Divalis : l'éveil

Chapitre 9 : Le divalis

3727 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 24/08/2022 10:16

Dès notre réveil, nous nous sommes éloignés de la civilisation humaine. La chance veut nous sourire, car nous avons rejoint le parc de Berezinsky. Même si c’est une biosphère dans laquelle une quantité considérable de touristes se déplacent, ces zones boisées sont assez vastes pour nous cacher.

Vlase marche en tête de meute. Nous sommes dans une zone humide. Le marais est peu profond et ne forme que quelques étendues d’eau, par-ci, par-là. Abysse est juste devant moi, elle file le train à Buntar lui-même derrière Sansa qui colle Vlase, puisqu’elle a peur de Dagan. Mais, si nous sommes vigilants, ce n’est pas à cause de lui. Il y a des tourbières ici. Le canidé et moi-même en connaissons le danger et si Sansa ne s’en approche pas. Ce n’est pas le cas des deux plus grands qui trouvent amusant de provoquer des remous avec leurs pattes.

Je suis plutôt étonnée que Dagan aussi soit prudent. Voire trop par moments, puisqu’il prend garde à ne pas une seule fois toucher l’eau. Les moustiques l’agressent depuis un moment, puisqu’il est dénué de pelage et qu’il ne nous a pas écoutés quand on lui a dit de se rouler dans la vase. Vlase vient de s’immobiliser, alors nous le rattrapons.

 

 –On peut passer par les chemins créés par les humains, mais c’est risquer d’en croiser sur les passerelles, dis-je à Vlase.

–Nous n’avons pas le choix d’après le plan que je vois là, pointe-t-il d’un mouvement de tête le panneau.

–Tu sais lire ? M’étonné-je.

–Caractéristique commune aux cryptides, chérie, tu t’en souviens ? Ricane le renard.

–Pour le parler, mais j'ignorais que cela impliquait aussi la lecture.

–Parlé ou écrit, le fait que l’on puisse comprendre toutes formes de langages est déjà aberrant en soi, réplique Dagan.

–Pourquoi aberrant ? M’étonné-je en me retournant.

–Les humains doivent apprendre à lire et à écrire, ce n’est pas inné pour eux, explique Vlase.

 

Je viens de comprendre pourquoi je trouvais mes camarades de classe nuls à l’école… Je n’y avais pas pris garde puisque les adultes eux lisaient normalement. Je pensais que cela venait au fur et à mesure. Un peu comme à la chasse, on s’améliore avec la pratique.

Enfin, nous voici à emprunter le ponton qui traverse les tourbières. Sansa marche devant Vlase, Buntar devant moi et Abysse devant Dagan qui clôt la marche. Chaque adulte surveille un jeune au cas où ils viendraient à tomber ou simplement avoir la brillante idée de descendre.

 

–Papa, qu’est-ce que l’on fait si l'on croise les humains, demande Buntar.

–Tu restes où tu es, nous les ferons reculer, affirme le canidé.

–Et si l'on tombe pendant que l'on en croise ? Ajoute Abysse.

–Restez bien près de nous quoi qu’il arrive, réplique Dagan en donnant un léger coup de museau à la coïste.

 

Celle-ci se retourne, amusée vers le mâle rouge qui lui sourit tout en se redressant, joueur. Le chemin est plutôt long jusqu’à ce que l’on en atteigne l’autre bout et avec cette chaleur, il est presque insupportable de marcher à découvert avec uniquement de la vase autour de nous.

 

–Qu’est-ce que je donnerais pour de l’eau fraîche, plaisanté-je.

–Moi aussi ! Et, j'ai faim, me répond Abysse.

–Tu as toujours faim, Abysse, ricane Buntar.

–Même pas vrai ! Grommelle la bleue.

 

Le canidé vert se retourne vers elle pour lui tirer la langue, Abysse s’énerve, mais Dagan vient se porter à sa hauteur, lui murmurant une information que je ne peux pas entendre à son oreille, ce qui la fait rire. Buntar penche la tête, sans savoir ce qu’il vient de lui dire.

 

–Qu'est-ce qu’il a dit ? Se vexe le jeune renard.

–Ça, c’est un secret entre Dagan et moi, dit Abysse en se redressant avec un sourire espiègle.

 

Je souris, puis surprend le regard que Vlase vient d’avoir vers nous. Buntar râle devant moi et plusieurs fois, je passe ma tête contre l’un de ces flancs pour l’empêcher de tomber. Alors qu’il marche dangereusement près du bord, quand il se retourne pour narguer Abysse.

La chance nous sourit une fois de plus, car nous n’avons croisé aucun humain, pendant la traversée. Nous voici de nouveau dans la taïga, sous le couvert des arbres, mais l'ombre n’est pas suffisante et avec cette chaleur, nous avons besoin de boire. A présent, il nous faut trouver une rivière qui n’est pas asséchée. Notre seule option est de suivre le lit en espérant trouver des de l’eau. Vlase pour ne pas changer est devant avec Sansa qui ne s’en décolle pas, Abysse et Buntar eux jouent de leurs côtés et Dagan est à la traîne. Je m’arrête de ce fait pour l’attendre et aller à son rythme.

 

–Ça va, tu suis ?

–J’essaie. Je n’ai pas l’habitude de marcher autant, je n’avais pas besoin de le faire là où j’étais.

–En parlant de ça, l’entité, pourquoi est-ce qu’elle ne nous parle plus ?

–Kotcheï est une sorte de magie avec une conscience. Il vit dans ce monde et dans tous les autres en même temps. Il a besoin d’une attache pour pouvoir y interagir et en général, il possède un corps ou un objet.

–Je suis certaine d’avoir entendu ce nom dans le folklore slave, un esprit démoniaque appartenant au monde des morts.

–C’est cela. Rien ne vivait dans le monde où j’étais. Il n’y avait rien d’autre que la terre, le ciel, l’eau, des arbres morts. Il y avait des feux follets aussi. Si je n’ai pas perdu la tête avec toutes ces années, c’est grâce à eux, au souvenir qu’ils referment. Kotcheï me parlait aussi, il m’a éduqué pour me préparer un minimum à rejoindre mon monde.

–Mais… C’est bien le monde de Kotcheï ? Alors, comment ton alpha a fait pour t’y conduire ?

–Hum, Kotcheï m’a parlé d’un lien qu’il avait avec Aérin et que c’était grâce à cela qu’elle pouvait aller dans son monde.

–En partant du principe que c’est son monde à lui. Il ne pouvait pas te libérer lui-même ?

–Pour être franc, je n’en sais rien. Je m’en suis déjà posé la question. La lune rouge est connue pour accroître le pouvoir des démons et elle a aussi un effet sur nous.

–Ah bon ? Dis-je en penchant la tête.

–Ben oui, il me dévisage alors, pensif. Quel âge as-tu ?

–Seize ans.

–Ah, tu n’es pas encore mature, réplique-t-il.

 

Je le regarde en levant un sourcil. Moi, pas mature, j’en rirai bien ! Dagan s’assied presque en se laissant tomber.

 

–Ils n’ont pas envie de ralentir l’allure, je n'en peux plus, halète le divalis.

 

Je me retourne vers le groupe en émettant une sorte d’aboiement pour attirer l’attention des canidés et de la coïste qui reviennent de ce fait vers nous. Sansa reste en retrait alors que les trois autres, viennent s’asseoir près de nous.

 

–Alors le sans-poil, on peine à suivre ? Ricane Vlase.

–Ah, ça va, je n’ai pas l’habitude des longues marches, râle le rouge.

–Que sais-tu faire hormis parler de ton monde sans vie ? Rajoute le renard.

 

Dagan plaque ses oreilles sur son crâne en fusillant Vlase des yeux. Je me redresse de ce fait, donnant volontairement un coup de queue dans la tête de Vlase. Rien de violent, mais juste de quoi le distraire.

 

–La chaleur nous tape tous sur le système. Ce ne serait peut-être pas plus mal de rester ici jusqu’à ce qu’il fasse nuit, il fera plus frais pour marcher, proposé-je.

–Mouais, ce n’est pas une mauvaise idée, Sansa est épuisée, ajoute le canidé en se tournant sur sa filleule qui s’aplatit immédiatement.

 

J’observe la renarde qui me paraît plus réservée que d’habitude. Vlase s’éloigne en grattant à plusieurs endroits le lit de la rivière pour trouver de l’eau. Je laisse Dagan à Abysse et Buntar qui se sont rués dessus et je rejoins le canidé.

 

–Sansa n’a pas l’air bien, dis-je doucement.

–Parce que tu te soucies d’elle ? Rétorque froidement Vlase.

–Pourquoi je ne le ferai pas ? Répliqué-je, étonnée par cette attaque gratuite.

–Tu ne nous regardes plus depuis que Sans-Poil est là, continue le canidé toujours occupé à gratter le sol.

 

Je fais alors le tour venant face à lui, lui faisant de ce fait redresser le cou pour qu’il me regarde.

 

–Je rêve ou tu es jaloux ? Et, toi alors ? Tu hurlais à tue-tête des journées entières pour trouver d’autres femelles. Est-ce que je t’en ai voulu ? Répliqué-je agressive.

–Tu le sais qu’il y a parfois des meutes nomades, on te l’a expliqué, avance le renard.

–Parce qu’ils auraient accepté deux individus étrangers à leur race ? Réfuté-je, moqueuse.

–Oui, car elles auraient compris que vous étiez avec moi, répond Vlase.

–Je n’en suis pas certaine, enfin, pour en revenir à Sansa. Elle a un problème ?

–Non, elle a juste peur de Tout-Nu. Rappelle-toi qu’il lui a fallu du temps pour se faire à ta présence, explique simplement Vlase.

–Dagan… J’ai eu pitié de lui. Ce n’est pas parce qu’il est de mon espèce qu’il aura un traitement de faveur, lui expliqué-je sans vraiment savoir pourquoi.

 

Le renard me sourit, venant glisser son museau contre le mien, ce qui me fait sursauter. Puis, le voici reparti à ses fouilles. Je soupire et regarde les plaques d’ardoises qui jonche le lit de la rivière en me demandant si je pourrais y trouver de l’eau si je les soulève ? Je me place à côté du plus proche, me pose contre et tente de le pousser. Je ne fais que du sur place, mes pattes glissant dans la terre poussiéreuse. Je me retrouve étalée au sol… Bonne idée.

Je me redresse et regarde Dagan, Abysse et Buntar qui m’ont rejoint en se demandant ce que je voulais faire. Leurs têtes penchées sur le côté… Je ris, leur expliquant mon idée et me voici avec de l’assistance pour pousser le caillou qui n’a pas envie de coopérer. Dagan se porte un peu plus contre, tout en poussant Abysse doucement, pour qu’elle lui laisse la place, plaçant son épaule contre, la soulève et réussir à la faire rouler sur le côté. Génial, il y a bien un peu d’eau !

Buntar et Abysse ont si soif, que ceux-ci viennent à s’échanger des coups de dents pour l’atteindre en premier. Je montre les dents à Buntar, venant le frapper de mes antérieurs pour le faire reculer. Ce qu’il fait directement en s’aplatissant. Abysse se jette sur l’eau, j’attends un peu et alors que je viens vers elle. Celle-ci se place au-dessus pour m’empêcher d’atteindre la petite flaque. Encore une fois, j’agis de la même façon, bousculant la coïste qui se couche aussi vite au sol, les oreilles aplaties et sa queue sous son ventre. Je regarde Buntar, l’autorisant à venir boire ce qu’Abysse a bien voulu lui laisser.

 

–Partagez au lieu de vous disputer ! Vous avez vu comment on a trouvé de l’eau, faites pareil en travaillant ensemble, les disputé-je.

 

Ils opinent du chef et s'éloignent, cherchant d'autres pierres à soulever. Vlase se rapproche de nous. J’en baisse les oreilles, me voûte et coince ma queue sous mon ventre, de crainte qu’il prenne mal ce que je viens de faire à son fils. Il s’immobilise et me regarde avec un air narquois.

 

–Si tu veux être prise au sérieux, éviter de te soumettre juste après, ricane Vlase.

–Tu es fille d’alpha après tout, réplique Dagan.

–Je n’ai rien d’un chef, je les ai juste empêchés de se battre, soufflé-je.

–Un alpha se doit d’être effrayant pour se faire respecter par les siens, ajoute Dagan.

–Heureusement que je ne suis pas les codes de ma race au pied de la lettre, réplique alors Vlase.

–Tu renies tes origines ? S’en indigne Dagan.

–Si je devais suivre mon instinct et mes mœurs, Sans-Poil, je ferai de toi un oméga et te chasserai de MA meute, gronde Vlase en lui montrant les dents.

–Mais, ce n’est pas TA meute ! Aéon ne t’appartient pas, s’échauffe le rouge.

 

Je me suis un peu reculée, mais les dernières paroles de Dagan me font vivement me retourner sur lui.

 

 –A toi non plus ! Dis-je en lui montrant les crocs.

 

Je retourne vers les jeunes voir s’ils s’en sortent avec l’eau. Vlase, lui, regarde Dagan avec un sourire espiègle.

 

–Tu as le don de l’énerver, ajoute-t-il au rouge, avant de partir à son tour.

 

Dagan reste sur place, portant nerveusement la tête sur le côté en tiquant. J’ai les yeux dessus. Je n’aime pas jouer les brutes... J’ai toujours cette sensation qui me demande de me rendre à un nouveau lieu cette fois… Nous nous sommes finalement allongés pour le restant de la journée. Le rouge me colle et cela m’agace quelque peu. Vlase, Abysse et Buntar le font, eux aussi,, mais j’ai moins cette sensation d’intrusion. Il est dans mon dos. Je suis enroulée contre Abysse, au point que je vais finir par me piquer à ces épines dorsales. Buntar est devant elle, allongé sur le dos, Vlase contre lui et Sansa blottie contre Vlase.

La soirée tombe finalement et la fraîcheur nous motive déjà un peu plus à reprendre la route. Vlase en tête, les jeunes au milieu, Dagan et moi en fin de file. Je m’étire tout en avançant et me retourne sur le rouge, qui me regarde en souriant.

 

–Quoi ?

–Rien, quand tu fais ça, ton pelage se hérisse sur ton dos, ç'a un côté comique.

–À défaut d’être impressionnante.

–Tu n’as pas besoin de le paraître pour l’être. Tu as du caractère, affirme Dagan.

–Pas tant que cela.

–Pour notre espèce, être alpha, n’est pas qu’une question de position hiérarchique. C’est aussi une caractéristique, explique Dagan.

–Une caractéristique ?

–Il n’y a qu’un seul alpha par génération. Elle n’est pas que notre chef, elle est aussi celle qui possède l’esprit de ruche.

–Qui est ?

–Une capacité qui soumet les autres. Avec de l’expérience, elle peut également le faire avec les autres espèces. Tu imagines ? Avec ce pouvoir, tu n’aurais pas à te montrer agressive avec Buntar et Abysse, il te suffirait de les regarder pour qu’ils s’écrasent et arrêtent de se battre.

 

Je le dévisage alors qu’il m’explique cela. Est-il sérieux ?

 

–Et c’est unique à l’alpha ?

–Oui.

–Comment peux-tu être certain que je suis la petite-fille d’Aérin ?

–Il n’y a que sa lignée à avoir un pelage doré et Kotcheï ne peut pas se tromper là-dessus.

–Il avait un lien avec elle… Tu penses qu’il peut aussi exister entre lui et moi ?

–Je n’en sais rien. Tout ce que je peux te dire, c’est que l’éclipse de lune amplifie les pouvoirs de Kotcheï et que tu étais là où Aérin avait ouvert le portail par le passé. 

–Ton alpha utilisait son pouvoir de la ruche ?

–Rarement, d’après les explications de Kotcheï. Chez les Divalis, les Alphas ont toujours été des femelles, peut-être qu’elles sont plus… Posées que les mâles, ajoute Dagan.

–Comment tu le sais que ce n'étaient que des femelles ?

–Ca, c’est Kotcheï qui me l’a montré via les feux follets. Aérin et ses… Celles d’avant se reproduisent sans mâle, m'explique-t-il en essayant lui-même de comprendre ce qu’il explique.

–La parthénogenèse.

–La quoi ? Me demande-t-il, ahuri.

–Certaines espèces comme les insectes et les reptiles en sont capables. C’est un peu comme du clonage. Les filles sont génétiquement identiques aux mères, j’avais vu ça dans un documentaire qui passait à la télé, dis-je plutôt ravie de lui apprendre quelque chose.

 

Après plusieurs heures de marche, nous sommes enfin tombés sur un ruisseau peu profond pour nous y désaltérer. J'ignore si c’est la soif ou la lourdeur de l'atmosphère qui en est la cause, mais j’ai mal à la tête depuis mon réveil et cela devient de plus en plus violent. Ce n’est pas la première fois, mais voilà un moment que je n’en avais pas eu d’aussi forts.

Malgré le fait que l’on ait trouvé Dagan, le clan continue d'aller dans la direction que je leur indique. La faim commence aussi à nous titiller. Nous n’avons pas croisé d’animaux. Sans doute parce qu’ils restent sous le couvert des ombres en journée. Mais, nous entendons des chevreuils aboyer. J’échange un regard avec Vlase et sans un mot, la meute se dirige vers leur appel. Vlase se tapit dans les fourrés. Ce sont des brocards, ils sont plusieurs mais un seul nous suffira.

Vlase ordonne à Dagan et Sansa de rester sur le côté, ce qui ne plaît pas à la renarde. Abysse et Buntar vont chasser pour la première fois une grosse proie avec nous. Vlase se place en embuscade tandis que nous contournons les cervidés, attendant que chacun s'organise. Je suis celle qui arrivera par-derrière et de ce fait, c’est à moi à lancer l’attaque.

Je m’élance et les cervidés détalent dans un élan de panique en direction de Vlase, Abysse et Buntar qui sortent des fourrés et les empêchent de s’éparpiller. Nous les talonnons, ils ne sont pas rapides. En revanche, ce n’est pas pour ça qu’il faut les sous-estimer. Leurs sabots peuvent quand même nous entailler et il est facile pour eux de nous crever les yeux.

Abysse et Buntar regardent les chevreuils avec envie, moi, c’est avec un poids dans l'estomac. Pourtant, j’ai conscience qu’il faut tuer pour survivre, que je ne suis pas exclusivement herbivore. Depuis l'élan, je suis toujours en stress quand je poursuis une proie. Mon cœur bat plus vite que de raison et mes crocs veulent inutilement mordre. Alors, je suis ravie d’avoir le rôle de rabatteuse. Le cervidé est bien plus petit et donc plus facile à mettre à mort. Dagan et Sansa nous rejoignent, les plus jeunes se servent en premier. Dagan est resté près de nous, il regarde la prise, d'un drôle d’œil.

 

–J’y pense, mais que mangeais-tu, s’il n’y avait que des feux follets ? Demandé-je au rouge.

–Je buvais dans la rivière de sang, m’explique ce dernier.

–Donc, tu n’as jamais chassé, se tourne Vlase sur lui.

 

Le mâle secoue la tête en guise de réponse.

 

–Tu apprendras comme les autres, réplique le renard.

 

Nous attendons que Sansa et Buntar s’arrêtent pour faire reculer Abysse. Nous n’y prêtions pas attention au début puisqu’elle était un bébé en pleine croissance. En revanche, elle a tendance à se goinfrer, parfois à en être malade quand il s’agit de grosses proies. Je me penche sur la carcasse, toujours avec cette réticente à mordre dedans, avant de me décider à me servir.

Dagan lui aussi hésite à manger. Il le renifle et lèche la chair ensanglantée. J’y pense, mais, s’il n’a jamais mordu dans rien, il ne doit avoir aucune force dans la mâchoire ? Il se décide à arracher un lambeau de chair.

 

–N’en mange pas trop ou tu vas être malade, lui conseille le canidé.

 

Je souris à cette attention qu’il vient d’avoir à l’égard du divalis tout en balançant ma queue. Dagan se crispe soudain et rend ce qu’il vient d’avaler.

 

–Il faudrait trouver de la nourriture qu’il digérait plus facilement, suggérè-je à Vlase.

–Cela sera pareil, il est comme un renardeau. Son estomac n’est pas habitué à digérer du solide, explique le renard.

–Et comment je fais pour m’y habituer ? Grommelle Dagan.

–On va devoir t’y aider. Comme un bébé ! Rit Vlase.

 –J’espère que tu n’es pas en train d'affirmer qu'il faut prédigéré sa nourriture ? J’ajoute avec dégoût.

–Littéralement comme un bébé, tu veux dire ? Non merci, c’est bon, je vais simplement boire le sang, ne vous prenez pas la tête pour ça, intervient Dagan.

 

Je pensais qu’ils allaient en rester là… Mais, Vlase compte bien nourrir Dagan comme un renardeau au déplaisir de celui-ci. Cela m’avait franchement dégouté quand les renardes le faisaient avec Dogost et Buntar.


Laisser un commentaire ?