Opération Serenaris : la plage qui recelait un dieu

Chapitre 1 : Tension

2859 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 28/08/2024 17:21

|| Avant-propos ||

Cette nouvelle a été créée par mes soins au cours d’un concours d’écriture sur un serveur discord dédié, exactement comme ma précédente nouvelle intitulé Le prix de l’insouciance.

Tout de même, il existe des différences notables entre ces deux histoires, puisque la consigne était cette fois-ci de créer une nouvelle de science-fiction portant sur le sujet « vacances à la plage ». Nous avions un peu plus d’un mois pour l’écrire, et elle devait contenir entre 2500 et 8000 mots.

Ça n’a pas été de tout repos pour moi. Je ne suis pas un grand lecteur de SF, et ça a été la première fois que j’en écrivais. Je suis quand même assez satisfait du résultat pour le poster sur FFR.

Je tiens aussi à préciser que je scinderai la nouvelle en plusieurs chapitres, afin que ce soit plus digeste à lire. La suite arrivera dans quelques jours, elle est d’ores et déjà écrite, et je ne tarderai pas à la publier. Bonne lecture !



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Journal de bord du capitaine Valeria, responsable de la 1re brigade d’exploration d’OGEEP industries

Entrée n°2436, 26 août 3802, 8h56


Nous approchons de Serenaris. Environ deux heures de voyage à vitesse lumière devrais suffire à atteindre sa surface.

La planète est désormais assez proche pour que nous puissions utiliser nos scanners. Serenaris nous promet à mon équipage et moi une mission peu palpitante. Presque entièrement constitué d’océans et de sables, des ressources florales ont été détecté en faible quantité, et seul quelques bactéries indiquent que la planète pourrait être propice à la vie animale dans un futur lointain. Il semblerait donc que Serenaris soit un jeune astre, au premier stade de son évolution. Il lui faudra encore plusieurs millénaires de maturation pour que cette planète puisse produire des ressources intéressantes aux yeux de notre glorieuse entreprise.

Malgré tout, notre mission n’en est pas moins nécessaire. Nous ne trouverons probablement rien à exploiter, ce n’est pas pour autant que l’exploration doit être négligée. Serenaris n’est encore sur aucune base de données car située à l’extrémité de la galaxie. Il est absolument capital qu’elle soit découverte, pour qu’elle devienne officiellement la propriété d’OGEEP Industries.

Je mènerai ma 97ème mission d’exploration à bien quoiqu’il advienne.

 

 

Valeria appuie sur l’une des commandes du tableau de bord, afin d’éteindre son journal holographique. Le texte projeté devant elle disparaît brusquement, et la pièce de vie retombe dans l’obscurité. La femme regarde à travers la grande vitre en face d’elle. Le vide infini de l’espace l’entoure, ce vide si familier pour une exploratrice comme elle. Et dire qu’elle aurait pu ne jamais connaitre cela. Et dire qu’elle aurait pu rester coincée à vie sur la planète miteuse qui lui sert de lieu de naissance. Jamais Valeria ne se sentira assez reconnaissante envers l’entreprise qu’elle sert. Des hauts gradés d’OGEEP Industries lui avaient laissée faire ses preuves dans sa jeunesse, puis ils l’ont sortie de la misère pour faire d’elle ce qu’elle est aujourd’hui.

    Elle s’étire pour détendre ses muscles, puis fait tourner la chaise de son bureau sur elle-même avant de pousser un long bâillement. La porte s’ouvre dans un bruit métallique sec, et dévoile Lucius son second. Instantanément, Valeria ferme la bouche et se redresse. Elle toise l’homme qui vient d’entrer. Lucius est de taille moyenne, musclé par ses années de service au sein d’OGEEP Industries. Sa combinaison bleu marine, ainsi que sa pose très droite met en valeur ses pectoraux. La beauté et la justesse de ses traits de visage, cernés par des cheveux noirs en bataille et une barbe fraîchement rasé feraient presque oublier ses cicatrices ainsi que ses cernes écrasants.

« - Ma capitaine. » lui dit son second d’un ton froid très professionnel.

« - Repos. Qu’est-ce qui t’amènes dans mes quartiers ?

- Vous êtes attendu. Ce n’est qu’une question d’heures avant que l’atterrissage ait lieu, vos hommes veulent connaître l’organisation de la mission afin de se préparer au mieux. 

- Je comptais vous rejoindre prochainement. Je vous remercie tout de même de me le rappeler. » réplique Valeria d’un ton faussement poli pour masquer son agacement.

    Lucius hoche la tête, puis tourne les talons. Les épaules de Valeria s’affaissent à nouveau. Elle prend la veste pendue à sa chaise, et sort de la pièce à son tour d’un pas déterminé.

Il faudra que je lui rappelle de ne pas entrer dans ma salle de repos. Il commence à me taper sur les nerfs celui-là.

 


Valeria accède à la salle de réunion des quartiers principaux du vaisseau. Construite dans une forme ovale, cette pièce est de loin la plus spacieuse. Des murs lisses d’un blanc éclatant les entourent, et sur ces derniers sont accrochés de grands écrans. Au milieu, comme mobilier, un plateau circulaire flotte au-dessus du sol, autour duquel treize fauteuils ont été installés. L’entièreté des membres de l’équipage s’y sont réunis, dans l’attente du capitaine.

    Elle sent à peine le poids des regards de ses équipiers, pour la plupart très distrait. À sa droite, Lucius s’est assis avec autour de lui la majorité des explorateurs, à savoir Owen, Liam, Luna, Clément, Elya, Alicia et Joseph. Plus à gauche, les trois techniciens, Axel, Roxane et Archibald ont à peine remarqué la venue de leur supérieur et sont pris dans une grande discussion sur l’état de la carrosserie du vaisseau. Enfin, un peu à l’écart des autres, Caleb, une jeune recrue talentueuse, est resté debout dans l’attente de la venue de Valeria et la fixe. Pour la première fois, la capitaine le remarque réellement. Son physique est tout l’opposé de celui de Lucius, à commencer par ses cheveux blonds mi-long impeccablement coiffés. Ses muscles sont fins et noueux, cependant, il compense ce manque de masse musculaire par un corps très athlétique. Quant à son visage, il est lui, resté complètement vierge de toute trace de blessure ou de fatigue, témoignant de sa jeunesse dans leur périlleux métier.

    La capitaine détourne son regard de celui de Caleb, et s’assoit à son tour en bout de table. Les discussions s’arrêtent alors. Les occupants du vaisseau sont pendus aux lèvres de Valeria.

« - Je vois que tout le monde est présent, annonce-t-elle solennellement. Sans plus attendre, commençons. »

    Une modélisation 3d de la surface de Serenaris est projeté au milieu de la table.

« - D’après les relevés que j’ai reçu de notre équipe technique, nous sommes face à une jeune planète. Elle est pratiquement uniquement constituée de sable, ainsi que de grandes étendues d’eau. Le climat y est agréable, en plus d’avoir une très bonne qualité d’air. Et à part des êtres vivants microscopiques, rien qui ne ressemblerait à un prédateur pourrait gêner notre mission. »

    Ses équipiers ne peuvent retenir des soupirs de soulagement. Une fois le calme revenu, Valeria poursuit.

« - Idem pour la flore, quelques traces éparses résident, dit-elle en pointant du doigt de minuscules points verts sur la carte. Ne vous réjouissez pas trop vite ! Nous avons toujours une mission à remplir.

- S’il n’y a ni flore, ni faune, quel intérêt avons-nous à traîner longtemps dans les parages ? » intervient Lucius. Des hochements de tête approbateurs des sept explorateurs suivent sa question. Sans trahir son impatience, Valeria lui répond.

« - Cette planète a été découverte récemment. Si la première brigade d’exploration d’OGEEP Industries y a été envoyée, ce n’est pas pour rien. Serenaris doit être recensée rapidement, et nous devrons faire des prélèvements sur place, pour ramener avec nous plusieurs échantillons de sables, d’eau, et de toutes les autres ressources digne d’intérêt que nous trouverons. Ce ne sera pas une brillante intervention. Simplement une mission de routine, qui n’en perd pas moins en importance. »

    Le visage de Lucius est déformé par une moue d’insatisfaction. Autour de lui, les autres explorateurs s’échangent des regards déçus. L’un d’entre eux, un grand homme roux nommé Owen prend la parole.

« - Ma capitaine. Sauf votre respect… Nous sommes impatients - et je le pense même vous, de retrouver nos foyers. C’est d’autant plus frustrant que votre plan d’action risque de s’éterniser, et tout ça pour quelques prélèvements inutiles qui traîneront à jamais dans les bureaux d’OGEEP Industries.

- Navré, mais non vous ne rentrerez pas plus tôt que prévu à vos domiciles. De ma carrière, je n’ai jamais bâclé de mission au nom de mon bien-être. Nous servons des forces qui nous dépassent ! Au sein de ce vaisseau, vous n’êtes pas des individus mais vous appartenez à un collectif. » rétorque-t-elle fermement.

    Valeria parcourt du regard l’assemblée d’explorateur. Ils lèvent les yeux au ciel et serrent les poings, sauf Caleb. Toujours détaché de ses coéquipiers, il affiche un sourire en coin.

« - Je ne veux plus entendre d’objections. Vos propos étaient à la limite du diffamatoire envers notre cause. Je sais me montrer magnanime, cependant un autre écart pourrait bien vous coûtez votre position. Cette remarque s’adresse à tout le monde. »

    Aucune protestation. Les membres de l’équipage se tiennent droit comme des piquets et valident ses propos d’un hochement de tête à l’unisson - y compris les techniciens, pourtant peu investis dans la réunion jusque-là. Valeria se relève de sa chaise, puis presse un bouton en dessous du plateau afin de faire disparaître la modélisation.

« - Bien. Puisque vous avez eu votre mise au point, préparez-vous. Lucius, Caleb, Liam, Luna, Owen, Clément, Elya, Joseph, et Alicia, je veux que vous soyez prêt dans une demi-heure, en combinaison, et avec le matos nécessaire. Les techniciens, avec moi dans la salle des commandes. »

 


La demi-heure passée, les membres de la 1ère brigade d’exploration se sont réunis. Valeria, à présent parquée avec ses équipiers dans la cale, attend. Tous portent la tenue des brigades d’exploration au complet. Cette dernière est constituée d’épaisses pièces d’armures noirs, enfilés au-dessus de leur combinaison bleu marine. Les casques ont été laissés de côté car jugé inutile, puisque la planète est respirable pour un être humain.

    Faiblement éclairé, le vaisseau bringuebale à cause de la violence de l’entrée dans l’atmosphère. Autour d’eux, les caisses de matériels glissent d’un bout à l’autre de la cale, et les explorateurs se débrouillent comme ils peuvent pour ne pas perdre l’équilibre. Impassible, Valeria active le microphone situé sur son poignet.

« - Journal de bord, entrée n°2437, 26 août 3802. (Elle regarde un petit écran intégré au bras de son armure d’un vif mouvement de tête.) L’atterrissage est imminent. Nous devrions arriver dans une zone plane en bord de mer. Les journées sur cette planète durent 34 heures 43 minutes. Nous devrons impérativement installer une zone de déploiement autour du vaisseau avant ce soir, puis commencer les opérations. Je suis confiante envers nos capacités. Si la mission se déroule correctement, ça ne sera qu’une question de jours. »

    Pas une remarque, pas un mouvement pouvant trahir une quelconque colère ou frustration n’émanent de ses équipiers. Valeria en tire une grande satisfaction. Elle éteint le microphone et s’accroche à une barre en fer au-dessus d’elle. La voix d’Archibald, le technicien vétéran, s’élève du haut-parleur.

« Le vaisseau va toucher le sol. Attention à la… »

    Une secousse ébranle la cale et ses occupants. Habitués à la délicatesse de ce genre de voyage, la plupart tiennent debout. Le vaisseau se stabilise, puis les moteurs s’éteignent. Brûlante de se mettre en action, la capitaine mène la marche et s’avance en direction de la porte. Cette dernière commence lentement à coulisser vers la droite, laissant un rayon de lumière filtré. Valeria met sa main en visière, et continue d’avancer. Sous ses pieds, une passerelle se déploie pour permettre une descente tranquille entre le vaisseau et le sol. Elle l’emprunte, les autres explorateurs derrière la suivent.

    La première chose qui la frappe, c’est la douceur du sable. Un sable fin, à la texture agréable, dans lequel son pied s’enfonce mollement. Elle s’éloigne du vaisseau, pour se diriger vers un étrange arbre situé devant elle. Un palmier, au tronc couleur mauve et aux feuilles d’un vert très foncé, réside, seul, au sommet d’une dune. Curieuse, la capitaine entreprend d’escalader la butte de sable. Comme ses pieds s’y enfoncent, elle faillit perdre l’équilibre plusieurs fois, tant et si bien qu’elle continue l’escalade à quatre pattes pour se faciliter la tâche.

    Une fois en haut de la dune, le vent et les embruns caressent délicatement son visage. Un éclat bleu à sa droite attire son attention. Valeria pivote. Son souffle se coupe. Devant elle, l’océan s’offre en un magnifique panorama. Partout à l’horizon, de l’eau, de l’eau et encore de l’eau turquoise. Plusieurs mètres en contrebas, les vagues se jettent sur le sable mouillé. Se vas et viens incessant crée une véritable mélodie aquatique, un son si paisible qu’à sa simple écoute Valeria en oublie presque la raison de sa venue sur cette planète paradisiaque.

Tu n'es pas ici en vacances Valeria. Reprends-toi maintenant, tu as mieux à faire que profiter de la vue.

    Elle se rend enfin compte que ses neuf équipiers l’ont rejointe depuis plusieurs minutes et sont eux aussi restés béats devant la plage. La capitaine claque des mains énergiquement.

« - Maintenant que nous sommes enfin sur place, il faut qu’on se mette en action ! Lucius, prends avec toi cinq personnes. Vous sortirez du vaisseau les équipements qui seront nécessaires pendant le séjour, et les mettrez dehors. Ce sera aussi le lieu d’un campement où nous trierons les différents échantillons avant de les entreposer dans le vaisseau. Les autres avec moi. »

    Aussitôt dit, aussitôt fait. Lucius a beau être un second irritant, il reste expérimenté dans son domaine de meneur d’hommes. Il part sans plus attendre avec son équipe constituée de Liam, Alicia, Clément, Elya et Joseph en direction du vaisseau afin de débarquer du matériel, tandis que Valeria se dirige vers le bord de mer avec son groupe plus réduit. Caleb l’interpelle et vient se placer à sa droite.

« - Ma capitaine. Avant que nous ne partions, j’ai prélevé un morceau d’écorce de cet étrange arbre dont vous vous êtes approchée. »

    Fier de sa trouvaille, il lui tend une boite transparente complètement hermétique dans laquelle se trouve un petit morceau de bois mauve découpé au couteau.

« - Oui. Hem. C’est une bonne initiative. Mais c’est aussi le but de notre mission, je ne vais pas non plus vous décerner une médaille. »

    Le jeune homme remarque à peine le sarcasme, trop heureux que sa capitaine lui est adressé la parole. Valeria soupire. Puis elle se tourne vers le reste des explorateurs qui attendent ses ordres sans bouger.

« - C’est vraiment la bleusaille qui prend des décisions dans cette brigade ? Qu’attendez-vous ? Il nous faut des échantillons de sables, d’eau de mer, et de tout ce que vous pourrez trouver de notable sur cette plage. Je veux qu’on la passe au peigne fin d’ici à ce soir ! »

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