Pour de courts instants de bonheur.

Chapitre 9 : Période de test

2357 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 11/05/2024 22:01

Chapitre 9

*************

Mike regarde par la fenêtre. La pluie s’est enfin arrêtée, révélant un bel arc-en-ciel dans le ciel. Je l’entends dire à MJ que le soleil finit toujours par revenir. Je le vois soulever notre petit bonhomme et l’emmener sur le perron pour aller voir l’arc-en-ciel de plus près.

- Dis donc, MJ, par contre, c’est ton vélo qui est dehors ?

- Oui pa, pardon, j’ai oublié de le ranger.

- Il faudra le faire. Sinon, M’man et moi n’allons pas oublier de te le confisquer, vu ?

MJ hoche la tête.

***Après le dîner nous proposons à MJ une partie de cartes. C’est Mike qui lui apprend à être stratégique et moi j’apprends à ne pas, à ne plus tricher.

MJ a fait de fameux progrès, il gère de mieux en mieux sa frustration quand la carte pirate fout la zizanie dans son bateau. Il râle tout ce qu’il peut quand ça arrive mais il se marre comme un bossu quand c’est nous qui perdons l’avantage de notre construction. Mike lui a dit dès le début qu’il ne le laisserait jamais gagner. Je suis émerveillée à chaque fois de voir ce qu’il lui livre comme message. Il n’est pas très bavard, l’amour de ma vie, il parle peu, mais il parle tellement juste à chaque fois.

- Le jour où tu nous battras, ce sera à la régulière.

Et c'est exactement ce qui se passe ce soir-là. C’est MJ qui gagne et il réclame une autre partie. Ce que nous acceptons étant donné qu’il n’y a pas école le lendemain. En plein milieu de la partie, le téléphone de Mike sonne.

- Désolé, service d’astreinte. Je dois répondre.

Il décroche. La conversation est courte, on entend juste un « ok » et le nom d’une rue. Mike nous regarde et referme son téléphone, après avoir raccroché.

- Faut que j’y aille. Problème de plomberie à l’école primaire, une bêtise de mômes dans les toilettes. C’est en train d’inonder le couloir. Je file. Ne m’attends pas, je ne sais pas à quelle heure je vais revenir. Je tâcherai de ne pas faire de bruit quand je reviendrai. Bonne nuit, MJ. A plus, Susan.

Mike ébouriffe les cheveux de MJ et m’embrasse brièvement avant de filer par la petite porte intérieure qui mène au garage. On entend la voiture démarrer dans la pénombre.

***

J’entends comme un bruit fracassant. Puis un éclat de voix. Je dors, je rêve. Je ne sais pas trop. Je tends l’oreille. Je n’entends rien. Je me rendors. Je me réveille en sursaut. Comme une secousse hypnique. Je regarde le réveil. Il est 3h45. Mike n’est pas rentré. L’urgence doit durer. Je ne sais pas pourquoi, j’ai une étrange sensation de malaise, comme un pressentiment. Je saute dans ma robe de chambre, attrape la lampe de poche pour ne pas allumer dans le couloir. Nous laissons la porte de la chambre de MJ ouverte et je ne veux pas le réveiller. Je descends lentement les escaliers, je prends la clé et j’ouvre la porte, avant d’avancer sur le porche. Le pick-up de Mike est garé là et….

- MIIIIIKE, oh non !

Je me rue près de lui. Il est couché sur le ventre. À côté de lui, un carton dont le contenu est renversé. Au moment où je pose la main sur son bras, il réagit et reprend ses esprits.

- Wahoo, quel vol plané.

- Tu t’es assommé ? T’as perdu connaissance ?

- Pff, je ne crois pas. Enfin, j’en sais rien.

- Tu viens d’arriver, c’est ça ?

Je regarde tout autour et là, avant même qu’il ne dise un mot, je comprends.

- Oh bordel, le vélo.

Je n’ai pas envie de rire. Je remercie ce sursaut inexpliqué. Mike serait resté dans l’allée du jardin, peut-être assommé et amoché. Il me fait signe de la tête. Il essaie de s’assoir, se passe la main dans les cheveux. Il se frotte le haut de l’épaule et la base des cervicales.

- Tu saignes. L’arcade sourcillière, la même. Celle qui a déjà pris lors de l’accident.

- J’en connais un qui va entendre parler du pays, crois-moi.

Je l’aide à se maintenir assis.

- T’as la tête qui tourne ? Tu veux que j’appelle les secours ?

Il me fait non avec sa main, mais je préfère appeler le médecin de secours. On en a dans la rue, avec du bol, lui aussi, c’est sa nuit d’astreinte, comme Mike.

***

Le médecin gare sa voiture devant notre maison. Mike est installé dans le canapé, avec une poche de glace sur le front.

- Bonsoir Mike, comment vous vous sentez ?

- Comme quelqu’un qui s’est mangé le ciment de l’allée centrale à cause d’un vélo pas rangé.

- Oh, je vois.

- Des douleurs dans les côtes ? Dans la poitrine ? À la tête ?

- Non, ça va.

Tout en parlant, le docteur Hencker ouvre sa trousse pour en sortir de quoi prendre une tension. Il place le brassard autour du bras musclé de mon mari, juste là, sur le tatouage qu’il a sur son biceps gauche. Il pompe, avant de relâcher la pression et de contrôler l’aiguille sur le tensomètre.

- Tout va bien de ce côté-là !, annonce-t-il en retirant le brassard.

- Pas de vertiges ? Pas de vomissements ?

Mike répond par la négative. À l’aide de sa lampe torche, il vérifie les yeux de Mike et continue en lui palpant le crâne et les pommettes.

- Pas besoin de points de sutures sur l’arcade ?, demande Mike.

- Non, j’préfère pas. Y a la trace de l’ancienne blessure. Je vais juste mettre des Strip, ça va le faire.

Le docteur désinfecte la plaie, tandis que j’apporte un linge humide pour nettoyer le sang sur le visage de mon mari.

*** Lendemain matin.

- Bonj…. Oh, ben ? Ça va, Papa ?

- NON, ça VA PAS DU TOUT... Je peux savoir ce que ce fichu vélo faisait au milieu de l’allée ?

- Oups…

- Bon sang, MJ. Une règle : tu me la rappelles ?

- On regarde où on va … ! » lance le petit garçon en se grattant le bas de la tête.

- PARDON ? Tu te fiches de moi, en plus !

Mike allonge le bras et lui donne un coup de journal sur le fond de son pantalon de pyjama.

- Tiens, c’est tout frais de ce matin. Affreux jojo.

Nous prenons le petit déjeuner. Mike, ayant fini son astreinte, a sa matinée de congé. Ordre du médecin, protocole commotion cérébrale, comme au football américain. Au moment où MJ part pour l’arrêt de bus, Mike lui annonce que son vélo est remisé au grenier

- Pour un petit moment, d’accord ?

MJ hoche la tête. Il attrape sa lunch box et se dirige vers la porte. Là, il se retourne et marche vers son père. Il lui grimpe sur les genoux et lui glisse à l’oreille, avant de lui faire un bisou tout près de l’oeil.

- Pardon P’pa. Bonne journée.

MJ saute en bas des genoux de son père et trottine jusque vers la porte. Mike lui sourit.

***

Le soir même, quand Mike rentre du travail, nous nous posons dans le canapé. MJ est dans sa chambre.

- Bon, comment ça a été cet après-midi ?

- Oh bien, je suis retourné à l’école. L’équipe de Hatcher a pris le relai. Et sinon, MJ a été sage ?

- Oh oui, il m’a donné un coup de main à désherber.

Pelotonnée contre lui, je déplie mes jambes.

- Attends, j’ai des fourmis.

Mike se met à me masser le pied, mais ça fait super mal quand le sang se remet à circuler.

- Dis, tu te souviens de ce jour, veille de St Valentin, quand les garçons de Lynett se cachaient d’elle ?

- Ils se planquaient, parce que Lynette était sur le point de leur donner une fessée.

- Tu leur as dit de rentrer chez eux, qu’ils allaient agraver leur situation en restant planqués. Tu te souviens de ce dont a parlé, après ?

Hochements de tête

- Oui, bien sûr. On a parlé d’avoir un enfant. C’est à ce moment là que je t’ai dit quel genre de père je ne voulais pas être. Le genre du mien, qui nous tapait dessus dès que ça lui prenait l’envie. Je n’ai pas envie que MJ aie des raisons d’avoir peur de moi. Je veux qu’il sache que je suis là, pour lui, que je serai près de lui, et derrière lui, s’il a besoin d’être recadré pour aller dans la bonne direction.

- Oh Mike, je t’aime vraiment. Et tu sais pourquoi, parce que tu as la sagesse de regarder tout ça en face et tu essaies de faire les choses différemment.

- Il y tellement de différence entre la punition pêtage de plomb et la punition qui s’avère être une leçon. Je ne veux pas faire de mal à MJ.

- MJ est un petit garçon chanceux. Je sais, que tu l’aimes. Il sait que nous l’aimons et que nous lui ferons pas de mal. Tu te souviens ce que tu m’as dit quand on est parti de la maternité, que « ça allait dépendre de nous ». On fait ce qu’on peut.

- Et pourtant, quand on voit ce qui s’est passé !

- Oui, et il apprendra à grandir avec. La différence entre lui et nous, c’est qu’il est mieux accompagné que nous l’avons été. On a conscience de tout ce que nous portons et on fait de notre mieux.

- Oui tu as raison.

Mike me caresse doucement le bras, avant de m’embrasser sur le bout du nez.

- Nous ne sommes pas responsables de la façon dont nous avons été élevés, mais nous avons le droit de changer cela pour nos enfants. Et c’est ce que tu fais. Tu te fâches, tu fais les gros yeux, mais tu le fais avec humour et avec amour. C’est une des raisons pour lesquelles je t’aime tant, Mike Delfino.

***Quelques jours plus tard

- Non MJ, tu restes avec moi.

- Mais Papa, le serpent, il va...

En fait un petit drame se déroule juste en dessous de nous. Nous sommes dans la petite clairière en train de faire un pique-nique. L'écureuil combat un serpent.

- Non, MJ, tu ne t’approches pas.

- Mais j’veux pas que l’écureuil… il va…

- MJ, RESTE ICI », la voix ferme de Mike va peut-être stopper le serpent, mais pas notre fils, qui fait encore un pas en avant. Mike met sa main, bien ouverte, sur la poitrine de notre petit bonhomme, pour le stopper physiquement.

- Paaa…, s’il te plaît. Faut faire partir le serpent. J’veux pas que l’écureuil, y meure ! Le serpent il va mordre.

J’essaie d’intervenir. Je vois bien le regard dégoûté et apeuré de notre petit garçon mais je vois aussi le regard noir de Mike.

- MJ, c’est ton père qui va mordre, si tu continues.

- Non, MJ. Ne t’approche pas plus. Je te l’interdis !

La voix de Mike monte encore d’un cran. C’est l’instant critique. Mike intensifie encore son regard. MJ cède.

- Très bien, Pa. D’accord ! Notre petit bonhomme tourne les talons, lance un dernier regard à son père et marche vers la voiture.

- Je préfère ça !

***A l'heure du coucher, nous entrons dans la chambre de MJ. Mike prend son air un peu sévère et demande :

- MJ, j’aimerais bien que tu me dises pourquoi c’est important d’obéir !

Voyant le petit menton fermement planté contre la poitrine, Mike approche doucement la main et le soulève :

- J'attends, MJ.

Mike ne crie pas mais le ton de sa voix montre à quel point c’est sérieux.

- Je dois obéir, c’est pour ma sécurité. Le serpent était super dangereux pour nous aussi.

Mike et moi sommes satisfaits de la réponse. Je m’approche et lui embrasse le dessus de la tête.

- Je suis fier de toi, mon grand. Bravo. Tu as tout retenu, tout compris.

- Papa, c’est sûr, l’écureuil est en sécurité ?

Mike étouffe un rire léger, se lève et s’apprête à sortir. Il appuie gentiment sur l’épaule de notre fils et lui dit :

- MJ, tu m'as déjà posé cette question, et je te réponds encore une fois : sois assuré que l'écureuil est bien en sécurité.

- Mais papa, c’est pas possible. J’ai vu le serpent mordre l'écureuil plusieurs fois, il aurait dû être mort.

- Fiston, je ne sais pas comment c'est possible, mais je te dis la vérité, il n'est en fait rien arrivé à l'écureuil. Peut-être qu'ils ont une protéine dans leur sang qui leur permet de survivre au venin de serpent. Les écureuils sont connus pour être féroces et pour attaquer et blesser les serpents.

Laisser un commentaire ?