Between Two Worlds - Acte 2

-Allez, Ruka, s’exclama une voix féminine. Nous allons arriver en retard !!  

-Selon Harry, ils y sont quasiment tous, ajouta une autre, ce serait dommage que nous soyons les derniers. 

-… Harry ? Mais qu'est-ce que vous racontez...

Le jeune homme ouvrit alors les yeux et découvrit avec stupeur qu’il se retrouvait dans un lit, mais pas n’importe lequel, son propre lit lorsqu’il vivait avec sa mère et sa sœur à Netbourg. 

-Ma chambre ? Il n’y a pas un problème... ?

Le jeune homme regarda de gauche à droite, retrouvant ses étagères remplis de mangas, divers livres et jeux, son bureau mal rangé comme toujours. 

Essayant de se poser des questions du pourquoi du comment il se retrouvait là, il réalisa en même temps que ces voix lui étaient très familières, ce qui lui donna un coup d’adrénaline pour vite se lever de son nid douillet afin de rejoindre le salon en bas des escaliers.

-Mam’, je t’assure que je ne trouve pas ton appareil photo, dit la voix plus jeune en fouillant des tiroirs. Tu es sûr de ne pas l’avoir oublié dans la voiture ? 

-Mais si, ma chérie, cherche encore un peu, souffla celle dans la cuisine. Oh ! Ruka, est-ce que tu- tu n'es toujours pas prêt ! 

-Maman ? Amélys ?

Ruka fut quelque peu déstabiliser, cela faisait longtemps qu’il n’avait pas vu un tel cadre, une vie de famille tranquille chez eux comme avant. Possédant une teinte rassurante et des cheveux ébène allant jusqu’au milieu du dos, Mélissa préparait un plat avec des œufs, toujours fidèle à elle-même avec son tablier à fleurs lorsqu’elle faisait de la cuisine.  

Et de l’autre côté du séjour se trouvait Amélys la tête dans un meuble pour trouver cette fameuse appareil photo, elle portait un short en jean et un t-shirt à rayures blanches et bleues et ses cheveux mi- long ébènes étaient tout défrisés. Une coiffure qu’elle aimait faire lors des périodes de détente comme un weekend ou des vacances. 

La mère posa sa terrine sur la table de travail de la cuisine et posa ses mains sur ses hanches en fixant Ruka, avec un air exaspéré. 

-Tu viens juste de te réveiller en plus ! Et ton pyjama, tu ne devais pas me le mettre dans le panier des linges sales ? 

-Quoi... ? Mais... Qu’est-ce que vous faîtes ici ? Ou du moins “on”-

Un mal de tête interrompit le jeune homme qui se tint sur la rambarde d’une main, et l’autre sur le front comme si une fièvre venait de faire irruption, heureusement pour lui ce fut rapide. 

-Attends une seconde, dit la mère en croisant les bras, tu ne serais pas en train de faire semblant pour ne pas aller au pique-nique, j’espère ? 

- Sérieusement, Ru’ ! Amélys se retira du meuble, visiblement déçue de n’avoir rien trouvé. Et en plus toujours en pyjama ! Franchement, comment fait Harry pour te supporter, tu es si long à la détente... 

-H-hey ! J’avais juste oublié que nous devons aller à…

Le jeune homme s’arrêta en plein milieu avec un air confus, « Où est-ce que c’est déjà ? Ma mémoire est en train de de me jouer des tours ? », Pensa-t-il. 

- Allô la Terre, ici Amélys ! Du nerf, va vite te prendre une douche, on s’occupe d’arranger le panier pique-nique pendant ce temps. 

- J’espère que ta collègue, Elisa, aura fait sa fameuse tarte aux poires, dit la mère avec un air tout émerveillé, ou même, le fameux curry d’Hugo… 

- Euh, maman, t’es en train de baver là au-dessus de la terrine, soupira Amélys.

- A-ahem, désolé, dit-elle avec surprise avant d’afficher un sourire gêné. Vous en avez bien de la chance d’avoir des amis qui savent cuisiner, quand j’étais jeune, j’étais la seule de mon groupe d’amis. 

- C’est vrai qu’on peut faire des choses sympas, reprit Amélys, sauf que dans le tas, Ruka ne sait pas vraiment cuisiner, si ce n’est chauffer une pizza ou des pâtes ! 

- Mais t’as fini de m’embêter ? Tu n’as pas pu manger ta barre de céréales “bio” du matin ou quoi ?! 

- C’est toi qui as mangé ma dernière barre d’ailleurs, s’affola Amélys en s’approchant de Ruka, avoue-le !

Les deux enfants se mirent à se chamailler comme à leur habitude pour une raison stupidement en premier lieu, Ruka essayait tout au mieux de décrédibiliser sa sœur et cette dernière ajoutant encore et encore des arguments pour prouver la stupidité de son frère. 

Pendant leur dispute, Melissa reprit sa terrine et l’ouvrit pour admirer la cuisson de sa quiche aux œufs, « Parfait, j’espère que le goût restera même si ça devient froid », se disait-elle. 

A ce même moment, les chaînes sur la télé se mirent à défiler, attrapant l’attention de la mère qui leva la tête vers l’écran, contrairement aux jumeaux qui eux, ne semblaient rien avoir remarqué.  

La télé s’arrêta sur la chaîne d’infos nationale, avec une femme blonde à robe noire en tant que présentatrice. Ses lèvres avaient beau bouger mais ce fut impossible pour Melissa de comprendre un traître mot de ce qu’elle disait, ce qui l’irrita un peu. 

- Bon, ça suffit, dit-elle en haussant la voix, vous avez tous les deux 19 ans et j’ai l’impression de voir deux bambins se disputant pour un hochet ! Alors vous vous calmez, sinon je vous promets qu’on passera les vacances à la montagne, hors des réseaux ! 

- Désolé, maman… s'excusèrent-ils en même temps.

Cependant malgré leur excuse auprès de leur mère, ceci ne les empêcha pas de continuer à se fusiller du regard. Le premier regardant ailleurs aura perdu, chose qu’ils font depuis petit sans même forcément annoncer ce jeu à haute voix, ce qui exaspéra Mélissa mais pouvant enfin écouter ce que disait la journaliste à l’écran.

Journaliste : […] Parlons maintenant de l’actualité du jour, un événement immanquable dans tout Reality. Tout du moins, ceux étant dans l’hémisphère de la planète où le soleil frappe encore dans les huit prochaines heures. L’éclipse solaire fera son apparition à partir de 13h15, et d’après les calculs de $@!?#+&, elle sera complète à 13h31. Donc si vous voulez la contempler, n’oubliez surtout pas vos lunettes spéciales éclipse conçu par $@!? #+& de A à Z afin que vous ne ratiez rien de cet événement incroyable ! Bénéficiez d’aucune perte de perception et voyez précisément les contours lumineux que créé le soleil derrière la lune… Sur ce, c’est la fin du journal de midi…

La journaliste termina donc sa présentation avec les détails sur le coucher du soleil et la levée, les saints du jour et futures météos dans la semaine qui se promettait d’être plutôt beau en général. 

Mais avant qu’elle disparaisse de l’écran, la présentatrice changea soudainement d’apparence pendant une toute petite seconde, très rapidement. Selon le point de vue de Ruka, il avait seulement aperçu que sa chevelure était devenue blanche et longue, et sa taille s’était drôlement rapetissée. Sans compter les deux choses ressemblant à des cornes qu’il crut voir sur son crâne.  

Pendant que les dames s’extasiaient à l’idée de pouvoir voir l’éclipse solaire pendant le pique-nique, quelque chose semblait turlupiner Ruka qui eut un mal de crâne à nouveau soudain. 

- Je… c’est moi ou, la présentatrice s’est transformée à la toute fin ? Et de quelle entreprise elle parlait, je n’ai rien compris…  Demanda-t-il d’un air embêté. 

- Qu’est-ce que tu nous fais là, Ruka, répondit Amélys de manière confuse, tu ferais mieux d’arrêter de jouer à tes jeux vidéo, ça n’aide pas.

La remarque fit réagir le jeune homme qui fusilla du regard sa sœur. 

- Mais rien du tout ! Et puis d’abord c’est toi qui- 

- Ruka ! L’interrompit Melissa en haussant sa voix. Tu vas prendre une bonne douche tout de suite et te préparer comme il faut, on part d’ici 20 minutes. Amélys, tu laisses tranquille ton frère, on charge déjà la voiture avec ce qu’il faut pour le pique-nique. 

- Oui, maman... Répondirent-ils en même temps après un soupir.

Aussitôt l’ordre reçu, les deux enfants se séparèrent avec un regard pouvant dire « Ce n’est pas fini », sauf que c’était de bonne guerre. Les jumeaux ont toujours eu cette forme de rivalité depuis leur tendre enfance, sans que cela ne dégénère en quelque chose de sérieux. Mais par moment cette gaminerie fatiguait leur mère, Melissa.

Après avoir fait un tour dans sa chambre pour récupérer ses futures affaires, un jean noir avec un sweat blanc à divers motifs, le jeune Ruka s’en alla enfin dans la fameuse douche. 

Une fois la tête sous l’eau sortant du pommeau, il eut encore une fois ce sentiment de malaise, comme si quelque chose ne semblait pas être à sa place et ce mal de crâne insistant lorsqu’il tentait de comprendre ce qui lui arrive. A force, il décida de simplement suivre ce qui devait se faire, finir cette douche, s’habiller, et rejoindre sa famille pour ce fameux pique-nique avec leurs proches.

Mais au-dessus de lui, au-dessus même de leur maison, au-delà du ciel, une personne quasi omnisciente observait les faits et gestes de Ruka de manière attentive, à travers une sphère. 

- Pauvre enfant… marmonna cette mystérieuse personne d’une petite voix. Inconsciemment il essaye de se protéger de la réalité, en créant sa propre réalité… Mais visiblement, son âme brûle assez pour ne pas rester enfermer dans sa propre boucle... Continuons d’observer…

Quelques trentaine de minutes plus tard, de nouveau du côté de la famille Lorens...

- Ne roule pas trop vite, Amélys, lui suggéra Melissa, nous ne sommes pas en retard… 

- Je fais que respecter les limitations de vitesse, mam’ ! Broncha la fille. Ici c’est 60 autorisé. 

- Pourtant je n’arrive pas à compter les vaches sur les champs donc… 

- Tu as sûrement oublié tes lentilles de contact, dit Ruka en soupirant contre la fenêtre. 

- Effectivement ! C’était donc pour ça que les gens dans la ville avaient une tête étrange… Je pensais que c’était un maquillage, une nouvelle mode.

Les deux enfants se mirent à soupirer bruyamment lorsque la mère finit sa profonde réflexion. Melissa a beau être une mère aimante et emplie de sagesse, mais il lui arrivait d’être souvent tête en l’air, un trait surtout transmis à Ruka contrairement à Amélys qui semblait l’avoir esquivé.

Il était 12h46, la petite voiture familiale conduit par Amélys arriva enfin au rendez-vous au bout de plusieurs minutes. A l’ouest de West Coast se trouvait un grand îlot naturel, hors de la technologie et l’extravagance des villes, cet endroit avait pour nom : Plateau verdoyant.

Dans cet espace naturel se trouvait plusieurs lacs et collines avec une pelouse des plus resplendissantes, le charme de ce lieu est surtout qu’il n’a jamais été touché par les prouesses de la technologie. Aucun produit n’a été utilisé pour la croissance des plantes et les animaux y vivent sereinement, les enfants n’en voyant pas souvent dans les villes, s’amusaient avec ceux vivant en ce lieu. Il y avait tout de même des gardiens pour s’occuper de ce grand îlot possédant plusieurs secteurs et garder un écosystème le plus équilibré possible.

Une fois la voiture garée, la famille Lorens se hâta pour décharger la voiture de tout ce qu’ils auront besoin, table de pique-nique portatif, les nourritures préparées et divers snacks… Les voilà enfin en route pour rejoindre leurs proches dans le secteur 7 du plateau verdoyant. La particularité de ce secteur était la présence des arbres de sakura donnant un magnifique paysage avec le lac juste derrière et la petite forêt non loin. 

- Les voilà enfin, s’écria un homme à lunettes à quelques mètres devant les Lorens, c’est encore Ruka qui vous a retardé, j’imagine ? 

- C’était si dur à deviner ? Bravo, Harry, s’exclama Amélys en riant. 

- Laissez-moi vous aider, lança Hugo en venant à la rencontre des trois nouveaux arrivants, une dame comme vous ne devrait pas porter quelque chose d’aussi lourd. 

- Ne vous en faîtes pas, Hugo, dit Melissa en faisant non de la tête, je n’en ai peut-être pas l’air, mais je suis une femme plutôt forte ! 

- Vous devriez vous ménager madame Lorens, insista le majordome de Linda, à 41 ans vous ne devriez pas forcer vos muscles alors qu’il est à peine-

Melissa s’arrêta net à la remarque d’Hugo, son expression devint tout à coup ferme et vexé, il était facile de comprendre que le majordome avait touché un point sensible qu’il ne fallait pas. Afin d’éviter de rester dans les environs lorsqu’elle explosera, les deux enfants continuèrent à avancer jusqu’aux autres près du grand arbre, le seul n’étant pas un sakura. 

Harry s’occupait de la grillade avec Linda qui était son assistante, jugeant si la cuisson était bonne ou non. Assise sur un drap blanc posé sur l’herbe se trouvait Linda, la collègue de Ruka qui s’était bien familiarisé avec les autres depuis maintenant plusieurs mois, cela lui faisait toujours bizarre de la voir ici. 

- Ruka ! Amélys ! S’écria Linda en les voyant s’approcher. Vous avez vu ce gros soleil ? Nous allons passer un merveilleux après-midi, j’en suis certaine ! 

- Je n’en doute pas une seconde, répondit Amélys en déposant le kit de pique-nique, tout va bien de votre côté ? 

- Impeccable, Hugo est clairement le meilleur conducteur de tout le pays, impossible de le détrôner ! Lança Harry en retournant une entrecôte. 

- C’est clair, ajouta Elisa, en même temps qui oserait faire un drift sur la 38e route tout en sachant qu’il y a déjà eu plusieurs accidents à cause des courses de nuit… T’es sûr que c’est qu’un simple majordome ? Lança-t-elle à Linda. 

- Hm… De ce que je sais, oui ? Mais il est vrai qu’il possède pleins de qualités, des fois je me demande même si ce n’est pas un androïde tellement il sait en faire des choses. Mais au moins je suis rassurée lorsqu’il est avec moi, finit-elle en souriant avant de jeter son regard sur Ruka, et toi Ruka, tu vas bien ? 

- Moi ? Et bien- 

- Bien sûr toi ! Il n’en existe pas plusieurs de Ruka ici ! L’interrompit Harry en le pointant avec son ustensile. 

- Oui, oui bon, j’ai un peu dormi dans la voiture mais je vais bien merci. Juste quelques maux de tête ce matin mais rien de grave… 

- Tu es sûr de ne pas faire une fièvre au moins ? Reprit Linda en s’approchant de Ruka pour mettre le dos de sa main sur son front. 

- Tu es sympa, Linda… Mais tu sais, Ruka n’est plus un petit garçon… Soupira Amélys en dépliant la table et les bancs attachés, s’asseyant ensuite dessus.

Au contact de la main de Linda, Ruka sentit sa tête bouillir, ce n’était pas désagréable mais il faisait très chaud tout d’un coup. A ce même moment avec la gêne, il lança son regard de droite à gauche et remarqua Harry en train de le regarder d’un air ennuyé et Elisa regardant à l’opposé. 

« C’est vrai que Harry éprouve toujours des sentiments pour Linda… », pensa le jeune homme. Il attrapa doucement le poignet de cette dernière afin d’y enlever sa main, faisant ensuite un petit sourire pour ne pas qu’elle s’inquiète encore plus. 

- C… ça va aller, j’ai juste trop joué hier en rentrant du boulot…

« D’ailleurs, qu’ai-je fait hier… Je ne m’en souviens pas… », se demanda-t-il juste après. 

- Et pourtant je t’avais dit de ne pas trop veiller après la sortie du boulot ! Fit remarquer Elisa. Tu fais vraiment qu’à ta tête… Bon sang. 

- Elles s’inquiètent toutes pour toi, tu devrais faire des efforts quand même, dit Amélys en ouvrant déjà une canette. 

- Mais je n’ai rien demandé de tout ça, moi ! 

- Sauf que tu oublies que tu es tellement désespérant qu’on se sentirait mal de t’abandonner, annonça Harry en riant, pour ma part je te fais assez confiance… Enfin, on dirait que ce n’est pas le cas pour la princesse et Elisa. 

- M-mais… Harry ! Ne m’appelle pas comme ça ! Rouspéta Linda en gonflant sa joue. 

- Alors pour ma part… dit Elisa avant de racler sa gorge, c’est surtout que je ne préfère pas que son état s’aggrave, au boulot il a toujours cet air fatigué alors autant qu’il soit actif aujourd’hui.  

- Tu as des merveilleux amis, dis donc, hmph, huhu, se mit à rire Linda doucement. 

- Merveilleux, hein… Souffla Ruka en haussant d’un sourcil.

« Mais en fait… Depuis quand est-ce que Linda est si intégré dans ma vie… ?», pensa à nouveau Ruka. 

Le ciel s’assombrit tout à coup, pas d’un noir profond, mais la lumière du soleil devint de moins en moins présente. En levant la tête, ils comprirent tous que c’était le début de la fameuse éclipse comme avait prévenu la journaliste à la télé.