Copains et puis c'est tout

Chapitre 5 : « Willumi »

1668 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 17/04/2021 15:08

— Yumi ? Yumi ! Réveille-toi bon sang ! On va finir par être en retard !


Yumi marmonna, n'ayant aucune envie de se lever malgré ces avertissements. Elle fit cependant l'effort d'ouvrir les yeux, en partie car les rayons du soleil pénétrant dans sa chambre l'empêchaient de faire autrement, avant d'empoigner son téléphone sur sa table de chevet et de constater qu'il lui restait effectivement que seize petites minutes pour arriver à l'heure à Kadic, celui-ci affichant « 7h44 ».


— Génial, grogna-t-elle.

— Yumi !


La petite voix qui continuait de s'élever derrière sa porte eut l'effet de l'agacer davantage. Ce n'était autre qu'Hiroki, son petit frère.


— Fiche-moi la paix, Hiroki !


Étudier dans le même établissement que son frère cadet pouvait parfois lui être insupportable et s'accompagner tous les matins pour s'y rendre n'était une partie de plaisir pour aucun des deux.


— Tant pis, je pars sans toi ! renchérit Hiroki, visiblement agacé lui aussi. Et je vais le dire à maman et papa !


Elle n'entendit ensuite que le bruit de ses pas qui descendaient les escaliers puis plus rien.


— C'est ça, vas-y. C'est tout ce que tu sais faire de toute façon.


Après le premier soupir de la journée, elle se leva finalement et prit sa serviette. Elle devait se dépêcher si elle ne voulait pas arriver en retard au collège comme le lui avait averti son frère. 

Elle prit donc un bain à la va-vite, retourna dans sa chambre, enfila ses habits et ses bottines noirs, se passa un coup de brosse dans les cheveux, récupéra son sac de cours et dévala à son tour les escaliers.


— J'y vais ! cria-t-elle depuis la porte d'entrée.

— Tu ferais bien, oui. Hiroki est déjà parti.

— Je sais, maman.


Durant le trajet, Yumi s'immergea dans ses pensées qui ne se résumaient qu'en un seul mot, ou plutôt en un seul prénom. Elle eut un pincement au cœur en se disant qu'au final, Ulrich l'avait toujours considérée comme une simple amie, alors qu'elle, elle l'aimait éperdument.

Leur histoire n'était-elle qu'« une banale amourette d'ados » qui finirait dans les oubliettes au fil des années ? Yumi secoua la tête, refusant catégoriquement de voir les choses ainsi. Ulrich était et resterait très probablement son premier et véritable amour.

Tant d'autres questions sans réponses lui tourmentaient l'esprit, elle préféra donc les laisser de côté afin de se concentrer sur la journée qui l'attendait.

Après quelques pas de plus, la japonaise parvint à arriver à l'heure à Kadic. À peine eut-elle le temps de franchir le portail du parc que la sonnerie annonçant le début des cours se fit entendre. Elle se dirigea donc vers sa salle où elle ne manqua pas d'apercevoir William qui avait déjà un grand sourire à la vue de la nipponne.


— Salut, Yumi, la salua-t-il une fois qu'elle arriva près de lui.

— Salut.


Son ton glacial fit comprendre au beau ténébreux que ce n'était pas le bon jour pour l'aborder, mais il s'entêta tout de même à poursuivre la discussion.


— C'est toujours un plaisir de te voir.


Yumi exprima d'abord un regard perplexe sur son visage, mais finit par décrocher un minuscule sourire.


— Tu devrais sourire plus souvent, tu sais, ça te rend encore plus belle.


Elle répondit à sa remarque par une expression faussement touchée. Yumi supportait de moins en moins les techniques de drague de son prétendant qu'elle qualifiait d'« à deux balles ». Elle détourna le regard et rentra en classe, suivie de près par William. Le cours débuta dans le calme.


— Pour commencer, je vais ramasser les devoirs que je vous ai demandé de faire pour aujourd'hui.


Surprise, Yumi se tourna vers son voisin habituel.


— De quel devoir elle parle ?


William la regarda à son tour, étonné de sa question.


— Le devoir qu'elle nous a donné avant-hier. Tu t'en souviens pas ? Je te l'avais même redit à la fin du cours comme t'avais l'air de pas écouter.


Yumi se rappela de cette fameuse heure où elle n'avait fait que penser à Ulrich au lieu d'écouter son cours. À cette pensée, son visage se décomposa.


— Super, soupira-t-elle. C'est vraiment mon jour aujourd'hui !


Arrivée à leur table, seul William rendit sa copie, ce qui surpris facilement l'enseignante.


— Ishiyama, où est le vôtre ?

— Euh... Je ne l'ai pas, je...


Sa professeure leva un sourcil.


— Vous l'avez fait ?

— C'est-à-dire que... je n'ai pas eu le temps.

— Très bien. Vous viendrez me voir à la fin du cours.


Yumi, agacée de nouveau, acquiesça d'un hochement de tête.


— Venant de toi, ça m'étonne !

— Je t'ai pas demandé ton avis, William !


Elle garda ensuite le silence tout le reste de l'heure et porta toute son attention au cours. Quand celui-ci se termina enfin, elle rangea calmement ses affaires et attendit d'être la seule qui restait dans la salle pour aller voir sa professeure.


— Vous vouliez me voir ?


L'enseignante stoppa son effaçage avant de s'intéresser à la jeune lycéenne.


— Oui.

— Si c'est pour le devoir, je suis désolée. Je me rattraperai, s'empressa-t-elle d'attester.

— Ishiyama, j'ai remarqué que vous n'étiez pas très attentive ces dernières semaines. S'il y a quoi que ce soit que vous ne comprenez pas, n'hésitez pas à me le faire savoir.


Yumi resta silencieuse un moment avant de déclarer :


— Non, ça va, jusqu'ici aucun des sujets que nous avons traités ne m'a posé un problème.

— Sûre ?

— Oui, assura la japonaise. Mais pour le devoir... 

— Vous êtes la seule à ne pas me l'avoir rendu, je ne vais pas vous pénaliser. Je sais que vous êtes une élève sérieuse et avez sûrement une bonne raison.


Yumi approuva, son rire nerveux résonnant dans la salle. Inutile de préciser que sa bonne raison se rapportait au fait qu'elle était bien trop occupée à penser à Ulrich Stern.


— Vous avez jusqu'à cet après-midi pour le faire et me le rendre. Nous sommes d'accord ?

— Oui, madame.


Leur petit entretien prit fin et la japonaise quitta la pièce. Elle soupira de soulagement quand elle fut à l'extérieur avant d'entamer son chemin pour se rendre à son prochain cours.



***



Yumi s'installa au bout de la table, dans un coin où elle pouvait être tranquille, et déposa une feuille ainsi que quelques stylos sur celle-ci. Il n'y avait quasiment personne dans la bibliothèque à l'heure qu'il était, le silence complet y régnait donc.


— Qu'est-ce que je vais encore inventer ? râla-t-elle. Si seulement j'avais écouté William la dernière fois, j'en serai pas là !


La japonaise commença à griffonner quelques mots sur sa feuille lorsqu'elle sentit une présence par-dessus son épaule.


— Je peux t'aider ?


Décidément, cette voix la poursuivait depuis le début de la journée. William, évidemment. Il prit place à côté de Yumi, un sourire dragueur collé aux lèvres.


— Si tu pouvais aller loin de moi, oui, ça m'aiderait beaucoup !


Mais le beau ténébreux ne parut pas prêter attention aux propos de la jeune adolescente. Son sourire s'accentua.


— C'est quand même pas de ma faute si tu te retrouves ici.


Yumi pesta intérieurement.


— En même temps... si tu arrêtais deux secondes de penser à cet imbécile de Stern...


La réaction de la jeune fille ne se fit pas attendre. Elle rougit, de gêne mais aussi de colère. Elle lança un regard mauvais à William, cherchant quoi lui cracher à la figure.


— Je peux savoir de quoi tu te mêles ?

— Désolé, je voulais pas te vexer, prétendit-il. Mais vois un peu la réalité, ma belle ! Ulrich et toi vous vous connaissez depuis un, deux ans ? Est-ce qu'il t'a déjà dit qu'il avait des sentiments pour toi ?


Lorsqu'elle y repensait, Ulrich lui avait indirectement fait comprendre à plusieurs reprises qu'elle comptait à ses yeux, par ses gestes comme par ses actes. Il lui était même arrivé de le lui avouer ouvertement, suite à une mauvaise blague que lui avait faite Sissi. Mais elle, stupidement, l'avait repoussé, au lieu de lui dire en retour ce qu'elle avait véritablement sur le cœur.

Yumi se sentit encore plus mal qu'elle ne l'était déjà. Au final, c'était peut-être elle qui avait tout gâché. Elle l'avait trop fait attendre et il avait fini par tourner la page.


— Ce qui se passe entre Ulrich et moi ne te regarde pas, William.

— Je sais, encore désolé. Mais Yumi, je veux simplement que t'arrêtes de te faire du mal en espérant quelque chose qui ne risque pas d'arriver. Si Ulrich t'aimait vraiment, il te l'aurait dit depuis longtemps.


Elle ne chercha pas à contredire le jeune homme à côté d'elle et se contenta de l'écouter tout en faisant de vagues dessins sur son brouillon.


— Moi, par exemple, dès la seconde où je t'ai vue, je n'ai pas hésité à te faire comprendre que tu me plaisais.


La jeune asiatique posa alors son crayon et le détailla longuement, à la fois en colère et triste. En colère car elle s'en voulait et triste car William avait d'une certaine façon raison.


— Tout le monde n'est pas comme toi, William. Laisse-moi maintenant. J'ai un devoir à faire.


Mais au lieu de se retirer, William l'attira doucement vers lui pour la prendre dans ses bras. Yumi ne le repoussa pas. À quoi bon, de toute façon ? Elle le laissa faire, silencieuse. Après tout, il n'y avait pas de mal à recevoir un peu de réconfort, même si William était loin d'être la personne qu'elle aurait voulue pour cela.

Ce dernier cessa son étreinte et plongea son regard dans celui de Yumi.


— Ça va mieux ? lui sourit-il.

— Euh... Ouais, merci.




Prochain chapitre : La rumeur

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