Yes or No ?

Chapitre 37 : Moins plus moins égal plus

5510 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 02/08/2022 16:13

(C'est ici que l'histoire rejoint mon autre fanfiction sur City Hunter, une de mes premières : "Pagne, Porte-Jarretelle et Magnum 357". Ce que nos tourtereaux aperçoivent n'est autre que la scène du chapitre 19. Pour celles et ceux qui seraient intéressés par cette histoire : Pagne, Porte-jarretelle et Magnum 357, une fanfiction City Hunter (Nicky Larson) (fanfictions.fr) Bonne lecture ^^)


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Chapitre 37 :  Moins plus moins égal plus


- "Je pense que je suis en droit d'exiger une explication ?" Répéta-t-il.

- "Je ..."

- "Ne commence pas à triturer tes doigts ou à faire l'autruche, Kazue. Tu as intérêt à me dire franchement pourquoi tu aurais répondu non à ma demande en mariage." 


Son ton était froid, net, précis. Impersonnel. Sans âme.


Je baissai alors les yeux sur mes mains et serrai fort les poings pour retenir ma petite manie habituelle. Je ne savais pas par où commencer. Moi qui, quelques heures plus tôt avais eu besoin de temps pour réfléchir, je n'en avais plus du tout. 


Devant mon mutisme, Mick m'invectiva, laissant filtrer son indignation :

- "Alors ? Pourquoi ? C'est parce que je ne suis pas assez bien ? Tu ne veux pas d'un comptable faussaire et tatoueur ? Ou parce que, finalement, le repris de justice, c'est bien pour s'envoyer en l'air et te faire jouir mais pas pour vivre avec ? Hein ? C'est quoi le truc ? Tu t'es rendue compte que tu ne m'aimes pas assez ?"

- "Ça va pas la tête !!! Ce n'est pas parce que je ne t'aime pas que je ne veux pas me marier !" 


Mick se leva d'un bond et se tourna vivement vers moi pour me crier :

- "Pourtant tu l'as envisagé avec Shinishi. Pourquoi as- tu eu envie de l'épouser, LUI ? Qu'est-ce qu'il avait de plus ?" 


Je m'exclamai :

- "Rien ! Il n'avait absolument rien de plus ! C'est moi qui suis différente !"


Je levai les yeux vers lui avant de poursuivre d'une voix plus calme :

- "J'étais encore naïve et il était mon premier amour. Nous marier paraissait logique : diplôme, mariage, bon boulot, famille. Et voilà, l'avenir semblait tout tracé, pas besoin de chercher plus loin. Mais, j'ai grandi, il est mort, j'ai changé ... Et ..."


Mick m'interrompit, tapant du pied :

- "Et ? Et quoi ? Putain ! J'en ai marre, Kazue ! Arrête de me regarder avec ces yeux de merlan frit, ça m'énerve ! Toi, tu m'as fait une scène quand Kaori est venue vivre ici mais moi, je dois vivre avec lui  alors que Kaori, elle, est repartie chez elle ! Toi, tu gardes tous ses cadeaux comme des joyaux inestimables : la boîte en carton dans ton placard, les disques qu'il t'a offerts, et si je n'avais rien dit, ta robe blanche serait encore dans NOTRE dressing ! Je dois me battre contre un fantôme et je ne peux pas gagner contre un fantôme !"

- "Mais ..." Je restai un moment muette, abasourdie puis j'explosai : "Mais tu n'as pas à te battre ! Vous êtes totalement différents ! Tout n'était pas rose tous les jours, tu sais, et il avait des défauts. Il était tellement tête en l'air qu'il oubliait parfois mon anniversaire et il ne voyait jamais quand je sortais de chez le coiffeur. Une fois, il était tellement obnubilé par son travail qu'il n'est pas venu à notre rendez-vous et j'ai poireauté toute seule au restaurant pendant deux heures ! Mais ... Mais quand on travaillait ensemble, c'était quelque chose de très particulier et on se comprenait sans se parler. Alors, tu vois, c'était tout le contraire de toi. Tu ne peux pas être jaloux de mon passé !"

- "Ah, et pourquoi donc ?"

- "Parce que c'est ridicule !"

- "Et pourquoi est-ce que je ne pourrais pas être jaloux de ton ancien fiancé ?"


J'explosai :

- "Parce qu'il est mort, idiot ! MORT !"


Il se pencha vers moi, me fusillant du regard :

- "Et alors ? Avec lui, tu envisageais un avenir mais pas avec moi ? Pourquoi ?  Pourquoi ?"

- "Je n'ai jamais dit que je n'envisageais pas d'avenir avec toi ! Ce n'est pas parce que je n'ai pas envie de me marier qu'il n'y a pas d'avenir !"

- "Ah bon ? Alors pourquoi tu ne veux pas te marier avec moi ? Hein, pourquoi pas MOI ?" hurla-t-il.


Sa rage me contamina et je lui criai en retour, le singeant :

- " "Pas moi, pas moi" ! On dirait un sale gosse capricieux ! Je comprends que tu sois vexé mais tu ne peux pas continuellement te mesurer avec lui et être jaloux de mon passé. Et moi ? Qu'est-ce que je devrais dire, moi ?"


Son visage se ferma soudain pendant que je lui lançai d'une voix forte et chargée de colère :

- "Combien de femmes ont déjà eu droit à ton numéro de charme, à tes baisers, à tes caresses ? Combien ? A combien d'autres femmes que moi as-tu murmuré des trucs à l'oreille ? Combien as-tu plaquées contre un mur, combien as-tu attachées avec une cravate ? A combien d'autres femmes as-tu fait ce que nous avons fait tout à l'heure ? Tu crois que je n'y pense jamais ? Tu crois que ça ne me fend pas le cœur à moi aussi ? Tu crois que je ne devine pas que tu ne sais même pas me répondre tellement il y en a eues ? Alors ? Je dis quoi, moi ?"


Il resta silencieux et je poursuivis, rageuse cette fois :

- "Alors, Monsieur Angel ? Rien à dire ? Je suis jalouse moi aussi. Mais être jalouse de ton passé ne me mènerait à rien. Et Shinishi fait partie de moi. Il était là pendant mes études, il m'a soutenue, il a compté, il m'a aimée et je l'ai aimé. Ce n'était pas un coup d'un soir. Il m'a aidée à me construire. On allait se marier, oui, et il a été tué. Fin de l'histoire. Et je ne vais pas jeter ces souvenirs à la poubelle parce que tu es jaloux de mon passé. Kaori compte pour toi et je ne t'interdis pas de la voir ou de lui parler ! Tu lui as même donné ton porte-bonheur alors, ne me demande pas de me débarrasser de Shinishi !!!" 


Je pris une grande inspiration et je repris, calmement cette fois :  

- "Et sans lui, on ne serait peut-être pas ensemble."


Il me regarda, impassible et toujours aussi silencieux :

- "C'est grâce à ses recherches que tu peux à nouveau utiliser tes mains. Je me suis inspirée de son étude pour mettre au point le sérum. Ta motricité, c'est un travail d'équipe entre Shinishi et moi."


Il regarda ses mains, les ouvrit et les referma plusieurs fois. Il soupira et vint s'asseoir à côté de moi, nerveux :

- "Je ne comprends toujours pas. Alors, c'est quoi ? Tu as honte de moi ? Je ferai tache au repas de famille ? Ou alors auprès de tes copines ?"


Le moment de me défendre était venu et comme je ne savais pas par quoi commencer, je me jetai la tête la première dans les arguments qu'il m'offrait :

- "Honte de quoi ? Je n'ai pas honte de toi ! Je n'aurais jamais honte de toi. Alors, en ce qui concerne le repas de famille, mon père aura peut-être du mal à accepter un étranger, surtout un Américain mais, non, ce n'est pas ça qui ferait renoncer à toi ! Et mes copines ? Alors, parlons-en des mes copines" 


J'énumérai sur mes doigts, sentant ma jalousie maladive prendre le dessus sur mes hésitations : 

- "Naoko et Himika t'ont vu nu en te faisant la toilette pendant plus de deux mois, Ayo Sakamoto, tu lui fais le baise-main et tu lui offres des roses, Kaori, tu étais fou amoureux d'elle, Reïka t'a embrassé sur la joue, dragué et maté les fesses et je tiens de source sûre que tu as fais des avances à Saeko au mariage de Miki ... Bon, reste juste Miki avec qui tu es resté correct, peut-être que Falcon te fait flipper, j'en sais rien, mais je me dis que ça viendra aussi ... Donc, côté copines, c'est plutôt moi qui devrais m'inquiéter ..."


Il baissa la tête :

- "Je t'ai déjà dit que j'étais un dragueur. Ca ne veut pas dire que je vais sauter sur tout ce qui bouge et qui porte une jupe. Enfin, correction : ça ne veut pas dire que j'ai envie de concrétiser. Mais justement, je pensais que nous marier te rassurerait sur ce point."

- "Parce que, porter une alliance t'empêcherait de mettre le nez dans des décolletés autres que le mien ?"

- "Non, mais je suis quelqu'un qui respecte ses promesses et ses engagements, tu le sais. Et je serai un mari fidèle." Me répondit-il très sérieusement.


Je m'écriai :

- "Mais je ne veux pas que tu restes avec moi parce que tu l'as promis mais parce que tu en as envie ! Pas par obligation ou un truc du genre qui te rendrait prisonnier ou attaché à moi. Ah, ça, non ! Tu es un homme libre, Mick Angel. Je suis jalouse et possessive, je le reconnais et j'aurais du mal à changer mais je ne veux pas que tu restes avec moi juste pour tenir une promesse idiote !"


Il me dévisagea :

- "Bah ... Je pensais que c'était le but du mariage, non ? Se promettre de rester ensemble ?"

- "Mais c'est trop tôt ! Comment peux-tu être sûr que tu veux rester avec moi jusqu'à la fin de ta vie ? On n’est ensemble que depuis deux mois !"

- "Heuu... Un peu plus quand même." M'interrompit-il. "Ca fait deux mois, trois semaines et deux jours ..."


Je sentis ma mâchoire lâcher sous la surprise :

- "Tu ... ? Tu comptes ... ? Tu comptes les jours ?"


Il se gratta l'arrière du crâne :

- "Pourquoi ? C'est pas normal ? Ça ne se fait pas, d'habitude ?"

- "M'enfin ! Miiiiick !!!!"

- "Je suis pas normal ... C'est ça ?" .

- "En fait, j'en sais rien ... Je ne sais pas si c'est le signe que tu es complètement barjot, déjà que tu parles en latin à ton arbuste, là, ..."

- "C'est pas un arbuste. C'est Jack The Ficus et il avait droit à des présentations en bonnes et dues formes avec la maîtresse de maison ..." M'interrompit-il, très sérieusement tout en regardant la plante verte qu'il avait achetée lors de son emménagement. 


Je suivis son regard et regardai son arbuste dans son pot, repensant, en souriant, à la scène improbable qui s'était jouée ici, Mick prenant une branche entre ses mains pour s'adresser à sa plante devant mes yeux ébahis :

- "Et tua nova domina erit. (elle sera ta nouvelle maîtresse)" Avait-il prononcé, très sérieusement et j'avais cédé à un fou rire mémorable.


Je vis avec une joie immense la petite flamme d'espièglerie s'allumer dans son regard. La tension commençait à retomber et je pus me laisser aller à sourire :

- "Bon alors, oui, t'es barjot ! Moi qui allais dire que le fait que tu comptes était la chose la plus romantique que j'ai jamais entendue ..."

- "Plus romantique qu'une demande en mariage ?" Me demanda-t-il d'un ton sec et acide à nouveau.


Je soutins son regard :

- "Oui. Beaucoup plus romantique qu'une demande en mariage au bout de deux mois ... trois semaines et ...?"

- "Et deux jours, enfin, si on regarde l'heure, ça fait trois maintenant ..."

- "Même avec un jour en plus, c'est trop tôt ..."

- "Trop tôt, trop tôt ...C'est très relatif !" Me répondit-il, très sérieusement. "D'habitude, je reste avec une femme tout au plus quarante-huit ou soixante-douze heures. Alors, tu vois bien que pour moi, deux mois, trois semaines et trois jours, c'est long."


J'étais abasourdie :

- "Je te demande pardon ? Pas plus de trois jours ? Mais c'est quoi cette règle à la noix ?"

- "C'est pas une règle. C'est comme ça. Le plus souvent, je me lasse. Ma motivation première est la drague. Attraper ma proie. J'aime la chasse, pour le boulot et pour le plaisir. Une fois attrapées, les femmes m'ennuient."

- "Fabuleux." Conclus-je, acide tout en croisant les bras. "Je suis ravie de savoir ça ... Et tu veux te marier ? C'est pas très logique ..."

- "Peut-être." Me répondit-il. "C'est toi qui m'a rendu comme ça. Complètement illogique et irrationnel." 


Je sentis mon cœur battre plus vite. Jamais je n'aurais pensé qu'il puisse m'avouer ses sentiments de si belle manière. Je m'en voulais encore plus de l'avoir fait souffrir et je ne savais comment lui dire que je ressentais la même chose que lui. 


Je lui pris ses mains entre les miennes et le regardai droit dans les yeux pour lui expliquer :

- "Mick, c'est normal de ressentir ça au début d'une relation. Je veux dire ... Même si pour toi, presque trois mois, ça paraît une éternité, ce n'est que le début. On est tout feu, tout flamme, on ne voit pas les défauts de l'autre ou alors, on se dit qu'on arrivera à s'y faire, que c'est pas si grave, on fait l'amour trois fois par jour ... Ce genre de choses."


Il me regarda et je le vis complétement abasourdi :

- "Quoi ? On fait plus l'amour ensuite ? Mais c'est nul !"


J'éclatai de rire :

- "Mais siiiiiii ! Mais moins ... Enfin, c'est surtout parce qu'on partage d'autres choses, on prend plus de temps pour se parler, on fait des voyages, on rencontre des gens, on se fait des amis en commun ... On se construit, en quelque sorte. Et on apprend à se connaître vraiment. Et là, tu pourras enfin décider si tu veux vivre avec moi et te marier."

- "Je croyais qu'ici, c'était mal vu pour un couple de vivre ensemble sans être mariés."


J'acquiesçai :

- "Effectivement. C'est le cas. Mais se marier pour échapper au regard médisant des voisins n'est pas une bonne raison. Ça fait longtemps que je me suis détachée de ce genre de considérations. Et puis, à part mes parents, je ne vois pas qui pourrait bien venir me donner la leçon ... une fille qui vit depuis presque huit ans avec un pervers notoire, une inspectrice célibataire qui fait tomber tous les hommes à ses pieds, une détective en quête du prince charmant tout aussi célibataire et autonome, une collègue homosexuelle ou une petite sœur qui fait l'amour dans des placards à balais ... Franchement, à part Madame Sakamoto, y'en a pas une pour relever l'autre, donc ... Voilà quoi !" 


Je jetai ma main par dessus mon épaule signifiant ainsi que je m'en moquais royalement et Mick me regarda, les yeux écarquillés :

- "C'est quoi cette histoire de placards à balais ?"

- "Laisse tomber, une autre fois ..."


Nous restâmes silencieux un moment puis je repris, le cœur battant :

- "Ta demande ... C'était trop tôt. J'ai besoin de temps. Moi aussi, je suis chamboulée par tout ça. Toi aussi, tu as bousculé ma vie, je n'avais pas prévu... Enfin, c'est arrivé tellement vite. Je ... Mick, regarde-moi ..."


Il tourna ses yeux bleu glacier vers moi et je plongeai dedans, oubliant la pudeur qui retenait mes sentiments prisonniers de mes mots :

- "Je crois que je suis tombée amoureuse de toi au moment où tu as ouvert les yeux dans ta chambre. Quelque chose en toi m'a troublée, fascinée ... Je ne sais même pas comment te l'expliquer. Mais j'ai lutté contre ces sentiments parce que : tomber amoureuse d'un patient est contre la déontologie, mon deuil n'était pas encore totalement fait et j'avais fermé mon cœur. Et ... Enfin, bon, je vais pas te refaire l'histoire, tu la connais aussi bien que moi. Et c'est arrivé tellement vite. D'un coup, je n'ai plus rien maîtrisé de ma vie et ça me terrifie, c'est tout."


Sans me lâcher des yeux, il prit ma main entre les siennes, ses mains aux zébrures blanches, pourpres et écarlates que j'était la seule à connaître. Je continuai :

- "Pardon. Ta demande arrive trop tôt pour moi. Et en plus, j'ai un truc à t'avouer." Je pris une grande inspiration. "J'ai la trouille de me marier. Je ... J'ai l'impression de porter la poisse."

- "Kazue ..."


Je lâchai ses mains pour énumérer sur mes doigts :

- "Pour mon premier mariage, j'étais veuve avant même d'être mariée. Ensuite, j'ai haï profondément mon deuxième fiancé. Et même quand je fais partie des invités, il se passe toujours un truc. Il y a des années, au mariage d'une copine de fac, j'ai trébuché et j'ai renversé le gâteau et que dire du mariage de Miki ?"

- "Kazue ... C'était des accidents, non ?"

- "Peut-être. Mais je porte la poisse. Et qu'est-ce qu'il se passera si c'est moi qui me marie ? Hein ?"

- "Pfffff ! N'importe quoi ! Tu penses que tu portes la poisse ? En t'appelant "blessing" (bénédiction) ? La poisse ? C'est toi qui me parles de poisse ? Qu'est-ce que je devrais dire, moi ? Tu crois pas que je n'y ai pas pensé ? Tous ceux que j'ai aimés à un moment ou à un autre, sont morts. Moi aussi je porte la poisse dans ce cas là !"


Mick se leva brusquement et je restai muette, ne sachant quoi lui répondre, le cœur serré. Il alla ouvrir son placard à whisky et se servit un verre :

- "Désolé, j'ai besoin d'un truc plus fort que du thé. Tu en veux ?"

- "Je ... Ok ... Mais pas beaucoup. Ça m'aidera peut-être pour la suite."

- "Ah, parce qu'il y a une suite ?" S'exclama-t-il en se tournant vers moi avant de remplir complètement son verre. "Bon, faudra au moins ça ..."


Je hochai la tête et prenant le verre qu'il me tendait.

- "Et bien ... Si en plus tu as encore des arguments, je crois que je vais remballer définitivement ma fierté." Murmura-t-il, amer, en se laissant tomber à côté de moi. 


Il but une grande gorgée, fit tourner le liquide ambré dans son verre et me dit :

- "Bon, vas-y. Y'a quoi d'autre ?"


Je bus aussi pour me donner du courage et la chaleur de l'alcool me brûla la gorge puis la poitrine et je prononçai :

- "Je n'ai pas vraiment envie de me marier. La robe blanche, la cérémonie, tout ce tralala. Si tu me permets ... ça m'emmerde."


Il faillit s'étrangler et je poursuivis rapidement de peur d'être interrompue et de perdre le courage que j'avais enfin retrouvé :

- "La cérémonie de Miki était très belle, je ne dis pas mais je ... je ne me retrouve pas dans tout ça. Je n'ai plus envie de jouer à la princesse, de lancer un bouquet, de prévoir des plans de table pour les invités, de réfléchir à des cartons d'invitation, à un gâteau, tout ça ... Rien que d'y repenser, ça m'emmerde."


Il rit doucement :

- "On peut faire les choses autrement, tu sais."

- "Ah oui ?" demandai-je en reprenant une gorgée de whisky.

- "Alors, juste une petite fête ici, avec nos amis et ta famille. Et si tu ne portes pas de robe blanche, c'est pas ça qui me dérange. Ta robe rouge, là, celle que tu portais à notre premier rendez-vous, celle-là irait parfaitement aussi. De toutes manières, ça ne pourra pas être officiel ..."

- "Comment ça, pas officiel ?"

- "Oui. Madame Angel ne peut pas exister puisque que Monsieur Mick Angel est une invention. Il est un fantôme."

- "Hein ? Alors, si on se marie, quel nom je porterai ? Madame Hetsfields ? Fitzjames ? Miller ? Pierce ? Johnson ? Ou Madame "On s'en fout" ?"


Il resta silencieux un moment pendant que je terminai mon verre. C'était âpre, fort et brûlant et je détestais ça mais la chaleur du whisky m'avait donné un peu de courage. Il termina aussi son verre en prenant une dernière longue gorgée, posa son verre sur la table basse, joignit ses mains, les coudes sur les genoux  puis me murmura :

- "Carpenter."

- "Je te demande pardon ?"


Il me regarda et je me noyai à nouveau dans ses yeux :

- "Carpenter. Mon vrai nom, c'est Carpenter. James Mickael William Carpenter. Mon père s'appelait James lui aussi, alors tout le monde m'appelait Mickael. Je suis né le vingt septembre 1956 dans une cabane au bord de Hidden Lake, quelque part au sud d’Anchorage, Alaska, U.S.A."

- "Mick ..." Mais je ne pus aller plus loin, ma voix se brisa sous le coup de l'émotion.


Il poursuivit :

- "Je n'ai pas dit qu'on devait se marier demain. Mais ..." Il soupira. "J'ai eu très peu de choix dans ma vie. Alors, ayant passé les trente cinq ans, je n'ai plus tellement envie d'attendre ..."

- "J'ai pas dit que je refusai ..."

- "Tu as dit que ça t'emmerdait."

- "Si on le fait ici, sans plan de table, sans carton d'invitation, sans robe blanche ..."

- "Avec ta robe rouge ..." Me corrigea vivement Mick en souriant.


Je confirmai en lui rendant son sourire :

- "Avec ma robe rouge, c'est peut-être quelque chose qu'on peut envisager ..."

- "Tu le penses vraiment ?"


Je soupirai et éludai un peu sa question:

- "On aurait supprimé ce qui m'emmerde mais pas ma poisse ..."

- "Comment une scientifique comme toi peux croire à ce genre de conneries ?"


Je ne trouvai pas quoi répondre et il poursuivit :

- "Bon admettons que tu aies la poisse. Donc, si tu as la poisse, je pense que je suis pareil, non ?"


Nos regards se croisèrent et je murmurai :

- "Je dois reconnaître que tu n'as pas été très chanceux ..."

- "Sauf depuis que je t'ai rencontrée." Il me montra ses mains : "On peut dire que j'ai eu un coup de chance de tomber sur toi. Un autre médecin n'aurait certainement pas réussi là où toi, tu as réussi. Alors, pourrait-on penser que nos deux poisses s'annulent ?"

- "Comment ça ?"


Il regarda son verre vide :

- "Comment t'expliquer ? Peut-être que deux malchanceux ensemble, ça annule le mauvais sort ... comme la formule mathématique, tu sais, là : moins-plus-moins-égal-plus. "


Je le regardai, éberluée et il répondit à ma question muette :

- "C'est un raisonnement logique, non ?"


Je ris doucement :

- "Oui. Logique. Moins-plus-moins-égal-plus. J'y avais pas pensé à celle-ci."

- "Bah bravo ! Pour une scientifique, franchement ..."

- "Oh, ça va, Môsieur l'artiste ..."


Il me sourit :

- "Alors, ça veut dire que je peux retenter ma chance un autre jour ?"

- "On va refaire un deal, Monsieur Angel ... Heuuu ... Monsieur James Mickael William Carpenter. Dans un an, jour pour jour, le douze juillet 1993, tu me reposeras la question, d'accord ?"

- "Un an !!!! Mais c'est dans une éternité !"

- "Mais non, tu verras, ça va passer vite. Et on aura appris à vivre ensemble, à se parler ..."

- "Ouais, bon, sur ce coup-là, c'est toi qui dois faire des efforts. Parce que, dans la catégorie "j'évite la confrontation", tu es une championne : soit tu te sauves chez tes parents, soit tu te planques derrière une porte fermée, soit tu te caches dans ton bureau. En ce qui concerne le coup de la petite culotte, j'ai beaucoup aimé ... Mais j'aurais préféré que tu le fasses pour d'autres raisons et pas pour te défiler ou essayer de me manipuler."


Je baissai la tête, confuse :

- "Je suis bien forcée de le reconnaître. Mais je crois que je retiendrai la leçon ... Je me suis quand même retrouvée toute nue dans l'ascenseur."


Il soupira :

- "Bien ... Alors, je remballe mon écrin ?"

- "Oui, garde la bague pour dans un an."

- "Ce n'est pas une bague. Comme tu ne peux pas en porter à ton travail, avec tes gants tout ça, je me suis dit que, si c'est pour ne jamais la mettre, ça n'avait pas d'intérêt. C'est des boucles d'oreille."

- "Oh ... J'adore cette idée. Mais garde-les, oui."


Nous nous regardâmes encore un instant et j'osai poser la question :

- "Je peux t'embrasser ?"


J'avais à peine fini ma phrase que ses lèvres étaient scellées aux miennes et je les retrouvai avec délice pour un baiser tendre et doux, presque hésitant. Quand nous nous écartâmes l'un de l'autre, je posai mon front contre le sien et mes mains sur ses joues et je murmurai la gorge serrée :

- "J'ai eu peur que tu ne veuilles plus de moi. Et que ... J'ai cru que c'était fini."


Sans me répondre, il m'embrassa à nouveau et m'entraîna à sa suite pour s'allonger sur le canapé, lui appuyé contre le dossier, et moi, le dos collé contre son torse. Il passa mon plaid sur nous deux et me serra dans ses bras. Je sentis soudain ma fatigue, mes paupières lourdes et chaudes et je ne pus me retenir de bailler. 


Il caressa doucement mon épaule à travers le tissu de sa chemise :

- "Je ne vais pas te mentir. J'ai cru aussi à un moment que je n'arriverais pas à te pardonner. Je suis déçu, blessé et frustré. Mais, t'imaginer partir d'ici, vivre ici sans toi ... Non."

- "Je t'aime, Mick Angel ... Ou, est-ce que je dois t'appeler James Carpenter ?"

- "Garde Mick Angel, je préfère."


Il posa délicatement ses lèvres sur mon oreille et me murmura doucement :

- "Je t'aime aussi, tête de mule." Il rit doucement avant d'ajouter : "Et n'oublie pas ... moins-plus-moins-égal-plus."


Je ris avec lui :

- "Non. Je n'oublierai pas ... moins-plus-moins-égal-plus."


Nos doigts s'entremêlèrent et nous nous laissâmes glisser ensemble dans le sommeil. 


Quelques heures plus tard, je m'éveillai sous une caresse délicate d'une main sur ma joue. Quand j'ouvris les yeux, je découvris Mick, accroupi devant moi, un sourire éclatant aux lèvres :

- "Désolé de te réveiller, mais il faut que tu viennes voir ça ..."


Je me frottai les yeux et m'étirai doucement, encore engourdie sous la douce chaleur du plaid :

- "Voir quoi ?" Demandai-je en baillant.

- "Nos voisins." Me dit Mick excité comme un gamin. "Je crois que les choses sont en train de bouger entre eux. Ils sont sur le toit. Viens vite ..."


Il me prit par la main et m'entraîna à sa suite vers la fenêtre de la cuisine. Je boitillai encore et en passant devant l'horloge, je m'exclamai horrifiée :

- "Meeeeeerde ! Il est déjà neuf heures passées ! Je devrais déjà être au boulot !"

- "T'inquiète. J'ai appelé le Doc. Je lui ai dit que tu avais glissé dans la baignoire hier soir et que tu t'étais foulé la cheville. Tu iras demain."


Et il se tourna vers moi et me désignant la fenêtre :

- "Regarde un peu ..."


Ryo et Kaori étaient sur le toit de leur immeuble. Nous les voyions de profil, alors qu'ils étaient accoudés à la rembarde. Ryo était juste derrière Kaori, les deux bras de part et d'autre d'elle, le front posé sur sa nuque.

- "Alors ..." dit Mick, enthousiaste. "Elle était d'abord toute seule puis il l'a rejoint et là, il vient d'y avoir rapprochement ..."

- "Oh, non ! Regarde !" M'exclamai-je, tout en voyant Ryo s'écarter de Kaori et faire un pas en arrière. 


Il gardait les épaules et la tête basses jusqu'à se qu'il sorte son arme.

- "Non mais, il nous fait quoi, là ?" demanda Mick, complètement désabusé. "Qu'est-ce qu'il est en train de bidouiller avec son Magnum, cet idiot ?"


Ryo avait sorti son arme de son holster, l'avait fait tournoyer comme si elle ne pesait rien et il en avait retiré les  balles pour les glisser ensuite dans la main de Kaori. Il lui dit quelque chose et elle le regardait, pétrifiée. Puis il reprit les munitions, rechargea son arme et la rangea à nouveau dans son holster. 


Puis, je retins mon souffle quand je le vit s'approcher d'elle, passer une main dans son dos, et la plaquer contre lui.

- "Yeeeeees !" Murmura Mick en me serrant la main, les yeux rivés sur nos amis. "Vas-y, Bro', fais pas le con cette fois ... fais pas le con ..."


Ryo passa la main sous le menton de Kaori et ils se firent face.

- "Oh Mon Dieu ..." Soufflai-je serrant un peu plus les doigts de Mick, le cœur battant.


Et enfin Ryo se pencha vers elle et l'embrassa :

- "Ouiiiiiii !!!" Je sautai de joie sur un pied tout en battant des mains. "Bravoooo Kaoriiii ! Tu as réussi !"


Mick se tourna vers moi :

- "Comment ça, "tu as réussi" ? Tu es au courant d'un truc ?"


Je me sentis rougir :

- "Ah non, non, non, rien de spécial ..."

- "Je ne te crois pas."


Je regardai à nouveau par la fenêtre et je montrai nos amis enlacés du doigt :

- "Ohhhhh ! Ca devient chauuuuud !"


Kaori avait passé les mains sous le t-shirt de Ryo et après avoir longuement caressé ses fesses, elle était en train de défaire sa ceinture. Mick eut un hoquet de surprise et se plaqua une main sur les yeux. Il surjoua le désespoir en riant :

- "Non, je veux pas voir ça ! Comment peut-elle faire ça à ce pas-beau ..."

- "Oups ..."

- "Quoi, "oups" ?" Demanda Mick tout en gardant les yeux dissimulés derrière ses mains.

- "Elle vient de s'écarter de lui ..."

- "Oh Fuuuuck ! What did he do, this moron ?" (Oh Putain ! Qu'est-ce qu'il a fait ce crétin ?") s'exclama Mick tout en regardant à nouveau par la fenêtre et son visage se déforma en un rictus que je connaissais plutôt sur le visage de Ryo.


Cette fois-ci, c'est moi qui plaquai mes mains sur ses yeux : Kaori venait de retirer son t-shirt, dévoilant ainsi une superbe poitrine magnifiquement galbée de dentelle noire.

- "Non, non, non ! Interdit !" Dis-je en riant, réjouie de l'avancée de mon amie mais toujours effroyablement jalouse de l'effet qu'elle pouvait avoir sur mon homme et j'ajoutai, pas tout à fait sur le ton de la plaisanterie : "Retire mes mains pour mater et je t'arrache les yeux, Mick Angel !"


Mick rit :

- "J'aime quand tu es jalouse, toi !"

- "Hahahah, bien essayé mais non !" Puis je regardai à nouveau vers le toit en face et je vis Ryo soulever Kaori dans ses bras telle une mariée sur le pas de la porte et se diriger vers les escaliers comme si elle ne pesait rien dans ses bras.


Je relâchai mon emprise sur les yeux de Mick tout en murmurant :

- "Tu avais raison, Kaori ... ton plan a marché."


Nous les regardâmes disparaître par la porte ouverte puis Mick se tourna vers moi :

- "Un plan ? Kaori avait un plan ?"

- "C'est l'impression que j'ai eue, oui."

- "Kazue ? Tu sais quelque chose ?"

- "Ah non, non. Je lui ai juste dit d'être elle-même. De lui faire voir qui elle était vraiment. Apparemment, ça l'a inspirée !" Dis-je en souriant. "Et ne me regarde pas comme ça, Mick Angel, je ne dirais rien de plus. Le reste est couvert par le secret professionnel !"

- "Secret professionnel ? N'importe quoi ! Je vais t'en donner moi, du secret professionnel ! Je suis sûr que tu avoueras sous la torture ..."


Il s'avança vers moi et me regarda dans les yeux :

- "Je t'ai déjà dit que tu étais sexy, comme ça, avec ma chemise."


Je reculai lentement, tout en riant :

- "Je ... j’ai mis une culotte, Mick."

- "Certes, mais à ce que je vois, tu ne portes pas de soutien-gorge ..."


Je regardai alors ma poitrine et sa chemise, ouverte jusqu'en dessous des seins, ne laissait aucun doute quant à l'absence de sous-vêtement. Pourtant, j'étais persuadée de l'avoir presque fermée jusqu'en haut quand je l'avais mise ... Je fermai deux boutons puis je m'enfuis vers la chambre, aussi vite que je le pus à cloche pied tout en riant d'excitation. Mick me rattrapa en deux ou trois enjambées et me fit tomber sur le lit. Nous fîmes semblant de batailler un peu et il me laissa gagner quand je pris entre mes mains sa cravate bleue.


A califourchon sur son torse, je jouai quelques secondes avec le bout de tissu satiné avant de saisir ses mains :

- "Viens par là, que je t’attrape ..."


Il rit en me fixant de son regard espiègle qui me faisait toujours chavirer :

- "Mais, attache-moi, Docteur Natori, attache-moi ! Ça fait longtemps que je ne veux plus être libre !"



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