WILD GOTHAM 3 : LE SOURIRE DU FOU

Chapitre 11 : Face à face

2361 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 11/10/2018 09:21

Même s’il portait le dernier coup de pinceau à son œuvre, le Joker n’était pas très enthousiaste. Un empoisonnement collectif, c’était tout de même un peu plat. Quoiqu’en disposant les cadavres de façon créative à l’usage de l’armée américaine à venir... Par conséquent il pénétra dans les tunnels souterrains du comté avec un air dubitatif. Comme d’habitude ses deux acolytes l’accompagnaient. Il croisa rapidement les éclaireurs menés par Deathstroke. Le Joker adorait ce vieux guerrier. Avec son épée, sa peinture de guerre, sa rigueur, et son air sombre, il était si stylé. Parfois sa manie de tirer la gueule pouvait être un peu chiante. N’était-il pas sur le point de prendre sa revanche sur les blancs ? Il aurait pu sourire un peu.

    

    « Alors les points d’eau sont loin ? » Lui dit le Joker.

    

    En tant que guerrier accompli Deathstroke était un combattant et aussi un stratège. Et cela se reporta sur sa façon de s’adresser au Joker. Il débuta par une légère ouverture.

    

    « Vous étiez acteur avant, n’est-ce pas ? »

    

    La question était plutôt incongrue au vue de la situation. Mais le Joker ne put pas résister à la tentation de parler de lui et donc de se donner en spectacle.

    

    « En effet j’ai fait de la scène. J’ai particulièrement excellé dans...» Improvisa-t-il, puisqu’il lui manquait une bonne partie de son passé avant d’être brutalement coupé.

    

    « Vous avez conservé des accessoires ? »

    

    Comprenant alors qu’il s’était fait piégé, le Joker préféra se taire. Une grande première.

    

    « Le couteau que vous avez donné à Ivy pour qu’elle vous frappe, je veux le voir. »

    

    Ainsi sa combine avait fini par être découverte. Le fameux couteau était un accessoire de théâtre munit d’une lame rétractable s’enfonçant dans le manche à l’impact. Toute l’assemblée regardait le Joker d’un œil soupçonneux. Les mensonges n’étaient plus d’actualité.

    

    « Qui t’as soufflé cette idée ? » Demanda le Joker.

    

    Puisqu’on attaquait sa crédibilité, il faisait de même. Surtout que l’accusation de Deathstroke comportait deux éléments troublants. Déjà elle était tardive. Et surtout les indiens n’étaient pas familiers de l’art théâtral. Il était donc envisageable voir certain, qu’une influence extérieure soit dans le coup.

    

    « Un esprit, qui vit ici. » Répliqua soudain Red Horse impatient d’en finir.

    

    « Un guerrier. » Reprit Deathstroke. « Il s’appelle Batman. »

    

    « Un blanc, je suppose ? »

    

    Le Joker venait de jouer habilement cette dernière carte. Même si Batman était resté masqué, Deathstroke à partir de sa façon de parler et de se battre avait comprit, qu’il n’était pas l’un des siens.

    

    « Un blanc qui m’a vaincu et aurait pu me tuer, comme tous les autres hommes m’accompagnant. Pourtant il nous a épargné. Par contre vous avez du sang d’une des nôtres sur les mains. Vous avez sali Ivy, fait passer pour une traitre, et même tuer. »

    

    Les deux acolytes auraient pu en rajouter sur ce dernier point. Mais était-ce nécessaire ? Totalement acculé à quoi le Joker pensait-il ? Sa chère Harley, son plan, sa survie ? Tout ça n’était que des broutilles comparés à ce Batman surgit de nulle part. Il avait deviné ses intentions, et même retourné des indiens contre lui. Depuis l’ingurgitation du red hood, le Joker était débarrassé de ses inhibitions. Il pouvait donc s’amuser sans retenue et laisser s’exprimer sa créativité. Toutefois il lui manquait un véritable partenaire de jeu. C’était dans cette perspective, qu’il avait laissé le message à Arkham. On a bien le droit de rêver. Et voilà que le rêve était devenue réalité. Personne ne l’empêcherait de rencontrer ce Batman. Plus vif que jamais le Joker dégaina son révolver, et tira à la volée. Même Deathstroke fut prit de court par la vitesse de son action. Les deux indiens les plus proches tombèrent sous les balles gênant ainsi les autres. Le temps que Deathstroke se dégage, le Joker avait déjà disparu. Deathstroke eut d’abord un regard pour ses hommes. Il ne compta que des blessés dans leurs rangs. Si le Joker était rapide, en revanche il manquait de précision.

    

    « Ramenez les blessés au village. Trois resteront pour garder l’entrée par laquelle le Joker est venu. » Dit-il tout en dégainant son sabre.

    

    Le Joker ignorait tout de ces tunnels. Il aurait dû mal à trouver un autre point de sortie. Deathstroke se voyait donc offert une chance de se rattraper, de se prouver qu’il était encore le guerrier d’antan. Jusqu’ici il s’était fait manipuler par le Joker, vaincre par Batman, et enfin surprendre. Toutefois il savait tirer des leçons de ses erreurs. Deathstroke s’était contenté de suivre la stratégie du Joker, et de résister aux assauts de Batman. Il était temps, qu’il passe à l’offensive. Deathstroke n’allait pas attendre de subir une embuscade du Joker. Par conséquent il éteint sa torche. Dans l’obscurité il ne serait plus une cible pour le révolver. De son coté le Joker même dans le rôle du gibier, ne perdait rien de son astuce. Il se doutait qu’on le traquait. Alors autant être trouvé tout de suite. Ainsi tout le monde gagnait du temps. Le Joker cessa donc de fuir, déposa sa torche, et se cacha dans un coin sombre à proximité son révolver bien en main. Le moment d’intervenir était venu à présent. Par sécurité Batman avait accepté la participation de Deathstroke et de ses hommes pour la neutralisation du Joker. Dans une telle situation il ne fallait refuser aucune aide. Ne se sentant pas à l’aise avec de récents ennemis, Batman préféra observer la scène à distance.

    

    « Ce n’est que çà ! » Pensa-t-il en voyant le fameux Joker au travers de sa longue-vue.

    

    Avec ses habits aux couleurs criardes, et sa gestuelle appuyée, il faisait penser à un saltimbanque de seconde zone. Seul son sourire figé le distinguait un peu. Puis vint la diversion à coup de révolver. Voilà quel était le vrai Joker : violent, rapide, et imprévisible. Et ce n’était pas fini. Il s’apprêtait encore à verser du sang, et en plus s’était rapproché d’une zone extrêmement dangereuse. Non ce maniaque ne ferait plus de dégâts. Batman y veillerait. Du fait de sa position d’observateur il avait pu voir la direction empruntée par le Joker lors de son échappée. C’est pourquoi Batman l’avait rapidement localisé une fois sa cavalcade arrêtée. Ses lunettes lui permirent de percevoir le traquenard mit en place. Le Joker avait anticipé son investigation à Arkham, et échappé à Deathstroke. Mais là il ne s’en tirerait pas. Comment le pourrait-il ? Il ne regardait même pas dans la bonne direction. Et pourtant alors que Batman brandissait son boomerang, il ouvrit le feu vers lui. Malgré la visée très approximative notamment à cause de l’obscurité, l’une des deux balles atteignit le ventre. Batman tomba, et émit un cri de douleur. Ce son permit une meilleure localisation. Le Joker pointa son arme dans cette direction, puis suivit un bruit se limitant à un claquement sec.

     

    « Déjà ! » S’exclama le Joker déçu avant de commencer à recharger son révolver.

    

    S’il ne profitait pas de ce répit, il était mort. Ne disposant pas du temps de retrouver son arme Batman serra les dents face à la douleur, puis s’élança. Enfin le Joker fut surprit. Le premier coup de poing fit voler l’arme à feu. Le Joker eut un mouvement de recul, qui lui permit d’esquiver la seconde frappe, et de se rapprocher de la lumière.  Distinguant enfin la silhouette de son adversaire, il passa à l’attaque. Le Joker débuta par un coup de pied bien sournois dans le tibia. Si ce genre de pratique existait dans les combats de rue, il n’en était rien dans les salles de boxe. Par conséquent Batman se laissa surprendre. Suivi alors une pluie de coups de poing. Le Joker était vraiment rapide. Par contre ses frappes désordonnées manquaient de puissance et surtout de précision. Sa garde suffit à Batman pour les encaisser avant de placer un bon direct du droit. Le Joker recula en titubant, soudain se redressa, et revint à la charge. Cette feinte ne fonctionna pas sur Batman. Il interposa ses bras face à l’espèce de crochet. Vint alors une douleur, qui le fit frémir. Batman sentit du sang couler de ses bras, puis vit le rasoir dans la main du Joker.

    

    « J’avais encore un tour en réserve.»

    

    Batman releva à peine cette réplique. Il était en pleine analyse. Son costume avait réduit la profondeur de la coupe. Il pouvait encore porter des coups efficacements. Malgré toutes les simagrées du Joker, il savait que son direct précédent avait causé des dommages. De plus il était déjà venu à bout d’un homme armé d’un sabre et disposant d’une véritable technique de combat. Le Joker avec ses pratiques de bagarreur de saloon, et sa lame de quelques centimètres, ne supportait la comparaison. Sauf qu’il y avait cette balle dans le ventre. Cette fois-ci Batman ne pouvait pas se permettre de rester sur la défensive à attendre la faille dans la garde adverse. Le temps lui était compté. La douleur commençait à le lui rappeler. Il tenta alors le tout pour le tout. Batman exécuta une brusque accélération en direction du Joker.

    

    En plus de sa vitesse cette charge comportait un aspect inédit. Jusqu’ici Batman s’était limité à un style de combat académique. Au final le Joker se laissa percuter de plein fouet. Batman continua sa course en entrainant son ennemi, jusqu’à ce qu’il l’aplatisse sur une paroi. Du moins c’était le plan initial. Car sous l’ardeur du combat, Batman avait oublié la proximité de la fameuse zone dangereuse. Il s’agissait d’un endroit où la descente était particulièrement abrupte. C’est d’ailleurs pour cette raison que Thomas Wayne n’avait pas exploré au-delà. En tant que mauvais grimpeur il n’était pas sûr de pouvoir remonter.  Aucun des deux hommes accaparés par leur combat, ne vit l’accident venir. Au milieu de sa chute Batman mut par une sorte d’instinct de survie, dégaina son lance-grappin. Malgré les ténèbres et le chaos, le rivet parvint à se planter quelque part.


    Sa blessure au ventre et ses coupures aux bras le relançaient. Ses jambes étaient lourdes. Pourtant il ne lâcha pas sa prise. En levant la tête Batman se demanda, si son acharnement n’était pas vain. Malgré ses lunettes il ne parvenait pas à distinguer le début du dénivelé. De toute manière était-il en état de grimper ? C’est alors que se produisit un miracle sous la forme d’une lumière. Un peu plus haut Deathstroke brandissait une torche. Alerté par les bruits de l’affrontement il avait rallumé sa torche afin de se déplacer plus rapidement. Il était tout de même arrivé après la bataille. Mais son empressement ne serait pas inutile.

    

    « Je suis là ! » Cria Batman avec ses forces restantes.

    

    « Moi aussi. »

    

    Ainsi le poids qu’il ressentait au niveau de ses jambes n’était pas dû uniquement aux dommages physiques ou à la fatigue. Le Joker était toujours de la partie. Que pouvait-il faire ? Batman tenait son lance-grappin des deux mains, parce qu’il n’était pas certain d’y arriver avec une seule dans son état actuel. Profitant de la lumière le Joker se hissa au même niveau que son rival, puis brandit bien en évidence son maudit rasoir. Le faible éclairage lui donnait un air particulièrement morbide. Batman eut l’impression de voir la mort en personne. Il tenta malgré tout de s’opposer à lui une dernière fois.

    

    « Si tu me tues, on tombe tous les deux. »

    

    En guise de réponse le Joker trancha la corde. Tout en glissant Batman l’entendit rire, comme si sa propre mort l’amusait.

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