Victime

Chapitre 2 : Lola

4588 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 13/01/2019 12:00

Mon réveil sonna. Cependant, je gardai encore mes yeux fermés. Hier, j'avais fait l'étrange rencontre d'un cahier qui pouvait tuer une personne rien qu'en connaissant son nom et son visage. Ça me paraissait encore dingue. J'étais vraiment très curieuse de savoir si son pouvoir était réel. Mais pour ça, il allait falloir que je tue quelqu'un. Je n'étais pas sûre d'être encore prête à mettre la vie d'autrui en danger. Je soupirai, cherchant mon téléphone à mes côtés. Soudain, j'entendis des respirations. Ce n'était pas les miennes, je ne respirais pas de cette façon. Je sentais presque des souffles s'écraser sur ma figure. Je fronçai les sourcils avant d'ouvrir les yeux.


-Coucou.


J'écarquillai des yeux. Mon oxygène resta coincée quelque part dans ma gorge. Un visage de monstre, des yeux ronds et globuleux, des dents pointus ainsi qu'une tenue affreuse. Ma seule réaction était de crier puis de tomber de mon lit. Je me pinçai plusieurs fois avant de retourner ma tête vers cette chose. Elle était toujours là, se grattant ennuyeusement la joue. J'étais encore entrain de rêver. Non, j'étais en plein cauchemar.


-Je suis vexé de ta réaction. Je suis Ryuk, le shinigami qui a perdu ce cahier, me raconta t-il en montrant mon bureau.


Est ce que j'avais bien entendu ? Un dieu de la mort ? Qu'est ce qu'il faisait dans ma chambre ? Peureuse, je me relevai sur mes jambes. Je me rapprochai lentement de lui. Une fois à sa hauteur, j'inspectai son visage. Comme pour vérifier si il était réel, je lui pinçai le nez. Il réagit immédiatement à mon geste, grognant que je lui avais fait mal. Toujours silencieuse, je me dirigeai vers mon bureau. J'attrapai une boîte avant de lui jeter dessus. L'objet le traversa.


-Qu'est ce que tu fiches ? me demanda t-il en haussant les épaules.


Au même moment, quelqu'un toqua à ma porte. C'était ma mère. Sans que je ne lui en donne la permission, elle entra dans ma chambre. Elle me demanda alors tristement pourquoi est ce que j'avais crié. Je restai immobile, je ne savais pas quoi faire. Pourtant ma mère ne regardait que dans ma direction et non vers celle de Ryuk.


-Elle ne peux pas me voir, m'expliqua t-il.


C'était donc ça. Cherchant un mensonge dans ma tête, j'indiquai à ma mère qu'une gigantesque araignée était suspendue à mon mur lorsque je m'étais réveillée. Peu convaincue, elle hocha tout de même la tête en me disant que mon petit déjeuner m'attendait en bas. Une fois partie, je demandai immédiatement des explications à Ryuk. Seule la personne qui touchait le cahier pouvait le voir. En d'autres termes si à tout hasard ma mère tombait dessus en rangeant ma chambre, elle découvrirait tout.


-Qu'est ce qu'il va se passer maintenant que tu es là ? demandais-je un peu craintive.


-Rien puisque ce cahier est à toi, il appartient au monde des humains. L'humaine Emi et le shinigami Ryuk sont maintenant liés.


-Est ce que ce cahier t'appartenait avant ?


-Tu es perspicace, ricana t-il. Je l'ai laissé tombé de mon monde parce que je m'ennuyais.


Quelle raison enfantine. Autrement dit n'importe qui aurait pu le ramasser, je n'étais pas spéciale. Est ce que je pouvais tuer un shinigami avec ce cahier ? Ça m'étonnerait puisque qu'ils étaient sensés être déjà morts. Ryuk se dirigea vers mon bureau avant de prendre le cahier. Déçu, il m'indiqua que je n'avais écrit aucun nom à l'intérieur. Je n'étais tout simplement pas encore prête. Ne voulant perdre d'avantage de temps, j'attrapai quelques vêtements avant de me changer. Je me retournai vers Ryuk, il m'observait toujours. Je n'allais tout de même pas me déshabiller devant lui. Lui faisant quelques signes de main, il soupira avant de s'envoler par la fenêtre.


Je descendais les escaliers, Ryuk toujours derrière moi. Je n'étais pas vraiment habituée à être accompagnée. J'échangeai un sourire avec mes parents avant de m'asseoir à la table. J'entamai mon petit déjeuner tout en répondant aux questions de ma mère. Comment était ma vie au lycée en ce moment ? Est ce que j'avais de bonnes notes ? Comment Lola allait ? Je mentais à chacune de mes réponses. Tandis que Ryuk se baladait partout dans la cuisine, je le regardai discrètement. Est ce que lui aussi avait besoin de manger ou boire ? Ça serait plutôt bizarre.


-Est ce que je peux goûter à une de ses pommes ?


Si je suivais bien ce qu'il m'avait dis, personne ne pouvait le voir mise à part moi. Si il commençait à prendre cette pomme et à croquer dedans, mes parents auront l'impression qu'elle vole toute seule. Ce n'était pas une bonne idée. Heureusement que je ne comptais pas sur l'esprit coopératif de ce shiginami.


-Quand je rentrerai ce soir.. je te raconterai quelque chose maman !


J'avais fait exprès de faire une pause pour que Ryuk comprenne qu'il n'aura sa pomme qu'à la fin de la journée. J'attrapai mon sac avant de saluer mes parents et de sortir de ma maison. Ryuk sur mes traces, je l'entendais râler qu'il avait faim et qu'il voulait réellement manger cette pomme. Je gardais cet indice dans un coin de ma tête. Le jour où j'aurai besoin de son aide, je pourrai toujours l'appâter avec ce qu'il aime. Sur le trajet, je profitai de ce moment pour lui poser quelques questions.


-Combien il y a de Death Note en tout dans le monde des humains ?


-Je ne peux pas le savoir, me dit-il.


-Est ce que moi je peux savoir si un autre humain possède un Death Note ?


-Dans ton état actuel, tu ne peux pas.


J'arquai un sourcil. Dans mon état actuel ? Curieuse, je lui demandai d'éclaircir un peu plus ma lanterne. Il me révéla que eux, shinigami, pouvaient voir le nom et l'espérance de vie d'un humain rien qu'en voyant son visage. Si je voulais avoir ce même pouvoir, je devais sacrifier la moitié de mon espérance de vie en échange de ses yeux. Il me précisa qu'il n'avait en aucun cas le droit de me dire quelle était la mienne. Autrement dit, si il me restait que très peu de temps à vivre je pourrai très bien mourir dans les années à venir si je sacrifiais mon espérance de vie.


J'entrai par le portail comme chaque matin. Je m'assis sur un des bancs, j'avais pour habitude d'attendre Lola avant d'aller en classe. Les minutes passèrent, elle n'était toujours pas là. Je regardai mon téléphone. Je n'avais aucun message et les cours allaient reprendre d'une minute à l'autre. J'abandonnai une fois que la sonnerie retentit. Je montai les escaliers jusqu'à ma classe. Notre professeur était déjà là, je toquai plusieurs fois à la porte en attente d'une réponse. Un peu grognon, il accepta tout de même que je rentre. Je rejoignis ma place sous les regards plus qu'amusés de mes autres camarades.


-Pourquoi est ce qu'ils se moquent tous de toi ? me demanda Ryuk.


Je sortis un cahier de mon sac sans lui répondre. Faisant semblant de reprendre le cours, j'écrivis sur mon cahier que tout le monde me détestait. Ryuk lit ma phrase à haute voix en passant sa tête au dessus de mon épaule. Il ricana.


-Tu es détestée et pourtant tu n'as encore tué personne ? Tu es très bizarre Emi.


Je n'étais pas sûre que quiconque dans cette classe méritait la mort. Je ne serai certainement pas triste non plus si du jour au lendemain ils venaient à disparaitre. J'avais toujours ce même et unique problème. Je ne voulais pas devenir une meurtrière. Et puis si je commençais à tuer tout ceux qui me détestait, je deviendrai rapidement un coupable évident. Au même moment, notre professeur nous indiqua que pendant ces deux heures il comptait nous donner un travail à faire qui sera noté. Étant donné les râlements de tous ses élèves, il nous précisa que nous pouvions nous mettre par deux. En quelques secondes à peine, ils étaient déjà tous par paire. Je n'avais cas le faire toute seule, ça ne changerait pas de d'habitude. Dans un coin de ma tête, j'avais pensé à me mettre avec Light mais Misa s'était littéralement jetée sur lui.


-Pourquoi tu n'irais pas avec lui ? me demanda Ryuk.


Peu importe qui était cette personne, elle me détestait. Je suivis tout de même le doigt qu'il pointait à l'autre bout de la classe. Rose aux joues, mon regard tomba sur Ryuzaki. Il était déjà entrain de travailler. Et puis, j'étais sûre qu'il refuserait mon aide. Je posai ma tête contre la table en soupirant, j'avais vraiment envie d'aller lui parler. Je n'avais rien à perdre. Inspirant un grand coup, j'attrapai mon livre avant de me diriger vers lui. Le soudain regard des autres me rendit encore plus nerveuse. Je me plaçai debout devant sa table. Il releva son regard vers moi. Les mots n'arrivaient plus à sortir de ma bouche.


-Est ce que tu.. est ce que je peux.. enfin se mettre..


-Bien sûr.


Bouche entrouverte, je ne réalisais toujours pas qu'il venait d'accepter. Visage plus que bouillant, je le remerciai infiniment avant de prendre une chaise. Assise devant lui, je ne savais pas trop quoi lui dire. De quelques gestes, il m'indiqua quelle partie je devais commencer. Tandis que je résolvais les premiers calculs, je lui jetai quelques coups d'œil. Il était tellement concentré, je ne l'avais jamais vu d'aussi près. Ses cheveux noirs me donnaient la drôle d'envie de plonger ma main dedans. Ses cernes se voyaient encore plus à cette distance. Et puis son visage était tellement près. Je soupirai discrètement avant de reprendre mon travail.


-Tu as faux ici.


Pouce au coin de la bouche, Ryuzaki me montra de son autre main une de mes réponses. À ce que je voyais sur sa feuille, il avait déjà terminé sa partie. Je m'excusai timidement avant de prendre une gomme et de tout effacer. Il devait certainement me prendre pour un boulet. Sans moi, il aurait déjà terminé depuis longtemps. J'avais cependant beau lire et relire le problème, je n'arrivais toujours pas à trouver la bonne réponse. Soudain, quelqu'un se jeta littéralement sur mon dos.


-Vous sortez ensembles ? me demanda une voix stridente.


Pour une raison que j'ignore, Ryuk ricana. Est ce qu'il trouvait Misa marrante à ce point ? Je dégageai mes épaules pour qu'elle s'enlève. Plus qu'excitée, elle s'assit sur notre table. Elle commença à nous poser des questions sur nous et sur notre relation. Malgré mes interventions, elle refusa de croire que nous n'étions pas ensembles. Ryuzaki s'en fichait complètement. Silencieux, j'aurai pu parier le voir continuer à travailler comme si Misa n'était pas là.


-Tu as vraiment des goûts spéciaux, ricana t-elle, t'intéresser au mec le plus bizarre de la planète.


-Il n'est pas bizarre, marmonnais-je légèrement irritée.


Sourire en coin, elle se releva satisfaite. Elle passa derrière Ryuzaki avant d'entourer ses bras autour de son cou. Ma jalousie aurait pu me donner la force de casser le stylo que je tenais dans ma main. À quoi est ce qu'elle jouait ? Le pire dans tout ça c'était que lui ne bougeait pas d'un poil.


-Dis, comment est ce que tu me trouves Ryuzaki ? Je suis sûre que tu rêverais de sortir avec moi !


Je serrai un de mes poings. Elle avait certainement raison. Si j'avais le physique de Misa, il y a bien longtemps que j'aurai tenté ma chance avec Ryuzaki. Elle était le genre de fille à avoir tout ce qu'elle voulait en un claquement de doigt. Je baissai la tête, redoutant la réponse du garçon face à moi. Ryuk à mes côtés faisait des petits commentaires comme si le spectacle qu'il observait l'amusait.


-Non merci Misa, dit-il tout en continuant de réfléchir. Moi aussi j'ai des goûts bizarres je crois.


-Misa qu'est ce que tu fiches ? soupira quelqu'un.


-Oh Light ! lui sauta t-elle au cou joyeuse. Tu es jaloux ?


-Non, râla t-il. Par contre, arrête d'embêter mes amis.


Elle perdit soudainement son sourire. Regard sombre, elle se détacha de Light avant de se diriger à nouveau vers nous. Elle attrapa ma feuille de travail puis la déchira en plusieurs morceaux sous mes yeux. Elle regagna ensuite sa place plus qu'irritée. Je baissai la tête, déçue d'avoir fait tout ça pour rien. J'embêtais encore plus Ryuzaki. Une nouvelle feuille se posa sur notre table, celle de Light. Il m'indiqua que je pouvais recopier ses réponses, elles étaient toutes justes. Je le remerciai étonnée avant de reprendre tout son travail. Ça m'ennuyait un peu de faire ça, je n'aimais pas profiter des autres pour gagner quelque chose. Je repensai aux paroles de Ryuzaki. Il avait dis que lui aussi avait des goûts bizarres. Est ce que je pouvais comprendre quelque chose là dedans ?


-N'oubliez pas de noter votre nom, nous prévint notre professeur à la fin de l'heure.


Je redevins tout à coup plus sérieuse. Quelqu'un dans cette classe pourrait lui aussi avoir un Death Note. Je ne pouvais en aucun cas compter sur Ryuk pour qu'il me le dise. Ça serait tout de même une très grande coïncidence que deux propriétaires se retrouvent aussi proches. Je voulais tout de même rester sur mes gardes. Étant donné que je n'étais pas très appréciée, n'importe qui pourrait vouloir mettre fin à mes jours. Pour ça, il lui faudra mon nom entier. J'avais un nom de famille assez long et compliqué. Un simple élève ne devinera jamais son écriture exacte. C'est pourquoi il chercherait très certainement mon nom sur une copie, en supposant qu'il n'aurait pas accès aux informations de l'école. À partir d'aujourd'hui, je mélangerai une lettre ou deux de mon nom à chaque fois que je rendrai un travail. Ce n'était peut être pas très efficace ou inutile mais je ne devais pas oublier que j'étais entourée d'idiots.


Je passai mon midi seule à une table. Personne n'était venu m'embêter jusqu'à ce que quelqu'un commence à me lancer des projectiles. C'était d'abord de simple morceaux de pain qui se transformèrent en cuillère de nourriture ou en lancés de couverts. J'essayai de ne pas y prêter attention. Voir que je m'en souciais les amusait encore plus. Je passai rapidement par les toilettes pour nettoyer tout ce qui était resté collé à mes vêtements.


-Tu me fais vraiment de la peine Emi, soupira Ryuk. Pourquoi est ce que tu ne les tues pas ? Ça serait beaucoup plus amusant.


Je ne trouvais pas que tuer des gens était amusant. Je rêvais de me débarrasser d'eux mais pas à ce point. En y repensant, le monde serait meilleur sans toutes ces personnes qui harcelaient les autres. Je pourrai utiliser ce cahier pour faire le bien autour de moi, en les éradiquant tous. J'agitai ma tête de gauche à droite avant de mouiller mon visage. Je n'étais pas une sorte de justicière, je devais m'enlever cette idée de la tête. Au moment de sortir des toilettes, je me cognai à quelqu'un. J'étais à la fois étonné et rassurée de me retrouver nez à nez avec Lola.


-Où est ce que tu étais ce matin ? lui demandais-je tristement. Tu aurais pu me prévenir, je me suis faîte du soucis pour toi !


Tandis qu'elle essayait de me rassurer, je la pris dans mes bras. J'avais vraiment été inquiète. Dès qu'elle ne venait pas à l'école, j'avais toujours peur que quelque chose lui soit arrivée. J'inspectai rapidement ses cheveux, son visage et ses habits. Elle avait l'air d'être normale, trop normale à mon goût. À la sonnerie, nous retournions ensembles en classe. Notre professeur n'étant pas encore là, je patientai à ma table en regardant à travers la fenêtre. Light entra dans mon champ de vision, s'adossant par la même occasion sur la vitre. Me parler directement ne lui ressemblait pas.


-Tu as été récupérer ce cahier hier ?


Je ne le montrai pas mais j'étais nerveuse. La façon dont il ramenait ce sujet subitement me faisait penser qu'il devait vraiment être intéressé. Je devais faire attention. Light n'était pas stupide. Si je lui disais que je ne l'avais pas récupéré, il saurait que je mentais. Je savais très bien qu'il m'avait vu regarder la même chose que lui lorsque le cahier était tombé. Mais si je lui confiai que je l'avais gardé chez moi, il me demanderait certainement ce que c'était et pourquoi je l'avais chez moi. Je décidai donc de trancher entre ces deux propositions.


-Oui j'ai essayé, racontais-je. Mais quand je suis arrivée dans la cour il n'était plus là.


-Quelqu'un est certainement venu le récupérer, proposa t-il.


-Oui, quelqu'un a dû le faire tomber sans faire exprès d'une des fenêtres.


Je n'avais pas d'autre choix que d'aller dans son sens. Après cette courte conversation, notre professeur entra enfin. Light regagna sa place derrière moi en silence. Au même moment, Misa passa à côté de ma table. Elle ricana. Je la regardai du coin de l'œil, qu'est ce qu'elle avait à rigoler ? Le cours commença. Je tournai ma tête vers Ryuzaki. Assis étrangement comme à son habitude, il était plus que concentré à écouter ce que notre professeur racontait. J'avais bien fait en fin de compte d'aller lui parler. Notre relation commençait peut être à faire ses premiers pas.


-C'est vraiment ennuyant la vie d'une lycéenne, râla Ryuk.


Lorsque notre professeur commença à écrire le cours au tableau, je cherchai ma boîte avec mes lunettes à l'intérieur. J'avais chercher dans mes affaires ou par terre, je ne la trouvais. Je me souvins soudainement d'un détail, Misa. Je lui jetai un coup d'œil. Sourire vainqueur, elle faisait tourner mes lunettes autour de ses doigts. Avant que je ne puisse réagir, elle les passa à quelqu'un d'autre. Cette personne ouvrit la fenêtre près d'elle puis les jeta au loin. Elles atterrirent dans la fontaine de l'école. J'interpellai immédiatement mon professeur pour lui en informer. Celui-ci, depuis tout à l'heure de dos, ne me cru pas et continua son cours comme si rien ne s'était produis. Je n'avais cas les récupérer à la pause, même si je doutais fortement qu'elles étaient encore en un seul morceau.


En sortant, je notai dans un couloir que Lola était accompagnée de Jenny. Cette scène ne présageait rien de bon. Je ne faisais pas du tout confiance à Jenny. Mais je vexerai certainement Lola en intervenant une nouvelle fois dans leur moment. J'entamai alors un autre couloir dans la direction opposée. J'avais l'impression que je venais de faire un choix important. J'espérais juste que s'en n'était pas un mauvais.


Marchant nonchalante, j'avançai en direction de la fontaine. Je ne pouvais pas le dire à mes parents. Ils s'inquiéteraient et dépenseraient sans compter pour m'en acheter des nouvelles. Au loin, j'aperçus une silhouette dans la fontaine. Pantalon retroussé, elle cherchait quelque chose dans l'eau. Plus je me rapprochais et plus je comprenais que cette personne était un garçon. J'écarquillai complètement des yeux. Les attrapant avec deux doigts, Ryuzaki tenait mes lunettes.


-Désolé, dit-il monotone. Elles sont cassées.


Je marchai lentement vers lui avant de les prendre dans ma main, toujours sous le choc. Lorsque je lui demandai pourquoi est ce qu'il avait été les récupérer, il me répondit que c'était parce qu'il se sentait concerné. Sous prétexte qu'il n'avait rien fais pour empêcher cette action, il pensait que la moindre des choses était de m'aider. Je rougis discrètement. Si tout le monde réagissait comme lui, notre monde serait déjà meilleur. Soupirante, je posai mon postérieur sur le rebord de la fontaine. Ryuzaki me rejoignit en s'asseyant à sa façon, mains sur les genoux. J'étais fatiguée de vivre de cette manière, lassée de devoir tout supporter toute seule. Je donnerai n'importe quoi pour changer de vie.


-Tu es vraiment très courageuse, me complimenta Ryuzaki. Je ne pense pas que je pourrai supporter ce que tu traverses tous les jours.


-Ryuzaki, le coupais-je. Qu'est ce que tu penses de moi ? Comment est ce que tu me trouves physiquement ?


Je ne savais pas ce qu'il me passait par la tête. Je me sentis subitement gênée. Demander ce genre de questions au garçon sur qui j'avais des vues, c'était complètement stupide. Je lui jetai quelques coups d'œil. Pourquoi est ce qu'il regardait par terre ? Je paniquai mentalement, me donnant plusieurs gifles. S'il ne disait rien c'était parce que je ne lui plaisais pas du tout. En réalité, je voulais juste savoir si je devais avaler cette vérité. Celle que Misa et ses copines me répétait chaque jour. J'étais inintéressante, moche et stupide. Voyant que Ryuzaki restait toujours silencieux, j'attrapai mon sac en vitesse avant de me lever. J'avais vraiment trop honte.


-Tu es comme moi, m'indiqua t-il, tu es spécial. Tu as du charme et une personnalité différente des autres. Si je devais choisir entre toi et Misa, je te choisirai toi.


Restant dos à lui, j'essayai de cacher mon visage plus que rouge. Moi qui n'avais jamais eu confiance en moi, je venais pour la première fois de me faire complimenter par un garçon. Cependant, je ne devais pas me faire d'idées trop vite. Il pouvait tout simplement m'encourager parce qu'il avait pitié de moi. À cette pensée, je serrai la lanière de mon sac. Non, Ryuzaki n'était pas un menteur. Prise d'une soudaine détermination, je me retournai vers lui. Audacieuse, je l'attrapai par les épaules pour le relever devant moi. Il était soudainement perdu de la distance qui s'était subitement affaiblie entre nous. J'avais vraiment envie de lui demander ça depuis le premier jour où j'avais commencé à l'aimer.


-Ryuzaki, est ce que tu voudrais sortir avec.. ?


-Hé venez voir, me coupa quelqu'un un peu loin, il se passe quelque chose dans le hall !


J'en profitai pour m'échapper de la gaffe que je venais de dire. Accompagnée de Ryuzaki, nous nous dirigions en silence vers le hall. Il y avait beaucoup de monde. À leur comportement j'avais l'impression qu'ils attendaient quelque chose. Qu'est ce qu'il se passait ici ? Soudain, quelqu'un sortit des toilettes des filles. C'était Jenny. Elle me paraissait normale, seul son sourire me dérangeait. Elle se retourna vers la porte, agitant ses mains dans tous les sens. On aurait dit qu'elle incitait quelqu'un à sortir. Mes yeux s'écarquillèrent subitement. Une fille pratiquement nue fit son apparition. Je ne l'avais pas tout de suite reconnue mais c'était Lola. Ses cheveux étaient courts, coupés n'importe comment. Elle ne portait qu'une simple culotte, le reste de son corps pouvait être admiré par les autres. Marchant en cachant sa poitrine, Jenny lançait les mèches de ses cheveux au dessus d'elle. J'en restais tétanisée.


-Tu veux tes vêtements ? demanda Misa en rigolant. Viens les chercher !


Quelques mètres plus loin, Misa les agita en sa direction. Lola en pleurs essayait tant bien que mal d'avancer. Furieuse, j'attrapai ses vêtements avant de pousser tout le monde et de rejoindre mon amie. Je me ruai littéralement sur elle, dégageant Jenny du passage. Je l'incitai à marcher vers les toilettes. Elle était tellement effrayée qu'elle en restait pétrifiée. Je la forçai délicatement à avancer, essayant du mieux que je pouvais de la couvrir des regards des autres. Arrivées dans les toilettes, elle s'effondra complètement. Je m'accroupis devant elle avant de la rhabiller avec ses vêtements. Épaules tremblantes, elle pleurait encore plus qu'avant.


-Laisse moi tranquille, Emi ! cria t-elle


-Calme toi Lola il faut que tu te rhabilles, la rassurais-je. Calme toi s'il te plait..


-Lâche moi, je suis ridicule ! hurla t-elle. Je veux mourir, je veux mourir !


Elle me repoussa, refusant en même temps de se rhabiller. Tout ça était la faute de Jenny. Si je l'avais suivis au lieu de prendre ce couloir, Lola n'aurait jamais été forcer de se mettre nue. Je m'en voulais terriblement. Bouillonnante, j'encourageai une nouvelle fois Lola à enfiler ses vêtements. Je lui donnai un baiser sur la joue avant de sortir des toilettes. Jenny était dans ma ligne de mire. Je la dévisageai intensément avant de me ruer sur elle. Je lui donnai une gifle magistrale. Je lui arrachai quelques cheveux tout en la griffant un peu partout. Je voulais la réduire en miettes.


-Tu mérites vraiment de mourir ! lui crachais-je.


Tandis que je me défoulais sur elle, Light vint nous séparer. Hystérique, il était impossible de m'arrêter. Avec l'aide d'autres garçons, ils réussirent tout de même à nous éloigner. Le visage de Jenny était en sang et c'était ma satisfaction. Je regagnai rapidement les toilettes. Accroupie dans un coin, Lola était à présent habillée mais toujours paralysée. Je la serrai dans mes bras, l'encourageant à puiser dans ses dernières forces pour rentrer chez elle. Elle ne voulait pas sortir. Nous restions alors là pendant des minutes qui se transformèrent en des heures. L'obscurité commençait déjà à prendre possession de l'école. Les professeurs et gardes de l'école finirent par venir nous chercher. Il n'y avais plus aucun élève. J'accompagnai Lola jusqu'à chez elle. Sa mère fonda en larmes en voyant l'état de sa fille.


-S'il vous plait, ne la quittez pas des yeux.



Je rentrai chez moi plus que déboussolée. Je ne saluai même pas mes parents, je m'enfermai directement dans ma chambre. J'attrapai le carnet que j'avais caché avant de le poser sur mon bureau. Tremblante, je pris un stylo. Il n'y avais plus que quelques millimètres entre ce stylo et la page du cahier. Je n'avais plus qu'à écrire son nom, rien que son nom. Je fermai les yeux, serrant fortement les dents. Je ne pouvais pas le faire. Je jetai violemment les deux objets avant de me cacher dans mon lit. J'étais une incapable. Elle avait fais du mal à mon amie et je n'avais même pas le courage de la venger. Je m'enroulai dans mes couvertures, repensant à son corps tremblant. J'attendrai demain pour faire mon choix final. Jenny Pember méritait-elle la mort ? Ce n'était plus qu'une question de temps, ou plutôt de nom.



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