Le Corbeau. Saison 1

Chapitre 72 : V Ignorance

3089 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:26

           CHAPITRE V : IGNORANCE

 

           Thomas regarda l’arche d’acier qui le surplombait. Il connaissait ce monument, il était déjà venu une fois. A l’époque, il suivait Laura sans se faire remarquer. Il n’avait pas pris le temps d’admirer cette tour de métal érigée par les moldus il y avait presque un siècle. Il ne connaissait pas la raison d’une telle construction mais il trouvait ce la admirable qu’elle tienne sans aucune magie. Il était entouré de plusieurs centaines de personnes venues du monde entier rien que pour voir cette tour de métal. Des touristes prenaient des photos par dizaines pour s’immortaliser devant le monument.

« Alors on apprécie la Tour Eiffel ? lança une voix dans son dos. »

Thomas se tourna vers l’individu qui lui avait parlé. Il avait des cheveux châtain et des yeux marron. Son physique était assez passe-partout. Il avait un sourire légèrement cynique accroché aux lèvres. Thomas ne répondit pas à son sourire. Il ne savait toujours pas si cet homme était un ami ou un ennemi. Après tout, ce Yann Firvel travaillait pour une branche obscure des Services Secrets du gouvernement moldu. Il possédait certes des pouvoirs par sa nature de sorcier, mais ceux-ci se limitaient au transplanage, l’animagie et des capacités physiques légèrement au dessus de la norme humaine. Bien sûr, il avait combattu les mangemorts et avait aidé en mettant à disposition de Pierrick une planque pour cacher Hans. Mais cela ne lui suffisait pas.

           Yann se mit à marcher en direction du parc qui s’étendait derrière la Tour Eiffel. Thomas se porta à sa hauteur.

« Comment va Marion Locca ? demanda Yann.

-Elle va bien, répondit froidement Thomas, n’oubliant pas qu’il avait essayé de tuer la jeune fille cette nuit même. Je l’ai confié à quelqu’un de confiance.

-Ta sœur, n’est-ce pas ?

-Comment sais-tu autant de chose sur moi ?

-J’ai espionné Pierrick durant un long moment. Je me devais de connaître aussi son entourage. Ne t’en fais pas, je ne vais pas venir l’éliminer. Je ne pense pas qu’elle soit dangereuse. Elle avait plus l’air d’une petite fille perdue tout à l’heure. Pour le moment, je ne crois pas que mes patrons aient déjà remarqué son absence. D’après ce que je sais, elle a l’habitude de ne pas donner de nouvelles durant plusieurs jours voir plusieurs semaines. Pourquoi voulais-tu me voir ?

-J’ai parlé à Zabulon Tréveune de Marion et bien entendu des sorciers n’apparaissant pas sur le parchemin enchanté du Département d’Enregistrement Citoyen.

-J’ai toujours trouvé ce nom bizarre !

-Il va déjà les prévenir pour qu’ils règlent le problème. Mais pour ceux déjà nés, c’est déjà trop tard. Combien êtes-vous exactement dans ce 13ème Bureau ?

-Je ne sais pas. C’est une information qu’ils ne nous donnent pas. J’ignore l’effectif total et encore moins la proportion de sorciers non-détectés. Ils ne font même pas confiance en leurs propres hommes. Je te rappelle que Locca a été envoyée pour me surveiller. A part quelques uns, je ne les connais pas tous.

-Je vois. A vrai dire, je m’en doutais. De même, tu dois ignorer s’ils ont un dossier de non-détectés qu’ils auraient eux repéré.

-Ce serait logique qu’ils en aient un. Chez les non-détecté comme chez les autres sorciers, les pouvoirs ne s’éveillent que vers l’âge de huit ans. Mais les dons spécifiques n’apparaissent généralement que quand le trop plein de magie se fait sentir. Environ vers treize ou quatorze ans. Le cas de Marion Locca est à part. J’ai entendu dire que dans son cas, ses dons de fantôme étaient apparus dés huit ans. J’ignore pourquoi. Elle a dû subir un traumatisme dans sa jeunesse.

-Elle n’est pas un fantôme. C’est une jeune fille comme les autres.

-Désolé. Je ne voulais pas t’offenser. J’ai compris ce que tu veux de moi. Tu voudrais que je vole les dossiers secrets du 13ème Bureau sur les non-détectés.

-Oui. Et aussi, que tu découvres qui est l’espion de ce 13ème Bureau au Ministère de la Magie. Car quand ils trouvent un sorcier, ils doivent forcément vérifié que son nom n’est pas sur le parchemin.

-Tu sais que je vais risquer gros si je fais ça.

-Ça veut dire que tu ne vas rien faire ?

-Je vais le faire. Parce que pour moi, ils sont sur la mauvaise voie. Et de toute façon, ils veulent déjà me mettre au placard alors ?

-Mieux vaut le placard que la morgue.

-Chez nous, le placard est une morgue, sourit Firvel. Je te recontacterai. Passe le bonjour à ta sœur de ma part, ainsi qu’à Marion.

-Je ne pense pas que tu connaisses la première et que tu sois assez intime avec la seconde.

-Espérons que ça change. »

           Thomas regarda un moment Yann Firvel s’éloigner. Puis il disparut entre deux passants. Même son entraînement de yexingke ne lui permettrait pas de réaliser une telle disparition. Ce Yann Firvel possédait vraiment des dons exceptionnels et avait dû subir un entraînement poussé.

 

           Chun se préparait à partir pour le Ministère de la Magie. Elle voulait avoir des nouvelles de Pierrick. Au moment où elle descendit dans la rue, elle se trouva nez à nez avec Jacques Mareau qui venait visiblement la voir. Le vieux policier lui sourit. Il avait l’air de ne pas avoir beaucoup dormi. Il faut dire que la veille, il avait appris l’existence du monde de la Magie. Un monde ne faisant qu’un avec le notre.

« Tu vas au Ministère de la Magie ? demanda t-il.

-Tu ne devrais pas parlé aussi fort, fit-elle. N’oublie pas que c’est un secret. Tu n’es même pas censé être au courant. Dés que Pierrick rentre à la maison, je vais être obligé de lui dire que tu as tout découvert.

-Et il m’effacera la mémoire.

-Il n’est pas un oubliator, ce n’est pas son métier. Je pensais plutôt te le présenter. Je pense que tu l’apprécieras.

-j’espère. Tu veux que je t’accompagne ?

-Tu n’as pas le droit d’entrer. Et s’ils remarquent que tu m’as accompagné jusqu’aux abords du Ministère, tu risques une visite des oubliators et moi de gros problèmes avec la Justice Magique.

-Oubliator, Justice Magique, Chasseur, que de nouveautés pour moi.

-Et ton ami ? Celui qui t’as aidé à enquêter ?

-Je dois le voir tout à l’heure. Il va vouloir savoir ce que tu m’as dit. Je ne sais pas encore ce que je vais faire.

-Et si vous lui disiez la vérité, lança une voix. »

           Surgissant d’un coin sombre, Yann Firvel s’avança en souriant. Personne ne comprenait comment il était arrivé là sans se faire voir. Jacques le reconnut aussitôt.

« Vous ! s’exclama t-il, portant sa main sous sa veste à son arme.

-Inutile monsieur Mareau, arrêta Firvel. Je ne vous veux aucun mal. Bonjour Chun, comment vas-tu ?

-Firvel, souffla Chun.

-Tu le connais ? demanda Jacques.

-On s’est déjà rencontré. Mais j’ignorais qu’il travaillait pour les Services Secrets français.

-Désolé, j’étais tenu par le secret professionnel, sourit Firvel. Vous connaissez ça Mareau. »

Descendant du toit de l’immeuble où il était perché, un corbeau vint se poser naturellement sur l’épaule de Yann Firvel. Chun reconnut immédiatement Bran.

« Il est avec toi ! s’écria t-elle.

-Oui, il me permettait de surveiller Pierrick en toutes circonstances, expliqua Firvel. Mais il s’est attaché à lui, et à toi aussi. Il me l’a dit.

-Parce qu’en plus vous parlez aux animaux ! remarqua Jacques.

-Seulement aux oiseaux.

-As-tu des nouvelles de Pierrick ? demanda Chun.

-Il va bien. J’étais avec lui il y a quelques heures. Il doit être entrain de chercher Hans Friedrich.

-J’étais sûre qu’il s’occupait de cette affaire. Ils en parlent dans le journal de ce matin.

-Ils leur manquent pas mal de détails. Friedrich n’a pas été enlevé à Beauxbâtons. C’est une mise en scène que nous avons improvisé, Pierrick et moi pour confondre un espion de Malgéus chez les Chasseurs. Nous avions mis Friedrich à l’abri dans une planque. Mais cette nuit, nous avons été attaqués par les mangemorts. Ils l’ont emmené.

-Qu’est-ce qu’ils veulent de lui ?

-Tu te souviens de l’affaire qui t’a permis de rencontré Pierrick ?

-L’affaire du Grimoire de Malchauzen.

-Malgéus n’a toujours pas abandonné son projet d’acquérir la puissance des anciens druides germains. Il a juste décidé de changer de moyen d’obtenir le rituel. N’ayant pas le Grimoire, il a recherché les descendants des druides germains, dont certains se sont installés en France durant les années cinquante et soixante. Hans Friedrich est l’un d’eux. C’est aussi la raison pour laquelle ils ont tué toute sa famille. Et si j’ai bien compris, une autre famille a été victime de leur violence. Un père mort, sa femme et sa fille enlevées. C’est la torture qui les attend. Et la mort si on ne les sauve pas à temps. »

Chun porta la main à sa bouche. Jusqu’où pouvait donc aller l’impitoyable cruauté de Malgéus ?

           Mais une question restait en suspens : qu’est-ce que venait faire Yann Firvel ici ? Chun la lui posa.

« Je dois récupérer les dossiers secrets du 13ème Bureau et les faire sortir, expliqua t-il. Thomas me l’a demandé et je dois avouer que cette idée me plait. Cela permettra au Ministère de la Magie de s’occuper des sorciers non-détectés et qu’ils ne soient pas utilisés par le 13ème Bureau dés leur enfance.

-Ce sont vos employeurs, dit Jacques. Vous n’avez aucun sens patriotique.

-A vrai dire, je l’ai perdu avec le temps. Et puis, toute cette histoire démontre que ce n’est pas une question de patriotisme. Ils m’ont mis sous surveillance et vont peut-être bientôt ordonné mon élimination. Ce sont des raisons suffisantes pour moi pour les trahir. Surtout que leurs raisons d’agir ne sont pas très claires. Je préfère me mettre du côté de Pierrick et Thomas. Même si personne ne doit le savoir.

-Et en quoi cela me concerne ? questionna Chun.

-En fait, ce n’est pas toi que je venais voir. Je suivais monsieur Mareau. J’aurai besoin de son concours. Ainsi que de celui de votre ami Dérios s’il accepte.

-Je ne vous connais pas, fit remarquer Jacques. Comment savoir que vous ne cherchez pas à nous piéger ? J’étais de la DST, je sais que les agents des Services Secrets ont l’habitude de mentir et de manipuler.

-Je ne peux rien dire pour vous demander de me faire confiance. Chun, tu as dû faire le rapprochement entre celui qui a volé le dossier qui était entre les mains de Pierre Hargus et moi. C’était bien moi. Ce dossier, j’ignore de quoi il parle. Tout ce que je sais, c’est le titre qui est inscrit sur la première page : PROJET GLADIUS. Et je sais que mes chefs l’ont fait étudier. Mais si j’en crois mon intuition, il concerne les Chasseurs, et peut-être même Pierrick.

-Vous vous basez sur vos intuitions ! s’exclama Jacques.

-Je suis né sorcier mais je n’ai jamais appris la magie. Mes pouvoirs se sont développés sous d’autres formes. Mon intuition ne m’a qu’extrêmement rarement trompé.

-Je n’ai rien à apprendre sur Pierrick, dit Chun. Je sais qui il est et ce qu’il est. Il est un sorcier, un chasseur, l’homme que j’aime. C’est tout. Je n’ai rien besoin d’autre.

-Mais lui-même ignore sûrement tout de ça. Et donc de lui.

-OK, je viens, finit par dire Jacques. J’ai un petit compte à régler avec les Services Secrets. Et puis, je ne supporte pas l’idée qu’on s’en prenne à des enfants. »

           Chun essaya de dissuader Jacques mais ce dernier avait déjà pris sa décision.

« Parfois, il faut savoir quand agir et quand rester tranquille, dit-il. Je ne suis pas sorcier. Mais moi aussi je fais confiance à mon intuition. Je sens qu’il faut que j’y aille. Je te revois bientôt. Toi, va voir ton homme. Va prendre de ses nouvelles. Je passerai te voir ce soir. »

Chun regarda Firvel et Jacques s’éloigner. Elle ne savait pas si c’était une bonne idée d’aller volé des dossiers dans une branche des Services Secrets. Pour elle, c’était même la dernière chose à faire. Elle se sentait de plus en plus dépassé par les évènements. Tout s’accélérait autour d’elle. Où cela s’arrêterait-il ? Quelles seraient les conséquences de tout cela ? Y aurait-il d’autres morts ? L’ignorance que dévoilaient ces questions lui faisait peur.

 

           Le soleil brillait sur la côte méditerranéenne. L’horizon était bleu de mer. La journée continuait à s’égrainer tout doucement. Après avoir quitté Lyon, Pierrick s’était rendu à Grenoble, Nice et Monaco. Maintenant, il se trouvait à Marseille. Une grosse communauté magique y vivait. Jusqu’à maintenant, ses recherches n’avaient rien donné. Il ignorait où en était ses collègues. Il retournerait au Ministère quand il en aurait fini ici.

           Depuis le flash qu’il avait eu à Lyon, il n’avait plus ressenti cette douleur. Il percevait des voix lointaines par moment mais il se disait que cela était plus dû à un effet de son imagination. Mais alors qu’il suivait des yeux un bateau, la douleur l’assaillit de nouveau. Elle était si fulgurante qu’il tomba à genoux en se prenant la tête. Le flou et le bourdonnement devinrent clairs plus rapidement. Il voyait de nouveau la scène comme une personne présente. Mais cette fois-ci, il était assis. Il avait la sensation d’être retenu au siège par des liens. Etait-il prisonnier ? Non, ce n’était pas la même chose. La pièce était sombre et dénué de décoration. Un homme le regardait. Il ne se souvenait pas de son nom mais le connaissait, il en était sûr. Il avait des lunettes rondes posées sur son nez. Pierrick estima son âge aux alentours de soixante ans. Un autre homme entra dans son champ de vision. Il ressemblait beaucoup au premier avec une trentaine d’années de moins.

« Quels sont les résultats des premières analyses ? demanda le plus âgé.

-Il est toujours en parfaite santé, répondit le jeune. Aucune forme de dégénérescence d’aucune sorte. Il s’éveille plus vite que nous l’avions prévu mais ce n’est pas flagrant.

-Et au niveau du flux magique ?

-Il est aussi puissant que prévu. Voir plus. Je me demande si ce n’est pas un peu trop dangereux.

-Tout ira bien Julien. Nous connaissions les risques en nous lançant sur ce projet. Et surtout, nous avons pris toutes les dispositions pour éviter les mauvaises surprises. Tout ce que nous pouvons faire maintenant c’est attendre.

-Je sais papa. Mais parfois, je me dis que nous avons peut-être fait quelque chose que nous n’aurions pas dû.

-Nous vivons une période sombre et violente. Pour survivre, il nous faut arriver à d’extrême mesure malheureusement. Dumbledore est quelqu’un de sage mais un peu trop timoré dans ses actes. En suivant sa méthode, nous ne réussirons jamais à vaincre Voldemort.

-Tu pourrais éviter de dire son nom ! gémit le jeune homme.

-Je n’ai pas peur de lui. »

Un silence s’installa quelques secondes. Puis le plus jeune reprit.

« Quand sera-t-il prêt ?

-Il nous faut attendre encore quelques années, répondit son père. Mais ne t’en fais pas, les Ch… »

Le reste de la scène disparut de sa vision.

           Pierrick se releva. Qu’est-ce que c’était que ces flashs ? Il ne se souvenait pas avoir vécu ça. Et pourtant, il savait que cela ne venait que de sa mémoire. Un secret était-il caché dans son esprit ? Etait-ce pour ce secret que ses parents avaient été assassinés quatre ans auparavant ? Il ignorait les réponses à ses questions. Tout ce qu’il savait, c’est que son esprit déchirait peu à peu le voile d’ombre entourant ses souvenirs. Il n’avait qu’à attendre.

           Mais il avait peur de ce qu’il risquait de découvrir.

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