La Traque

Chapitre 7

Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 08:14

Chapitre 7

Un bip régulier résonna dans la pièce étrangement silencieuse. Ses mains posées à côté du téléphone devenaient moites. La voix enjouée de Garcia brisa enfin l'attente :

-Bureau du génie suprême ! Parlez, puisqu'il vous en laisse l'occasion…

Un faible sourire étira les lèvres d'Hotch avant de s'effacer derrière son habituel et impassible masque.

-Garcia. Je vais t'envoyer une photo. Je veux que tu identifies les trois inconnus sur ce cliché. Le deuxième s'appellerait « Brad » ou « Brendan » et le troisième « Max ». Je veux également que tu trouves immédiatement tout ce qu'il est possible de trouver concernant un potentiel suspect dénommé « Harper Hillman ».

Le souffle de Penelope s'emballa au bout du fil :

-Un suspect ? Parfait, je m'y mets tout de suite ! Restez en ligne, mes chéris.

Un concert de petits claquements suivit cette phrase. Hotch se représenta l'informaticienne en train de taper sur son clavier à toute vitesse, traquant dans les méandres du monde virtuel la moindre trace laissée par Hillman. Il lança un bref regard à son équipe qui attendait patiemment que Garcia les impressionne une fois de plus. Ses yeux s'arrêtèrent sur Reid qui, livide, fixait le téléphone avec une étrange intensité.

Un désagréable frisson parcourut le corps du chef de l'équipe et un profond malaise lui retourna l'estomac. La joute verbale qu'il venait d'y avoir entre l'inspecteur et Reid était des plus étranges.

Roger semblait croire que Reid était impliqué dans cette histoire.

Aaron serra les poings. Il était convaincu que son agent était incapable de prendre part à de tels massacres. Pourtant, lorsqu'il faisait abstraction de ses sentiments envers son collègue, il devait admettre que son comportement prêtait à confusion… Hotch nota mentalement qu'il devait à nouveau avoir une conversation avec lui, afin de comprendre ce qui le troublait et ce qui poussait l'inspecteur à l'attaquer ouvertement.

Soudain, la voix de Penelope le sortit de ses pensées :

-Trouvé ! Harper Hillman, trente-six ans, célibataire et joueur invétéré. Votre homme habitait à San Francisco avant de disparaître.

Hotch fronça les sourcils et la coupa brusquement.

Avant de disparaître » ?

Le ton de Garcia devint plus grave, hésitant :

-D'après ce que je lis, il a disparu de la surface de la terre il y a quelques mois, juste après notre deuxième meurtre. Il semblerait qu'il ait eu quelques petits problèmes avec le fisc et des prêteurs sur gage… Et ce, peu de temps avant que les meurtres ne commencent…

Dans un souffle, Morgan annonça :

-L'élément déclencheur…

Hotch opina pensivement, tout en songeant que ceci était beaucoup trop simple…

-Possible. Mais ne nous avançons pas. Merci Garcia. Je veux que tu lances un avis de recherche sur lui…

Sans attendre de réponse de sa part, légèrement troublé, il raccrocha puis leva les yeux vers son équipe qui attendait ses instructions.

-Vous allez rentrer à l'hôtel pour vous reposer quelques heures. Demain matin, nous présenterons le profil à la presse et nous lancerons un appel à témoin pour retrouver Hillman.

Il ne parla pas de ses doutes concernant ce suspect, puisqu'il s'agissait plus d'une conviction que d'une analyse objective.

-Ensuite, Roger, Morgan et Prentiss se rendront chez Harper Hillman pour voir si cet homme correspond ou non à notre profil. Reid, Rossi et moi-même, nous nous rendrons à l'université de Berkeley pour interroger les anciens professeurs des victimes et voir ce qu'ils ont à nous dire sur Hillman.

Il leva les yeux vers Reid et le vit se crisper. L'idée de retourner à l'université ne semblait pas lui plaire. Spencer leur cachait visiblement quelque chose à ce sujet, quelque chose d'important, sans aucun doute… Aaron songea qu'il était essentiel de découvrir rapidement de quoi il s'agissait.

Chassant ces pensées, il soupira légèrement, courbaturé et épuisé par cette journée, et conclut :

-En attendant que Garcia trouve quelque chose, rentrez à l'hôtel et passez une bonne nuit.

D'un signe de tête, il leur indiqua qu'ils pouvaient prendre congé. Il vit les corps de ses collègues se détendre, expulser la pression accumulée tout au long de la soirée et s'éloigner dans un brouhaha désordonné. Il voulut retenir Spencer afin d'avoir une nouvelle discussion avec lui, mais remarqua qu'il s'était déjà éclipsé.

Il fronça ses sourcils et ses yeux sombres se posèrent sur Morgan qui cherchait visiblement la même personne que lui, excédé et inquiet. Hotch se demanda un instant s'il était rassurant de constater qu'il n'était pas le seul à s'inquiéter pour le jeune agent… Mais en conclut plutôt le contraire.

La mine sombre, il observa pensivement les membres de son équipe sortir de la pièce et s'attarda sur l'inspecteur Roger qui paraissait préoccupé. Cet homme était-il plus lucide que lui et voyait-il chez Reid ce que sa proximité avec le jeune homme l'empêchait de voir ?

Le chef d'équipe soupira et passa une main lasse sur ses traits tirés. Il prit la photo abandonnée sur la table, avec la terrible impression qu'il lui manquait une pièce du puzzle pour tout comprendre.

Demain, il parlerait à Reid.

 


 

Ses mains pâles poussèrent un lourd battant qui céda sans un bruit pour le laisser sortir. Un vent frais aux parfums iodés balaya son visage et s'engouffra sous sa veste. Il sentit à peine le froid sur sa peau. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine et un sang bouillonnant et ardent fouettait ses membres.

Sans dire un mot, il quitta l'hôtel, s'engouffrant dans la nuit paisible. Le ciel dégagé s'ouvrait devant lui et la lune jetait une lumière fantasmagorique sur les rues vides. Ses mains tremblantes se posèrent sur son sac à bandoulière.

Cette nuit lui appartenait...

L'hôte se réjouissait déjà du festin qui leur était offert… Brandon vivait ses dernières heures, dans sa belle maison…

Soudain, un faible crissement retentit quelques mètres derrière lui et attira son attention. Bientôt, des bruits de pas brisèrent la lugubre magie de la pénombre silencieuse qui voilait les artères de la ville. Terrifié, Reid s'arrêta au beau milieu du trottoir, aux aguets et laissa ces pas se rapprocher de lui, immobile.

Quelqu'un le suivait.

Ses mains se crispèrent un peu plus sur son sac, sentant à travers le cuir la forme rassurante d'un couteau.

-Reid…

Il sursauta brusquement et se crispa violemment. Une colère sourde se mit à battre dans ses tempes lorsqu'il reconnut cette voix et il se retourna lentement vers Morgan qui se tenait à moins d'un mètre de lui. Il dut se faire violence pour ne pas laisser son oppressant besoin de tuer se décharger sur cet homme…

-…Morgan ?

Sa voix tremblait de fureur et d'incrédulité. Il ferma un instant les yeux et tenta une fois de plus de calmer ses instincts les plus primitifs qui lui ordonnaient de dégainer son couteau et d'en finir avec cet obstacle. Il avala sa salive avec difficulté et s'exprima sur un ton étrangement calme :

-Pourquoi m'as-tu suivi ?

Les mâchoires de son collègue se contractèrent légèrement :

-J'ai besoin de te parler… De te parler de ce qu'il s'est passé avec l'équipe de foot, il y a plus de dix ans.

Les pupilles de Reid se rétrécirent à l'extrême et ses poings se serrèrent violemment. Son cœur s'emballa et sa respiration devint sifflante. Dans un effort surhumain, il resta immobile :

-Il n'y a rien à dire.

Derek se mordit légèrement la lèvre inférieure, visiblement mal à l'aise, puis continua d'une voix assez mal assurée :

-Je pense que tu es impliqué dans notre affaire.

Spencer reçut cette déclaration comme une gifle. Sa main se glissa inconsciemment dans son sac et s'enroula autour du couteau. Le manche froid électrisa sa peau et une onde de choc agréable se répercuta dans tous ses membres, avant de se liquéfier et se lover dans son bas-ventre. La peur se liait au plaisir. Sa voix métallique et lointaine résonna dans la nuit :

-Pourquoi dis-tu ça ?

L'hôte lui sommait d'en finir immédiatement avec Morgan, tant qu'il ne s'y attendait pas… Reid visa alors distraitement la gorge de son collègue, tout en imaginant déjà le sang chaud de Derek jaillir de sa carotide sectionnée et éclabousser ses mains.

Une vague de plaisir et de désir le submergea à cette simple évocation.

Il écouta machinalement la réponse de Morgan, concentré sur la façon dont il allait laisser la lame déchirer sa peau chocolat :

-Tout tourne autour de cette équipe de foot… et tu agis d'une manière tellement étrange. Tu es mon ami, Spencer, je m'inquiète et je veux savoir…

Le mot « ami » le fit brusquement lâcher le couteau qui se réchauffait délicieusement au contact de sa paume. Il battit plusieurs fois des paupières et plongea son regard perdu dans celui de Derek.

Ami.

Il allait tuer son ami. Un ami dont le regard ne portait aucun jugement, juste une profonde inquiétude…

De l'affection, aussi. Oui. Il souffrait pour lui, avec lui. Déboussolé, Spencer sortit sa main désarmée de son sac et essaya de reprendre ses esprits.

-Je… euh… Je… n'ai rien fait de mal… Et nous avons déjà un suspect…

Sa défense était pitoyable, mais étrangement l'idée d'avoir épargné Morgan l'apaisait assez pour que son esprit en reste à sortir des excuses lamentables... Derek brisa aussitôt cet argument :

-Tu nous as donné ce suspect et il est introuvable… Parle-moi, Reid.

Le jeune homme fit un pas en arrière. Ses yeux se mirent à chercher désespérément une réponse dans ce ciel sombre et parsemé d'étoiles. Aussitôt, ses lèvres formèrent des mots qui coulèrent naturellement de ses lèvres et ses yeux se plongèrent dans les pupilles sombres de son collègue :

-Vérifie mon alibi pour ce week-end, si tu veux… Demande à Garcia de le faire… Je n'ai pas tué ces personnes.

Je les ai forcées à se tuer, nuança-t-il mentalement, tout en regardant avec sincérité son collègue. Derek le jaugea un instant, puis approuva doucement :

-D'accord. Je vais lui demander de vérifier.

Etrangement, cette phrase ne formalisa absolument pas le jeune homme qui réalisait doucement et avec horreur qu'il avait failli tuer son ami. Un silence pesant suivit cette déclaration. Derek croisa les bras sur son large torse, visiblement gêné par le froid et la tournure de la discussion. Il demanda enfin :

-Qu'est-ce que tu fais dehors à cette heure ?

La question finit de déstabiliser le jeune agent, mais il le cacha assez aisément et mentit avec une facilité déconcertante :

-Je n'arrive pas à dormir… et je… j'ai besoin de me rendre à…

un meurtre, conclut-il pour lui-même, avant de terminer la version officielle :

-… une réunion… Enfin, tu vois… J'ai besoin de parler… à quelqu'un… d'un certain problème qui revient parfois…

Il était sans aucun doute plus convenable d'avouer à un ami sa dépendance à la drogue plutôt que sa dépendance au meurtre. Le besoin de Dilaudid était clairement plus seyant que le besoin de tuer. Derek baissa les yeux et acquiesça doucement :

-Je vois. J'espère que ta « réunion » va bien se passer. Si tu as besoin de parler, je suis là… Bonne nuit, Reid.

Son collègue tourna les talons sans ajouter un mot et s'éloigna de lui. Une fois qu'il eut disparu de son champ de vision, un tremblement nerveux agita le corps du jeune homme qui se mit à respirer plus fort, partagé entre rage et panique.

Derek l'avait vu dehors… Un témoin l'avait aperçu seul, en pleine rue, au milieu de la nuit.

Etait-il sage de tuer ce soir ? Mais pouvait-il se permettre de faire encore patienter l'hôte ? Et surtout, une autre occasion se présenterait-elle à nouveau avant que l'équipe ne trouve Brandon ?

Un grognement rageur retroussa ses lèvres avant de se perdre dans la nuit.

Il pouvait toujours rattraper Morgan et le tuer… Mais cette option le rebutait et lui apporterait de nombreux ennuis.

Paniqué, il effaça donc cette solution de son esprit et se focalisa sur Brandon. Même si cet acte était imprudent, il devait le tuer.

Il passa anxieusement une main moite dans ses cheveux et se remit en marche vers la demeure de sa victime, échafaudant un rapide alibi… Il pouvait toujours prétendre qu'il s'était rendu à une réunion des Drogués Anonymes, comme il l'avait dit à Derek.

Et personne ne pourrait vérifier la véracité de ses propos puisque ces réunions préservaient l'anonymat de ses membres…

Sa respiration erratique se calma devant ce plan et sa démarche redevint plus souple et plus paisible. Il se força à se concentrer sur sa proie, à se détacher de ce malencontreux contretemps et se détendit enfin.

Il allait tuer, c'était l'essentiel.

Il continua son chemin dans la nuit, croisant de temps à temps une voiture sur la route et quelques badauds sur les trottoirs. Personne ne lui prêtait attention…

Il s'arrêta à plusieurs reprises, sortit un sachet de son sac à bandoulière et ramassa consciencieusement plusieurs objets qui trainaient sur les trottoirs.

Après une bonne quarantaine de minutes de marche entrecoupée d'arrêts, il reconnut la rue de Brandon et s'y engagea avec assurance. Il passa devant la plupart des maisons sans même leur adresser un regard, captivé par une grosse bâtisse entourée de végétations…

Les battements de son cœur résonnèrent dans la nuit, lorsqu'il arriva devant le petit portail. D'une main assurée, il sortit une paire de gant de sa poche et les enfila avant d'ouvrir la barrière de fer forgée qui grinça légèrement sur ses gonds. Il entra dans la propriété et s'engagea dans la cour pavée. Il jeta un œil critique à la pelouse parfaitement entretenue par les employés de maison puis nota que, comme prévu, la voiture de la femme de Brandon ne se trouvait pas dans l'allée. Son épouse, chirurgienne, était de garde ce soir.

Parfait. Un large sourire étira ses lèvres et flotta quelques secondes sur son visage.

Silencieusement, il se dirigea vers la droite de la maison où sommeillait un magnifique quercus agrifolia, appelé plus couramment chêne de Californie et, habilement, il commença à s'agripper aux branches et à grimper.

Après quelques semaines de recherches sur cette victime, il avait appris que le rez-de-chaussée de la maison était pourvu d'un performant système d'alarme mais que l'étage en était exempt.

Après avoir surveillé les habitudes de Brandon, lors de ses précédentes visites, il avait remarqué que cet idiot laissait toujours une fenêtre ouverte à l'étage... Spencer ne savait pas exactement sur quoi elle donnait - chambre, couloir, salle de bain ? -, mais y avait vu un moyen facile d'entrer dans la maison puisque les branches du quercus agrifolia caressaient cette façade de la demeure.

Avec une souplesse dont il s'était toujours cru exempt, il arriva assez vite à hauteur de la fenêtre. Sa respiration était rauque, bruyante… L'excitation l'emportait doucement. La présence de l'hôte était écrasante, mais bénéfique.

Debout sur sa branche, à moins d'un mètre de la maison, il s'approcha doucement de sa cible et aperçut par le trou béant un couloir.

Tant mieux Tomber directement dans la chambre de Brandon aurait pu rendre la tâche plus complexe.

Sans faire de bruit, il se pencha vers la fenêtre, lâcha les branches et arriva à s'agripper au chambranle. Lentement, il tira le reste de son corps et atterrit dans un bruit mat sur le sol du couloir.

Il retint aussitôt sa respiration et tendit l'oreille pour voir si sa petite chute avait réveillé ou non sa victime. Il sonda un moment le silence rassurant et se détendit.

Il se releva et enleva les feuilles accrochées à ses cheveux avant d'inspecter les lieux… Les murs de ce couloir étaient recouverts de cadres dorés et de photos de vacances. Avec colère, il reconnut l'Egypte, une île paradisiaque, Paris,… Il laissa ses mains glisser sur les murs tapissés avec art. Tant de plaisirs, tant de richesses qu'il n'avait pas mérités.

Mais il allait lui faire rembourser ses dettes.

A cette pensée, son corps se mit à bouillonner agréablement… Mais une ribambelle de souvenirs s'abattit soudainement sur lui. Il revit avec une horrible précision cette funeste soirée où, attaché à un goal de foot, encerclé par des porcs, il avait vu Brandon se placer entre ses jambes écartées et le souiller.

Une douleur sans nom lui scia les jambes et il s'écroula sur le tapis, les larmes aux yeux, tandis qu'un pieu lui transperçait le bas-ventre. Dans un hoquet étouffé, il serra les poings et sentit à nouveau le sang couler le long de ses cuisses.

Les traits de Brandon, déformé par un plaisir bestial et répugnant dansèrent sous ses yeux… Il entendit encore ses gémissements lascifs et la clameur des spectateurs… Leur folie, leur avidité, leurs mains sur lui, sur sa peau, partout.

Des dizaines de visages mus par la cruauté et la luxure l'obsédaient, tournaient dans son esprit et le ravageaient.

Il se roula en boule sur le sol, submergé par la violence de ses souvenirs et gémit doucement… Sa mère était morte en sachant tout ça.

Après quelques longues minutes de profonde douleur, il reprit ses esprits et se redressa, animé par un besoin omniprésent de défigurer ce visage qui, dans ses souvenirs, prenait plaisir à le souiller, à le violer. Le monstre en lui s'impatientait et se remémorait rageusement la turpide dont le jeune homme avait été victime…

Reprenant légèrement le contrôle de son corps, il balaya le couloir des yeux et compta les portes…

Neuf chambres.

Les battements de son cœur et sa respiration redevinrent erratiques. Il se dirigea sans hésiter vers la première et l'ouvrit. Un bureau vide.

Mauvaise pioche.

L'excitation reprenait ses droits et se liait à sa colère, pour un détonant mélange de sentiments contrastés et violents. Sans attendre plus longtemps, il se rendit à la seconde et l'ouvrit doucement… Une chambre vide et impersonnelle. Sans doute une chambre réservée aux invités.

La recherche le faisait délicieusement languir et se révélait assez excitante. Calmement, guidé par ses instincts, il se dirigea vers la porte suivante, posa une main déterminée sur la poignée et l'ouvrit.

Une odeur masculine et une moiteur désagréable frappa aussitôt son visage. Une respiration calme et régulière caressa l'air immobile… Cette pièce était bien plus sombre que les précédentes. Reid retint son souffle et s'avança doucement dans la chambre, laissant ses yeux s'habituer à cette dense obscurité. Un frisson parcourut ses membres et une chaleur agréable se mit à irradier d'une zone située sous son nombril.

Il aperçut bientôt une masse immobile déformer les draps qui couvraient un grand lit pour deux personnes. Son cœur rata un battement avant de s'élancer dans une course folle. Pour se calmer, il se força à détailler la chambre. La pièce était très spacieuse. Il discerna les contours d'une commode, d'une garde-robe et d'un petit fauteuil. Ses yeux glissèrent lentement dans la pénombre et tombèrent sur une porte ouverte. Une salle de bain ? Il ignora ce détail et continua sa minutieuse inspection, tout en surveillant la respiration de sa proie profondément endormie…

Il était à nouveau calme.

Soudain, il remarqua une grande forme sombre dressée à quelques mètres de lui et faillit pousser un cri de surprise. Un inconnu le fixait en silence, de l'autre côté de la chambre. Seul un hoquet étranglé lui échappa et la forme tressauta en même temps que lui. Saisi de stupeur, il comprit qu'il ne s'agissait que d'un miroir et laissa échapper un soupir de soulagement.

Il avait eu peur de son propre reflet.

Il se maudit mentalement et reporta son attention sur Brandon qui n'avait visiblement pas été troublé par le léger bruit qu'il venait d'émettre.

Spencer s'approcha encore un peu et avala avec difficulté sa salive, se trouvant tellement près de sa victime… Si près de la vengeance et du plaisir ultime qu'elle provoquerait. Délicatement, il glissa sa main dans son sac, rencontra le couteau et son arme à feu. Raisonnable, il opta pour son revolver qui impressionnerait bien plus sa victime que le couteau…

Délicatement, il s'assit sur le lit, juste à côté de Brandon… Il devina ses traits paisibles dans l'obscurité et la rage grandit encore plus en lui.

Son bourreau se reposait, repu de la souffrance qu'il lui avait autrefois infligée… Les lèvres du jeune homme tremblèrent violemment, agitées par la fureur qui l'animait…

Le canon de son arme se posa brusquement sur la tempe de l'homme endormi. Celui-ci se réveilla en sursaut et poussa un bref cri de surprise et d'horreur en voyant un intrus dans sa chambre à coucher. Il tenta de se relever, mais le canon glacial contre son crâne l'en dissuada aussitôt.

Spencer sentit l'homme trembler tout contre lui et sa voix mal assurée et encore légèrement endormie s'éleva doucement :

-Pitié… Je… Qu'est-ce que vous… me voulez ?... Qui… Qui… êtes-vous… ?

Un sourire cruel flotta sur les lèvres du jeune homme, mais il ne répondit pas tout de suite, se nourrissant de la terreur de sa victime.

Le jeu commençait…

A suivre…

 


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