Partenaire

Chapitre 6

1105 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 28/07/2018 11:07

Alice n'avait pas protesté mais Caïn avait tout de même assuré qu'il passerait la journée avec elle. Jusque là il n'avait pas menti. Au début, Lucie était restée pour parler avec Alice. Elles discutèrent de tout et de rien et Caïn prit la mesure de l'ampleur de ce qu'il avait manqué entre les deux femmes. Alice paraissait connaître personnellement la mère et le beau-père de Lucie tandis que cette dernière demandait chaudement des nouvelles de Félix, l'ami juge d'Alice. C'est ainsi que le capitaine apprit que Félix Duval était le meilleur ami de sa lieutenante et qu'à l'annonce de son séjour prolongé à Marseille il avait lui-même demandé sa mutation ici.


Caïn ne dit rien mais il tendit l'oreille pour saisir tout sous-entendu qui ferait avancer son enquête. Cela avait l'avantage de le garder occupé mais même si elles ne laissaient rien paraître, Lucie comme Alice devaient restées conscientes de sa présence car aucune information valable ne filtra entre les lignes. Et puis Lucie partit et ils se retrouvèrent tous les deux. Caïn hésita longuement. Il mourrait d'envie de parler à Alice de la scène à laquelle il venait d'assister sans oser car il ne savait pas bien comment il pourrait justifier son intérêt.


  • Quelque chose te tracasse Fred ?
  • On peut dire ça comme ça, commença Caïn mais sous le regard d'Alice il continua. Comment connais-tu tant de choses sur Lucie ?
  • Parce qu'elle me les a dit, lui répondit simplement Alice.


Caïn eut attendu qu'elle développe un peu mais après avoir dit cela elle le fixa avec un sourire mais ne dit rien de plus. Le capitaine aurait voulu continuer à lui parler de Lucie, c'était malheureusement impossible sans avoir l'air suspect mais lui vint une autre questionnement.


  • Pourquoi les gens te parle ?
  • Qu'est-ce que tu veux dire ? Les gens se parlent entre eux, discutent, c'est normal.
  • Les gens te disent des choses les concernant. Plusieurs fois j'ai vu des suspects se confier à toi alors même que tu es de la police.
  • Peut-être est-ce que j'inspire confiance, tenta Alice visiblement amusée par la question de Caïn.
  • Non pas plus que n'importe quelle autre jeune femme et personne n'a jamais fait ça avec Lucie. Toi c'est parce que tu es franche mais communicante. Tu dis ce que tu penses sans juger. Je suis sûr que Lucie t'a raconté quelques uns de ses secrets les plus croustillants.
  • Il ne t'est pas venu à l'idée que si elle le faisait c'est justement parce qu'elle sait que je ne dirais jamais rien. Même si un suspect venait à se confier à moi sur quelques chose qui ne concerne pas l'enquête et qui n'est pas juridiquement répréhensible, je garderais son secret alors pour Lucie … Les gens aiment pouvoir parler librement, se décharger d'un fardeau en sachant que je ne répéterais rien.
  • Le gentil flic muet comme une tombe, ironisa Caïn.
  • Ça te dérange tant que ça que je sache des choses à propos de Lucie ? Tu en saurais autant que moi si tu t'en donnais la peine. Ou alors il te plaît tant que ça le rôle de méchant flic ?
  • Ça a toujours été mon rôle de prédilection. Lorsque j'ai commencé ma carrière j'étais en duo avec un ami à moi, Jacques Moretti. Il faisait toujours le bon flic et moi j'excellais dans l'art du mauvais flic. Parfois on changeait. À l'époque je pouvais encore choisir : la jouer gros dur, dragueur, casanier ou réglo.
  • Bon flic ou mauvais flic.
  • C'est ça. Maintenant dès que les gens me voient ils me cataloguent. Je n'ai pas joué ma première réplique que déjà je suis « le flic handicapé ».
  • Tu en joues énormément.
  • Me laissent-ils le choix ? Et puis autant prendre un maximum d'avance avant qu'ils ne voient à qui ils ont réellement affaire. Mais ce n'est pas ça qui compte. En fauteuil la première chose sur laquelle se base les gens, c'est le handicap. Tout ce que tu montres ensuite ne fait que se rajouter à ça.
  • Tout le monde n'est pas comme ça.
  • La plupart des bipèdes en tout cas.
  • Qu'importe si ce sont ceux qui compte qui te voient comme tu es.
  • Lucie et Nassim ne m'ont pas connu avant mon accident. Le fauteuil y a été pour beaucoup dans ma séparation avec Gaëlle. Et pour Ben … je préfère ne même pas en parler.
  • Vraiment ? Oses-tu dire que ceux qui t'ont rencontré après le fauteuil ne te connaisse pas vraiment ?
  • Non ce n'est pas ce que …
  • Alors ? Pour les autres c'est pareil, enfin pour ton ex-femme peut-être y avait-il autre chose mais ton fils …Le problème ce n'est pas le fauteuil, c'est toi. Je suis certaine que tu as été infernal avec lui en lui répétant qu'avec des jambes tu aurais pu être un meilleur père. Qu'est-ce qu'il s'en fout, ton fils, des roues que tu as scotché au cul. C'est la façon dont toi tu te dénigres qui a fait de toi un mauvais père, si tant est que c'est ce que tu as été.


Même clouée dans un lit d'hôpital, après avoir frôlé la mort, elle lui donnait toujours des leçons. Elle était galvanisante si bien que lorsqu'elle changea totalement de sujet en lui demandant justement de lui parler de Ben, il se laissa faire et décrivit son fils en long, en large et en travers. Il commença du tout début et Alice écouta alors qu'il racontait comment Gaëlle le lui avait annoncé et le jour de l'accouchement sans lui épargner ni les détails de la grossesse ni de la nuit à la maternité. Toute la vie de Ben y passa sauf les moments de l'enquête mais Alice avait lu le dossier.


Elle le regardait déballer la vie de son fils avec une telle fierté qu'elle en faisait chaud au cœur. Ses yeux pétillaient et ses bras venaient ponctués chacune de ses histoires. Alice n'avait jamais vu le capitaine parler autant, elle en aurait presque rit à l'aune de la question qui avait tout débuté. À aucun moment Alice ne l'interrompit alors qu'elle voyait quasiment Ben grandir sous ses yeux.  


Laisser un commentaire ?