La descendante

Chapitre 1 : L'appétit des nuages

1653 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 23/02/2018 14:10

Mon histoire emprunte à l'univers de Christopher Paolini et n'a aucune fin lucrative. Mon seul but est de vous faire plaisir tout comme je me fais plaisir.

Bonne lecture à tous ! :)


P.S: N'hésitez pas à partager vos ressentis au sujet de ma fanfic, c'est ma toute première :) J'adore recevoir des commentaires comme tout un chacun, cela me motive énormément à aller de l'avant. Dîtes-moi ce que vous en pensez, j'en tiendrai compte pour m'améliorer, promis ! Et aussi pour ne pas vous laisser plusieurs jours sans chapitre :p (niarkniark)

Mais non c'est pas du chantage ! Si ? Bon...



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Une pente nuageuse s'offrait à ses regards endormis. Il aurait été si facile de croire qu'ils passeraient en un autre monde une fois cette nuée franchie ! Mais l'avion se redressait déjà, laissant l'horizon reprendre ses droits céruléens ; Éther ferma les yeux.

« Si tu ne veux pas être déçue, n'espère pas. Le voyage va être long, prends sur toi... »

De Fortaleza, Brésil, à Milan, Italie. Encore dix bonnes heures à s'efforcer de ne pas songer au temps qui restait à subir, la tête lourde et l'esprit brumeux, le corps ankylosé sans véritables possibilités d'étirements. C'était peu dire. Elle n'aimait pas cette oppression constante à l'idée d'un problème technique. Un souci dans les moteurs.

« Arrête... ça va être la trentième fois que tu penses à ça depuis le départ. Faut respirer ma fille, sinon t'es bientôt bonne pour écrire avec ton sang tant il sera noir. »

La jeune femme hésita à piocher les fruits secs à l'abri dans son sac ventral. Ce sac où s'abritait le parachute rectangulaire en cas de...

Elle grimaça. Sa peur des hauteurs était censée s'effacer sous la confrontation directe avec l'avion !

Depuis l'enfance, son esprit avait toujours été ainsi : frondeur. Aucune irraison ne pouvait venir faire trembler son cœur sans qu'il ne fonçât aussitôt sur l'objet de ses inquiétudes, espérant désamorcer les prémices de l'angoisse.

Le souffle des ventilateurs internes avait au moins le succès de la bercer. Elle resserra son sac en bandoulière autour du cou, vérifia qu'il était bien fermé puis s'autorisa à s'assoupir, malgré tout. L'épuisement gagnait du terrain, il serait bon qu'elle se reposât un peu si elle ne voulait pas être totalement claquée en arrivant. Un léger sourire ourla ses lèvres : une fois là-bas, une nouvelle vie pourrait débuter... Nouveau pays, nouvelles rencontres. Le wwoofing était vraiment une idée géniale. Enfin, elle l'espérait, c'était son premier essai. Une famille italienne très charmante, les parents et trois enfants ; elle s'occuperait avec eux de leur grand jardin, des chats, des moutons et du gros chien blanc tout doux dont elle avait vu la photo.

Éther rêva. L'astre déversait son miel sur la chaleur des roses, elle en prenait soin, délicatement, heureuse d'être tout simplement. Pititou le chat brun roulait sa tête sur les dalles de terre sèche, elle se baissa pour caresser le ventre rond, si moelleux. Le chien aboya pour prévenir de l'arrivée d'une voiture. Celle-ci ne cessait de klaxonner, c'en devenait irritant pour la jeune femme qui se boucha les oreilles ; le bruit envahissait son corps, branlant sa tête sans qu'elle ne pût s'arrêter. Finalement, elle s'éveilla, grimaçante. L'avion bougeait beaucoup. Beaucoup trop à vrai dire. Une voix de femme répétait aux passagers de garder leur calme, les perturbations allaient s'apaiser d'ici un quart d'heure.

Il n'y avait pas de quoi frissonner.

« Oh merde je savais que ça allait arriver cette histoire, je le savais, je le savais ! Ce n'est pas pour rien que j'avais tant de mal à me rassurer. Ça va aller, tout va bien. »

Sa voisine n'était pas moins pâle et ses doigts s'étaient férocement agrippés à l'accoudoir central. Éther le lui laissa volontiers, une pulsation amère tordant son estomac ; elle descendit le voile à la fenêtre, ne souhaitant plus voir le noir chaos de l'extérieur. La blancheur des nuages avait laissé place à une opacité dangereuse et titanesque.

Une autre secousse ébranla la carlingue ; Éther serra les paupières et les lèvres, livide. Sa main s'était sporadiquement crispée sur la poignée du parachute. Elle l'avait gardé de son ancien club de parachutisme – une idée bien sadique pour se libérer de sa peur, qui avait finalement viré au cauchemar dès le premier saut. Mais c'était le sien à présent et elle savait le replier.

L'orage tonna, elle perçut même le déchirement caractéristique du ciel, ce crépitement électrique qui conseillait à toute âme vivant à la ronde de fuir le plus loin et plus vite possible. Il n'y avait pas moyen. Elle était piégée, piégée et terrorisée.

« J'embrasserai la terre dès arrivée saine et sauve à Milan. Si je veux raconter mon rêve à Pititou, il me faut garder l'esprit clair. Je n'ai pas envie de faire une crise de panique. Ok, il n'y a pas vraiment de rapport. N'importe quoi pour me distraire. »

Brusquement, ce fut un déluge d'éclairs qui mangea la vapeur des nuées, croquant sans remords et dans un même instant, le métal de l'intrus. Éther perçut nettement ses oreilles siffler et ses poils se dresser, la tablette lui servant de table osciller vers le bas, son ventre remonter dans sa gorge et un énorme hurlement – le vent ? Son propre cri ? – percer son crâne. L'impression d'être arrachée au siège fut si réelle qu'elle ne réfléchit pas à deux fois avant de tirer sur la poignée du parachute, son inconscient seul dictant ses gestes.

Que s'était-il passé, au juste ? Elle ne se rappelait que du choc des sangles contre son corps puis... sa vision, comme éteinte, ne laissant plus filtrer qu'un magma grisâtre et turbulent. La tempête ? Un éclair de lumière transperça ses iris, elle poussa une plainte, le souffle court.

« Qu-quoi ? »

Elle volait.

Ou plutôt non, elle chutait. Lentement, retenue par son parachute rectangulaire. Et il faisait jour. La lumière était ce soleil indécent de splendeur qu'elle s'était pris dans l’œil, une seconde. Automatiquement, la jeune femme enregistrait ce qu'elle pouvait percevoir : une étendue sans fin, blonde et sèche, quelques pics au lointain, plutôt en face, une forêt peut-être, extrêmement fournie, longue et dense, entourant ses monts blanchis. Le ciel, d'un azur criant de vérité, sans un seul petit nuage. Éther se sentit nauséeuse, elle avait mal à la tête, mal aux jambes, aux bras, mal partout ; elle ne pouvait sombrer. Non, pas maintenant, pas dans cet absurde état, c'était une question de vie ou de mort.

  • Reprends-toi, tu réfléchiras plus tard. D'abord, atterrir. Et le plus proche de cette zone verte serait le mieux, pas envie de mourir dans un désert.

Se parler à haute voix était une de ses habitudes, quand elle pouvait se le permettre. Cela l'aidait à se concentrer et elle en avait terriblement besoin.

Le sol devenait plus visible, plus aride, aussi. Elle sentit un remugle de peur ardente broyer son estomac lorsqu'elle se rendit compte qu'elle n'atteindrait pas la forêt. Qu'elle devrait marcher, et pendant combien de temps ? Son souffle était néant, sa gorge, couteau. Jamais une chute ne lui avait paru aussi longue.

Elle réussit à se positionner légèrement en retrait par rapport au matériel, se prépara au choc, ploya les jambes. La rencontre fut rude et elle partit en roulé-boulé, s'emmêlant totalement dans les fils ; un peu de sable sec envahit ses narines et sa bouche, elle toussa, ne bougea plus, laissant la voile soulever les fins grains dorés à l'arrière.

« J'ai mal... et tellement fatiguée. Envie de dormir, de m'abriter sous la toile et de dormir. »

Toutefois, l'idée de carboniser seule en un pays inconnu lui rendit l'énergie nécessaire au pliage.

  • Si je dois me protéger du soleil, que ce soit efficacement, sous plusieurs épaisseurs.

Se rappelant qu'elle possédait une petite bouteille d'eau et des fruits secs dans le bagage ventral, ainsi que son sac en bandoulière heureusement toujours solidement attaché et bien fermé, un soulagement non négligeable la fit s'asseoir à nouveau, tremblante. Eh bien on pouvait dire qu'elle était chanceuse dans son malheur. Jamais l'idée de ne manger que lorsqu'on avait faim ne lui parut aussi sensée ; qu'aurait-elle fait si elle s'était mise à grignoter dans l'avion toutes ses réserves ?

Une fois le matériel à nouveau bien rangé dans sa poche, quoique certainement alourdi de sable, Éther fit un tour d'horizon, repéra de nouveau les pics lointains aperçus du haut du ciel et s'y dirigea, le cœur battant à cent à l'heure.

  • Faut te calmer ma belle sinon tu vas pas survivre. Putain, me calmer ?! Non mais je suis sérieuse là ?! Je viens d'arriver dans un foutu autre monde alors que j'étais dans... dans !! 

Elle poussa un grand cri d'impuissance, sentit monter en elle une irréversible rupture et stoppa sa marche, haletante. Il n'y avait pas grand-chose à comprendre : soit elle s'adaptait, soit elle mourait. Elle ne se laisserait pas dominer par l'absurdité d'une situation où elle ne s'appelait plus Éther.

Cousant au pilori de la volonté ses restes de courage, la jeune femme avança, pas après pas, vers ce qui lui semblait son seul espoir de survie.


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