The New Substitute

Chapitre 5

2644 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 25/02/2017 23:24

Cela faisait à présent deux longues heures que le ténébreux fouillait dans chaque recoin du Seireitei dans l’espoir de mettre la main sur la jolie Shinigami remplaçante, en vain. L’inquiétude primait : personne ne semblait l’avoir aperçu, et sa pression spirituelle demeurait introuvable.

Il s’était d’abord rendu chez sa désormais nouvelle coéquipière, comme le lui avait suggéré la petite sœur de Byakuya Kuchiki. Contre toute attente, la porte n’était pas verrouillée. La pointe d’espoir qui l’avait submergé à cet instant fut bien vite réduite à néant : tandis qu’il frappait inlassablement dans l’attente d’une réponse de la blonde, seul un silence de mort l’avait accueilli. Ainsi, il avait décidé d’entrer.

Rien. Personne. Le vide total. La maison de la jeune femme était parfaitement ordonnée : le lit avait été fait, les serviettes dont il s’était servi pour nettoyer les parcelles de son corps souillées par le sang séchaient sur un petit étendoir, et rien ne jonchait le sol ou la surface des meubles. Cela ne pouvait donc signifier qu’une chose, que Tsunata n’était pas rentrée chez elle après s’être enfuie de la Première Division.

Une indéniable frayeur le prit de court. Après tout, il ne la connaissait pas réellement, et ne pouvait donc envisager sa réaction quant au fait qu’elle venait de perdre l’être qui lui était si cher. Si elle venait à commettre un acte irréparable, il ne pourrait se le pardonner car, au-delà du fait qu’elle était à présent sous sa tutelle, il se sentait intimement responsable d’elle, de son bien-être.

Ainsi, s’armant d’un sang-froid dont Ichigo Kurosaki aurait des leçons à tirer, il avait sillonné toutes les rues de la ville des Shinigami. Seulement la mystérieuse blondinette semblait s’être évaporée dans la nature, ce qui n’était vraiment pas pour le rassurer.

Absorbé par le plan qu’il tentait de mettre au point pour la retrouver, il ne fit pas attention à son environnement et percuta de plein fouet la personne qui lui arrivait de face. D’un geste vif et assuré, il la rattrapa avant sa chute imminente, un bras sous la poitrine. Sans aucun effort, Shûhei la remit sur pieds et écarquilla les yeux en découvrant son identité ; tandis que ses cheveux blonds dissimulaient en partie son visage, elle le redressa sous la surprise. C’est de la sorte que le regard vert pomme de Tsunata rencontra celui argenté du ténébreux.

Le cœur du Vice-Capitaine marqua un arrêt brutal lorsqu’il distingua sur les pommettes de la jeune femme le déversement de sa tristesse. La lumière tamisée du soleil de plus en plus intimidé semblait jouer avec ses larmes, les faisant scintiller tels de véritables diamants. Ses joues rosées par le chagrin étaient d’une beauté irréelle, et l’intensité de ses iris devenait encore plus flagrante qu’à l’accoutumée. Oui, c’était insupportable de la voir dans un tel état, mais il devait bien admettre qu’elle restait d’un charme surnaturel.

Tsunata baissa de nouveau son visage pour camoufler ses rougeurs naissantes, sortant une fois de plus Shûhei de sa contemplation silencieuse. D’une voix calme, il lui demanda :

– Est-ce que ça va ?

Question bien dérisoire, d’autant plus que la réponse n’était que trop évidente. Cependant, c’était la seule chose qu’il eut réussi à prononcer.

– Oui, répondit-elle faiblement. Pardon, Vice-Capitaine Hisagi.

A question stupide, réponse stupide !

Tsunata le contourna et partit précipitamment, la tête toujours basse, dans la direction opposée à celle du brun.

– Attends ! s’écria-t-il.

Le temps pour Shûhei de se retourner, elle avait disparu.

Le poing serré, il grogna de frustration. S’il avait su réagir le moment venu, s’il n’avait pas perdu son temps à la détailler avec tant d’insistance, il ne serait pas dans cette situation : à nouveau sans elle. Et ils devaient réussir à former une équipe soudée ? Le projet du Commandant Kyôraku semblait compromis, d’autant plus avec un incapable comme lui. L’échec était voué d’avance, aussi se surprit-il à prier secrètement le retour du rouquin impulsif de Karakura, car jamais une pareille distance entre lui et le deuxième membre de son duo ne serait surmontable.

De plus, quelle était cette nouvelle lubie de le nommer par son titre honorifique ? Décidément, il n’arrivait pas à la comprendre. Etait-ce dû à sa bêtise légendaire ? Probablement. La seule option raisonnable qui se présentait à lui et qu’il décida d’appliquer fut de rentrer chez lui et de tenter d’oublier cette nouvelle journée catastrophique au sein de la Soul Society.

La nuit tomba lentement dans le Seireitei, laissant entrevoir les premières lueurs des étoiles qui perceraient bientôt l’obscurité de leur pureté éblouissante.

Shûhei Hisagi, étalé de tout son long contre son futon, les bras croisés sous la tête, observa son plafond avec intérêt. L’image de cette fille l’oppressait tant elle occupait son esprit ; entre ce sourire parfait qu’elle avait arboré à l’occasion de leur première rencontre, son regard désarmant et les larmes qui avaient précédemment tracé leur sinistre route le long de ses joues parfaitement arrondies, l’oublier relevait de l’impossible.

Trouver le sommeil était une épreuve tout aussi insurmontable après de pareils rebondissements. S’il ne s’aérait pas rapidement les idées, son crâne allait exploser, il en était convaincu ! D’un bond, il se tint debout et se dirigea expressément vers la sortie.

Le voici à présent qui traînait des pieds, les mains profondément enfoncées dans les poches de son hakama. La pénombre était complète, signe que cela devait faire un certain temps qu’il errait tel un spectre lugubre dans les allées endormies du Seireitei. S’il n’avait pas vu le temps passer, il pouvait certifier qu’il en était de même des paysages qu’il avait croisés, au point que lorsqu’il redressa la tête pour voir où il avait atterri, il dut prendre quelques secondes pour reconnaître l’endroit.

Proche du centre de la ville, il était à quelques pas de la fontaine construite pour le recueil des pourfendeurs d’âmes endeuillés suite aux lourdes pertes survenues lors de la dernière guerre sainte qu’ils avaient mené.

Shûhei s’en souvenait parfaitement, jours funestes. Un court moment de répit leur avait été accordé, avant qu’une nouvelle menace ne surgisse des tréfonds d’on-ne-sait-où et ne brise cette paix amplement méritée. C’était la raison qui lui avait valu, à lui et quelques uns de ses subalternes de la Neuvième Division, une excursion de plus d’un mois en dehors de la Soul Society, mois durant lequel était apparue la mystérieuse Shinigami remplaçante du doux nom de Tsunata Nara.

Ah ! comment se faisait-il que toutes ses pensées convergeaient vers cette fille ? Bien que la cause lui semblât encore inconnue, il admit une évidence qu’il ne pouvait plus nier : elle l’obsédait totalement.

Autre fait indéniable, son escapade nocturne n’avait en rien modifié son humeur désastreuse, au point qu’il en vint à s’exaspérer lui-même. Qu’avait-il fait au bon Dieu pour être ainsi torturé ? Etait-ce là la seule récompense qu’il méritait, après toutes ces années de bons et loyaux services dans l’armée de la Cour Royale ? La perte de son Capitaine, de nombreux camarades, et une solitude en béton, voilà ce qu’il avait récolté. Et pour couronner le tout, une jeune femme se mettait à le hanter, alors qu’elle ne lui vouait qu’indifférence et mépris.

Vraiment, il fallait vraiment qu’il sorte de ces tourments. Et puis, elle n’était pas si exceptionnelle que ça, quand on y repensait. Elle était jolie, certes. Elle avait des formes avantageuses dont tout homme rêverait secrètement, d’accord. Elle possédait, selon les dires, une force démentielle, pourquoi pas. Son regard, si intense, dans lequel il pourrait se perdre sans remords, semblait déborder d’amour tandis que son simple sourire, si innocent et si pur, réchauffait son cœur noyé jusque là dans un désespoir palpable…

Non, non, non, et non ! Ce n’était pas en empruntant cette voie qu’il allait se débarrasser de ses pensées moroses. Peut-être continuaient-elles de le poursuivre parce qu’il n’avait pas assez marché ? Il fallait donc qu’il persévère !

Alors que son pas se fit plus engagé, Shûhei entendit un bruit près de lui.  D’après le son qui lui était parvenu, il devait sans doute s’agir d’une pierre tombée contre les pavés près de la fontaine et roulant contre ceux-ci. Quelqu’un se trouvait probablement là-bas, restait-il encore à savoir qui ; car, à cette heure tardive, seuls les Shinigami de garde étaient de sortie, mais ils travaillaient dans l’ombre et ne pouvaient donc commettre une telle erreur de débutant.

Interloqué, il décida d’aller élucider ce nouveau mystère, se disant que cela l’aiderait probablement à oublier la cause de ses préoccupations. A pas feutrés, il s’approcha de la source du bruit soudain. Lorsqu’il fut arrivé à destination, il découvrit une longue cascade dorée briller sous le joug de l’astre lunaire et tanguer au gré du vent.

Le cœur battant la chamade, il voulut faire demi-tour avant de réaliser que quelque chose n’allait pas. La jeune femme – qu’il avait identifié comme étant Tsunata – ne bougeait pas et se tenait dans une position pour le moins étrange : sa tête était appuyée contre ses bras croisés sur le bord de la fontaine tandis que le reste de son corps était étalé au sol.

Prit d’une soudaine panique, il accourut à ses côtés. Lorsqu’il fut à son niveau, un bref soupir passa la barrière de ses lèvres : à son plus grand soulagement, la remplaçante dormait paisiblement. Comme lui, elle avait probablement dû marcher longtemps et, à force d’épuisement, s’était assoupie devant le spectacle aquatique relaxant qu’offrait la sculpture aux airs antiques.

Le visage enfantin et apaisé qu’elle arborait étira les lèvres du ténébreux dans un tendre sourire qu’il ne pût réprimer. Ses doutes, ses angoisses, sa mélancolie, tout disparaissait en sa présence.

Shûhei se pencha vers elle, remit une de ses mèches dorées en place derrière son oreille, et la secoua doucement par les épaules.

– Tsunata-san ?

Elle ne répondit pas, sûrement endormie trop profondément pour percevoir son appel.

Dans un sourire moins discret que le précédent, il réitéra sa tentative de réveil.

– Tsunata ?

– Hum…

Le Vice-Capitaine dut se retenir de rire en voyant son minois bougon toujours assoupi.

– Tu t’es endormie au bord de la fontaine, reprit-il. Tu serais mieux chez toi, non ?

Aucune réponse. Tout espoir de la tirer des bras de Morphée était réduit à néant. Seulement, il ne pouvait certainement pas la laisser là, à la merci des plus vils pervers que la Soul Society pouvait détenir.

Dans une douceur qu’il ne sous-estimait pas jusque là, il glissa l’un de ses bras dans le pli de ses jambes, puis l’autre derrière ses épaules, et la souleva. Elle était encore plus légère que ce qu’il avait imaginé, et d’autant plus facile à manipuler. Aussi la ramena-t-il contre son torse musclé.

Le brun frissonna lorsque ses cheveux blonds comme les blés vinrent chatouiller sa peau mise à nue. Son parfum sucré l’enivra tandis qu’il percevait distinctement les battements de son cœur sous sa poitrine. Son visage paisible était si proche de lui que son propre souffle fit frémir les petites mèches d’or qui couvraient le front de Tsunata.

Sans raison apparente, toujours endormie à poings fermés, elle se blottit contre le jeune homme et agrippa faiblement son kosode ; à y regarder de plus près, elle le câlinait comme s’il s’agissait d’un ours en peluche. Shûhei rougit si violemment qu’il crut l’entrainer dans une chute qui, à coup sûr, l’aurait définitivement réveillé.

Une fois ressaisi, il prit la direction des appartements de la jolie blonde.

Durant toute la durée de son périple, son regard ne quitta le visage de sa nouvelle coéquipière sous aucun prétexte. Personne n’aurait pu soupçonner en la voyant ainsi qu’un peu plus tôt, la seule expression qu’elle avait dévoilé était celle d’une profonde douleur.

Shûhei profita pleinement de cette vue imprenable sur celle qui lui torturait les méninges depuis près de quarante-huit heures. Ce n’est que lorsqu’il fut confronté à une porte close qu’il mit un terme à sa contemplation intensive. Tous deux venaient d’arriver à destination, aussi devait-il la laisser se reposer dans de meilleures conditions qu’auparavant.

Le ténébreux franchit l’entrée de la modeste demeure de Tsunata et, d’un pas doux et lent à la fois, l’amena sur son lit. A croire que cela devenait une véritable habitude ! Mais, était-ce pour lui déplaire ? Loin de là, bien au contraire.

Une fois qu’il l’eut confortablement installé, il défit ses waraji et ôta ses tabi. Ses pieds étaient si petits qu’il les trouva adorables. Encore un détail chez elle qui le faisait sourire niaisement ; à force, il ne les comptait plus.

Il la souleva légèrement et la glissa dans ses couvertures. Lorsqu’elle fut définitivement installée, un soupir d’aise s’échappa de ses lèvres dans un faible sourire inconscient, accentuant celui plus visible du Vice-Capitaine.

Soudain, il remarqua le bijou qui ornait le cou de la demoiselle depuis le jour où il avait fait sa connaissance : un pendentif sphérique argenté maintenu par une chaîne fine et raffinée dans un matériau similaire. Celui-ci, qui s’arrêtait d’ordinaire au-dessus de sa poitrine, avait roulé sur le côté. Lorsque Shûhei l’extirpa des quelques cheveux qui s’étaient entremêlés autour de l’accessoire, il remarqua des gravures au dos de l’œillet. L’examinant de plus près, il parvint à lire trois inscriptions en katakana : tsu ; na ; ta.

Un énième sourire prit forme sur son visage, avant qu’il ne décide de la laisser dormir. En route vers son propre domicile – après s’être assuré que la porte de la blonde était correctement fermée –, il sut que son sommeil personnel allait lui aussi être plus agréable, plus serein.

Il avait parcouru plusieurs dizaines de kilomètres pour se défaire des diverses pensées qui le maintenaient éveillé, mais ce fut finalement le sujet principal de ses tourments qui arriva à calmer le cœur torturé de Shûhei.




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