Inconnue au bataillon

Chapitre 6

1258 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 14/06/2018 08:50

Lucie fut réveillée par une odeur de café. Elle ouvrit un œil et vit qu'elle était toujours à l'hôpital. Pourquoi y avait-il donc une telle odeur dans la chambre d'un malade ? Elle leva la tête, sentant tous les muscles de son cou et de son dos se plaindre de la position dans laquelle elle avait dormi. Caïn était là. Il sirotait un café avec une deuxième tasse sur les genoux à côté d'un sachet sortie tout droit d'une boulangerie. Il la regardait en souriant puis baissa le regard. Lucie fit de même et vit qu'elle avait entrelacé ses doigts à ceux d'Alice, pourtant elle ne la lâcha pas tout de suite. Elle se souvenait lui avoir parler en rêve. Elle l'avait imaginé bienveillante et franche.


  • Bien dormi ?, lui demanda Caïn en lui tendant un café.


Il n'y avait pas de jugement dans sa voix. C'était une simple question. Lucie dut utiliser ses deux mains pour prendre la tasse. Il lui proposa aussi le sachet de viennoiseries en prenant un croissant. Avait-il pris cela pour lui seul et était par hasard tombé sur elle ? Mais il y avait deux cafés. Il avait su, donc. Était-ce par instinct ou après avoir demandé au garde ? Delambre connaissait déjà la réponse.


Ils mangèrent ensemble avant de partir pour le SRPJ. Là-bas ils ne trouvèrent évidement rien de nouveau mais avant 11 heure, Borel les appelait. Il avait trouvé l'hôtel où Alice restait. Il leur envoyait l'adresse et leur ferait un rapport plus complet sur place. Quand elle s'assit dans la décapotable jaune, la commandante avait retrouvé le sourire. Caïn aussi était plutôt content que l'enquête avance enfin. Si Borel les faisait venir ce n'est pas pour leur dire qu'il n'avait rien.


L'hôtel se situait face à une grande surface. Caïn se gara sur le parking de celle-ci. Les emplacements pour voitures de l'hôtel étaient gardés par un portail. Borel les attendait sur le trottoir. Il les salua d'un signe de tête mais commença sans délai.


  • La grande clé servait à ouvrir le garage mais il est resté vide. Alice a loué ici sous le nom de Marie Durand, le réceptionniste n'a exigé aucune pièce d’identité, et évidement après vérification aucune Marie Durand ne correspond à son signalement. La clé moyenne ouvre la porte de sa chambre, et c'est là que les choses deviennent intéressantes.
  • Expliquez-vous Borel.
  • Non. Le mieux est encore que je vous montre.


Effectivement en ouvrant la porte ils n'eurent plus aucune question quant à ce qu'entendait le lieutenant.


  • La photo était visiblement un véritable hobby.


Un mur entier était couvert de clichés.


  • Le plus important, capitaine, reste ce qu'elle représente.


En s'approchant Caïn en resta bouche bée. Lucie arriva derrière lui et eut peu ou prou la même réaction. Les photos s'organisaient en plusieurs îlots mais le groupe central leur suffisait amplement. Il n'y avait qu'une seule personne sur les photos au centre du mur. Caïn. Caïn au SRPJ, dans la rue, chez lui, en enquête, partout. Les îlots périphériques montraient Lucie, Borel, Legrand, la tombe de Moretti, il y avait même quelques clichés de Gaëlle.


  • Elle fait carrément une fixation sur vous, déclara Delambre.
  • Alice répertorie toutes vos enquêtes, les lieux que vous fréquentez, les personnes que vous voyez … et ça depuis deux semaines. Soit quand elle a pris cette chambre. Pour l'instant il est toujours impossible de savoir si c'est à ce moment qu'elle est arrivée à Marseille où si elle résidait ailleurs avant.
  • Dans ses affaires j'ai trouvé un historique presque complet de vos anciennes affaires et un carnet dans lequel elle conservait de nombreux témoignages, ajouta Legrand en tendant le-dit objet au capitaine. Mais je n'ai rien retrouvé qui nous soit d'aucune aide sur son identité ou elle-même. Le seul objet personnel que j'ai pu trouver c'est une brosse à dents.
  • Et ce carnet, il dit quoi ?
  • Visiblement il s'agit d'une complication de choses qu'auraient fait un flic ripoux. Les événements sont parfois datés mais souvent ce n'est qu'une année.
  • Un exemple ?
  • 2001. Alors qu'il avait arrêté un toxicomane qu'il avait tué sa copine et qui se cachait au Nuit Blanche la matin-même, il est venu le soir sniffer des rails de coke avec les dealers se son coupable. Une semaine après il a grièvement blessé un mauvais payeur sur ordre d'un …
  • Arrêtez. C'est bon, je vois le topo. Pas de nom ?
  • Non. Toujours « il », répondit Delambre.
  • Vas voir à la fin, lui conseilla Legrand.


Lucie fit ce qu'il lui disait et s'arrêta plusieurs instants sur la dernière page. Elle regarda Legrand, puis Caïn. Quand elle retourna les pages vers eux, tous purent lire en lettres capitales : FREDERIC CAÏN. Cela parut tous leur faire de l'effet, sauf au principal concerné qui déclara avec nonchalance.


  • Oui merci, je m'étais reconnu. Qui qu'elle soit, Alice ne m'avait donc pas dans son cœur. Elle vient à Marseille, sûrement pour me faire tomber mais au lieu de ça, c'est elle qui se fait tirer dessus. Étrange. Delambre passez-moi le carnet.
  • Pourquoi ?
  • Il pourrait nous être utile de savoir si Alice avait un ou plusieurs informateurs et, si possible de savoir qui ils sont. Cela nous aidera peut-être à comprendre pourquoi elle ne s'est mis en mouvement que récemment alors que tout ce qu'elle a pu trouver doit être vieux d'au moins 10 ans.
  • Cette histoire ne vous inquiète pas plus que cela ?, s'enquit Borel.
  • Pour l'instant mon seul soucis c'est que j'ai une victime entre la vie et la mort et que je ne sais pas qui elle est, pourquoi on a voulu la tuer et qui, répliqua Caïn en prenant le carnet. Vous finissez de me fouiller tout ça et je veux un rapport complet cette après-midi.


Avant que l'un de ses lieutenants n'ait pu répondre quoi que ce soit, Caïn était sorti. Lucie le suivit de loin jusqu'à sa voiture avant de s'installer à ses côtés. Il ne lui accorda pas un regard pas un regard. Il feuilletait les pages, s'arrêtant ça et là pour en lire quelques lignes. Finalement il parvint lui aussi jusqu'à la dernière page, là où son nom était inscrit en toutes lettres.


  • Fred, ça va ?
  • Pourquoi ça n'irait pas ? Quel que soit ce qu'elle me voulait, je n'apprendrais rien de nouveau tant qu'elle ne sera pas réveillée. Pour l'instant je ne crains rien et puis c'est toi qui t'es épris de notre petite Alice sans même la connaître.


Delambre fut presque embarrassée de sa remarque et de ce qu'il insinuait mais elle connaissait Caïn depuis trop longtemps pour le laisser mettre un point final à leur conversation par la gêne.


  • Avec ce qu'elle a sur toi, elle pourrait te faire définitivement tomber une fois réveillée.
  • Et je devrais lui en vouloir ?
  • Les intérêts personnels pourraient desservir ton investissement dans l'enquête.
  • Alice est une victime comme les autres et puis si elle voulait me mettre en faute pour ce que j'ai fait par le passé … elle aurait totalement raison.   


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