Schisma : Tourment [Webtoon Concours 2022]

Chapitre 0 : Prologue - Filet

Ce chapitre est en prélecture...

1374 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 07/07/2021 22:25

Ce chapitre est en prélecture...

Pas âme qui vive dans cette maison. La jeune femme déambulait dans chaque pièce du rez-de-chaussée. Elle retourna dans le hall. Le porte manteau à gauche de la porte d'entrée était vide, aucune paire de chaussures ne traînaient sur le tapis. Rien d'étonnant pour la jeune fille, dont les parents s'absentaient régulièrement pour des raisons professionnelles, mais où étaient donc passées les affaires de son cher frère ?

Elle contourna la table ronde au centre de la pièce, glissant ses doigts sur la surface vide en bois d'ébène et s'approcha de la commode - où était disposé un miroir ovale accroché au mur, profitant de remettre en place sa frange blonde et examina ses yeux vairons. Un bleu dragée teintait l'œil droit, tandis que le vert pistache prenait possession de l'autre.

— Le boulot de nuit ne te sied guère Eliah, murmura-t-elle - effleurant du bout des doigts les cernes dessinées sous son regard.

Aucunement la faute des jeux vidéo, dont elle pouvait y jouer des heures une fois rentrée du travail, se persuada-t-elle, remarquant la statuette sur la commode. Encore un achat compulsif de sa mère... Elle attrapa l'objet en question et le scruta sous toutes les coutures. Quelle drôle de guêpe que voilà. L'insecte volant possédait d'énormes yeux globuleux, à en donner des frissons. Eliah déposa aussitôt le bibelot et déposa délicatement ses mains sur la commode, pour souffler un peu et s'observa de nouveau dans la glace. Elle haussa un sourcil étonné découvrant ses yeux entièrement vert. Clignant des yeux à plusieurs reprises, elle secoua la tête pensant sincèrement que la fatigue lui jouait des tours et ne s'attarda pas dessus plus longtemps.


Eliah emprunta les escaliers menant à leur chambre respective. Une éternité semblait s'être écoulée depuis leur envol, quand elle arriva au premier étage. Sa chambre se trouvait tout au fond du couloir à gauche, en face de celle de son frère. En pénétrant dans la sienne, la blonde grimaça en voyant l'affreux papier rose tapissé sur les parois. À quel moment de son humble existence avait-elle souhaité cela ? La malheureuse n'en avait aucun souvenir.

Un bruit retentit au rez-de-chaussée. Une porte qui claque.

— Eziel ? Appela la jeune femme.

Sans réponse, Eliah héla une nouvelle fois le prénom de son frère. Le silence. Surprise et quelque peu saoulé, elle sortit dans le couloir et tendit une oreille - plus attentive. Elle ne rêvait pas. Quelqu'un était bel et bien présent dans la maison. « Eziel » répéta-t-elle.

— Putain, la masturbation rend vraiment sourd ! hurla-t-elle - dans l'espoir d'obtenir une réponse.

Sans succès. Pourtant, le boucan survenait de nouveau et courrait dans l'entièreté de la maison. Pourquoi faisait-il autant de vacarme ?

La blonde regarda sur sa gauche, après avoir détecté quelque chose - du moins un tableau pendu à la cloison. Une peinture à l'huile... ou bien à l'acrylique... Peu importe, elle ne connaissait pas grand-chose à l'art.

L'obscurité envahissait la clairière rocheuse. Le loup hurlait au sommet, non pas au clair de lune, mais semblait asseoir sa domination face au sanglier agonisant à ras du sol, tandis que le chien maîtrisait le renard jappant de douleur. Complètement indifférents à cette scène sordide, la chèvre et l'âne broutaient tranquillement dans leur coin. Une pique d'adrénaline s'empara d'Eliah qui continuait à regarder le tableau avec crainte et curiosité. Où sa mère avait pu dénicher un tableau aussi lugubre ? Ce n'était pas dans ses habitudes. La jeune fille lorgna sur la toute petite brèche à gauche, bien dissimulée à travers ses innombrables pierres, persuadée de voir des yeux - observant le spectacle dans la pénombre. Un frisson d'effroi parcourut son échine. Étrange, vraiment très étrange...

Eliah retourna sur ses pas, remarquant que la décoration du mur avait drastiquement changé.

— Ça ne m'a même pas sauté aux yeux quand je suis arrivée, murmura-t-elle - haussant les épaules.

Les motifs et couleurs criardes la laissèrent tout de même dubitative. Depuis quand les parents avaient des goûts aussi douteux ? Probablement la crise de la cinquantaine. Ils auraient mieux fait de rénover les escaliers en bois qui grinçaient à chaque pression, légère aussi soit-elle.


Le salon, vieux comme le monde, se ternissait au fil du temps et à chaque coup de vent qui frappait les vitres, les murs se délabraient. Depuis quand avaient-ils cessé d'entretenir leur nid douillet ? Elle jeta un coup d'œil dehors, obnubilée par les tourbillons qui dansaient autour de la maison.

Les lumières se mirent soudainement à clignoter. Un énorme fracas - comme si l'on avait brisé un verre en mille morceaux - résonnèrent dans toute la demeure. Les parois vibrèrent sous des grognements. Instinctivement, Eliah tourna sur elle-même, cherchant la source de ce bruit terrifiant. Plus qu'un frisson, des sueurs chaudes émanèrent de son corps en apercevant, dans la pièce voisine, une silhouette enveloppée dans de la fumée noire - un peu trop imposante à son goût. Ses jambes se paralysèrent l'empêchant de bouger quand celle-ci s'avançait d'un pas latent dans sa direction.

Plus que paniquée, son corps ne lui obéissait toujours pas. S'apprêtant à se faire attraper par cette masse difforme, Eliah réussit enfin à sortir de sa torpeur et se rua vers la première porte et s'enferma à double tour.

Balayant rapidement la pièce du regard, malgré un faible éclairage, elle reconnut la salle de bain. À première vue, rien d'alarmant. À première vue... Des bougies étaient disposées un peu partout.

Bam. Bam. BAM. L'individu à l'extérieur martelait de plus en plus fort la porte. À cette allure, le barrage qui les séparait allait céder d'un instant à l'autre. Baladant son regard dans chaque recoin de la pièce, elle se focalisa sur la fenêtre en face d'elle. Unique échappatoire et pourtant condamné de l'autre côté par des planches en bois. Peut-être se briseraient-elles sous son poids, si elle prenait assez d'élan ? En espérant qu'elle parvienne à casser les carreaux avant.

N'ayant pas le temps de tergiverser en voyant la porte de plus en plus branlante, elle fonça sur la seule issue de secours possible, mais se retrouva instantanément projetée en arrière, le dos touchant le sol en premier, accentuant la douleur de sa chute. Se relevant péniblement, la personne qu'elle fuyait, démolie la barrière et la plaqua au sol. Eliah cria. Enfin, elle essayait de crier. Aucun son ne sortait de sa bouche.

Le corps de son agresseur venait l'écraser lourdement contre le sien. Sa vision se flouta. Sa gorge se noua. Le souffle chaud de son assaillant venait se glisser au creux de son cou. Elle ferma les yeux, terrorisée à l'idée de lui faire face. L'individu prenait le temps de la renifler. À croire qu'il se délectait de sa peur.

— Tic tac, tic tac, c'est bientôt l'heure, murmurait-il tout gaiement.

Toujours muette, Eliah hurlait de tout son être, suppliant silencieusement que quelqu'un vienne la sauver. Plissant plus fermement ses paupières, elle espérait que sa mort soit rapide et indolore.

Soudain, elle se sentit tombée - comme absorbée par un gouffre.


La jeune femme ouvrit grand les yeux, parvenant enfin à se réveiller de son cauchemar. C'est ce qu'elle croyait, mais son assaillant était toujours là, sans visage, où elle ne discernait que la masse noirâtre et vaporeuse qui l'enveloppait. Au-dessus d'elle, prêt à la dévorer.

— On se revoit bientôt, susurra-t-il, relâchant lentement son emprise - disparaissant tel un mirage.

Eliah - les yeux écarquillés - resta pendant de sempiternelles secondes figée, avant de réaliser qu'elle était libre de tout mouvement et ancrée dans la réalité. Elle s'assit au milieu de son lit, le corps tremblotant, se frottant frénétiquement les bras pour effacer toute trace de ce mauvais rêve, puis éclata en sanglots.


Laisser un commentaire ?