L'Appel de la Meute

Chapitre 1 : L'Appel de la Meute

Chapitre final

Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 05:01

L'Appel de la Meute 
 


      J'avais à peine neuf ans quand je me suis transformé pour la première fois en cette chose: une monstruosité sanguinaire dépassant mon imagination de jeune enfant. J'ai été élevé dans une famille de paysans faisant partie de l'empire d'Arathor: le plus grand règne humain ayant existé...c'est au final son étendue géographique qui a causé sa perte. Mais je n'écris pas ces lignes pour parler de l'empire humain d'Arathor, la folie m'engloutit peu à peu et je dois me dépêcher, mon temps est compté avant que ça ne recommence, ça sommeille en moi, attendant de reprendre le dessus sur mon fragile corps et cette fois-ci, je ne sais pas si je pourrais lutter plus longtemps contre ce maléfice qui a détruit ma vie et lacéré les quelques pages de ma tendre enfance de plusieurs griffures. Afin que l'on se souvienne de qui j'étais, et que l'on parvienne à éliminer l'abomination née et grouillant dans mon âme, j'écris ces quelques lignes, puisse ce texte atterrir entre de bonnes mains...

      Je me nomme Zek, mes parents n'étaient pas riches et je n'ai jamais subi une éducation normale pour un garçon de mon âge. Mais je les aimais...et je suis certain qu'eux aussi tenaient à moi. Tous les jours, il y avait une liste de corvée à faire, après le petit déjeuner je partais vagabonder dans les champs, vérifier si la récolte était bonne et aussi car j'aimais toucher les épis de blé et sentir l'odeur des fleurs de printemps. Père m'avait promis de me rejoindre quand il aurait fini de ranger la moissonneuse, ce jour là je ne m'en suis souvenu que récemment, c'est comme ça que j'ai réaliser la gravité de la situation dans laquelle j'étais et que ça ne pouvait plus durer...Je suis parti à travers les rangées de maïs, courant après un papillon comme n'importe quel enfant, ce travail dans les champs m'avait rendu fort, c'est ce que me répété mon père, j'avais des cuisses musclées ce qui me permettait de courir sur de longues distances avant d'être épuisé. Je connaissait par cœur les champs: le maïs entourait la maison et il y avait un peu plus au nord les enclos avec le blé plus loin encore. J'avais cette sensation étrange, une colère...et cette impression d'un danger, celle d'une mort imminente, mais qui en voudrait à un pauvre garçon de ferme? J'avais perdu de vue le papillon, une brume épaisse s'était installé sur l'ensemble du territoire, je ne voyait même plus à dix mètres.

       J'étais paniqué, j'avais un gout de sang dans la bouche. Tâtant de mes mains tremblotantes mes lèvres, je m'aperçut que je saignais abondamment. Il y avait aussi cette odeur comme si tout le champs avait été transformé en un tas de cadavres en décomposition. Je courrait, sans regarder derrière moi sur le petit sentier conduisant à ma maison, j'étais perdu ! Je ne reconnaissais plus rien, même les repères que père m'avait enseigné avait disparus. Tout devenait flou. Ma mémoire, ma vue, la brume avait quelque chose d'inquiétant, de surnaturel. J'avais mal partout, je souffrait à chacun de mes mouvements. Je criais pour qu'on vienne me sauver mais je ne reconnaissais même plus mes cris, c'était quelque chose d'inhumain qui avait résonné, un hurlement farouche qui venait pourtant bien de moi. Je me sentais partir, chacun de mes pas m'éloignait un peu plus d'un possible secours. Mais je n'avais pas le choix, je continuais mes hurlements qui avaient maintenant perdus toute détresse, des cris de fureur...Je vis père au bout du sentier, une expression effrayée lui tiraillant le visage. Il tenait à la main une fourche et pointait les piques acérés dans ma direction. J'avais perdu tout contrôle sur mes membres, j'avais la vague sensation de planer, comme à la fin d'un cauchemar, sauf que là, j'étais persuadé que ça n'avait rien d'irréel. Mon regard commençait lui aussi à se voiler, j'allais perdre connaissance...et à quelques dizaines de mètres de père, ma vision se brouilla complètement...

      J'ouvris les yeux et me releva précipitamment. J'étais dans l'enclos, attaché par des chaines massives à la barrière s'enfonçant profondément dans le sol, j'étais vêtu de seulement mon pantalon déchiré au dessus des genoux. Il n'y avait plus aucun animal, seulement moi. Derrière la barrière, les champs de blés semblaient encore plus imposants qu'a l'ordinaire. Mes parents sortirent de la maison, père cachait maman, il avait dans les mains deux énormes seaux et ils se dirigèrent dans ma direction. Aucun des deux ne me regardait, ils faisaient mine de regarder les champs, mais en continuant à s'approcher de moi, je m'aperçut que mère avait pleurée: ses yeux étaient encore rouges. Père lui aussi semblait très triste...mais pourquoi? Était-ce un rêve? Toutes ces questions trottaient dans ma tête, tout ça n'avait aucun sens ! Il déposa les deux énormes seaux devant moi et, sans m'adresser un regard, ils repartirent tous les deux vers la maison. J'attendis avec patience de ne plus les voir pour m'approcher des deux contenants: l'un d'eux contenait de l'eau. Je fut horrifié de voir le contenu du second seau: des viscères d'animaux y étaient entassées. Je ne comprenais plus rien...je suis resté attaché durant deux jours, deux longues journées à attendre le retour de mes parents sans rien manger, je savais que père me surveillais à une fenêtre, mais jamais il ne vint. Jusqu'à la nuit suivante, où le phénomène s'était reproduit pour la seconde fois. Je sentis toute mon ossature changer: ma colonne vertébrale se souleva et les extrémités de mon corps s'allongèrent. Je poussais des cris de douleur mêlée à de l'horreur et une lumière dans la maison s'alluma. Je savais que c'était père, il allait venir pour m'aider, me réveiller de cet enfer. La pluie commença à tomber abondamment et l'orage camoufla mes hurlements bestiaux. Père allait venir, ce n'était qu'une question de temps et ensuite il me serrerait dans ses bras en m'assurant de sa protection, comme il l'a toujours fait quand je faisait mes habituels cauchemars...

      Il n'était plus qu'à quelques mètres mais j'étais incapable de voir son visage, il s'arrêta...je n'ai jamais su ce qu'il avait pensé à cet instant, ce qu'il pouvait bien penser en regardant son fils unique se transformer en monstre, mais il allait me donner la réponse, fusse t-elle celle que j'attendais je ne saurais le dire, mais à cette époque ce fut une rupture entre mes deux êtres qui se combattent sans relâche. Il me regarda pendant toute la durée de la transformation, jusqu'à ce que, comme la fois précédente, je perde totalement le contrôle de mes membres. J'avais une vision floue de ce qui avait suivi, mon père est allé chercher un sac qui ne m'était pas familier. Il le posa entre nous deux et mis sa main dedans, retira des graviers assez volumineux et me les lança. "Vous n'êtes pas mon fils, vous l'avez tué" . Il répétait ces mots en continuant de projeter les pierres dans ma direction, je savais que mon corps en souffrait même si je n'en ressentais pas la douleur, mais mon esprit fut brisé à jamais. Ma mère regardait la scène et le sixième sens que j'avais développé me convainquit qu'elle m'aimait, tout du moins elle avait aimée le garçon que j'avais été quelques jours auparavant. Père stoppa, et reparti le sac vide à la main en m'assurant que la prochaine fois que le phénomène se reproduirait, il m'abattrait comme un animal que j'étais devenu...et je perdis connaissance pour la seconde fois...

      A mon réveil, j'avais du mal à me mouvoir, surement les pierres ont eues raison de mes os fragiles. Je saignais à de nombreux endroits et la seule chose que je souhaitais était que la prochaine métamorphose puisse me sortir de là, je n'avais rien mangé depuis plusieurs jours et les blessures allaient probablement m'achever dans peu de temps. En proie à la peur, je fixais la maison en faisant semblant d'être encore endormi: l'image de mon père m'avait terrorisé. Quelques minutes passèrent, sans pouvoir me décider de me lever ce qui signalerais de mon réveil à père...Je n'avais jamais ressenti ça: une intense envie de partir d'ici, de briser mes chaines et de ne plus jamais revenir. La porte de la maison s'ouvrit, je ferma les yeux en tentant d'imiter la longue respiration d'un individu endormi...J'entendis des bruits de pas s'approcher de moi...J'ouvris discrètement un œil et constata que c'était ma mère, elle avait l'air effrayée, le rythme de ses pas ralentit avant de totalement s'arrêter à une quelques centimètres de mon corps. Elle s'accroupit et releva ma tête, je fis mine de me réveiller doucement pour ne pas la faire sursauter...Elle me souriait.
-Je vais te soigner, laisses moi faire, dit-elle d'une voix douce.
-Maman? Qu'est ce qu'il se passe?
-Ce n'est rien...
Elle trempa une éponge dans l'eau et commença à me nettoyer avec. Elle pansa mes blessures et me donna à manger mon gâteau préféré en mettant à coté une bouteille d'eau. Elle me fixa quelques instants, et retourna vers la maison sans adresser un regard en arrière. Si seulement père pouvait être aussi compréhensif...Je restais à nouveau seul dans l'enclos. Chaque jour, mère m'apporta à manger et à boire. Pendant une semaine environ, j'étais en train de renaitre, mais je sentait au fond de moi la présence du monstre se délectant de mes peurs qu'un jour père recroise son regard. Cette bête avait un nom, car ce n'était pas moi, deux êtres prisonniers d'un même corps, mais je n'avais rien de comparable à lui, il n'était pas humain et a voulu faire du mal à père...C'était un juste retour les souffrances infligées à cette créature. Père ne m'aurait jamais fait du mal...mais s'il tuait le monstre, tuerait-il du même coup le fils? J'avais froid, la nuit n'allait pas tarder à tomber. Je savais que cette nuit serait celle où tout se finira pour l'un de nous. Qui aura l'avantage cette fois? Les premiers signes apparurent sur mon corps, mes muscles se crispèrent et mes sens étaient décuplés...la lumière extérieure s'alluma, c'était lui...il arrivait...

      Père s'approcha, la peur avait totalement disparue de mes hurlements, la fureur l'avait remplacée. Ses pas résonnèrent dans mon crâne, de plus en plus bruyants...de plus en plus espacés...Il s'arrêta à la même distance que la dernière fois, et pencha la tête pour me faire comprendre comment il comptait en finir: il avait à la main son fusil de chasse. En une fraction de seconde, il le pointa dans ma direction et le chargea...nous restâmes dans cette position inconfortable durant plusieurs minutes. Il n'était pas prêt à tirer, comme moi je n'étais pas prêt à mourir. Quand il tira j'étais déjà parti, les liens avaient étés rouillés et la force de la créature avait suffit à les briser. Encore aujourd'hui je ne sais pas si c'est ma mère qui avait voulu ce dénouement en venant me laver. Je voyais parfaitement clair cette fois, l'odeur du sang était présente partout. Je fondit sur mon père qui lâcha quelques mètres plus loin son arme. Il tomba au sol et jamais il ne se relèvera. Je sentis le gout de son sang sur ma langue. Il m'en fallait plus, j'avais perdu trop de force, il fallait que je retrouve ma vigueur passée. J'étais entré dans la maison, marquant les murs de centaines de griffures, écrasant les meubles, brisant les fenêtres et arrachant les portes. J'avais atteins la chambre de mes parents. Ma mère se tenait devant moi, agenouillée et les mains jointes. Elle priait ! C'était donc moi le coupable? J'ai voulu arrêter la folie sanguinaire qui m'avait emporté, mais j'en étais incapable. Mes griffes vinrent frapper son visage et mes crocs pénétrèrent profondément dans sa chair. Son corps mutilé tomba sur le sol taché de sang. J'étais libre à présent, plus rien ne me retenait: j'avais détruis les derniers liens qui me retenaient à mon passé de petit garçon de ferme. Sans perdre une seconde, je m'étais enfui hors de cet enfer. Courant à travers les champs vers le nord, le brouillard revint peu à peu, jusqu'à complètement m'engloutir dans l'obscurité...

      J'avais rêvé de beaucoup de choses cette nuit-là. Sans vraiment prendre conscience de ce que j'avais fait la veille, je m'étais réveillé dans une sorte de grotte, il y faisait froid et les nombreux courant d'air qui y passaient me donnèrent des frissons. J'avais complètement guéri de mes blessures, il n'y avait plus la trace de la moindre goutte de sang et j'étais recouvert d'une épaisse fourrure...Je sentis une présence, je n'étais pas seul...quelque chose m'observait...un félin blanc apparut près de moi.
-Ne sois pas effrayé, murmura l'animal, nous avons beaucoup de choses à bâtir ensemble...
-De quoi parlez-vous? Qui êtes vous?
-Je me nomme Nataara, je vis ici depuis la nuit des temps, exilée par les miens. Je me nourri de la magie des puits de lune pour rester jeune en
attendant ta venue.
-Je ne comprend rien...
-Pour le moment, il faut encore attendre un peu, me répondit elle d'une voix rassurante, mais ce qui importe le plus, c'est que tu puisses devenir un guerrier fort et d'expérience pour mener ta race à la victoire.
-Ma...race?
-Tu n'es plus humain, du moins pas complètement. La magie à fait effet sur toi et maintenant tu peut te transformer en worgen.
-C'est un monstre, m'exclamais-je en l'interrompant.
-Tu dois apprendre à la contrôler, bientôt tu pourra te transformer à volonté.
-Je n'en ai pas envie !
-Tu ne peut pas y renoncer, c'est ta nature et il est de ton devoir de guider les tiens.
-Que dois-je faire?
-Tu le sais, laisse Kruhorn venir à toi.
-Kruhorn?!
-Zek est rien sans Kruhorn, c'est un combat que tu ne peut pas gagner sans lui.

       J'ai écouté les conseils de la sorcière. J'ai attendu la nuit et laisser opérer la métamorphose. Kruhorn m'a guidé dans de nombreux lieux qui m'étaient encore inconnus. J'ai fais la rencontre d'un autre worgen, Fenrez, qui m'a appris comment je pouvais me métamorphoser à volonté...ce fut une grave erreur, jamais je n'aurais imaginé à quel point il pouvait être puissant. Maintenant il aura bientôt le dessus sur moi, la vision floue de mes parents flottent encore dans les airs et leurs cris de douleur se mêlent au vent. C'est un combat que je ne pouvais gagner, je le sens venir en moi, il approche...jamais plus je ne verrais le jour comme avant, jamais plus Zek sera libre, prisonnier d'un corps étranger de sa volonté. Trouvez le moyen de me détruire, exterminez la bête qui fera souffrir tant de gens. C'est mon dernier souhait avant de replonger définitivement dans les ténèbres...
 

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