Il suffira d'une larme

Chapitre 1 : Il suffira d'une larme

Chapitre final

3504 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 14/10/2025 17:14

Cet O.S. participe au défi d'écriture de septembre octobre 2025 : du sang, des larmes et de la sueur (intégrer au moins un des trois fluides) Niveau 1.



Rien qu'une larme.

D'aucuns disent que je ne suis pas grand chose, rien qu’une goutte, parfois écoulée en secret et vite effacée par le revers discret d'une manche. Et pourtant, je suis bien plus que cela. 

D'abord, je ne suis pas qu'une simple goutte d'eau salée. Si, si, vous pouvez me croire !

Evidemment, l'eau représente la majorité de mon être. Mais pas que... Je me compose aussi de gras, de sucre, de sels minéraux et de protéines. Ces dernières portent des noms étranges, presque ésotériques, qui cachent de véritables combattantes contre les virus et bactéries présents dans l'air environnant. Ainsi, grâce à elles, en m'étalant à la surface de la douce sphère de vos iris, je la protège instantanément. J'accueille alors la paupière délicate qui glisse plus de vingt-huit mille fois par jour sur votre œil, tous les jours de votre vie. Je vous laisse faire la multiplication en fonction de votre âge. Et en ajouter un peu pour les nuits d'insomnie. Sachez que sans moi, chaque mouvement de paupière serait très douloureux. Le clin d'œil charmeur perdrait de ses adeptes !

Je peux aussi intervenir en cas d'urgence. En mode réflexe, produite en moins de temps qu'il n’en faut pour le dire, je me précipite hors des glandes lacrymales pour purifier la surface oculaire des agents irritants, grains de poussière inopinés, pollens allergisants, vent trop puissant ou vapeurs agressives, jus d'oignons, lumière trop vive ou un simple bâillement... Autant dire que j'interviens souvent. 

Comme là... Quand les paupières de mon hôte ont eu besoin de moi.

**************

Kaori se releva. Elle toussa et cligna des yeux. Dans cet environnement confiné, la poussière volait. Ryo et Mick se battaient. Blessé, shooté à l'angel-dust, cette drogue qui repoussait les limites de la mort, l'ancien tueur numéro un des USA, ex-partenaire de Ryo quelques années auparavant et ami de Kaori depuis peu, Mick Angel n'était plus que l'ombre de lui-même, un zombi, n'obéissant qu'à la voix de son maître, Kaïbara Shin.

— Tuer les intrus.

Voilà ce qu'il répétait en boucle sur un ton monocorde, glaçant, funèbre. 

La veille, Mick aurait dû mourir dans l'explosion de l'avion de ligne qui le ramenait à Los Angeles, c'était ce que ses amis avaient pensé et ils l'avaient pleuré. 

Mais en réalité, il en avait été tout autrement. Repêché en mer par Kaïbara à bord de son yacht, il avait été maintenu en vie par la drogue et maintenant, il n'était rien de plus qu'une marionnette entre les mains de Shin, le père adoptif de Ryo à l'époque où ils étaient guérilleros. Ce dernier les avait même tous piégés sur son yacht, dans un jeu de piste machiavélique sans issue. Aveuglé par sa haine envers son ancien protégé, qu'il avait considéré comme un fils, Kaïbara s’était enfermé avec Ryo, Kaori, Falcon et Mick dans cette petite pièce hermétiquement close. Sauf que Mick n'était pas du côté de ses amis, cette fois. C'était eux les intrus et il était bel et bien en train d'essayer de les tuer. Il avait déjà gravement blessé Falcon qui venait à peine de se relever après quelques minutes d'inconscience. 

L’Américain affrontait à présent Ryo, sous les yeux épouvantés de Kaori et de Falcon. Kaïbara lui, assis en retrait dans un beau sofa confortable, suivait le duel avec intérêt, un petit sourire suffisant au coin des lèvres. Mick réussit à blesser son ancien ami, son frère de cœur, à la poitrine et au visage. La joue barrée d'un filet de sang, ce dernier regardait son adversaire lui faisant face, vide d'âme, pantin déshumanisé, corps altéré et conscience brisée. 

On voyait dans les yeux de Ryo sa résignation, sa tristesse mais aussi sa détermination. Il leva lentement son arme alors que Mick s'avançait péniblement vers lui, le pas mal assuré, titubant presque. Un grognement guttural, profond, presque monstrueux, bestial, montait de sa poitrine et résonnait dans la salle de commande du yacht. Ryo visa son ami, serra les mâchoires et s'apprêta à presser sur la détente quand soudain :

— Noooon !!!

Kaori venait de s'élancer et de se jeter dans les bras de Mick. Elle le serra contre elle, criant encore une fois :

— Non ! Mick...

— Kaori ! l'interpella Ryo qui braquait toujours son arme sur eux.

— Non, répéta la jeune femme.

Elle savait bien qu'il était capable d'atteindre Mick sans l'effleurer. Elle ne craignait rien. Les balles de Ryo ne l'atteindraient jamais. Mais elle savait bien qu'en se mettant ainsi dans sa ligne de mire, elle lui montrait qu'elle voulait que ça se termine autrement. Il devait lui faire confiance, comme elle lui faisait confiance en retour. Ryo soupira et, imperceptiblement, relâcha sa prise sur son revolver.

Mick le zombi gronda et saisit violemment Kaori par le col de sa chemise. Il la souleva de terre, à bout de bras. A quelques mètres de là, Ryo cria une nouvelle fois, et Kaori lui intima de ne pas tirer. Elle avait peur, mais d'un autre côté, elle croyait dur comme fer que Mick était encore en vie, quelque part derrière ces yeux vides et ternes. Elle prit une grande inspiration, espérant de toutes ses forces que son intuition était la bonne. Elle n'avait plus le choix maintenant, elle devait aller jusqu'au bout de ce qu'elle avait initié. 

— C'est moi, Mick ! reprit-elle d'une voix douce cette fois. C'est moi. Kaori. 

Lentement, elle sortit de la poche de sa chemise la chaînette en argent sur laquelle était accroché un pendentif en forme de balle de fusil, le collier que Mick lui avait offert avant de partir. 

—Rappelle-toi. Regarde !

A cet instant, Mick se calma un peu. Les grognements cessèrent, sa respiration devint moins bruyante. Kaori avait toujours la sensation qu'il ne la voyait pas, mais les yeux de Mick lui semblèrent peut-être moins creux, moins opaques. Ou aurait-elle rêvé ? Elle sentait cependant que son ami se détendait un peu puisqu’elle descendit de quelques centimètres, il la rapprocha de lui et de son visage. Kaori le fixa intensément et son cœur se serra de découvrir ses iris auparavant bleu azur, espiègles et vibrants, si gris et impénétrables. 

— C'est le pendentif que tu m'as offert, expliqua-t-elle d'une voix douce. Ton porte-bonheur... Celui qui protège de tous les dangers. Regarde. Regarde bien. C'est ton porte-bonheur...

Elle passa la chaîne autour du cou de Mick et la balle se posa sur sa peau froide. Kaori le vit tressaillir mais rien de plus ne se passa. Elle ne put retenir ses larmes et les laissa couler sur ses joues. Sa voix se brisa et elle ne put que murmurer :

— C'est Kaori. Souviens-toi, Mick, je t'en prie.

Et puis, avec une délicatesse infinie, elle enroula ses bras autour du cou de Mick et posa son visage contre son front glacé. Elle était tellement triste. Cette histoire était tellement affreuse.

— Kao...Kao.... grogna le mort-vivant en retour.

Une à une, les larmes de la jeune femme vinrent s'écraser sur la peau de Mick. Il en sentit même une sur sa joue. La goutte tomba au niveau de sa pommette puis traça lentement son chemin vers sa mâchoire. Il sentit sa chaleur sur sa peau froide.

Une larme... 

Celle de Kaori.

Sur lui. 

Sur son visage. 

Sur sa joue. 

Sur sa peau... 


**************

Parce que je porte les émotions à l'extérieur du corps, je suis perçue comme une manifestation de faiblesse de caractère, d'instabilité ou de vulnérabilité. Pourtant, je chasse la colère, la peur, la tristesse, en emmenant avec moi les substances chimiques nocives sécrétées par le stress ou la douleur. En effet, à ma nature habituelle, s'ajoutent alors d'autres protéines et hormones. En même temps, je contiens aussi un peptide opioïde... Et oui, je contiens un véritable anti-douleur. Ne suis-je vraiment rien qu'une goutte ?

Moi, je crois que je suis aussi et surtout l'expression de l'humanité la plus pure. Pleurer est une manifestation de l'attachement. Pleurer, c'est avoir du cœur, pleurer, c'est être humain, au sens le plus noble du terme.

**************


Ses larmes à elle... pour lui. 

Elle pleurait pour lui, parce qu’elle était vivante et qu'il était perdu... ou pire.

Oui, Mick savait qu'il était mort. Il l'avait su au moment où il avait refusé d'honorer son contrat, quand il était parti sans avoir abattu Ryo, alors qu'il avait été payé pour ça. A ce moment, il avait signé son arrêt de mort, il en avait parfaitement conscience. Cela ne l'avait cependant pas fait douter de sa décision, pas une seconde. Il s'était refusé à tuer celui que Kaori aimait tant. Il ne pouvait tout simplement pas lui faire ça, pas à elle. C'était pour cela qu'il lui avait offert son médaillon, son porte-bonheur, l'unique chose qui lui restait de son enfance en Alaska, le seul souvenir de son père. Il était persuadé qu'elle en aurait plus besoin que lui. Et puis aussi... avec ce bijou, elle ne l'oublierait pas. Savoir que quelqu'un, quelque part, penserait encore à lui, même après sa disparition, lui avait réchauffé le cœur et donné l'élan d'aller au bout de sa décision.

Ensuite, l'avion avait explosé, Mick avait chuté, comme tous les autres passagers. Son corps avait heurté l'océan avec une telle force qu'il en avait perdu connaissance. Il avait flotté entre le néant et la vie, entre eau et lumière, luttant pour rester conscient et ne pas se noyer, s'accrochant coûte que coûte à n'importe quel débris, pour respirer encore un peu, même si son être n'était plus que souffrance. 

Il avait abandonné tout espoir quand, brusquement, il s'était réveillé dans cette cale de bateau. Il avait reconnu Kaïbara, son commanditaire, portant un costume trois pièces haute couture – moins élégant que les siens cependant – qui lui faisait face. Ses blessures avaient été soignées et il ne sentait plus la douleur, on avait dû lui inoculer un puissant analgésique. Il s'était rappelé la chute, l'océan, l'obscurité. Il aurait dû être mort. Comment pouvait-on survivre à un accident pareil ?

— Non, vous n'êtes pas mort, Monsieur Angel, avait dit Kaïbara comme s'il l'avait entendu. Et vous ne mourrez pas. Je vais vous offrir la possibilité d'accomplir votre mission. 

 — Quoi ? 

— Grâce à ma drogue, la formidable poussière d'ange, vous allez vous battre au-delà de la mort. 

Mick aurait voulu crier. Ses mots étaient restés coincés dans sa gorge. Kaïbara avait souri, mais ses yeux étaient restés froids, diaboliques. Il avait sorti une seringue de sa poche et l'avait plantée dans le bras de Mick qui n’avait absolument pas pu se débattre, ses membres ne lui obéissant plus, certainement sous l'effet des anti-douleurs qui circulaient en quantité dans ses veines. 

— Ryo sera tellement heureux de vous revoir, avait susurré Kaïbara. Et je vais vous préparer des retrouvailles dignes de vous, les deux meilleurs tireurs du monde.

Il avait écarté les bras, triomphant, théâtral :

— Oui, vous affronterez Ryo et ensuite le bateau explosera. J'ai tout prévu. Le minutage sera parfait. Vous serez parfait.

— Noon !

Mais Mick n'avait pas eu la force de lutter contre la puissance de la drogue qui s'était lentement répandue dans son bras, remplaçant son sang par une coulée brûlante, force corruptrice, puissance malfaisante mais tellement agréable... C'était bon. Le PCP avait alors obstrué toutes ses pensées. Il n'avait plus entendu que la voix de Kaïbara, seule lumière dans les ténèbres, telle un phare dans la nuit. 

— Tuer les intrus, telle est ma volonté, avait prononcé Shin. Ensuite, le bateau explosera et vous serez libéré, Mick Angel. Mais avant, tuez les intrus.

Soudain, ce fut la seule chose qui existait dans sa conscience : tuer. 

Mick était mort, c'était une certitude, mais il pouvait encore bouger, entendre et obéir à la voix qui l'avait tiré des limbes. Et c'était d'ailleurs ce qu'il était en train de faire... il tuait les intrus. Il obéissait aux ordres. 

“Tuer les intrus.”

Et puis, soudain...

— Mick !

Une voix différente. Douce. Mélodieuse. Chaude. Aimante. 

— C'est moi, c'est Kaori...

En l'entendant, il avait senti son cœur pulser plus fort, le temps d'un battement, avant de reprendre mollement dans sa poitrine, alimentant ses organes avec juste ce qu'il fallait d'hémoglobine. Froid et épais, le fluide circulait, mais à peine. 

Kaori... 

Et puis quelque chose était tombé sur sa joue. C'était tellement chaud qu'il eut l'impression qu'un sillon de lave dévalait sur sa peau.

Kaori...

A travers les brumes de la drogue, il se rappela un doux visage, un sourire chatoyant, des yeux rieurs. Une belle âme. Sans doute la plus belle et la plus pure, la plus droite et sincère qu'il ait jamais rencontrée de toute sa vie. La seule qui ait jamais vu autre chose qu'un beau gosse version prince charmant ou un tueur sans cœur, les deux facettes du même masque qu'il s'imposait depuis tant d'années. Elle avait brisé ce bouclier ; elle avait vu son coeur, le vrai Mick.

Kaori...

Cette chaleur sur sa peau. Qu'est-ce que ça pouvait bien être ? C'était chaud, doux et humide. 

Une larme ? 

Oui. C'était une larme et une autre vint la rejoindre, brûlante de vie, de douleur, de tristesse. Kaori pleurait pour lui. Elle était triste pour lui. Il était important pour quelqu'un. Il était important pour Kaori. 

"Intrus... tuer les intrus." 

La voix de Kaïbara martèle dans sa tête : 

“Elle aussi est une intruse. Tu dois la tuer.”

C'est sa mission, “Tuer les intrus”. 

Elle, intruse… Tuer. Tuer Kaori. Tuer Kaori ?

Non. 

Hors de question. 

Et maintenant que le brouillard se dissipait lentement de son esprit, Mick comprenait soudain quelque chose que la voix qui commandait dans sa tête avait dit auparavant : 

“Vous affronterez Ryo et ensuite le bateau explosera.” 

Oui… C’était bien ça : “bateau explosera”. Dans sa tête, d’autres mots résonnaient aussi :

“Compte-à-rebours… bombe… tous mourir.” 

Et puis, tout à coup, Mick se souvint de Kaori qui avait crié : 

“Pourquoi ?... haine… Umibozu, non !... Ryo !... Mick, rappelle-toi. C’est moi, c’est Kaori… Ton porte-bonheur…”

Kaori.

“Compte-à-rebours, bombe, tous mourir.”

Ryo. Umi. Kaori. Ils étaient donc tous là ? Sur un bateau. “Bateau, explosera, mourir.” 

Ils allaient tous mourir ? 

“Tous mourir, compte-à-rebours, bombe.”

 Kaori...

Mick entendit alors la respiration de Falcon à quelques mètres de là. Il sentit aussi sa force. Il perçut la présence de Ryo, pas trop loin, en face de lui. 

Falcon. Ryo. Là. Tous les deux. 

Et Kaori. Contre lui. Elle était contre lui. Elle avait pleuré pour lui. Il serra Kaori contre lui, pour respirer son parfum légèrement citronné. Il sentit l'humidité de la joue tiède et délicate. Elle avait pleuré pour lui. Elle lui avait offert ses larmes....

Compte-à-rebours, bombe, tous mourir.

A travers les brumes de sa conscience, oscillant entre la vie et la mort, Mick Angel prit sa décision. Il allait en finir. 

Tout arrêter. Sa vie, ses souffrances et le monstre qui donne les ordres.

Il allait tout arrêter. Pour elle. Pour qu'elle continue à vivre auprès de celui qu'elle aimait. Ryo. Son ami. Le seul pro qu'il ait jamais respecté et admiré.

Arrêter la bombe. Kaori. Ryo. Umi. Sauver.

Il se passa alors une chose étrange. Depuis cette trace incandescente laissée par les larmes de Kaori sur sa peau, Mick sentit une douce brûlure gagner tout son corps. De la chaleur dans son visage, le long de son cou, de son dos, dans son ventre, ses bras, ses jambes... Une sensation soyeuse et caressante se répandit ainsi, emportée par le sang qui pulsait à nouveau dans ses veines.

Puissant, purifiant, vivant. 

Umi, Kaori, Ryo. 

Ca aurait pu être agréable, si ce flux n'avait pas réveillé à sa suite la douleur, la souffrance à l'état brut. Il avait mal partout, os brisés, muscles déchirés, son épaule démise, la peau de son dos brûlée. 

Sauver.

Il ne tenait plus. Il rejeta Kaori, la propulsant loin de lui, en direction de Ryo. C'était tellement fort que la pauvre vola à travers la pièce et atterrit directement dans les bras de son partenaire qui s'écroula sous l'impact. Ils étaient sonnés tous les deux mais ils allaient bien. 

Ryo.

Ryo la protégerait, il lui avait promis et Ryo était un homme de parole. 

Mick s'élança alors droit devant lui, hurlant de rage, de douleur, mais aussi pour aller puiser au fond de lui toute la force dont il avait besoin pour aller jusqu'au bout. Il fonça vers ses deux amis, encore au sol, dans les bras l'un de l'autre.

En voyant ça, Kaïbara, le monstre incendiaire, pensa que ce hurlement annonçait sa victoire, que Mick allait attaquer Ryo et en finir. Il se foutait le doigt dans l'œil. Mick bondit par-dessus Ryo et Kaori, chargeant Kaïbara.

Arrêter la bombe et mourir.

Oui, Mick allait mourir. C'était écrit depuis qu'il avait décidé de quitter le Japon en laissant Ryo en vie. Il le savait. Il aurait dû disparaître dans l'explosion de l'avion. Il aurait déjà dû être mort. Il était déjà mort. Son corps et son cœur le lui criaient. Alors, autant en finir pour de bon.

Sauver Kaori.

Mick Angel avait repéré son objectif à travers sa vision floue et ses perceptions imparfaites. Ce n’était pas Kaïbara, mais le tableau de commande auquel étaient reliés le détonateur de la bombe, qui se trouvait juste derrière lui. Avec cette lumière verte éblouissante, impossible de le louper. Il fallait le détruire. Mick ne disposait d'aucune arme. Aucune sauf ses poings. Il serra les phalanges avec toute la force qui lui restait et plongea ses mains contre l'écran. Le verre se brisa, libérant l'électricité du circuit qui se répandit dans son corps. 

Douleur. Tenir, pour sauver Kaori.

Son cœur éclate et se fige. Sur sa peau, une odeur écoeurante de brûlé, dans ses nerfs à vif, dans ses doigts, ses pieds, son dos, son ventre, ses jambes, ses bras jusqu’à la racine de ses cheveux, partout : douleur. 

Kaori !

Le compteur explosa et propulsa Mick en arrière. L'électricité venait de l'abandonner brutalement. Il s'affala comme un pantin. Il entendit Kaori crier son nom, mais n'eut même plus la force de se tourner vers elle et de lui sourire. Elle avait pleuré pour lui. Elle lui avait offert ses larmes. Quel plus beau cadeau pouvait-elle lui faire ?

Il avait réussi. Ses amis ne mourraient pas tués par la bombe de ce taré sadique. Maintenant, Ryo avait une chance de se battre équitablement, de vaincre et de sauver tout le monde. Il pouvait y arriver. Oui, Ryo était fort. Il pouvait le faire. Mick avait modifié le rapport de force et il en était fier. Ryo pouvait tous les sauver et il protégerait Kaori. C'était ça, le plus important.

Le noir l'entoura, la douleur s'effaca, son souffle se tarit. Il ferma les yeux. Il partait en paix.


**************

Une larme. Il aura suffi d'une seule larme.

Oui, je suis une bien petite chose. Faite d'eau, de sels et d'une myriade d'éléments invisibles, je parais bien inoffensive : une simple goutte, presque insignifiante. C'est vrai, je ne suis pas bien grande et une larme ressemble à toute autre larme, me direz-vous.

Et pourtant, j'ai pu changer le cours des choses, j'ai enrayé un plan machiavélique presque parfait. On ne m'avait pas assez prise en compte. Pourtant, aussi minuscule que je sois, j'ai, parfois, le pouvoir de faire basculer les destins.


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