Cœur sur Papier

Chapitre 7 : Ma petite Hortense

822 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 21/05/2022 22:59

Ma petite Hortense,

Comment te portes-tu ? J’espère que tu vas mieux, que tu ne souffres pas, que tu peux être heureuse. Je te souhaite tant de belles choses là où tu es, tant de belles choses que j’aurais aimé pouvoir t’offrir si seulement tu avais pu rester à mes côtés.

Tu as passé neuf longs et beaux mois auprès de moi, c’est là tout ce que nous avons eu la chance de partager. Ils étaient emplis de doux moments dont j’ai le souvenir. Ton papa n’arrêtait pas de rire quand je m’inquiétais de savoir si ton prénom allait te plaire, nous avons beaucoup ri aussi quand on imaginait que tu n’aimerais sûrement pas mes bouillies de légumes. Nous avons pris beaucoup de plaisir à préparer ta chambre ensemble, à aller chercher ta poussette. Nous étions prêts à t’accueillir afin que tu sois bien, que tu sois chez toi.

Quand il fut temps pour toi de sortir, tout s’est compliqué… On a dû m’endormir pour te libérer en urgence, mais à mon réveil tu n’étais déjà plus parmi nous, mon petit ange.

Et personne n’a pu m’en expliquer la raison. Je voulais juste savoir, j’avais besoin d’une réponse, j’avais besoin qu’on réponde au « pourquoi » qui ne quittait pas mes lèvres, qui ne quittait pas mon cœur.

Je n’ai pas compris pourquoi, pourquoi une chose comme ça devait s’abattre sur toi, sur nous, sur toute notre famille. Je t’ai beaucoup pleurée… Je te pleure encore, maintenant que j’aperçois les petits cercles faisant gondoler le papier sur lequel je t’écris. Tout le monde ne cesse de me répéter de ne me pas m’en vouloir, que ce n’est pas ma faute. Je crois qu’ils ne peuvent pas comprendre ce que je ressens, je ne leur en veux pas ; comment me dire que ce n’est pas ma faute lorsque c’est en moi que tu as grandi ?

Tu sais, ils ont tous été si gentils à l’hôpital. Ils étaient présents, il y avait plein de monde, je ne m’en souviens pas bien, mes pensées concernant ce moment sont un peu brouillées… Je me rappelle leurs visages, leurs bras qui m’entouraient, leurs voix. Ton papa était là aussi, il a toujours su être là… On continue de se soutenir aujourd’hui, on sait qu’on s’aime et qu’on est là l’un pour l’autre.

Tu me manques toujours tu sais. Les jours passent, les semaines aussi, mais ne t’inquiète pas, je ne suis pas près de t’oublier. La tristesse de notre séparation si rude reste, à mes côtés, une compagne silencieuse mais dont la présence est bien lourde. J’apprends à vivre avec elle, et à percevoir que d’autres émotions, desquelles je me croyais définitivement privée, reviennent désormais furtivement. Je me surprends à sourire devant un livre agréable, sous les premiers rayons du soleil d’avril, encore un peu timides à cette période de l’année. J’espère que tu serais heureuse de ça, je culpabilise parfois de retrouver un peu de bonheur, comme si je ne le méritais pas encore.

Ma petite Hortense, il est vrai que nous ressentons ton absence à la maison, mais tu sais, en fait, tu es partout. Dans chaque petite fleur qui éclot, à travers les gazouillis des oiseaux, je sens que tu es un peu là avec moi, avec nous. Je le sens profondément dans mon cœur, au fond de moi… Alors dans ces moments si délicats, si précieux, je m’enlace. Les autres mamans endeuillées font ce geste, comme moi : c’est comme si je t’enlaçais toi, alors que je ne le peux pas. Ces moments me font ressentir un sentiment particulier liant mélancolie et tendresse…

Je reprends mon souffle doucement, je respire peu à peu un nouvel air. Je prononce parfois ton nom, pour te faire encore exister, pour te célébrer.

Nous restons ensemble malgré tout, toujours.

                                                                                             Ta maman qui t’aime plus fort que tout au monde


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