The Rescue's Hope

Chapitre 12

3047 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 19/11/2017 10:08

Shûhei, incrédule, tourna successivement son regard dilaté sur les dix personnes présentes autour de lui.

–  Vous vous foutez de moi, c’est ça ?

–  Nous ne connaissons aucune Tsunata, Hisagi, je t’assure, dit Rukia d’un air navré.

Il se mit à trembler nerveusement et haleta entre ses dents crispées, des gouttes de sueur dévalant une à une ses tempes contractées.

–  Dites-moi ce qui lui est arrivé !

–  T’es bouché ou quoi ? maugréa Renji. On te dit qu’on la connaît pas, ta gonzesse !

–  Bien sûr que si ! Une Shinigami à peine plus grande qu’Orihime Inoue, aux longs cheveux blond doré et aux yeux d’un vert troublant, toujours en train de sourire et de dire des « la ferme » à tout va !

–  C’est la femme parfaite que tu nous décris là ! railla Tetsuzaemon.

–  Quand je pense que tu t’es trouvé une petite-amie et que tu ne nous as rien dit ! s’offusqua Rangiku, les mains sur les hanches. C’est méchant, Shûhei ! Je pensais qu’on se disait tout ! T’as plutôt intérêt à nous la présenter dès que tu seras remis !

Cette fois, le ténébreux perdit patience et s’époumona :

–  Elle vous a sauvé la vie à plusieurs reprises, je vous signale ! Comment vous avez pu l’oublier ? C’est le Capitaine provisoire de la Troisième Division !

–  Tu sais très bien que c’est moi qui ait accepté ce rôle depuis la maladie du Capitaine Ôtoribashi, intervint Izuru.

En effet, le blond portait sur lui un haori blanc à manches longues et à l’intérieur teinté d’un bleu pâle ; mais ce qui interpela véritablement Shûhei fut d’une toute autre nature.

–  Maladie ? reprit-il.

–  Oui, confirma Sotaro, notre Capitaine est tombé dans un coma profond sans raison apparente, il y a plus de quatre mois, maintenant. Depuis, Kira-sensei a pris sa place.

–  Comment ça, Kira-sensei ? C’est Tsunata, ton maître d’apprentissage ! La sœur adoptive d’Akio, ton grand frère de Rukongai !

Sotaro arqua un sourcil.

–  Akio n’a jamais eu de sœur, Hisagi-san.

Les yeux hagards, le souffle anarchiquement entrecoupé, Shûhei saisit brusquement le kosode du Capitaine-Général et plongea son regard dans son œil gris étonné.

–  Commandant, dites-moi que vous vous en souvenez : vous l’appelez toujours « ma petite Tsunata-chan » ; c’est vous qui nous avez assignés à faire équipe ensemble l’hiver dernier et qui avez surnommé notre duo « le Shûnata » !

–  Le Shûnata, tu dis ? fit Shunsui. C’est ridicule comme nom.

Shûhei, interdit, lâcha soudainement sa prise sur le Shinigami borgne.

–  Tu as peut-être eu une commotion, suggéra Isane, ou alors le poison fait encore son effet, mais cette jeune femme n’est rien de plus que le fruit de ton imagination, Hisagi-san.

Ce fut la goutte de trop : le ténébreux arracha rageusement les fils reliés à son corps, chassa le drap blanc qui le couvrait et s’extirpa du lit médical.

–  Qu’est-ce que tu fous, Hisagi ? demanda Renji d’un air las.

–  Tiens-toi tranquille, pour l’amour du ciel ! siffla Kensei.

–  Laissez-moi passer ! Il faut que je la retrouve !

–  C’est absurde, Vice-Capitaine Hisagi ! tenta de le raisonner Kiyone. Vous n’êtes même pas guéri !

–  Poussez-vous de mon chemin !

–  Il n’en est pas question, mon vieux : tu n’iras nulle part !

Les Capitaines Iba, Kotetsu, Muguruma, et la Vice-Capitaine de la Quatrième Division firent de leur mieux pour le retenir ; Izuru et Sotaro, quant à eux, observèrent la scène en retrait, incrédules.

–  Laissez-le partir, commanda le blond.

Ils se tournèrent vers lui.

–  Qu’est-ce que tu dis, Kira ? demanda Kensei.

–  Je vous dis de le laisser y aller. Faites-moi confiance.

Après un temps d’hébétude la plus complète, ils finirent par s’exécuter. Shûhei lança à son meilleur ami un regard que celui-ci savait reconnaissant, puis s’enfuit sans plus de cérémonie.

Rangiku considéra les deux de la Division du désespoir avec intérêt, avant de diriger son regard sur la sortie que le brun venait d’emprunter pour disparaître.

–  Il est à ce point en manque de nana ? questionna Tetsuzaemon.

–  Je ne pense pas qu’il s’agisse de ça, avoua Izuru.

***

Courant à en perdre haleine malgré les nombreuses mises en garde de son corps affaibli, Shûhei traversa de part et d’autre le Seireitei. Il évita soigneusement les soldats des Treize Armées sur son passage, martelant le sol de ses pieds nus sans même se soucier de son environnement, son crâne oppressé par les derniers événements.

Comment pouvaient-ils avoir tous oublié Tsunata ? C’était impossible, Shûhei savait pertinemment qu’elle n’était pas la création de son esprit adroit, et ce même si elle représentait tout ce qu’il avait toujours désiré chez une femme, et qu’il éprouvait pour elle un sentiment des plus purs qu’il soit, si doux et si puissant que même le mot « amour » semblait une injure à son encontre. Tous ces moments délicieux partagés ensemble, toutes les fois où il avait rêvé d’elle tandis qu’il luttait pour ne pas l’approcher et ainsi ne plus représenter une gêne pour elle, tous ces sourires qui lui avaient été offerts, et toutes les fois où elle avait prononcé son nom de sa voix semblable aux jours d’été… Il devait la retrouver : de la sorte, tous seraient forcés de reconnaître son existence, et de se souvenir d’elle.

Le premier lieu vers lequel le ténébreux se rendit fut celui où il était logique d’aller chercher la preuve que Tsunata était réelle : chez elle. Ainsi, lorsqu’il arriva dans la rue où se trouvaient ses appartements, il accéléra encore ; quelle ne fut pas sa surprise quand, arrivant devant la porte de son petit logis, il trouva celle-ci condamnée par de nombreuses planches craquelées et moisies par le temps. Le cœur tambourinant douloureusement contre ses côtes, il perdit contenance et mit un coup de pied brutal dans ce qui lui barrait le passage. Une fois l’ouverture faite, Shûhei s’étrangla : outre la poussière qui ravageait la fenêtre par laquelle Tsunata aimait observer les étoiles lorsqu’elle était allongée de tout son long sur son lit occidental, il ne trouva rien de plus qu’une grande pièce vide. La petite cuisine que la blonde s’était aménagée avait elle aussi disparue. Son parfum sucré dont il adorait se délecter était substitué par une odeur désagréable de renfermé. Plus rien ne laissait présumer son passage ici-même. Pourtant, le doute n’était pas permis : il connaissait trop l’endroit pour s’être trompé.

Tremblant de toute part, il hurla en cause de désespoir :

–  Tsunata !

Seul un silence morbide lui répondit. Il entra dans l’appartement, se dirigea vers la salle de bain, défonça la porte et constata à son plus grand damne que personne ne s’y trouvait. Il poussa un grognement sonore et ne s’attarda pas davantage, décidé à la retrouver au plus vite. Il entreprit ainsi le chemin menant à la fontaine du Seireitei, celle-là même qui représentait tant dans leur relation et qui avait vu naître, petit à petit, leur complicité.

Après un quart d’heure de course rythmée par divers shunpo, tandis que la fatigue commençait à le submerger, il arriva enfin sur le lieu de sa convoitise. La déception n’en fut que plus grande : sa jolie coéquipière aux longs cheveux dorés ne s’y trouvait pas non plus. Ni une ni deux, ne s’accordant pas même une minute pour reprendre son souffle, il repartit de plus belle vers l’endroit que la jeune femme affectionnait tant pour leurs soirées de détente après quelques missions rondement menées, celui que tous deux s’accordaient à appeler « La Plaine ».

Comme auparavant, il trouva le paysage désert, sans la moindre trace du passage de l’ancienne étudiante ; pire encore, la couverture vichy qu’elle laissait là pour leurs pique-niques improvisés s’était elle aussi évaporée. Shûhei haletait, l’émotion gagnant peu à peu ses yeux argentés, une angoisse sans précédent lui nouant l’estomac. Cet endroit si merveilleux se révélait à la limite du chaotique lorsque Tsunata ne s’y trouvait pas pour l’ensoleiller de sa présence, et ne s’apparentait à présent plus qu’à un cimetière de souvenirs. Le jeune homme ne put que s’égosiller une fois de plus en appelant sa raison d’être disparue.

C’est alors qu’il songea au dernier endroit où il n’avait pas encore été la chercher, un lieu où la Shinigami ne se rendait que rarement, mais qu’elle semblait apprécier plus encore que son doux foyer. Shûhei ne perdit pas une seconde de plus et se hâta là où son dernier espoir résidait.

Il arriva enfin dans les quartiers de la Neuvième Division, où bon nombre de ses subalternes le saluèrent sur son passage et s’inquiétèrent de le voir détaler de la sorte après un choc si violent. La seule fois où Shûhei prit le temps de s’interrompre pour leur adresser la parole, ce ne fut pas pour leur répondre mais bien s’enquérir de savoir s’ils avaient vu ou non sa coéquipière ; confronté aux mêmes regards interdits que lors de son réveil dans l’unité médicale, il en fit une brève description ; tous s’accordèrent sur le fait que, de leur vie, jamais ils n’avaient croisé une telle jeune femme, et que s’il en avait été question, ils s’en souviendraient sans le moindre doute. Le ténébreux comprit donc que compter sur les autres était peine perdue, aussi reprit-il sa course folle sans même se retourner.

***

Posté devant la porte de sa garçonnière, il hésita longuement à en découvrir l’intérieur, trop angoissé à l’idée de le voir vide, désolé de toutes traces de la Shinigami qu’il cherchait sans relâche.

Il s’y résolut néanmoins et, comme si une force mystérieuse guidait sa main, poussa le panneau de bois qui lui faisait barrage. Comme il s’en était douté, Tsunata ne s’y trouvait pas, encore une fois. A court d’idées sur l’endroit où elle pouvait bien se cacher, et épuisé par son activité physique poussée alors même qu’il était en pleine convalescence, il s’écroula lourdement sur les genoux, le regard perdu. Il sonda son esprit embrumé à toute allure ; il revit alors la scène de leur rencontre, se remémora la douceur de sa peau, la chaleur de son souffle, la fraîcheur de ses larmes de cristal, le son de son rire ensoleillé, ses chamailleries avec le rouquin de Karakura, ses rougeurs lorsque Shûhei s’approchait trop d’elle, le goût des plats qu’elle lui préparait spécialement avec entrain, le regard plein d’admiration qu’elle lui accordait lorsqu’il se mettait à jouer piètrement quelques notes avec sa guitare, les nombreuses étreintes qu’elle lui avait offertes, le contact de ses lèvres sur son front ou sa joue marquée de cicatrices…

Shûhei plaqua sa main contre son visage et se laissa submerger par le désespoir. Que se passait-il ? Pourquoi Tsunata avait disparu et, pire encore, pourquoi était-il le seul à se souvenir de tous les détails qui faisaient d’elle la personne la plus importante de sa vie ? Pourquoi aucun autre ne connaissait ce nom qui avait tant fait pour eux ? Ce ne pouvait être une chimère de son imagination débordante, c’était impossible : jamais il n’aurait pu créer toutes ces choses, qui plus est en un laps de temps si restreint !

Ou alors, peut-être que si. Dans ce cas, la vie n’avait plus de sens pour lui. Si Tsunata n’avait jamais existé, alors plus rien ne valait la peine d’être vécu. Si elle n’était qu’une illusion, alors il voulait retourner dans ce monde fictif qu’il avait construit autour de son existence. Ce que Shûhei voulait, c’était Tsunata, et rien d’autre.

C’est alors qu’un rayon venu de l’extérieur pénétra dans sa modeste chambre et frappa un objet métallique à proximité du futon du jeune homme. Aveuglé par l’éclat éblouissant qui passait entre ses doigts, il interrompit ses sanglots bruyants et y dirigea son attention ; son cœur marqua un arrêt semblable à celui de sa respiration lorsqu’il en définit les contours.

–  Qu’est-ce que…

Il se redressa subitement et, en trois enjambées, fut au niveau de sa couchette traditionnelle. Il se jeta à genoux, puis détailla longuement l’objet d’un regard empreint de convoitise. Tandis que ses larmes ruisselèrent silencieusement le long de ses joues hâlées, il guida sa main avec hésitation et frôla du bout des doigts ce qu’il pensait être un mirage ; cependant, le contact lisse et froid qu’il ressentit le convainquit qu’il s’agissait là bel et bien de la réalité. Il arracha aussitôt ce qui avait visiblement glissé partiellement sous son futon par il-ne-savait-quelle magie, et le souleva pour mieux l’observer.

–  Je le savais !

Le Vice-Capitaine tenait entre ses doigts une chaîne argentée d’une finesse qu’il connaissait bien, au milieu de laquelle pendait une boule d’acier attachée à un œillet, sur lequel trônaient trois caractères qu’il pouvait écrire les yeux fermés, ceux qui formaient à eux trois le prénom de Tsunata.

Cependant, un détail le tint en haleine : jamais de sa vie la jeune femme n’avait enlevé ce collier qui lui était cher, pour la simple et bonne raison que la chaîne ne possédait aucune attache et qu’elle ne pouvait, par conséquent, pas la retirer. Ce bijou, qu’il associait sans raison à Tetsuribon, faisait partie intégrante de sa coéquipière.

Pourquoi était-il chez Shûhei ? Pourquoi était-il cassé ? Et où était sa propriétaire ? Tandis qu’il se posait toutes ces questions, trois présences apparurent dans l’encadrement de sa porte.

–  Hisagi ?

Shûhei sursauta, les joues toujours inondées de ses larmes, la lueur du collier reflétant dans ses yeux argentés interloqués.

–  Kira ? Rangiku ? Sotaro ?

Les trois l’observèrent avec intérêt pendant que le jeune homme essuyait d’un revers de bras son visage ruisselant.

–  Tu devrais t’habiller, suggéra Izuru.

–  Pourquoi ?

–  Tous les quatre, on va dans le monde des humains, annonça Rangiku.

Le brun les considéra à tour de rôle.

–  Je ne peux pas, je dois retrouver…

–  Tsunata, l’interrompit son meilleur ami, c’est ça ?

Les mâchoires du Vice-Capitaine de la Division de l’oubli se crispèrent.

–  J’ai la preuve qu’elle existe ! J’ai la preuve que Tsunata est bien réelle !

C’est alors qu’il brandit devant eux le bijou de sa coéquipière, et que celui-ci s’imprégna davantage de la lumière du soleil. La même expression prit possession des visages d’Izuru, Rangiku et Sotaro : celle de l’incrédulité.

Puis, le blond retrouva son sérieux et dit :

–  Elle a le parfum sucré des cochonneries qu’elle mange toute la journée, et est aussi lunatique que peut l’être Ichigo Kurosaki. Malgré ça, elle a le cœur sur la main et redonne espoir à ceux qu’elle croise par son simple sourire. Ce collier que tu tiens là, c’est le sien et, d’ordinaire, elle ne le quitte jamais.

–  Tu te souviens d’elle ? s’enquit le ténébreux.

–  Comme s’il s’agissait du vague souvenir d’un rêve lointain. Mais s’il y a une chose dont je suis persuadé, c’est que de ma vie, jamais je n’ai souhaité être Capitaine, que ce soit de façon officielle ou momentanée. Ce que je veux dire par là, c’est que je te crois, Hisagi.

–  On te croit, appuya Rangiku. Tsunata est notre amie, et ce depuis le jour où elle a foulé pour la première fois le sol de la Soul Society.

–  Il faut retrouver sensei, et au plus vite !

Shûhei les observa silencieusement, abasourdi par ce vif retournement de situation. Un rictus victorieux étira discrètement le coin de ses lèvres ; il se dressa de toute sa hauteur et déclara d’un ton déterminé :

–  On n’a pas une seconde à perdre.




Laisser un commentaire ?