Sentiments et Ressentiments

Chapitre 6 : Chapitre 5 - Rencontre tant attendue et mauvaises surprises

17484 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 05:21

Chapitre 5 : Rencontre tant attendue et mauvaises surprises.

 

Une semaine passa depuis la rencontre de Karin avec le meilleur ami de son frère, Renji. Elle avait décidé de le surnommer amicalement « l'ananas rouge » à cause de sa coiffure improbable. Depuis ce moment, le jeune homme ne cessait de la taquiner sur le duc pour se venger de ce surnom qu'il estimait « ridicule ».

Dans son lit, Karin rêvassait alors que la Lune était déjà haute dans le ciel. Elle ne parvenait pas à s'endormir à cause de prunelles turquoises qui ne la laissaient pas tranquille. Le visage d'Hitsugaya la poursuivait à n'importe quel moment de la journée ou de la nuit et la fatigue due à son manque de sommeil ne cessait d'augmenter.

Pour le moment, la jeune fille réussissait encore à donner le change à Ichigo et sa femme mais elle savait que cela n'allait pas durer encore très longtemps. De plus, son frère aîné lui avait dit qu'il avait une annonce importante à lui faire et ça la stressait beaucoup. Elle espérait qu'il ne s'agissait de rien de grave.

Karin regarda l'horloge et poussa un soupir de découragement. Il était déjà presque quatre heures du matin. Elle doutait de parvenir à trouver le sommeil mais décida tout de même de tenter le coup. Il fallait vraiment qu'elle se repose si elle voulait être en forme pour le lendemain. Sa résolution prise, elle ferma ses yeux noirs et s’emmitoufla dans la couette comme si elle était dans un cocon.

Après une demie heure d'attente et une dernière pensée pour sa sœur jumelle, Karin s'endormit enfin d'un sommeil peuplé de rêves où elle voyait une paire d'yeux de glace la regarder avec tendresse.

 

Le lendemain matin, alors que Karin dormait profondément, la porte de sa chambre s'ouvrit doucement sur Orihime qui venait la réveiller. Elle s'approcha doucement du lit de la jeune fille et se mit à la secouer légèrement en espérant qu'elle l'entende :

Karin, il est 10h30... Ton petit déjeuner est prêt et il t'attend sur la table de la salle à manger, murmura la rousse à son oreille.

La brune gémit dans son sommeil et ouvrit difficilement ses yeux sombres. L'esprit encore dans le brouillard, Karin remarqua avec peine la présence de la femme de son frère à côté de son lit. Elle se redressa péniblement dans son lit et lui lança un regard interrogateur.

Orihime ? l'appela-t-elle d'une voix encore ensommeillée. Qu'est-ce qui se passe ? Quelque chose ne va pas ?

Il est 10h30, ma jolie et tu devrais être levée depuis un moment, signala sa belle-sœur en retenant un sourire.

À cette annonce, Karin écarquilla ses yeux noirs. Sans perdre une minute, elle rejeta ses couvertures loin d'elle et se leva rapidement pour se préparer. Mais à peine avait-elle posé ses deux pieds sur le sol qu'elle se mit à vaciller dangereusement. La brune se rassit sur son lit en maudissant sa faiblesse.

Prends ton temps, lui conseilla Orihime en posant délicatement une main sur son épaule. Ton professeur ne viendra pas aujourd'hui car il nous a prévenu qu'il avait un imprévu.

Karin ne savait pas si elle devait s'en réjouir ou s'en attrister. Il était vrai que le cours de danse l'aurait plus ou moins empêché de songer à une certaine personne mais en même temps, elle aurait l'occasion de réfléchir sur son comportement étrange de ces derniers jours.

Quelques minutes plus tard, aidée par la femme d'Ichigo, la brune tenta une fois encore de se lever. Elle tenait difficilement debout sur ses jambes vacillantes mais elle serra les dents. Il ne fallait pas qu'elle tombe de nouveau. Quelques secondes sans bouger et son étourdissement s'en allait au fur et à mesure.

Tu m'inquiètes, tu sais, dit soudain la rousse soucieuse. Tu me parais assez faible...

Juste une fatigue passagère, ce n'est rien, répliqua Karin avec plus d'assurance qu'elle n'en ressentait réellement.

Orihime lui lança un regard oblique, se demandant si ce qu'elle disait était bien vrai. En réprimant un soupir de résignation – cette fille était aussi têtue que son mari –, elle suivit Karin jusqu'à la salle d'eau où elle prépara le bain de la jeune fille qui se déshabillait dans un coin de la pièce.

Une fois le bain prêt, Karin se plongea dedans avec délice. Après la nuit difficile qu'elle avait passé, rien de mieux que se délasser dans une eau bien chaude. Elle entendait Orihime s'affairer dans sa chambre, sans doute lui préparait-elle des vêtements.

Après près d'une demie heure dans l'eau, Karin se leva enfin de son bain et s'enroula dans une serviette de la couleur des yeux troublants du duc. Il fallait qu'elle en revienne toujours à lui, c'était vraiment agaçant ! Se morigénant intérieurement, la jeune fille sortit de la salle et rejoignit sa belle-sœur qui venait de terminer de faire son lit.

Tu sais, j'aurais pu le faire, fit-elle remarquer en désignant le lit.

C'était pour gagner du temps, c'est tout, objecta la rousse en venant dans sa direction avec un tissu dans ses mains. Je t'ai choisie celle-là, ça ira ? fit-elle en mettant devant ses yeux une robe verte ceinturée de blanc.

Oui, répondit la brune avec un petit sourire. Tu pourrais m'aider ? J'ai toujours du mal à enfiler ces robes.

Pas de souci, commence à t'habiller et quand c'est bon, je viendrai t'aider.

Karin se mit en devoir d'enfiler ses sous-vêtements. Après cela, la femme de son frère aîné vint l'aider à enfiler la robe choisie. Une fois prête, Orihime la coiffa d'une tresse qui partait sur le devant et invita Karin à se regarder dans le miroir. La jeune fille ne se reconnaissait pas du tout devant cette belle jeune fille que lui montrait son reflet.

C'est vraiment moi, ça ? s'écria-t-elle stupéfaite.

Orihime sourit devant la réaction de la brune, elle s'attendait à peu près à ça. Elle l'invita à la suivre en bas où son petit déjeuner devait déjà être froid. En arrivant au rez-de-chaussée, quelle ne fut pas la surprise des deux femmes en entendant frapper à la porte.

Alors que Karin se dirigeait dans la salle à manger envoyée par sa belle-sœur, Orihime partit ouvrir la porte au mystérieux visiteur. Elle se trouva face à face à un valet du duc Hitsugaya qui avait un message à lui remettre de la part de son mari. La jeune femme remercia le domestique et ferma la porte une fois qu'il était parti.

Elle ouvrit le message en question et ce qu'elle lut était vraiment bizarre.

 

Orihime,

Je t'envoie ce message de la part de Sa Grâce pour

te dire que le bal est reporté à dans deux semaines.

Un événement étrange justifie cette mesure, je te

l'expliquerai ce soir, quand je serai rentré.

Et dis à Karin que j'aurai besoin de lui parler ce soir.

Bien à toi,

Ichigo.

 

Orihime espérait que ce n'était rien de grave mais le fait que le duc soit obligé de repousser le bal était quelque peu inquiétant. Ce n'était pas son genre de retarder un événement de ce genre. Elle aurait tout le loisir d'y réfléchir plus tard car Karin l'attendait dans la salle à manger.

Celle-ci trouvait d'ailleurs que la rousse mettait beaucoup de temps à revenir. Que s'était-il passé ? Avant qu'elle put aller voir, elle la vit entrer dans la pièce où elle se trouvait, le visage crispé.

Tu es bizarre, Orihime, souleva Karin, le regard soupçonneux.

Je viens juste de recevoir un message de ton frère, soupira-t-elle en baissant son regard sur la lettre. Il me disait que le bal du duc était reporté et qu'il aurait besoin de te parler ce soir, annonça la jeune femme en relevant la tête.

Pour quelle raison mon frère a-t-il besoin de me parler ?

Je ne sais pas Karin, il ne m'en a pas fait part, répondit-elle en s'asseyant à ses côtés.

Karin mordit dans une tartine beurrée, perplexe. Décidément, Ichigo avait toujours le chic pour la surprendre, se dit-elle amusée. Mais Orihime était inquiète et elle n'aimait pas ça. À cette pensée, son visage s'assombrit brusquement.

Tu vas bien ? Tu as l'air préoccupée.

La rousse lui adressa un sourire tendu. Karin ne manquait vraiment pas de jugeote, elle devrait y prendre garde à l'avenir.

Rien d'important.

Orihime se leva, débarrassa la table et alla dans la cuisine préparer le déjeuner – et pour fuir la perspicacité de la sœur de son mari.

Pour se changer les idées, Karin se dirigea dans le bureau de son frère pour prendre un livre. C'était la première fois depuis son arrivée dans cette maison qu'elle mettait les pieds dans cette pièce. Elle constata avec attendrissement que cet endroit ressemblait bien à Ichigo : solide et rassurant.

Elle prit place dans un fauteuil se trouvant dans un coin de la pièce et commença sa lecture. Mais seulement après quelques minutes, ses paupières devinrent lourdes et elle s'endormit paisiblement.

 

Pendant ce temps, Ichigo travaillait avec le duc sur un dossier compliqué.

- Que comptez-vous faire, Monseigneur ?

Toshiro soupira, il n'en savait rien lui-même. Un de ses métayers n'avait pas pu régler la taxe qu'il lui devait car il avait été trop malade pour pouvoir rentrer ses récoltes. Mais il ne voulait pas l'exproprier, il devait y avoir un autre moyen.

Laissons-le tranquille pour cette année, décida le duc. Et faites en sorte qu'un médecin aille à son chevet.

Ce sera fait, Votre Grâce, acquiesça le régisseur.

Le jeune seigneur n'entendit pas la réponse de son employé. Il était perdu dans ses pensées et se posait toutes sortes de questions sur une jeune fille en particulier. Il ne pouvait pas nier qu'il appréciait beaucoup sa compagnie mais il ne s'en sentait pas le droit.

Pour quelle raison ? Tout simplement qu'il était déjà engagé avec une femme – qu'il n'aimait pas mais là n'était pas la question. Sa fiancée pourrait très mal prendre le fait qu'il se rapproche d'une autre qu'elle.

Ichigo, comprenant au bout de quelques secondes que le duc ne l'écoutait plus, réprima un soupir. Il était souvent ailleurs, en ce moment. Le roux savait plus ou moins ce qui tracassait son seigneur et aurait aimé pouvoir lui venir en aide mais il ne savait pas comment procéder.

Votre Grâce ?

Hitsugaya secoua la tête en entendant la voix de son employé, afin de reprendre ses esprits.

Désolé, Kurosaki, soupira-t-il en se levant de son bureau. Je n'ai pas la tête à travailler en ce moment, ajouta-t-il en levant les yeux au plafond.

J'avais cru comprendre, en effet, répliqua Ichigo en croisant ses bras. On dirait que quelque chose vous embête.

Toshiro se retourna vers son régisseur, une lueur d'incompréhension dans ses prunelles turquoises. Puis il comprit où le roux voulait en venir donc il sortit le message qu'il avait reçu une semaine auparavant et le montra à Ichigo.

Je ne sais pas si vous êtes au courant mais la semaine dernière, mon bureau a été fouillé, révéla le duc, les sourcils froncés. Et on m'a laissé ce message, tenez.

Ichigo était stupéfait par ce qu'il venait d'apprendre. Qui aurait pu faire une chose pareille et pour quelle raison ? De plus en plus d'événements étranges avaient lieu et ce n'était pas pour le rassurer.

Je l'ignorais, avoua-t-il en prenant la lettre que son employeur lui tendait. Mais pourquoi ? Rien d'important n'est déposé dans ce bureau ! Vous me l'avez dit vous-même !

En effet, mais notre visiteur devait apparemment l'ignorer, déclara le duc. Vous seul savez où je range les papiers importants donc il n'y aucun risque pour qu'ils soient découverts.

Le frère de Karin hocha la tête sans répondre et commença sa lecture. Ce qu'il découvrit en parcourant le message laissé par le supposé cambrioleur le laissait perplexe. Qu'est-ce que cela signifiait ?

Il y a quelque chose qui ne va pas, commenta Ichigo, le visage sombre. Qui aurait intérêt à vous menacer de la sorte ?

Je l'ignore, Kurosaki. Mais une chose est sûre, il a envoyé ce même genre de message à ma fiancée qui me l'a montré, révéla le duc d'un ton où perçait de l'anxiété.

Ichigo relut le message et la signature l'intrigua. « Le Diable n'est jamais loin »... Qui pouvait être ce « Diable » ?

Le message envoyé à votre fiancée était-il signé de la même façon ?

Oui, mais en quoi cela aurait-il son importance ? s'étonna le jeune seigneur.

Je ne sais pas, Votre Grâce, soupira Ichigo. Mais c'est tout de même une manière bien étrange de signer un message, vous ne trouvez pas ?

Toshiro acquiesça sans mot dire. Son régisseur n'avait pas tort, ce n'était pas le genre de signature que l'on pouvait trouver dans beaucoup de lettres. Mais pourquoi s'en prendre à sa fiancée ? Il ne comprenait vraiment pas et cela l'agaçait.

En tout cas, il ne faut pas prendre ces menaces à la légère, énonça Ichigo, les sourcils encore plus froncés que d'habitude. Si quelqu'un a l'intention de s'en prendre à vous ainsi qu'à votre fiancée, il faudra faire très attention.

Tout à fait d'accord, approuva Toshiro avec un signe de tête. Restons sur nos gardes, Kurosaki.

Ils n'eurent pas le loisir de se remettre au travail car la porte du bureau s'ouvrit sur le majordome qui affichait une mine contrariée.

Quelque chose ne va pas, Shin ? parla le duc, s'attendant à une mauvaise nouvelle.

Votre fiancée est ici et veut vous parler, Monseigneur, annonça sombrement le domestique. Dois-je lui dire que vous êtes absent ?

Décidément, Toshiro n'avait pas de chance. Pourquoi venait-elle le déranger à ce moment précis ? Elle trouvait toujours le moyen de lui gâcher la vie. Il soupira profondément et répondit à son majordome d'une voix où perçait de l'impatience :

Je vais la recevoir dans le salon bleu. Faites-nous parvenir du thé.

Très bien, Monseigneur, s'inclina Shin en prenant congé.

Toshiro se leva du canapé où il s'était assis quelques instants plus tôt et assura à son régisseur qu'il n'en aurait pas pour longtemps.

Continuez sans moi en attendant.

Très bien, assura Ichigo.

Le roux regarda son employeur partir pour rejoindre Mademoiselle Hinamori. Il n'avait vraiment pas envie de la recevoir, son air ennuyé ne le trompait pas. Cette visite était-elle si importante que ça ? Il était vrai qu'elle venait toujours au moment le moins opportun, songea le jeune homme avec agacement. En soupirant, il s'installa au bureau du duc et continua ce qu'il avait à faire.

En se dirigeant vers la pièce où l'attendait sa fiancée, Toshiro ne put empêcher un soupir de frustration s'échapper de ses lèvres. Il n'était pas d'humeur à bavarder gaiement et elle n'avait pas intérêt de l'avoir dérangé en plein travail pour une histoire sans importance.

Après quelques minutes trop courtes à son goût, le duc entra dans le salon bleu où sa fiancée buvait une tasse de thé. En la voyant, il savait qu'elle était d'aussi bonne humeur que lui. La discussion promettait d'être longue. « Désolé, Kurosaki », s'excusa-t-il intérieurement.

Bonjour, mon amie, la salua-t-il tout de même. Quelque chose ne va pas ? Vous avez l'air assez troublée...

Bonjour, Votre Grâce, répondit-elle en exécutant une révérence. En effet, vous avez vu juste, je suis très contrariée.

Le jeune seigneur l'invita à prendre place à ses côtés sur le canapé tandis qu'elle poursuivait sur un ton où on sentait de la frustration :

Mon père étant très occupé, je ne peux m'adresser qu'à vous !

Et lui, il n'avait rien à faire de ses journées, peut-être ?

Est-que ce serait possible d'avancer la date de notre mariage de trois jours ?

Le duc savait qu'il aurait mieux fait de ne pas accepter de la recevoir mais son père – Dieu ait son âme – lui avait toujours appris à ne jamais manquer de respect à une dame. La demande de sa promise ne lui plaisait pas du tout, mais alors vraiment pas.

Pour quelle raison ? Il y a un problème ? fit mine de s'inquiéter le jeune homme.

Hinamori tritura ses doigts comme si elle se sentait mal à l'aise. Il était vrai que ce n'était pas une requête des plus ordinaires, il y avait de quoi être gênée. Mais la jeune femme savait ce qu'elle voulait : elle désirait devenir duchesse et être une des femmes les plus importantes du royaume. Alors si pour cela elle devait tricher un peu, elle le ferait sans hésiter une seconde.

Le duc, lui , n'en menait pas large. C'était pour cette raison stupide qu'elle l'avait fait demander ? Sa patience n'allait pas tarder à atteindre ses limites et il le savait. S'efforçant de garder son calme, il écouta d'une oreille distraite les paroles de la jeune femme.

En effet, soupira-t-elle. Le groupe de musicien qui doit jouer à notre mariage ne pourra pas être là à la date prévue.

Il n'en revenait pas ! Quelle raison ridicule pour avancer la date d'un mariage ! Elle aurait vraiment pu faire un effort pour trouver autre chose, quand même ! Toshiro serra discrètement les poings, signe que son agacement grandissait.

Et ne peut-on tout simplement pas en trouver un autre ? Ce n'est pas les orchestres qui manquent dans le royaume... fit justement remarquer Toshiro.

Hinamori ne savait pas vraiment quoi répondre. Elle était piégée.

Oui, vous avez sûrement raison, concéda-t-elle, déçue de ne pas avoir obtenue ce qu'elle voulait. Je vais vous laisser, je suis attendue chez une amie, fit-elle en se levant.

Par mimétisme, le jeune duc aux cheveux d'argent se leva aussi et reconduisit lui-même sa fiancée à son carrosse. Hinamori lui adressa un signe de main qu'il ne vit pas et le carrosse disparut de son champ de vision.

Fulminant, le jeune seigneur rejoignit son régisseur qui l'attendait encore dans son bureau. D'ailleurs, celui-ci venait de terminer ce qu'il était en train de faire, la visite d'Hinamori ayant duré plus longtemps que prévue. Quand il vit son employeur entrer dans son bureau, Ichigo put tout à fait remarquer que le duc était à bout de patience. Était-ce sa fiancée qui l'avait mis dans un tel état ? Il n'en doutait guère.

Non mais franchement, quel toupet ! Me déranger pour une raison aussi futile ! Je n'ai pas que ça à faire, moi ! craqua Toshiro en faisant les cent pas dans la pièce.

Qu'est-ce qu'elle vous voulait, si je peux me permettre ? C'est la première fois que je vous vois dans une telle colère, indiqua Ichigo, ne sachant pas comment réagir.

Madame voulait tout simplement avancer la date du mariage car l'orchestre qu'elle voulait n'était pas disponible ce jour-là, expliqua le duc un peu plus calmement.

Le roux était stupéfait. Quelle raison ridicule ! Il comprenait la colère justifiée du duc, lui-même n'aurait pas réagi autrement. Elle avait vraiment bien choisi son moment pour les déranger alors qu'ils avaient du pain sur la planche.

Avec tout ça, je vous ai laissé tout le travail, s'excusa le duc.

Ce n'est pas grave, je vous assure, l'apaisa Ichigo en balayant l'objection d'un geste de la main. D'ailleurs, j'ai terminé ce qu'il nous restait,signala-t-il.

Toshiro hochait la tête sans répondre. Il n'y avait qu'elle qui pouvait le mettre dans une telle colère. Il n'était pas là pour écouter les états d'âmes de sa fiancée, bon sang ! Il se devait d'abord au roi et aux paysans qui vivaient sur ses terres. Le reste venait après mais Hinamori ne voulait pas le comprendre.

Le jeune duc poussa un soupir de colère et de fatigue mêlées. Il partit s'asseoir sur le canapé et se tint la tête entre ses mains. Il était épuisé...

Je crois que je vais vous laisser vous reposer, Votre Grâce, annonça Ichigo qui venait à côté de lui. Vous en avez besoin...

Je ne vous le fais pas dire, Kurosaki, marmonna le noble. Je vous souhaite une bonne soirée et passez le bonjour à votre femme ainsi qu'à votre sœur.

Je le ferai, assura le régisseur. Bonne soirée, Votre Grâce et à demain, le salua-t-il en quittant la pièce.

Une fois seul, Toshiro enleva sa cravate et déboutonna les deux premiers boutons de sa chemise afin de se mettre à l'aise. Puis soudain, on toqua à la porte.

Entrez !

La porte s'ouvrit et laissa apparaître Shin, son fidèle majordome qui avait dû entendre ses éclats de voix.

C'est bientôt l'heure de dîner, Monseigneur... Désirez-vous manger ici ? demanda humblement Shin.

Ce ne serait pas de refus, merci Shin, accepta Toshiro avec soulagement.

Très bien, fit le domestique. Le repas sera prêt dans une petite vingtaine de minutes et je vous l'apporterai aussitôt.

Le duc congédia son employé avec un petit sourire crispé. Il avait vraiment besoin de se reposer mais le visage d'une jeune fille brune aux yeux noirs lui apparut dans son esprit. Mais que lui arrivait-il ?

 

Pendant le chemin du retour, Ichigo ne savait pas quoi penser de la tentative d'Hinamori pour faire avancer la date du mariage. Cette demande était vraiment étrange. Mais il n'eut pas le loisir d'y songer plus longtemps car le voilà de retour chez lui. Il remercia le cocher avec un sourire et entra dans la maison.

Je suis rentré ! s'annonça-t-il en fermant la porte d'entrée.

Personne ne répondait et il n'entendait aucun bruit. Vraiment étrange... Le jeune régisseur se dirigea dans la cuisine où il trouva sa femme en train de préparer le dîner. Concentrée comme elle l'était, elle ne devait pas avoir remarqué sa présence donc il se mit derrière elle et l'enlaça en posant ses mains sur son ventre légèrement rebondi.

Ichigo, sourit Orihime. Tu rentres tôt aujourd'hui, indiqua-t-elle en mettant sa préparation dans le plat.

Le roux embrassa sa femme dans la nuque et lui expliqua rapidement :

C'est vrai mais le duc n'était pas vraiment en forme et en plus, sa fiancée nous a encore dérangés. Sa Grâce était vraiment en colère, souffla-t-il comme à bout de force.

Ichigo releva la tête et fit dériver son regard noisette sur toute la pièce. Sa sœur devrait être avec Orihime mais il ne la voyait nulle part. Cependant, il se souvenait qu'elle semblait vraiment fatiguée donc il supposa qu'elle était partie se reposer dans sa chambre.

Tu sais où est Karin ? demanda-t-il à sa femme.

Elle voulait lire donc je suppose qu'elle doit être dans ton bureau, vu que je ne l'ai pas vu en ressortir, formula Orihime en se retournant vers lui avec un beau sourire sur ses lèvres.

Ne bouge pas, je vais aller vérifier, l'informa son mari. Et après, je vous expliquerai tout.

La rousse sourit sans répondre tandis qu'Ichigo se rendait dans son bureau. Elle mit le plat dans le four et s'attaqua à la préparation du dessert.

Ichigo ouvrit doucement la porte de son bureau et entra en catimini. Il fit dévier ses yeux dans toute la pièce et découvrit sa sœur endormie sur un des deux fauteuils. Le jeune homme sourit à cette vision, attendri. Elle devait vraiment être épuisée si elle s'endormait de cette manière, malgré ce qu'elle répétait sans cesse.

Le livre que Karin avait dans les mains attira son attention. Il put constater avec un sourire qu'il s'agissait d'une histoire d'amour. Ichigo n'aurait jamais pensé que ce soit le genre de lecture dont sa sœur raffolait. Mais tout le monde changeait en grandissant et sa cadette en était la preuve vivante.

Il s'approcha d'elle et posa une main sur son bras, pour la réveiller.

Karin, le dîner est bientôt prêt, l'avertit-t-il en la secouant légèrement.

La brune bougea dans son sommeil, la voix de son frère lui parvenant plus ou moins clairement. Elle ouvrit les yeux et les posa aussitôt sur Ichigo qui retira sa main du bras de la jeune fille.

Ichi-nii, tu es rentré tôt, fit-elle remarquer encore endormie.

Le roux sourit à la remarque de sa sœur. Décidément, ses faits et gestes étaient passés au crible, dans cette maison, songea-t-il amusé. Sa femme lui avait fait la même remarque, quelques instants plus tôt.

En effet, je t'expliquerai tout à l'heure, déclara-t-il en prenant la main de sa cadette afin de l'aider à se mettre debout. Vous vous êtes données le mot, Orihime et toi...

Pourquoi tu dis ça ? s'étonna l'ancienne paysanne.

Parce qu'elle m'a fait la même remarque que toi, quand je suis rentré, répliqua le jeune homme. Aller, on va rejoindre Orihime qui doit préparer la table...

Karin acquiesça sans mot dire et emboîta le pas de son frère, en refermant la porte du bureau derrière elle.

Arrivant dans la salle à manger, la jeune fille prit place sur une chaise tandis que son frère se rendait dans la cuisine afin d'aider sa femme. Elle réfléchissait à ce qu'Ichigo pourrait avoir lui dire, cela l'agaçait de ne pas savoir de quoi il retournait. Mais elle ne put pas continuer à penser à tout cela car elle vit Orihime et Ichigo arriver dans la pièce, les bras pris par les plats du repas.

Tout va bien, Karin ? s'inquiéta Orihime tandis qu'elle s'asseyait en face d'elle.

Je me pose plein de questions sur plein de choses, soupira la brune. Yuzu, ma nouvelle vie avec vous, ça fait beaucoup de choses à digérer d'un coup.

Sa belle-sœur sourit d'un air attendri. Elle savait que la sœur de son mari était préoccupée aussi par une toute autre chose mais elle ne dit rien.

Tu veux en parler plus tard ? Je suis là si tu as besoin, énonça-t-elle.

Karin esquissa un léger sourire sans répondre, reconnaissante. Elle prit l'assiette que la jeune femme lui tendait et attaqua son repas. Orihime était un vrai cordon-bleu, songea-t-elle avec envie. Elle aimerait être aussi bonne en cuisine mais pour le moment, elle savait à peine faire cuire un œuf.

À la fin du dîner, la brune sentit le regard noisette de son frère peser lourdement sur elle. Le moment devait être venu car elle entendit Ichigo lui annoncer avec un peu d'appréhension :

Petite sœur, il faut que je te dise quelque chose...

La jeune fille releva la tête et planta ses prunelles sombres dans celle de son aîné. Elle ne savait pas à quoi s'attendre, il était rarement aussi tendu.

Je t'écoute, Ichi-nii.

Voilà : la semaine prochaine, nous irons voir notre père pour que tu fasses enfin sa connaissance, lâcha Ichigo d'un seul coup.

La nouvelle fit l'effet d'une bombe pour la jeune fille brune. Son père ? Mais elle n'était même pas sûre d'avoir envie de le rencontrer ! Elle savait cependant que ça ferait plaisir à son frère donc elle se ferait un devoir de les accompagner.

Je sais que ça doit être difficile mais ne t'en fais pas, ce n'est pas un monstre, essaya-t-il de la rassurer.

Tu crois... que je... vais lui plaire ? hésita Karin.

Le jeune régisseur s'attendait à cette question de la part de sa sœur. Mais elle n'avait pas de doute à avoir.

Tu n'as qu'à rester naturelle, il a envie de te connaître depuis très longtemps, tu sais, avoua-t-il avec un sourire. Mais c'est vrai que j'aurais aimé que Yuzu soit là aussi, souffla-t-il, le visage soudain triste.

Karin sentit son corps se crisper à la mention du nom de leur sœur. Les larmes menaçaient de déborder mais elle les retint courageusement.

Moi aussi, murmura-t-elle en baissant les yeux.

L'ambiance était devenue plus morose. Orihime ne savait que dire pour les rassurer donc elle prit Karin par les épaules et l'enlaça. Une marque de soutien qui fit beaucoup de bien à la jeune fille. Ichigo les rejoignit et les enlaça toutes les deux. Karin et Orihime se mirent à éclater de rire et enlacèrent le jeune homme à leur tour. Un simple câlin avait ramené la joie de vivre dans cette maison.

Si on attaquait le dessert, maintenant ?

La question d'Ichigo amena un sourire moqueur sur les lèvres de Karin. Elle savait, qu'à un moment où à un autre, son frère allait demander de manger le gâteau préparé par sa femme, dans l'après-midi.

Va le chercher ! répliqua la rousse en partageant un regard de connivence avec l'autre fille de la maison.

Sur les rires des deux femmes, Ichigo partit dans la cuisine chercher la pâtisserie en faisant mine de ronchonner. Karin partit se rafraîchir dans la salle de bain pour calmer son hilarité.

En passant de l'eau sur son visage, les yeux turquoises du duc lui apparaissaient devant les yeux. Elle en avait assez de le voir tout le temps quand elle s'y attendait le moins ! Et la douleur ressentie à chaque fois était de plus en plus virulente et la laissait désemparée.

La brune secoua la tête pour chasser ses pensées inopportunes et se rendit dans la salle à manger en se composant un visage souriant.

C'est quel jour qu'on va voir notre père, Ichi-nii ? demanda Karin d'une voix neutre.

Le jeune homme roux avala la bouchée de gâteau dans sa bouche et répondit en la regardant :

Dimanche prochain, normalement.

D'accord.

Le silence retomba sur la pièce tandis que tout le monde finissait de manger sa part de gâteau au chocolat. En essuyant le coin de sa bouche, Karin songea tristement à sa sœur jumelle Yuzu qui n'avait pas la chance de partager ce moment en famille.

 

L'odeur de sang séché ne la lâchait pas. La jeune fille ne savait toujours pas pourquoi elle était retenue prisonnière dans cet endroit. Elle ne comptait plus le nombre de ses blessures et son corps était tout ankylosé.

Depuis combien de temps était-elle ici ? Ça faisait un long moment qu'elle n'avait pas eu la visite de son ravisseur et elle mourrait de faim. Elle espérait que sa sœur ne s'inquiète pas trop à son sujet mais en la connaissant, elle se dit qu'il ne fallait pas trop en demander.

Tiens donc, comment va ma prisonnière préférée depuis ce temps ?

La voix d'homme qui susurrait à son oreille lui fit rater un battement. Elle ne l'avait pas du tout entendu arriver et il l'avait fait sursauter. Sa réaction fit rire son geôlier.

Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? cracha-t-elle d'une voix faible.

Oh mais rien voyons ! se récria-t-il faussement offensé.

La jeune fille savait qu'il ne fallait pas se fier aux paroles de son ravisseur. Elle aimerait vraiment revoir sa sœur juste une seule fois... A cette pensée, des larmes de douleur et de frustration se mirent à couler sur ses joues meurtries.

Tu sais que ta sœur jumelle est vraiment mignonne ? murmura l'homme d'une voix suave où perçait une satisfaction intense. Brune et piquante, tout à fait mon genre...

La prisonnière écarquilla les yeux de terreur. Il n'avait tout de même pas l'intention de faire ce qu'il semblait sous-entendre ? Cette perspective l'emplissait d'horreur.

Vous n'avez pas le droit de lui faire ça ! cria la jeune fille avec la force du désespoir. Pourquoi vous faites ça ? Pourquoi vous en prendre à nous ? Nous n'avons jamais fait de mal à...

Tais-toi ! vociféra son tortionnaire en la frappant violemment sur une jambe. Tu n'es rien, rien du tout !

Yuzu retint à grand-peine un cri de douleur. Elle savait qu'il ne fallait pas le pousser à bout mais elle n'avait pas pu s'en empêcher. Son innocence était désormais très loin derrière elle. Elle regrettait le temps où elle était avec sa sœur et leur mère.

Je ne peux pas permettre que deux gamines comme toi et ta sœur faites échouer le plan qu'il a fallu plus de deux ans à mettre au point ! Donc tu resteras ici jusqu'à la fin de ta vie et ta sœur viendra te rejoindre dans quelques temps... trancha-t-il d'une voix froide et sèche.

Il fixa de son regard mauvais la jeune fille qui retenait ses sanglots dans sa gorge. Il fallait à tout prix que sa fille épouse le duc car il était à deux doigts de la faillite. Lui seul pouvait les tirer d'affaire. Personne ne devait découvrir ce secret car il en allait de son intégrité.

Tu n'as pas le choix, ma jolie.

Sur ces paroles, le ravisseur repartit comme il était venu en laissant Yuzu pleurer de désespoir. Elle comprenait de moins en moins ce qui se passait et elle espérait que ça finirait bien. Pour tout le monde...

 

De retour dans sa chambre, Karin enleva sa robe et enfila sa tenue de nuit en soupirant. Elle ne parvenait plus à chasser le duc Hitsugaya de ses pensées. Chaque jour et chaque nuit, son visage froid lui apparaissait comme dans un rêve.

Ses yeux de glace la captivaient et elle pourrait s'y noyer sans que ça ne lui pose problème. Son air inaccessible et fier faisait battre son cœur à une vitesse folle et les autres hommes lui étaient indifférents. La brune n'avait d'yeux que pour le duc Toshiro Hitsugaya.

La porte de sa chambre s'ouvrit et laissa passer sa belle-sœur qui lui apportait une tasse de ce qu'elle supposait être du chocolat chaud. Orihime posa le plateau sur la table de nuit et prit place au côté de la jeune fille. La rousse trouvait que Karin semblait très tourmentée et perdue, à la fois.

Karin, tu es vraiment étrange depuis quelques temps, tu sais, lui fit remarquer Orihime sur un ton triste.

À la mention de son nom, la brune tourna la tête vers la femme de son frère avec une expression de peine sur le visage.

Mais non, tout va bien, Orihime, tenta-t-elle de la convaincre.

Arrête, tu ne me la feras pas à moi, jeune demoiselle, répliqua Orihime d'un ton sans réplique. Tu crois que je suis aveugle ?

Karin se leva de son lit et se dirigea vers la fenêtre de sa chambre, regardant avec mélancolie la Lune déjà haute dans le ciel. La couleur de l'astre lunaire lui faisait penser aux cheveux d'argent du jeune duc. Une couleur vraiment étrange pour un jeune homme, soit dit en passant. Rien que le fait d'imaginer son visage et elle sentait son cœur s'emballer dans sa poitrine.

Non, je ne crois pas ça, Orihime, soupira la jeune fille sans se retourner. J'aimerai simplement savoir ce qui m'arrive, c'est vraiment agaçant et troublant...

Orihime, soudainement intéressée par les paroles de la sœur de son mari, se rapprocha d'elle et se mit elle aussi à regarder la Lune.

Karin sentait sa présence à ses côtés mais n'osait pas la regarder dans ses perles grises, de peur qu'elle y découvre une chose compromettante. Sans aucune raison apparente, la jeune fille sentait des sanglots monter dans sa gorge et tenta de les retenir, en vain.

Entendant des bruits étouffés venant de sa voisine, Orihime se retourna vivement vers elle et une mine inquiète s'afficha sur son beau visage. Elle posa une main sur l'épaule de Karin et la fit tourner vers elle. Ce qu'elle vit lui brisa le cœur : le visage clair de la jolie brune était ravagé par les larmes coulant sur ses joues.

Je savais que ça n'allait pas, Karin, fit-elle en la prenant dans ses bras. Je reconnais les signes, j'ai été jeune moi aussi...

Un sourire involontaire se peignit sur le visage de la jeune fille en entendant ces mots.

Arrête, on dirait... que tu penses... être vieille, balbutia-t-elle péniblement.

J'ai tout de même vingt-cinq ans, tu sais... Mais bon, revenons à ce qui nous préoccupe, trancha la rousse.

Karin tressaillit dans les bras de sa belle-sœur. Elle allait passer à la casserole et elle ne pourrait pas y échapper.

Tu disais que... tu savais ce que j'ai, hésita-t-elle en baissant les yeux en se dégageant.

Tu... es... amoureuse, Karin, martela Orihime pour être sûre de se faire bien comprendre.

À cette révélation, la brune écarquilla les yeux et posa un regard étonné sur la rousse. Amoureuse, elle ? Mais de qui ? Elle était encore plus perdue qu'avant.

Qu'est-ce qui te fait dire une chose pareille, Orihime ?

L'interpellée sourit tendrement à cette question. La sœur d'Ichigo était décidément bien innocente, songea-t-elle attendrie.

J'ai eu les mêmes symptômes donc tu ne peux pas me tromper, affirma-t-elle d'un ton définitif. Se perdre dans ses pensées avec un sourire béat, le cœur qui s'emballe quand on pense à lui, le fait de le savoir avec une autre qui te fait souffrir et d'autres encore... énuméra Orihime en comptant sur ses doigts.

Elle s'interrompit un instant, pour laisser à Karin le temps de digérer cette nouvelle.

Karin, elle, était complètement désemparée. Elle mit ses mains devant ses yeux pour cacher ses larmes à la vue de la femme d'Ichigo. Comment avait-elle pu ne pas s'en rendre compte avant ? Pourquoi avait-elle été aussi aveugle ?

Ses pleurs redoublèrent d'intensité. Elle était décidément bien stupide de s'être amourachée d'un duc déjà promis à une autre... Sa bêtise ne connaissait pas de limite, se fustigea-t-elle amèrement.

Maintenant... que tu... en parles, sanglota la brune avec ironie. Comment j'ai pu être aussi stupide ?

Orihime la couvait d'un regard triste, comprenant ce que la jeune fille ressentait. Quand elle avait rencontré celui qui allait devenir son mari, elle avait eu le coup de foudre. Mais Ichigo n'était pas à l'aise avec les sentiments et il lui avait fallu un temps fou pour comprendre que ses sentiments étaient réciproques.

Le pire de tout, c'est qu'il n'est pas pour moi, continua Karin en regardant la Lune avec mélancolie. Je vise haut, non ? Un duc, rien que ça... Fiancé, qui plus est !

On ne choisit pas de qui on tombe amoureux, Karin, soupira Orihime en fermant les yeux. Le mieux qu'on puisse faire, c'est vivre avec et espérer qu'un jour, ça devienne réciproque.

Dans ce cas, je mourrai vieille fille.

Ou pas...

Karin se tourna vers sa belle-sœur et ce qu'elle vit sur son visage lui fit chaud au cœur. Un sourire plein d'espoir et un regard gris confiant. Mais elle n'était pas dupe pour autant. Elle savait que ce serait quasiment impossible. Il ne fallait pas qu'elle perde confiance en elle, lui dirait Yuzu avec un sourire encourageant. Elle entendait presque sa voix.

Orihime ? l'appela la brune hésitante.

Oui, ma jolie ?

Elle tripota ses doigts quelques instants avant de répondre en baissant la tête :

Ne dis rien à mon frère, s'il te plaît.

Il était vrai que si Ichigo apprenait ce qui s'était dit dans cette pièce, cela ne lui plairait sans doute pas. Donc Orihime acquiesça sans mot dire à sa demande, la comprenant très bien.

Bon, je vais aller me coucher, annonça la rousse en s'éloignant en direction de la porte. Essaie de dormir un peu, tout de même.

Bonne nuit et merci.

Avant de fermer la porte derrière elle, Orihime adressa un doux sourire à la sœur de son mari. Elle marcha vers sa chambre où son cher et tendre devait s'impatienter. Bingo ! En pénétrant dans la chambre principale, elle vit Ichigo le visage sombre.

Alors ? l'interrogea-t-il.

Je reviens, fit-elle en se rendant dans la salle d'eau.

Le jeune homme soupira mais prit son mal en patience. Il entendit l'eau et en déduisit que sa femme faisait sa toilette. Le visage tourmenté de sa jeune sœur lui revint en mémoire. Mais qu'est-ce qui pouvait la tracasser autant ? Elle semblait réellement souffrir et ça, Ichigo ne le supportait pas.

Il savait bien sûr que Yuzu lui manquait atrocement mais son petit doigt lui disait qu'il ne s'agissait pas seulement de ça. Il y avait autre chose et il mourrait d'envie de savoir ce que c'était. Le bruit d'une porte qui s'ouvre interrompit ses sombres pensées et il vit Orihime s'approcher du lit pour se coucher.

Ichigo attendit encore quelques instants – tant bien que mal – pour laisser sa moitié s'installer et une fois qu'elle était couchée à ses côtés, il se tourna vers elle pour lui demander encore une fois :

Alors ?

Comme tu l'avais deviné, elle n'est pas très bien, souffla la jeune femme fatiguée. Mais j'ai réussi à lui remonter le moral, donc tu n'as plus à t'inquiéter.

Tu crois vraiment que cette explication va me suffire ? insista le roux, la mine contrariée.

En entendant la réaction de son rouquin de mari, Orihime ne pouvait pas dire qu'elle ne s'y attendait pas. Elle ne connaissait pas plus têtu que lui – peut-être Karin dans ses mauvais jours – et savait très bien qu'il allait tout faire pour connaître la vérité. Elle réprima un soupir, à la fois amusée et irritée qu'il insiste autant.

Écoute, elle m'a fait promettre de ne pas en parler, lui avoua-t-elle en plongeant ses yeux gris dans ceux noisettes de son mari. Comment j'aurais pu lui refuser ça ?

Ça ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout, cette histoire. Ichigo poussa un soupir de résignation car il ne demanderait jamais à Orihime de briser une promesse faite à sa cadette, même si ça lui pesait beaucoup.

Il trouverait une autre façon de lui tirer les vers du nez, se dit-il en embrassant sa femme. Puis il se coucha, ferma la lumière et baissa les paupières sur ses prunelles pleines d'interrogations. Demain était un autre jour.

 

Après la discussion qu'elle avait eu avec Orihime, Karin tenta de se recoucher afin de dormir mais le sommeil la fuyait, comme de raison. La découverte de ses sentiments l'avait complètement chamboulée. Jamais elle n'aurait imaginé qu'elle était tombée amoureuse du duc – à son insu. Elle se sentait bien en sa compagnie, mise à part sa gêne.

La brune se sentait vraiment vivante et ça faisait longtemps qu'une chose pareille ne lui était pas arrivée. Mais une souffrance infinie vint envahir son cœur. Le jeune duc était fiancé et le mariage était prévu pour bientôt, alors comment faire ?

Karin jeta ses couvertures au pied du lit et se leva doucement, sans faire de bruit, et s'installa à son bureau. Son frère avait été assez gentil pour lui en procurer un quand elle l'avait demandé. Elle posa une feuille blanche devant elle et prit une plume qu'elle trempa dans de l'encre avant de commencer à écrire.

Elle voulait se vider la tête de tous ses tourments et quoi de mieux que de se confier à une feuille de papier, qui ne dira jamais rien à personne ?

 

J'avoue, je suis complètement paumée et c'est la première fois que ça m'arrive. Je ne fais que penser à lui, je n'arrive pas à me l'enlever de la tête. Ses yeux turquoises m'ont jeté un sortilège trop puissant pour que je puisse le rompre.

Mais pourquoi a-t-il fallu que je tombe amoureuse de l'homme le plus inaccessible que je connaisse ? Je ne suis qu'une idiote... A chaque fois que je le vois, mon cœur s'emballe dans ma poitrine et mes jambes flageolent. Mais aussi, le fait qu'il soit fiancé m'éclate à la figure. La première fois que je tombe amoureuse et j'en souffre horriblement. Rien que d'y penser et je sens mon cœur se briser impitoyablement.

Yuzu, j'ai tellement besoin de tes conseils avisés, j'aimerai tellement que tu sois là et que tu me dises ce que tu aurais fait à ma place.

Je suis condamnée à garder le silence, jamais je ne le lui avouerai. Pour me faire rejeter, ce n'est pas la peine. Je souffre déjà assez comme ça. Malheureusement, Orihime a tout deviné mais je lui ai fait promettre de ne rien dire, et surtout à mon frère. Ce serait une véritable catastrophe naturelle s'il l'apprenait !

 

Karin posa tranquillement sa plume et se détendit. Elle se sentait mieux depuis qu'elle avait posé ses sentiments sur le papier, elle aurait dû le faire bien avant. Une bonne chose de faite, se dit-elle en retournant dans son lit.

Mais avant qu'elle ne puisse fermer les yeux pour se plonger dans un sommeil bien mérité, elle vit Ichigo entrer dans la chambre et refermer la porte derrière lui. Que venait-il faire ici ? Il devait être déjà couché !

Tu n'arrives pas à dormir, à ce que je vois, nota-t-il d'une voix basse.

- Non, trop de choses dans la tête, répondis-je vaguement. Toi non plus ?

Heureusement qu'elle avait rangé la feuille, songea-t-elle avec soulagement. Il ne manquerait plus que son frère la lise et ce serait la fin de tout. Il prit la chaise qui se trouvait devant son bureau et la posa à côté du lit avant de prendre place dessus.

- Non, en effet, soupira le roux en la fixant de ses prunelles noisettes. Tu crois que je ne sais pas que tu ne vas pas bien ?

Je ne te ferai pas cet affront, murmura la jeune fille en se redressant. Mais Orihime a dû te dire que ça va mieux, à présent.

Karin s'interrompit un instant avant de demander, un brin taquine :

- Est-ce que ta femme sait que tu es ici ?

- Non, j'ai attendu qu'elle soit endormie avant de venir te voir. Mais ne change pas de sujet, petite sœur.

- Moi ? Je ne fais rien de tel, mon frère, nia-t-elle l'évidence.

Ichigo sourit, amusé de la réplique de sa sœur cadette. Elle ne manquait pas d'assurance pour lui mentir de cette façon. Mais en voyant ses yeux brillants de larmes contenues, le visage du jeune homme redevint sérieux. Décidément, ce ne serait pas facile de la faire parler, se dit-il avec une fierté dissimulée. Elle était bien de sa famille, il ne pouvait le nier.

- On va faire comme si je te croyais, hein ? ironisa Ichigo en levant les yeux au ciel. Non, sérieusement...

- Tu peux être vraiment désagréable, parfois, se moqua la brune. On ne te l'a jamais dit ?

- Beaucoup trop, sourit-il. Mais comme tu vois, ça ne sert à rien.

Karin se retint de rire devant la réponse de son frère. Elle le savait borné, mais là il battait tous les records. Elle s'adossa à son oreiller et regardait son frère du coin de l’œil. Il semblait vraiment énervé de ne pas avoir réussi à lui tirer les vers du nez. Elle allait se montrer charitable, pour une fois.

- Je vais te donner un indice pour te mettre sur la voie, annonça Karin en souriant. Mais avant, tu dois me promettre une chose...

- Laquelle ?

Le sourire plein de malice de sa sœur ne lui plaisait vraiment pas. Qu'allait-elle faire, bon sang ? Enfin, il le saurait tôt ou tard... Et le plus tôt serait le mieux.

Que tu ne me demanderas plus rien à ce sujet.

Elle était fière d'elle, en plus. Il la reconnaissait bien là, se dit-il attendri.

Promis, soupira le jeune homme, vaincu.

Karin se sentit soulagée quand son frère accepta ses conditions. Que pourrait-elle lui donner comme indice sans trop se trahir ? Elle réfléchit quelques minutes puis reprit la parole, savourant par avance son effet :

Alors voilà : c'est le genre de chose qui arrive à une fille et qui peut bouleverser sa vie.

Ichigo écarquilla les yeux. Elle avait osé ! Il éclata de rire, ayant compris avec un instant de retard là où elle voulait en venir avec cette fichue promesse. Elle ne voulait pas se mouiller plus que nécessaire, c'était bien joué de sa part.

- Ichi-nii, Orihime dort, lui rappela la jeune fille en mettant un doigt devant sa propre bouche.

Oh, c'est vrai !

Il stoppa son rire aussitôt puis posa son regard noisette sur sa cadette, qui devait jubiler de l'avoir eu comme un débutant. La fatigue commençait à s'emparer de lui donc il se leva et remit la chaise à sa place.

- Bon, je vais te laisser dormir, petite sœur, énonça-t-il en se dirigeant vers la porte. Bonne nuit.

Bonne nuit, Ichi-nii.

Sur ces mots, le jeune homme roux ferma la porte derrière lui et Karin entendit ses pas feutrés s'éloigner avec soulagement. Elle avait été à deux doigts de craquer mais elle avait tenu bon. Son frère était un adversaire redoutable, quand il voulait.

En réprimant un sourire de soulagement, elle s'allongea et rabattit ses couvertures sur elle, la couvrant presque entièrement. Seul le haut de la tête dépassait. Elle ferma les yeux, prête à s'endormir quand elle sentit quelque chose de bizarre, ce qui la fit sursauter. Ce n'était pas encore maintenant qu'elle allait pouvoir accéder au sommeil qui lui faisait défaut, se dit-elle avec irritation.

Un frisson désagréable lui parcourra la colonne vertébrale. Karin avait la désagréable sensation d'être observée fixement et cette présence ne lui paraissait pas amicale.

- C'est quoi ce délire ? se demanda-t-elle tout bas en se redressant vivement dans son lit.

Aussitôt qu'elle avait parlé, cette sensation disparut. La jeune fille crut alors l'avoir rêvée. Elle se recoucha en espérant que cette fois-ci était la bonne. Elle ferma ses yeux noirs et plongea dans un sommeil peuplé de rêves étranges où la présence ressentie plus tôt refaisait surface.

 

Quelques heures plus tôt...

Le duc se retrouva enfin seul dans son bureau. Décidément, cette femme lui tapait sur les nerfs. Il poussa un soupir de frustration et de colère mêlées devant l'obstination de sa fiancée à avancer la date du mariage.

Sa patience était mise à rude épreuve et il ne supporterait plus tout ça encore très longtemps. Il se dit bizarrement que cette précipitation pouvait cacher quelque chose puis rejeta aussitôt cette idée. Elle ne collait pas avec le caractère posé de sa fiancée. Enfin, l'avenir le lui dirait tôt ou tard. Il ne la pensait pas aussi calculatrice mais on était à l'abri de rien. C'était une leçon qu'il avait apprise à ses dépens.

Regardant l'horloge d'un coup d’œil distrait et avisant l'heure tardive, Toshiro se dit qu'il était plus que temps pour lui de se coucher. Il était épuisé et la visite de la jeune femme n'avait pas arrangé les choses. En songeant au motif de sa visite, il eut un sourire désabusé. Le jeune duc ne savait que trop qu'elle était pressée de l'épouser, contrairement à lui.

Après tout, quelle femme ne rêverait-elle pas de devenir duchesse ? Aucune, mise à part peut-être une femme désintéressée et il n'en connaissait pas. Un visage doux entouré de cheveux noirs lui vint soudain en tête. Décidément, la sœur de son régisseur ne le lâchait pas. Il était vrai qu'il appréciait sa compagnie, elle était toujours naturelle et il trouvait ça rafraîchissant.

Le seigneur sortit de son bureau d'un pas las et tendit l'oreille.

Cette journée n'en finira donc jamais ? soupira-t-il en entendant des éclats de voix dans le hall.

Il partit dans la direction du bruit, décidé à comprendre la cause de tout ce tapage. Quand il arriva sur place, il fut surpris par ce qu'il découvrit. Le majordome empêchait deux serviteurs d'en venir aux mains mais il commençait à fatiguer. Le duc manifesta sa présence par un toussotement et aussitôt un silence de plomb remplaça le bruit.

- J'aimerai savoir ce qui se passe, dit-il sur un ton froid. Pourquoi cette bagarre ?

C'est lui qui a commencé, fit un valet en jetant un regard plein de hargne au valet personnel du duc.

- C'est vrai, Tamashi ?

- Non, Monseigneur, soupira le jeune homme.

Toshiro croisa les bras sur sa poitrine, signe que son impatience montait.

J'ai surpris Dan en train de fouiller dans l'argenterie, révéla-t-il devant le regard de glace de son maître.

À ces mots, le dit Dan s'énerva et voulut s'approcher de Tamashi mais en fut empêché par le majordome qui le retenait fermement. Son visage était marqué par de la fureur pure.

- Je vais te tuer, Tamashi !

- Tu ne tueras personne.

La voix du jeune duc claqua comme un fouet, calmant instantanément la colère de son serviteur. Celui-ci tourna la tête vers son maître, de la haine dans ses prunelles noires. Toshiro ne cilla pas devant cette rage contenue. Il ne lui faisait pas peur.

- Shin, enfermez notre jeune ami dans sa chambre pour qu'il réfléchisse aux conséquences de ses actes, ordonna sèchement Hitsugaya. Dan, tu quitteras le château demain matin à la première heure, ajouta-t-il en le regardant fixement. Je ne tolère pas ce genre de comportement chez moi.

Obéissant aux ordres de son jeune maître, Shin empoigna le récalcitrant et le conduisit de force dans sa chambre, ignorant les cris de rage de ce dernier.

Une fois qu'ils furent partis, le duc se tourna vers son valet, encore choqué par la menace de l'ancien domestique.

- Tamashi, va te coucher, dit-il plus doucement. Il ne pourra rien te faire, sinon il sait ce qui l'attend.

Le jeune serviteur soupira de soulagement. Il était reconnaissant à son seigneur d'avoir pris les choses en main de cette façon.

- Merci, Votre Grâce et bonne nuit.

Il n'attendait pas de réponse et monta dans sa chambre afin d'oublier ce qui venait de se passer.

Toshiro mit une main devant ses yeux clos. Décidément, ce n'était pas sa journée, songea-t-il avec ironie. Il marcha doucement en direction de sa chambre en se posant des questions. Quelque chose n'allait pas, il le sentait mais il ne savait pas quoi exactement. Depuis quelques temps, il avait un mauvais pressentiment.

Le jeune homme aux cheveux d'argent ouvrit la porte de sa chambre et s'y faufila sans un bruit. Il la referma derrière lui vit que son valet avait préparé sa tenue de nuit. Même en état de choc, il y avait pensé, se dit-il amusé. Une fois prêt pour dormir, il fut pris d'une impulsion subite et alla ouvrir son coffre fort, dissimulé derrière le portrait de sa mère. Il prit ce qu'il cherchait et alla dans son lit.

Il s'agissait de la fameuse lettre reçue quelques semaines plus tôt. Il ne l'avait pas encore ouverte car il appréhendait ce qu'il allait y trouver. Il déchiffra le nom de l'expéditeur et la date d'envoi. Son père... Des souvenirs revinrent en force sans qu'il ne puisse les retenir. Des souvenirs de cette nuit-là...

 

Flash Back, sept ans plus tôt :

 

Sur une route enneigée, un carrosse roulait au pas. Les armoiries peintes dessus ne laissaient aucune place au doute : il s'agit du carrosse de la famille ducale Hitsugaya. Un adolescent aux cheveux argentés somnolait dans un coin, tandis que son père discutait avec sa mère.

Puis un bruit sourd réveilla le jeune homme et il vit son père et sa mère allongés sur le sol blanc. Il ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Pourquoi ses parents étaient-ils étendus par terre ? Il s'approcha du carrosse et vit qu'il était retourné et que les chevaux et le cocher n'étaient plus là. Qu'est-ce que ça voulait dire ?

Le jeune homme alla d'abord voir sa mère et les traces de sang ne laissaient place à aucun doute possible : sa mère était morte. Comment une chose pareille avait-elle pu se produire ? Ses yeux de glace pleins de larmes, il ferma tendrement les yeux de sa mère et l'embrassa une dernière fois sur le front, comme elle avait coutume de le faire lorsqu'il était enfant.

Il se dirigea vers son père, tremblant de tout son corps. Avec horreur, il vit une flaque de sang au niveau de sa tête. Il s'agenouilla devant son père et vit qu'il était vivant. Il avait les yeux ouverts – des yeux semblables aux siens – et tentait de lui dire quelque chose.

- Approche...toi, mon.... fils, parla-t-il péniblement. Toshiro, il faut que... que tu sois fort...

- Pourquoi vous dites cela, père ? Vous allez vous en sortir !

- Écoute-moi attentivement, pria le duc en posant sa main ensanglantée sur l'épaule de son héritier. À partir de... maintenant, tu es le... nouveau duc, mon fils... et tu vivras... des moments difficiles... Mais je sais... que tu t'en sortiras, je suis... fier de toi...

La main retomba lourdement sur le sol et Toshiro se mit à verser des larmes de rage et de désespoir. Pourquoi lui avait-on enlevé ses parents ? C'était un cauchemar !

 

Fin Flash-back.

 

Ces souvenirs douloureux firent remonter des larmes à ses yeux turquoises. Même après toutes ces années, la douleur était toujours aussi vivace. Il sécha les gouttes salées avec la manche de son pyjama puis reprit la lettre écrite par son père. Elle était datée de la veille de sa mort. Pourquoi la recevait-il seulement maintenant ? Il trouvait vraiment ça étrange, comme si par delà la mort, le vieux duc avait voulu lui dire quelque chose.

Il décacheta l'enveloppe, déplia délicatement la feuille et commença sa lecture.

 

Mon fils,

 

Je sais que cette lettre doit te surprendre mais je n'ai pas eu le temps de te parler avant mon départ pour l'autre monde.

Donc j'ai tout écris ici, la veille de ma mort.

Voilà: ce que je vais te dire va te paraître sans doute étrange mais c'est la stricte vérité.

Tes fiançailles avec la jeune Hinamori sont nulles et non avenues. J'imagine sans peine l'expression de ton visage au moment où tu liras ceci, tu ne vas sans doute pas comprendre. Cependant, tu sais que j'ai toujours voulu ton bonheur avant toute chose et je n'ignore pas que cette jeune demoiselle n'est pas faite pour toi.

Toshiro, pousse l'armoire dans le bureau, celle qui est à côté de mon portrait, tu verras une sorte de petite porte: c'est un petit coffre dont personne ne connaît l’existence. Tu y trouveras les réponses à toutes les questions que tu dois te poser.

 

Je suis parti alors que tu n'étais encore qu'un adolescent et tout est retombé sur tes épaules à un âge bien tendre, mais sache que de là où nous sommes, ta mère et moi sommes très fiers de toi.

Un dernier conseil : si tu rencontres une jeune fille dont tu tombes amoureux et qui t'aime aussi pour ce que tu es, peu importe son rang social... épouse-la car seule elle pourra te rendre heureux.

 

Sois heureux, mon fils, nous veillerons toujours sur toi.

 

Ton père.

 

Toshiro laissa tomber la lettre sur son lit, complètement hébété. Il n'était pas fiancé ? Mais enfin, c'était quoi ce délire ? Il prit sa tête entre ses mains, ne voulant pas croire à cette nouvelle. Cette annonce lui avait fait l'effet d'une bombe. Le jeune duc reprit la feuille et relit une seconde fois la lettre de son père, pour être certain de ne commettre aucune erreur. Mais il lisait la même chose.

Cachant la lettre sous son oreiller, il éteignit la lumière et s'allongea confortablement dans son lit en remontant les couvertures jusqu'à la tête. Il ferma les yeux pour tenter de trouver le sommeil mais les mots de son père lui revenait sans cesse à l'esprit. Toshiro secoua violemment la tête afin de chasser les pensées qui le tourmentaient. Deux heures plus tard, il s'endormit d'un sommeil peuplé de rêves où il revoyait l'accident qui avait coûté la vie à ses parents.

 

Sept jours étaient passé et c'était le jour de la première rencontre de Karin et son père. La veille, la jeune fille avait eu beaucoup de mal à trouver le sommeil à cause de cela. Malgré les tentatives d'Ichigo et Orihime pour la rassurer, elle était toujours aussi stressée.

Ichigo entra dans la chambre de sa cadette afin de la réveiller. Il s'approcha doucement du lit et la vit complètement recouverte. Seul le haut de la tête dépassait des couvertures. Il esquissa un léger sourire, attendri par cette vision. Puis se rappelant la raison pour laquelle il était là, le roux secoua sa sœur pour la réveiller.

- Karin, l'appela-t-il espérant qu'elle réagisse enfin. Il est 11h00 et il est temps de te lever, sinon on ne sera jamais à l'heure chez papa.

À peine avait-il fini sa phrase que sa sœur se redressa vivement dans son lit, les yeux encore pleins de sommeil. Mince, c'est vrai que c'était aujourd'hui... En réprimant un soupir, Karin leva ses prunelles noires sur son frère qui était encore dans la pièce.

Je ne serais jamais prête à temps ! s'affola la brune en se levant rapidement.

- On a encore du temps, Karin, la rassura son frère en souriant. On part seulement dans trois heures.

Elle soupira de soulagement à cette nouvelle. Trois heures étaient plus que suffisantes pour une fille comme elle pour se préparer.

- Viens prendre ta tasse de thé, elle t'attend en bas.

Sur ces mots, Ichigo quitta la pièce. Karin passa rapidement dans la salle d'eau afin de passer un coup d'eau sur son visage fatigué et enfila la robe que sa belle-sœur lui avait préparée, la veille au soir.

C'était une belle robe vert d'eau qui mettait en valeur son teint pâle, serrée par un ruban noir à la taille. Elle emporta les mitaines noires et la capeline de la même couleur avec elle pour lui éviter de remonter les chercher avant de partir.

En arrivant en bas, trois quarts d'heure plus tard, elle vit Orihime s'affairer à la préparation du déjeuner, constitué de sandwichs et de pâtes. Quelque chose de rapide et simple, elle aimait cette idée. La brune alla rejoindre son frère sur le canapé qui lisait le journal du jour.

Te voilà enfin, la taquina le roux en repliant le journal.

- Tes remarques, je peux m'en passer, répliqua-t-elle en lui tirant la langue.

Orihime salua Karin en entrant dans la pièce et posa le plat contenant les pâtes sur la table déjà dressée. Elle repartit aussitôt dans la cuisine, sans doute pour aller chercher les sandwichs.

Aussitôt que la maîtresse de maison fut de retour dans la salle à manger, tous trois prirent place et mangèrent de bon appétit le repas préparé par la rousse. Au bout d'une heure, le repas était terminé et Ichigo et Karin commencèrent à se chamailler de nouveau sous le regard attendri d'Orihime.

Les deux femmes débarrassèrent la table en moins de temps qu'il ne fallut pour le dire, tandis que l'homme de la maison s'occupait de la vaisselle.

- Tu ne trouves pas que ça lui va bien, Orihime ? se moqua Karin en regardant son frère laver une assiette avec application.

- C'est vrai que ça lui va bien, renchérit sa belle-sœur sur le même ton, en réprimant un fou rire devant le regard noir du roux. Il faut en profiter tant que ça dure.

- Vous allez voir, toutes les deux, ronchonna Ichigo en fermant le robinet.

Après s'être essuyé les mains avec un torchon, il le balança sur les deux femmes qui l'esquivaient sans problème dans un éclat de rire. Un fou rire les prirent tous les trois et à bout de souffle, ils arrêtèrent leurs enfantillages.

Orihime jeta un coup à l'horloge qui indiquait 13h30. Elle décida donc de prendre les choses en main avant qu'ils ne soient en retard pour de bon.

- Bon, allez vous préparer tous les deux, il est bientôt l'heure de partir.

Sur cette phrase, la jeune femme partit chercher son manteau, son bonnet et son écharpe qu'elle avait laissés dans sa chambre. Pendant ce temps, le frère et la sœur enfilèrent chacun le leur en se taquinant. Mais Ichigo sentit l'appréhension de Karin monter sensiblement alors qu'ils sortirent de la maison.

Le carrosse les attendait déjà et Ichigo invita sa femme et Karin à monter à l'intérieur. Il les suivit aussitôt après et referma la porte derrière lui. Le carrosse s'ébranla et démarra doucement, il accéléra jusqu'à obtenir la vitesse désirée.

Tout ira bien, petite sœur.

Karin adressa un sourire reconnaissant à son frère. Il avait bien évidemment deviné qu'elle était stressée par cette rencontre. Rencontrer son père pour la première fois à dix-huit ans rendrait n'importe qui sur les nerfs et la brune ne faisait pas exception à la règle.

- J'avoue que je ne sais pas à quoi m'attendre, souffla la jeune fille.

Elle tourna la tête vers la fenêtre afin de regarder le paysage défiler à toute allure.

- Ne t'en fais pas, la rassura le jeune homme. Il est un peu étrange mais tu t'y feras vite, tu verras.

Cette nouvelle n'était pas trop pour rassurer la brune qui ne répondit pas. Puis ses pensées dérivèrent vers un certain duc aux cheveux d'argent. Elle se demandait comment il allait. La dernière fois qu'elle l'avait vu, il semblait vraiment préoccupé. La jeune fille espérait que rien de grave ne lui était arrivé.

Environ une heure plus tard, les voilà arrivés à destination. Ichigo aida Orihime et Karin à descendre du carrosse, la marche pouvait paraître assez haute lorsqu'on n'y était pas habitué. Quand Karin mit à pied à terre, elle admira la vue qui profilait devant elle. Elle était stupéfaite par la taille du manoir paternel, elle ne s'attendait pas du tout à ça.

L'appréhension qui l'avait lâchée pendant le voyage revint en flèche. On lui cachait beaucoup de choses et elle n'aimait pas ça. Qui était réellement son père ? Elle décida de demander à son frère :

Dis, Ichi-nii, pourquoi notre père possède un si grand manoir ?

Le jeune homme roux réprima un soupir en entendant la question de sa sœur. Il ne pouvait nier qu'il s'y attendait, mais pas si tôt. Il ne pouvait rien dire pour le moment, Karin l'apprendrait en temps voulu.

- C'est à notre père de te le dire.

Un homme sortit du manoir et se posta sur le perron. Il était grand, brun avec une barbe de trois jours. Il imposait le respect par sa seule présence et la jeune fille se demanda aussitôt si ce n'était pas lui, son père.

- Notre père nous attend, indiqua Ichigo en mettant sa main dans le dos de sa cadette pour l'inviter à le suivre.

Karin sentit son corps se tendre davantage mais suivit tout de même le couple qui marchait en direction du perron. Elle gardait la tête baissée, cette situation la mettait très mal à l'aise. La jeune fille craignait de rencontrer le regard de son père.

Ichigo n'était pas plus étonné que ça du comportement de sa sœur. Il comprenait ce qui lui arrivait mais il ne savait pas trop comment la rassurer alors il ne dit rien. Alors que tous trois s'arrêtaient devant le maître de maison, le roux prit la main de Karin dans la sienne pour lui donner un peu de son courage.

- Orihime ! s'écria le père Kurosaki en serrant sa belle-fille dans ses bras. Comment va la mère de mon premier futur petit-enfant ?

- Très bien, ne vous en faîtes pas, répondit-t-elle en lui rendant son étreinte. Et vous, Isshin-san ?

Tu as vraiment besoin de lui demander, ma chérie ? soupira le jeune homme en l'entourant de son bras libre, avant que son père ne puisse répondre.

Karin ne pipait mot, attendant qu'on la remarque. Le peu qu'elle voyait de son père lui semblait vraiment étrange. Elle ne l'avait pas du tout imaginé comme ça. La jeune fille sentit soudain trois paires d'yeux se poser sur elle et se tendit aussitôt.

- Dis-moi, mon fils, dit sérieusement Isshin. Qui est cette ravissante jeune fille derrière toi ?

L'heure de vérité pour Karin.

- C'est ta fille, papa, et elle s'appelle Karin.

- Ma fille ? répéta-t-il complètement stupéfait.

Orihime et Ichigo sourirent sans répondre.

- Bonjour, père, fit timidement la brune, ne sachant où se mettre.

L'homme fit une chose à laquelle elle ne se serait pas attendue : il la serra fort contre son cœur et pleura comme une madeleine. Ichigo réprima un sourire amusé en voyant le comportement de son paternel.

- Que tu es belle, ma fille ! Je n'arrive pas à croire que je te rencontre enfin !

Karin écarquilla ses yeux sombres et malgré elle, des larmes coulèrent sur ses joues. L'émotion était trop forte pour elle. Décidément, sa famille était pleine de surprises, se dit-elle en retenant un sourire moqueur.

- Papa, on ne va pas rester sur le perron toute l'après-midi, s'impatienta Ichigo.

En entendant la voix irritée de son fils, Isshin lâcha enfin Karin et les conduisit dans un salon servant à recevoir les invités, non sans continuer à se réjouir de cette rencontre « providentielle ».

La brune ne se sentait pas vraiment à sa place dans cet endroit. Cette maison était encore plus grande et plus luxueuse que celle où elle habitait avec son frère. Elle prit place doucement sur un canapé que son père lui indiqua, en face de lui.

- Je crois qu'il est temps que je donne quelques explications, soupira Isshin en revenant sérieux. Karin, je pense que tu dois te demander pourquoi je possède une si grande maison...

La brune hocha de la tête pour montrer son assentiment. Elle avait hâte de connaître la raison, mais elle n'en montrait rien pour ne pas être impolie.

- C'était la dot de Masaki, la mère d'Ichigo, que j'ai reçu lorsque nous nous sommes mariés.

En effet, cela expliquait tout, songea la jeune fille. Elle tourna la tête vers son frère, sachant que le sujet de sa mère était toujours très fragile. Ichigo avait le visage sombre, donc elle posa doucement sa main sur la sienne pour le soutenir. Après tout, tous deux connaissaient la même douleur d'avoir perdu leur mère.

- Ma chère Masaki est morte lorsque notre fils a eu cinq ans, elle a été piquée par un serpent venimeux et personne n'a rien pu faire pour la sauver...

Isshin s'interrompit, ce souvenir étant toujours très douloureux. Il inspira profondément et reprit tant bien que mal son récit.

- C'est deux ans après ce drame que j'ai rencontré Ayame, ta mère, révéla le brun en regardant sa fille dans les yeux. Elle était pleine de joie de vivre et tellement jolie...

Karin vit son père sourire tristement à ce souvenir. Elle se demandait ce qui avait pu se passer ensuite.

- Comprends-moi bien, j'ai vraiment aimé Ayame mais à chaque fois que j'étais avec elle, j'avais l'impression de tromper Masaki alors j'ai mis un terme à notre relation... sans savoir qu'elle était enceinte de moi.

- A quel moment l'avez-vous appris ? s'enquit la jeune fille.

Ichigo écoutait attentivement le récit de son père. Il n'aurait jamais soupçonné une telle histoire. Comme quoi, après vingt-sept ans, son père lui cachait encore beaucoup de choses. C'est vrai que ce n'était pas une chose évidente à avouer, ce qui expliquait qu'Ichigo l'avait su en allant dans le grenier du manoir où d'anciennes correspondance étaient entreposées.

- Cinq ans après notre rupture, j'ai reçu une lettre anonyme me disant que j'avais deux filles.

Je sais que ma mère ne vous a jamais écrit, elle n'en avait pas eu la force, se souvint Karin. Je le tiens d'elle, d'ailleurs et elle ne savait pas que vous étiez au courant de notre existence, à Yuzu et moi.

Yuzu était le prénom de ma grand-mère...

Karin ne montra pas son étonnement à cette nouvelle. Ainsi, malgré tout, sa mère avait voulu marquer le lien avec la famille de son ancien amant qu'elle aimait encore... C'était une histoire tristement romantique...

- Elle m'a tout avoué sur... sur son lit de mort, sans avoir eu le temps... de me dire le nom... de mon père. Je sais... qu'elle vous... aimait toujours, dit-elle avec une voix entrecoupée de sanglots.

Des gouttes salées tombèrent de ses yeux à ce souvenir. Ichigo serra la main de sa sœur, peiné de voir qu'elle souffrait toujours autant. Lui-même était pareil...

- Sache que j'ai toujours regretté d'avoir quitté ta mère, Karin et je me le reprocherai jusqu'à ma mort. Je regrette tellement de ne pas vous avoir vu grandir, Yuzu et toi.

Dans sa jeunesse, Karin savait qu'elle n'aurait pas réussi à pardonner à son père ses erreurs passées. Mais elle n'était plus une enfant et comprenait ce qu'on pouvait ressentir dans un telle situation. Elle-même n'aurait peut-être pas agi différemment de lui. Même s'il n'était pas resté avec elle, il avait vraiment aimé sa mère et ça lui suffisait.

Ichigo se disait avec surprise qu'il n'avait jamais vu son père aussi sérieux de toute sa vie. Quelle mouche l'avait piqué ? Mais il fallait en profiter tant que ça durerait, car comme on dit : chassez le naturel, il revient au galop.

Isshin se leva de son fauteuil et se dirigea vers sa fille qui ne pipait mot. Lui en voulait-elle ? Elle en aurait parfaitement le droit, après tout il les avait abandonnées. Donc quelle ne fut pas sa surprise de voir son enfant sauter dans ses bras en le serrant fort contre elle.

Karin comprit la question implicite que son père devait se poser donc elle s'écarta de lui, le visage mouillé de larmes, et dit sous le coup d'une émotion trop forte :

- Je te pardonne... Papa.

Deux heures après cette séquence très intense en émotion, Isshin avait retrouvé le comportement de grand gamin exaspérant qui était habituellement le sien, au grand plaisir de son fils – notez l'ironie. Une domestique avait apporté le thé et les petits gâteaux qu'elle avait posés sur la petite table, Orihime fit le service pendant que la servante se retirait.

Isshin savait qu'il énervait son fils mais son bonheur était tel qu'il voulait en faire profiter tout le monde. Pour le calmer une bonne fois pour toutes – ce qui voulait dire le temps de quelques minutes – Ichigo frappa son père avec un coup de poing bien senti.

Ça t'apprendra à faire le malin devant tes enfants, le vieux ! lâcha le roux, le poing fumant.

Karin ne put se retenir de rire devant la scène cocasse qui se jouait devant ses yeux ébahis.

- Dis, Orihime, chuchota-t-elle. Ils sont toujours comme ça ?

- Et encore, là ce n'est rien, lui apprit-elle en levant ses prunelles grises au plafond. Tu verras, ça peut être encore pire que ça...

Un souvenir particulier lui revint en mémoire, faisant naître sur ses lèvres un sourire amusé.

- Pourquoi tu souris ?

Juste un souvenir drôle, je vais t'expliquer : Ichigo était tellement énervé contre ton père qu'il l'a envoyé valser à l'autre bout de la pièce, lui expliqua-t-elle, une lueur de moquerie affectueuse dans ses yeux. Et quand ton père s'est relevé, il a recommencé de plus belle.

Les deux hommes continuaient de se chamailler comme des enfants : c'était à celui qui toucherait l'autre en premier.

- Ichigo en avait les cheveux qui se dressaient sur la tête, comme maintenant, lui montra-t-elle du doigt.

Karin pouffa devant le spectacle ridicule que lui donnait les deux hommes de sa famille. Avec un père et un frère comme ça, elle était bien mal embarquée.

- Ma famille... est vraiment... cinglée, souffla-t-elle en reprenant son souffle avec peine.

- Je ne te le fais pas dire, confirma Orihime en se levant. Bon, ça suffit tous les deux, fit-elle en frappant dans ses mains. Sinon, vous allez tacher le tapis avec votre sang.

- Je plains ton enfant d'avoir un père et un grand-père pareil, reprit Karin après que le calme soit revenu dans la pièce.

- On ne choisit pas sa famille, déclara la rousse d'un ton docte. Tu es bien placée pour le savoir...

- Ah ça, oui...

Ichigo et leur père reprirent place dans leurs fauteuils, le visage plein de pansements et de bosses.

- On se serait cru à la maternelle, railla Karin sur un ton narquois. Vous avez quel âge, tous les deux ?

Alors son frère et son père allaient s'indigner devant cette remarque injuste, quelqu'un frappa à la porte du salon.

- Entrez ! fit le chef de famille.

Un domestique entra dans la pièce et s'inclina devant son maître avant de lui tendre une lettre cachetée. Ce devait être le majordome, songea Karin.

- Un homme nous a apporté ça pour vous, Monsieur Isshin, révéla le majordome. Je me suis dis qu'il valait mieux que je vous le remette en main propre.

- Merci, Aoi, dit Isshin en prenant l'enveloppe.

Aoi s'inclina une nouvelle fois avant de se retirer et de fermer la porte derrière lui.

Tout le monde était intrigué par cette lettre venue de nulle part. Le roux se leva et se mit derrière son père, quelque chose lui disait que ça ne sentait pas bon.

- Regarde, Papa, elle n'a pas d'expéditeur, lui montra Ichigo.

Le visage d'Isshin se tendit, il avait un mauvais pressentiment. Après quelques minutes à observer l'enveloppe, le père Kurosaki se décida enfin à l'ouvrir et sortit la feuille. Ce qu'il lut le mit dans un colère noire.

Orihime n'avait jamais vu son beau-père aussi furieux et cela lui fit froid dans le dos. Elle posa son regard sur son mari et elle vit que ses yeux lançaient des éclairs.

Juste à côté d'elle, Karin sentit que l'atmosphère de la pièce s'était rafraîchie. Quelque chose de grave était en train de se produire sous ses yeux, elle en était certaine. Mais quoi ?

- Vous allez nous dire ce qui passe, à la fin ? s'énerva-t-elle.

Quand elle finit de parler, Ichigo leva les yeux vers elle et ce qu'elle vit ne lui plaisait pas, mais alors pas du tout.

- C'est une lettre de menace, révéla le roux en serrant les poings. Notre sœur a été enlevée.

Cette nouvelle fit l'effet d'une bombe dans toute la pièce. Karin s'effondra en larmes devant sa famille, impuissante. Voilà pourquoi Yuzu ne donnait plus de nouvelles, elle le comprenait maintenant. Mais pourquoi enlèverait-on sa sœur ? Ça n'avait aucun sens ! Et elle savait que son père et son frère en étaient venus à la même conclusion. Et ça faisait combien de temps ?

Devant la détresse visible de la jeune fille, Orihime sentit des gouttes affluer à ses yeux mais elle les retint avec force. La voir ainsi lui faisait beaucoup de mal et imaginer sa souffrance ainsi que celle de son mari et son beau-père l'achevait.

Lis-nous la lettre, ordonna Karin, prête à exploser de rage.

Voyant que son père était encore sous le choc de la nouvelle, Ichigo lui prit la feuille des mains et commença sa lecture en refrénant sa fureur :

- « Votre chère fille Yuzu est entre nos mains. Ne faites rien d'insensé ou nous n'hésiterons pas à la tuer. Faites attention à sa jumelle, un accident est si vite arrivé. Nous prendrons contact avec vous pour la rançon dans une prochaine lettre. Et faites attention, Le Diable n'est jamais loin. » Encore cette signature, grogna le roux.

- Pourquoi encore ? demanda Orihime d'une voix hachée.

- Le duc Hitsugaya a reçu une lettre de menace, la semaine dernière si je me souviens bien, et elle était signée de la même façon.

- Ces deux affaires seraient donc liées ? s'étonna le père des jumelles tout en consolant sa deuxième fille.

- C'est vraiment bizarre, tout ça, et ça ne me dit rien qui vaille, fit Ichigo d'une voix sombre.

Le fils Kurosaki frappa son poing violemment dans le mur en face de lui pour exorciser sa rage. Et en plus, Karin était en danger aussi ! C'était quoi ce délire ?

- Ichi-nii, il faut que je te dise un truc, articula faiblement la brune.

En se retournant vers elle, son aîné lui fit signe qu'il l'écoutait avec attention.

- Samedi de la semaine dernière, dans la nuit, j'ai senti une présence vraiment étrange. Mais je ne sais pas d'où elle venait. Je me suis sentie intensément observée et j'en ai encore des frissons.

- C'est pas vrai !

- Je t'en prie, essaie de te calmer mon fils, si tu t'énerves, ça ne fera qu'empirer les choses, le pria Isshin.

S'il te plaît, Ichigo, dit Orihime en le serrant contre elle. Fais-le pour nous.

Au prix de gros efforts sur lui-même, le jeune homme revint s'asseoir aux côtés de sa femme et sa sœur, toutes deux très éprouvées par cette bombe.

En tout cas, une chose était sûre : celui qui avait fait ça allait le payer très cher. Ichigo en faisait le serment tout en serrant les deux femmes de sa vie contre lui.

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