Coca ou l'odeur

Chapitre 2 : Thermique

Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:26

Les plaquettes anti-incendie comportant le plan du bâtiment avaient éveillées sa curiosité, et il les déchiffrait maintenant bien à l’abri, dans un ancien local de stockage de Protectrons.

Il ne manqua pas de remarquer que l’immeuble était pourvu en série de portes hydrauliques, fait incompatible avec un simple hôpital.

De plus, il se releva d’un sursaut quand il pu lire la superficie totale du lieu.

 10 000 mètres carrés.

Autrement dit, impossible de caser tout ça dans les deux étages qu’il avait aperçus depuis l’extérieur. Il enclencha le verrouillage manuel de la porte et s’affala au sol. Il avait besoin de temps, pour réfléchir, pour appréhender.

 

Cette aubaine semblait trop belle pour être encore la, et malgré son relatif éloignement des routes de commerce il était incompréhensible de trouver ce lieu inviolé plus de cent années après le feu.

Gunnar…il n’avait pas menti, Coca devrait lui dire, sa méthode de récupération fonctionnait.

Peut-être les géniteurs de Gunnar lui prévoyaient-ils une apparence physique plus en rapport avec la majesté de son nom, mais les faits étaient la, ce nain difforme savait parler la langue des machines de l’ancien monde, et sans accent.

 

Adapter un radar d’aviation pour détecter les sources importantes de métal ne lui avait posé aucun problème, et une fois couplé à un des vieux scanners d’abri, la carte numérique s’était couverte de spots.

Rien d’inconnu jusque la, New Reno et Carson city au sud, Salt lake à l’est, sans compter les camps de raiders et les relais de caravaniers qui couvraient la route.

 

Mais plus au sud, à mi chemin d’Austin, se dégageait un écho puissant, qui les avait d’abord

laissés perplexes, puis rêveurs.

De tout les rôdeurs désespérés des terres désolées présents à Elko, nul ne fit mention d’une quelconque ville à cet endroit, même le chemin de fer ne passait pas la bas.

 

Voila.

 

Voila pourquoi Coca était la.

A des centaines de kilomètres de son lieu de départ, sans aucune idée de son but exact, emportant avec lui une balise sensée signaler une fois activée, à ceux restés en ville, une perspective de récupération alléchante.

 

Envisageant la possibilité d’un réseau souterrain étendu, il chargea dans son masque une cartouche NRBC, ne négligeant pas les risques de contamination chimique, et se le plaqua sur le visage.

 Il se dirigea ensuite vers le hall d’entrée du bâtiment, et récupéra les contacteurs de la porte qui lui avait fait barrage lors de son arrivée. 

Ce simple geste venait de lui rembourser ses frais de déplacement, la journée aurait pu commencer plus mal…ou finir plus tôt, repensant dans un frisson glacé à sa rencontre encore toute proche avec le fléau de griffes.

Son exploration des étages supérieurs, uniquement administratifs, n’avait fait que confirmer ses déductions; le reste était sous ses pieds.

Les escaliers menant au premier niveau inférieur débouchaient sur un poste de garde circulaire, un sas de portes en verre à sens unique de chaque coté.

Coca poussa la porte et s’engouffra dans la guérite où trônait l’inscription « Security Checkpoint ». Des cartes à puces et des badges s’entassaient sur le comptoir.

 Alors qu’il posait la main sur le panneau de vidéo surveillance pour tenter de l’activer, il pu entendre un pivot mécanique se mettre en marche, puis se verrouiller.

 

Trois détonations assourdissantes vinrent rompre le silence et soulever une volute d’éclats, de poussières et de béton haché.

Les impacts avaient traversés la cloison du poste de garde de part en part, arrachant les blindages d’acier qui muraient les parois. Le panneau de surveillance avait fait jaillir une gerbe d’étincelles avant d’imploser, entraînant également l’extinction des veilleuses des sorties de secours.

 

Un des projectiles avait atteint son paquetage, ce qui l’avait pulvérisé, l’impact du choc envoyant voler Coca à l’autre bout du poste et s’étaler lourdement sur le sol.

 Immobilisé par l’impact soudain, il eut le soulagement de constater toute absence de bruit et donc de mouvement mécanique. Il était hors champ.

 Une tourelle, Mk I. ou II , maximum. Les modèles ultérieurs ayant remplacés les projectiles balistiques par le Laser.

C’était une bonne nouvelle.

Les gyroscopes des Mark II. étaient à repérage et à désignation thermique, contrairement aux suivants qui agissaient grâce à la différence de pression d’air crée par le déplacement.

 Les uns pouvaient être dupés, pas les autres.

Elle était fixée au plafond du couloir et dirigée vers le lieu de son dernier tir, émettant des « clics » de manière cyclique, probablement venus du module d’acquisition de cible.

 

Coca calcula soigneusement ce qu’il savait potentiellement être ses derniers instants, malgré la sensation de l’adrénaline brûlante, qu’il sentait continuer de se consumer dans tout son corps.

Ce fut alors son instinct qui lui dicta d’enclencher le faible projecteur de son masque pour se sortir des ténèbres, puis, comme renforcé par cette lueur, il saisit un fragment de métal avant de l’entourer de son écharpe et d’en allumer l’extrémité.

Il jeta le tout par l’ouverture béante qu’avait créé ce soudain déferlement de balles venu d’un autre temps, et sûrement destiné à d’autres hommes.

 Il attendit jusqu’au verrouillage mécanique du pignon sur sa trajectoire de tir, puis s’en remis aux « Big Game ».

 

Les deux percuteurs de son Winchester frappèrent simultanément, coordonnés dans la destruction.

 La trappe d’alimentation jaillit de son renfoncement, laissant visible le tableau électrique de la machine implacable, qui laissait pleuvoir une gerbe de feu sur le leurre de tissu.

Une balle de 10mm s’extirpa du canon de l’antique 6520 de Coca, arrachant avec elle les tripes d’acier, laissées sans protection, de cette sentinelle véhémente.

L’implosion de l’engin dégagea un souffle brutal, mêlé de shrapnels incandescents, qui criblèrent la pièce et le couloir attenant.

 

Le silence était maintenant retombé et rien ne semblait plus pouvoir le troubler.

 Face à la carcasse roussie et encore brûlante, Coca envisageait les perspectives qui s’offraient à lui.

Il lui en avait coûté, pour triompher, de mettre le feu à cette écharpe, dernier lien physique avec un souvenir qui ne le tourmentait que trop ; il espéra dans un rictus que cette partie de sa mémoire se fusse consumée en même temps que l’objet.

Il constata toutefois avec désagrément que ses tripes se serrèrent à la simple réminiscence de ce fragment de vie… il s’y résigna, sachant qu’il pouvait toujours continuer à le fuir, et que telle risquait d’être sa conduite pendant encore longtemps.

 

Pendant un instant il avait quitté son corps, focalisé sur ce halo de passé qui lui avait jaillit au visage, mais il rattrapait maintenant son retard et s’employait à déterminer les composants de la tourelle dont il pourrait tirer profit.

A l’aide d’une tenaille, il pu extraire les calculateurs d’acquisition de cible ainsi que le rack de chargement, qui semblait encore bien garni.

A l’intérieur, une soixantaine de balles de BMG .50, suffisamment pour pouvoir prétendre semer une apocalypse mesurée. Il se demanda un instant si le Griffemort rencontré la haut rentrait dans la mesure de cette apocalypse, et s’en voulu presque de n’avoir pu le vérifier…

 

Plus troublant, la preuve d’une rémanence de puissance électrique dans le bâtiment, pourtant isolé et laissé à l’abandon, ne pouvait plus être discutée.

Alimenter pendant plus de 150 ans une tourelle, qu’il ne pouvait imaginer être la seule, un panneau de contrôle, et toute les veilleuses du centre, sans compter les installations qui lui étaient restés encore inconnues… ne pouvait se faire qu’en ayant recours a un seul type d’énergie…

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