Etoiles et chaos

Chapitre 13 : Chapitre douze

3563 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 08/11/2016 20:30

TITRE : Etoiles & Chaos

AUTEUR : Ardell

DISCLAIMER : Les personnages et l'univers de Saint Seiya appartiennent à Masami Kurumada. Seul le personnage de Cinnamon est à moi.

 

CHAPITRE DOUZE

Les Chevaliers de Bronze firent part à Saori de leur inquiétude pour Cinnamon. Jusqu'à récemment, celle-ci s'était montrée sous un jour plutôt hostile, mais si elle commençait à retourner son agressivité contre elle-même... La jeune déesse leur avait demandé de rester attentifs et de ne pas hésiter à entourer l'adolescente de leur présence et de leur amitié. Amitié qui avait réussi à vaincre la haine jadis tapie dans le coeur de Phénix...

C'est ainsi qu'au cours des jours suivants, on vit fréquemment l'un des Bronzes arpenter l'escalier du Zodiaque à la recherche de Cinnamon — laquelle se trouvait immanquablement dans l'un des Temples inoccupés — pour l'inviter à se joindre à eux. En vain. La jeune fille demeurait aimable, et même souriante, cependant elle déclinait toute offre qui lui était proposée. Tout juste acceptait-elle de partager leurs repas, et encore... La volonté d'Athéna de la voir au moins à ce moment-là y était sûrement pour quelque chose...

Milo, quant à lui, était allé s'excuser auprès d'elle. S'il avait dit ou fait quoi que ce soit... Cinnamon l'avait rassuré avec un doux sourire. Non il n'avait rien à se reprocher, il n'avait rien dit de particulier.

Tout comme les autres, il n'avait rien vu, rien entendu. Rien dit, rien fait.

C'était bien ça le problème.

Jeudi 12 mars 1987 - Maison du Bélier

Debout sur le parvis de son Temple, Mû levait des yeux fatigués vers les étoiles qui semblaient le narguer. Plus de cinq jours à ausculter les protections, à les examiner sous toutes les coutures jusqu'à en oublier de manger ou de dormir. Il essayait de faire bonne figure devant son apprenti, mais ses compagnons d'armes n'étaient pas dupes. Aldébaran lui rendait souvent visite pour l'inciter à se reposer au moins quelques minutes, et il apportait toujours avec lui de quoi se nourrir. Néanmoins le Bélier touchait à peine aux repas. Il avait l'impression de devenir fou.

Et ces étoiles qui étaient là, impassibles...

Si tout cela n'était qu'un plan visant à faire tourner les Chevaliers d'Or en bourrique, Mû devait avouer qu'il était parfaitement réussi. Le dieu — ou quelle que soit l'entité — qui se cachait derrière cette farce devait bien rire.

Tout comme ces étoiles, si toutefois elles pouvaient ressentir quoi que ce soit...

L'Atlante baissa son regard sur les maisons des apprentis et sur les arènes, un peu plus loin. Mis à part quelques fâcheux incidents, tout était pourtant revenu à la normale. Certes, il fallait déplorer la perte de Saints valeureux qui, pour beaucoup, n'avaient pas mérité la mort. Cependant, Athéna était sauve et le Sanctuaire débarrassé du mal qui le rongeait. Ce mal rongeait-il à présent les armures dorées ?

Mû leva de nouveau les yeux vers le ciel. Il devait réellement avoir besoin de sommeil, parce que les étoiles lui apparaissaient aussi lumineuses que des panneaux indicateurs dans une fête foraine. Le problème, c'est qu'il était incapable de comprendre ce qu'elles lui désignaient...

Le Bélier se secoua soudain, puis passa une main lasse sur son visage. Panneau, fête foraine... Pas de doute, son cerveau lui criait son besoin de dormir un peu. Juste pour un petit quart d'heure. Et lorsqu'il se réveillerait, il s'occuperait des habits sacrés.

Il connaissait les constellations par coeur, il n'avait nul besoin de se focaliser sur ces groupes d'étoiles qui, de toute façon, seraient encore là la nuit suivante.

Mû fit demi tour et se mit à marcher vers le seuil de sa Maison.

Brusquement il s'arrêta net.

Les étoiles. Seraient. Encore. Là.

Par Athéna, pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt ?

Les étoiles seraient encore là.

On le disait spécialiste des armures, et pourtant il lui avait fallu des jours pour ne serait-ce qu'effleurer l'explication de cette énigme. Il n'était en effet pas encore sûr de lui. C'était trop... énorme. Surtout, cela impliquait trop de choses. Parce que si c'était ça...

"Athéna, faites que je me trompe !"

Il devait se rendre sans attendre dans la bibliothèque du Palais. Ce n'était que là qu'il trouverait de quoi confirmer ou infirmer son idée. Finalement, son cerveau n'était peut-être pas si fatigué que cela.

Quelque part, sur le Domaine Sacré

La matinée était bien avancée, bientôt Cinnamon devrait se rendre au Palais pour déjeuner avec Athéna et ses Bronze. Enfin... en théorie. Pour l'instant, elle se trouvait dans une gorge isolée, à une certaine distance du Zodiaque d'Or. Ils pouvaient toujours la chercher dans les douze Maisons... Aujourd'hui, elle n'était vraiment pas d'humeur à se joindre à eux. Elle était lasse de faire comme si tout allait bien alors que rien n'était normal, rien. Avant il lui était au moins possible de se reposer sur deux Chevaliers. L'un d'entre eux avait d'ailleurs été son confident. Oh elle avait toujours su qu'il ne s'opposerait jamais à eux pour la protéger, et ce n'était pas ce qu'elle avait attendu de lui. A vrai dire, il lui avait suffit que quelqu'un sache. Pouvoir laisser tomber le masque un instant, arrêter de faire comme si de rien n'était. Pas une fois elle n'avait pensé à lui en vouloir de n'avoir rien empêché. Après tout, contrairement aux autres, il connaissait l'identité réelle du Grand Pope. Il avait choisi de le servir en toute connaissance de cause. Il était donc entendu qu'il serait de son côté, quoi qu'il arrive. Cela, elle le savait et le respectait. C'était d'ailleurs peut-être parce qu'elle ne lui avait rien demandé qu'il l'avait tant de fois accueillie dans son Temple.

Cinnamon ferma les yeux. Il fallait qu'elle arrête de penser à messire Aphrodite, il lui manquait trop. Que la solitude était difficile à supporter lorsque l'on portait le poids d'un écrasant secret ! Et encore, le Saint des Poissons ne savait pas tout. Il n'y en avait qu'un qui savait tout d'elle, et elle ignorait si elle était soulagée ou terrifiée par son absence. Les deux peut-être. Maintenant elle était toute seule et devait faire semblant tout le temps.

La jeune fille reprit sa marche et s'arrêta bientôt, le regard fixé sur quelques petits tas de pierre. A première vue, ce n'était que de simples cailloux qui avaient probablement roulé ici lors d'un éboulement. Pourtant, qui y regardait de plus près distinguait certains détails qui faisait penser à plusieurs statues que l'on aurait jetées là sans égard pour l'art qu'elles représentaient. Enfin, il s'agissait d'un art tout à fait spécial... et morbide. Les traits des visages étaient trop réalistes, trop vivants de terreur pour appartenir à de simples objets mis au rebut.

Cinnamon sourit. Sacré Argol... La dernière fois qu'elle l'avait vu...

Cet endroit n'était pas loin de la limite du Domaine Sacré. Si elle avançait encore... L'adolescente regarda autour d'elle, soudain effrayée. Elle avait beau avoir conscience que c'était impossible, elle s'attendait presque à le voir surgir pour la ramener au Palais par la peau du cou. Elle recula instinctivement. Si les Chevaliers d'Argent avaient reçu l'ordre de l'empêcher de partir, en revanche, ils n'avaient jamais eu le droit de porter la main sur elle. Ça c'était réservé à d'autres... et l'un d'eux en particulier ne s'en était jamais privé.

Quitter le Sanctuaire... Ils étaient marrants, les Bronzes. On voyait bien que ce n'était pas eux qui avaient hérité d'un garde-chiourme expert en violence physique et verbale. Ce n'était pas eux qu'on avait traîné sur le sol en les tenant par les cheveux...

La jeune fille grimaça. Ce jour-là, cela n'avait pas duré longtemps, mais combien de fois avait-elle eu l'impression que son cuir chevelu allait s'arracher de sa tête ? Cette manie qu'ils avaient de lui tirer les tifs... A croire que ça leur plaisait de lui faire mal. Encore, Kyko, elle comprenait. Il fallait bien qu'il asseoit son autorité fut-ce par la violence. Mais lui. Sans le moindre doute, il était définitivement sadique. Elle entendait encore son rire amusé et cruel.

— Regarde un peu qui voilà ! La petite protégée du Pope... Oh pardon, je veux dire la protégée de l'ex-Pope...

Toute à ses pensées, Cinnamon n'avait pas vu les deux gardes qui s'approchaient.

— Tu es perdue ? On peut peut-être te raccompagner... proposa le second avec un sourire écoeurant.

— Non merci, répondit-elle. Retournez à votre poste.

— Non mais t'as entendu comment elle nous parle ? Eh toi ! C'est fini de jouer les invitées d'honneur !

— Moi je dis qu'elle a besoin d'une bonne leçon.

A cette proposition, les deux hommes éclatèrent de rire. Ils étaient seuls, tous les trois. C'était le moment où jamais de s'amuser un peu avec cette fille qui avait côtoyé le Zodiaque d'Or, on ne savait pas trop pourquoi. Ils s'approchèrent d'elle, sûrs d'eux.

S'ils avaient été un peu plus observateurs, ils auraient décelé l'absence totale de peur chez leur victime. Elle se tenait bien droite devant eux, le regard impassible. Cependant, ils étaient trop occupés à imaginer ce qu'ils allaient lui faire pour prêter attention aux signes.

Ils ne virent pas le bleu mauve de ses prunelles s'assombrir et virer au noir. Pas plus qu'ils ne remarquèrent le sourire évanescent qui orna ses lèvres le temps d'un souffle.

Le premier s'avança. Mal lui en prit. Sans crier gare, la jeune fille bondit sur lui et lui porta un violent coup de pied à l'entrejambe. Tandis que l'homme se courbait en geignant, elle passa rapidement derrière lui d'un mouvement gracieux qui fit virevolter sa jupe. Le tranchant de la main asséné sur la nuque avec juste la force nécessaire et il s'effondra, inconscient.

— Qu'est-ce que tu lui as fait, sale pute ?!

Elle se tourna vers le deuxième garde. Cette fois, elle était vraiment contrariée.

Il se jeta sur elle mais elle vint sans hésiter à sa rencontre et, esquivant avec une facilité déconcertante le poing qu'il balançait sur elle, elle posa la paume de sa main sur sa joue.

Ce contact à peine établi, l'homme s'effondra à terre.

Mort.

Elle contempla le corps avec un certain mépris, s'approcha ensuite du premier garde qui gisait face contre sol, toujours inconscient.

L'adolescente s'agenouilla sur son dos et, presque tendrement, entoura sa tête de ses mains. Puis elle lui brisa la nuque.

Elle se leva enfin, épousseta sa robe et remit un peu d'ordre dans sa chevelure. Ensuite elle s'étira, les bras tendus devant elle, la tête roulant sur ses épaules. Elle en avait assez de faire semblant : devant deux misérables gardes, elle n'allait pas se gêner.

De toute façon, au point où elle en était...

Palais du Grand Pope

Chevaliers de Bronze et d'Or s'étaient réunis dans le salon en attendant l'heure de rejoindre Athéna pour le déjeuner. Personne n'avait encore vu Cinnamon, mais peut-être arriverait-elle juste à temps pour le repas. Pour l'instant, les conversations allaient bon train et, comme d'habitude, c'était Seiya le plus turbulent.

Soudain, Shaka s'approcha de Mû qui était assis et ne participait à aucune conversation.

— Tu m'as l'air bien songeur, Mû, commença-t-il. Que se passe-t-il ?

Aussitôt le silence se fit. Le Bélier aurait-il quelque chose à dire concernant les armures ? Évidemment, il devait garder le secret sur le sujet en présence des Bronzes, cependant il pouvait au moins faire un signe à ses frères d'armes. Un petit quelque chose qui les mettrait sur la voie et les rassurerait, qui sait ? Et, bien sûr, il ne lui était pas non plus interdit de faire usage de sa télépathie...

Mû sourit à l'assemblée et seul Shaka comprit à quel point ce sourire sonnait faux. Le gardien du premier Temple était ennuyé et frustré.

— Non, tout va bien. C'est juste que je ne sais plus où j'ai rangé l'un de mes outils qui me serait très utile...

— Tu devrais demander à Kiki, proposa Seiya. Le connaissant, il aura voulu plaisanter.

— Kiki aime faire des farces, c'est vrai, mais il ne toucherait jamais à mes outils sans ma permission.

— Où est-il en ce moment ? interrogea Shiriyu.

— Je l'ai vu avec d'autres apprentis avant de venir ici. Excusez-moi de vous ennuyer avec ça. Je finirai bien par trouver ce que je cherche.

— A ce propos, quelqu'un a-t-il vu Cinnamon ? C'est bientôt l'heure du déjeuner et Saori souhaite sa présence.

Comme tous répondait par la négative à la question de Shun, Seiya déclara :

— D'accord, j'y vais.

— Je t'accompagne, ajouta Shiriyu. A deux, on aura plus de chance de la retrouver.

— Si j'étais Athéna, j'y réfléchirais à deux fois avant d'inviter cette fille à dîner.

— Ikki ! fit Shun.

Phénix se tenait en effet adossé au chambranle de la porte ouverte, les bras croisés.

— Que veux-tu dire ? demanda Pégase.

Ikki releva la tête et son regard s'attacha sur les Chevaliers d'Or.

— Simplement que la petite protégée de ces messieurs est en réalité une tueuse.

A ces mots, chacun des Golds Saints réagit différemment. Aldébaran croisa les bras, le visage impassible. Milo esquissa un sourire indécis comme s'il se demandait à quoi rimait cette plaisanterie alors qu'Aiolia fronçait les sourcils. Shaka pâlit tandis qu'un éclair de compréhension passait dans le regard de Mû.

— Que racontes-tu ? fit le Lion. Cinnamon, une tueuse ?

— On peut savoir d'où te vient une telle idée ? renchérit le Scorpion.

— Laissez-le donc parler, vous deux, exigea le Taureau.

Ikki s'avança dans la pièce et raconta ce dont il avait été témoin à peine plus d'une heure auparavant. Lorsqu'il avait vu ces hommes s'en prendre à la jeune fille, il avait d'abord cru qu'elle se débrouillerait toute seule, dévoilant ainsi qu'elle savait se battre. C'était bien ce qui s'était passé. Si, comparée à un Chevalier, elle avait fait preuve d'une lenteur pitoyable, en revanche elle s'était montrée bien plus rapide que les gardes. Ses coups étaient précis et bien ajustés.

Assez loin de la scène, Phénix s'était décidé à intervenir quand elle avait tué le deuxième homme. Ensuite elle avait disparu, volatilisée. En examinant le premier corps, Ikki n'avait pu que constater le décès alors qu'il l'avait cru seulement évanoui. Ce dernier ne portait aucune trace qui aurait pu indiquer la cause de la mort : il avait été comme foudroyé par un simple contact...

Cinnamon aurait pu se contenter de se défendre. Elle aurait pu s'en aller une fois ses adversaires à terre.

Elle avait délibérément choisi de les éliminer, chacun d'une façon différente, achevant froidement celui qui gisait inconscient.

— Vous croyez toujours qu'elle est inoffensive ? termina-t-il.

— C'est... c'est impossible ! bafouilla Milo.

— Il y a sûrement une explication, tenta Aiolia sans trop y croire. Il a dû se passer quelque chose pour qu'elle change à ce point...

— Et si elle n'avait jamais changé ? Si ce n'était que maintenant qu'elle nous montrait son véritable visage ? Après tout, ce ne serait pas la première fois...

Ce petit rappel des évènements qui avaient eu lieu au Sanctuaire suffit à faire taire les Saints d'Or. En admettant que l'hypothèse de Phénix soit exacte... Non ! Une trahison de la part d'un prétendu Grand Pope était déjà de trop, alors une autre...

— Un instant, fit Mû. Ikki, tu dis que Cinnamon a tué l'un de ces hommes par simple contact ?

— Je pensais qu'elle l'avait simplement mis K.O. or en effet elle l'a tué. Le plus étrange, c'est que je n'ai décelé aucune cosmo-énergie à l'oeuvre...

— Il faudrait que j'examine le corps, cependant une mort aussi foudroyante pourrait suggérer un empoisonnement ou...

— Qu'y a-t-il, Mû ? s'enquit Aldébaran. Précise ta pensée.

Le Bélier secoua la tête. C'était trop, pourtant ils en étaient arrivés à un tel point que cette dernière théorie n'était peut-être pas si fantaisiste.

— J'espère que je me trompe, répondit-il. Cette façon de tuer m'évoque également le SekiShiki.

Shiriyu pâlit.

— La technique d'extraction de l'âme... murmura-t-il.

Seiya les regarda tous les deux tour à tour et s'exclama :

— La technique d'extraction de l'âme ? Mais c'est l'attaque de DeathMask, ça !

— Et à ton avis, gamin, qui me l'a enseignée ?

Les Chevaliers se tournèrent vers la porte. Cinnamon se tenait dans l'embrasure et les toisait de ses yeux noirs, un léger sourire aux lèvres. Puis elle s'effaça littéralement.

— Oh par Athéna... gémit Mû.

Juste avant que la jeune fille disparaisse, elle avait été nimbée d'une aura, un cosmos particulier.

Un cosmos noir.

 

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