Tu le paieras un jour William Afton

Chapitre 13 : L'enfant prodige

1761 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 18/09/2020 21:13

Scott quitta la pièce pour laisser les deux hommes parler. William s'installa sur le grand fauteuil en cuir derrière le bureau et Henry se contenta d'une des chaises rembourrées qui traînait devant celui-ci. Le gérant ne prononça pas un mot, glacial comme le vent qui soufflait en cette soirée d'hiver. Son ancien ami suait à grosse gouttes et tenait dans ses bras une chemise en carton qu'il tenait serrée contre son coeur. Le coup porté par William avait laissé une jolie trace bleue sur son front, un peu plus foncée au fur et à mesure que les minutes s'égrénaient, longues, interminables.


"Ecoute, Willy, je sais que... Enfin que j'ai disparu sans rien dire, mais j'ai une explication. Je...

— C'était toi ? le coupa immédiatement William. C'est toi qui as tué cette gamine. Comment as-tu seulement pu me faire ça ? Nous faire ça ! On a passé des mois sur ce projet, Henry ! Tu as tout foutu en l'air en seulement une soirée !"


Il serra les poings et prit de grandes inspirations. Il ne devait pas céder à la colère. Il n'était pas comme lui, il valait beaucoup mieux que lui. Henry ne répondit pas immédiatement, il baissa les yeux sur sa pochette et la posa doucement sur le bureau. 


"J'ai... J'ai besoin de ton aide."


William leva un sourcil, puis éclata de rire. Il avait besoin de son aide ? A lui ? Alors qu'il l'avait laissé mettre les mains dans le crottin jusqu'aux coudes ?


"La seule chose qui me retient de t'exploser la figure, c'est Maggie dans la pièce d'à côté. Tu ne nies même pas ! Comment oses-tu revenir et me demander de l'aide ?!

— Ce n'est pas ce que tu crois, William. Oui. Oui, c'est moi qui ai tué la gamine, mais ce n'est pas ce que tu crois, je te le promets. Elle... Elle m'a fait du mal. Mais je peux arranger ça, dit-il rapidement en baissant la voix. Je peux tout faire redevenir comme avant. Je peux la sauver. J'ai juste besoin de toi et de ton génie, comme à l'université, lorsqu'on a eu cette idée de restaurant. 

— Tu me dégoûtes.

— Ecoute-moi ! J'ai fait une erreur, d'accord, mais...

— Tu as tué une gamine, Henry ! Tu l'as buté et personne n'est au courant parce que je pensais que tu te rendrais de toi-même ! Parce que je pensais que tu viendrais m'expliquer plus tôt... Que tu... Que nous étions amis."


William sentit des larmes de colère et de culpabilité lui monter aux yeux. Tout ce qu'il avait refoulé depuis près de trois ans ressortait violemment, tout d'un coup. Il avait cru ne plus pouvoir être atteint par cet événement, il pensait être passé à autre chose. Mais il devait se rendre à l'évidence : ce n'était pas et ne serait jamais le cas. Il se souvenait de chaque seconde, de chaque scène : le sang qui coule de Fredbear, les sacs poubelles enroulés autour du corps de cette fille défigurée, le bruit du camion-poubelle qui s'éloigne, la Marionnette qui prend son indépendance. Elle le hantait. Elle le hantait tous les jours, et maintenant que son meurtrier se trouvait devant lui, il était incapable de réfléchir correctement, d'appeler la police et d'en finir une bonne fois pour toutes. Pourquoi ne parvenait-il pas à simplement saisir le téléphone ? Parce que tu es un couard, William Afton, lui chuchota la voix dans son esprit. Parce que tu sais qu'il y aura des conséquences pour toi aussi : tu es son complice.


"Comment... Comment tu peux vivre avec ça ? lui demanda William, en refoulant ses larmes. Tu l'as abandonnée dans cette ruelle, tu m'as forcé à devenir un meurtrier moi-aussi parce que j'étais trop... trop con pour voir que tu n'étais qu'un connard égocentrique. 

— Justement, j'ai des remords moi aussi. Et je sais... Je sais ce que tu vis en ce moment. Avec la Marionnette. Je l'ai vue bouger. Je l'ai vue... C'est elle. C'est la gamine, ça ne peut être qu'elle. Et j'ai... Si je te disais que j'avais trouvé le moyen de vivre éternellement ? Réfléchis. Si l'âme de cette enfant s'est accroché à ce robot, il est peut-être possible de faire l'inverse. De transverser son âme dans un nouveau corps humain. On peut la sauver. On peut... On peut recréer ce que l'on a fait. On peut arranger la mort, William. Ce serait une découverte majeure. S'il te plaît. On peut le faire, tous les deux. Fais-moi confiance."


Il posa une main sur la sienne. William eut un violent mouvement de recul face à son discours et se dégagea vivement de son emprise. Des excuses, il aurait pu le supporter. Des explications, c'était tout ce qu'il demandait. Mais ça... Ca, c'était au-dessus de ses forces. Il n'était pas venu pour se faire pardonner, il était venu pour recommencer à tuer et, pire, pour l'encourager à sombrer dans les ténèbres avec lui. Son ami avait disparu. Il n'existait plus. Ce qu'il avait devant les yeux était la carcasse d'un homme rongé par la monstruosité.


"Dégage de mon bureau, déclara-t-il d'une voix sombre."


S'il restait une seconde de plus en face de lui, il n'était pas certain de ce qu'il serait capable de lui faire. Henry s'attendait à cette réaction. Il se leva simplement, et posa un bout de papier sur sa pile de dossiers.


"Je sais que tu changeras d'avis tôt ou tard. Appelle-moi. Je t'attendrais. Je n'abandonnerais pas, tu sais. Et toi aussi, tôt ou tard, tu le comprendras."


William jeta son mug contre le mur. Il explosa en morceaux.


"Dégage de mon bureau ! hurla-t-il, hystérique. Je ne veux plus jamais revoir ta putain de tête dans mon putain de restaurant !"


Scott entra de nouveau dans la pièce, alerté par le bruit. Il se précipita auprès de William, pour le retenir de faire quelque chose qu'il regretterait ensuite. Henry renifla, et se dirigea vers la sortie, sourire aux lèvres.


"Ne m'oublie pas, William. Je sais à quel point tu tiens à tes enfants. Tôt ou tard, tu me rejoindras."


William n'eut pas le temps de réaliser la menace sous-entendue dans sa dernière phrase. Henry quitta enfin le bâtiment, raccompagné par Scott. Une fois seul, il laissa éclater sa rage. Son bureau, ses armoires, il balança tout à terre, arracha les cadres et détruisit tout ce qui pouvait être cassé. Dix minutes plus tard, les mains en sang, il ne put que contempler sa propre violence. Il devait se calmer. Henry appartenait au passé et il y resterait. Cette fois définitivement, il l'espérait.


********* 


Quand il quitta le restaurant, Henry avait le sourire. Cette réaction faisait partie de celles attendues. Il était évident que William n'allait pas lui manger dans la main immédiatement. Il avait cependant un plan pour que cela arrive plus tôt que prévu. Il savait parfaitement comment fonctionnait son ami : s'il voulait quelque chose de lui, il allait devoir le fragiliser psychologiquement. Son retour avait déjà causé une vague de panique chez lui, mais ce n'était pas suffisant. Il devait aller plus loin. Et il savait exactement vers qui se tournait.


Depuis le temps qu'il tournait autour du restaurant, il avait bien remarqué le petit jeu de Michael Afton. Tous les soirs, alors que le service commençait, il s'éclipsait discrètement par la porte de la cuisine pour rejoindre ses amis, deux garçons et une fille, probablement des collègues d'école. Ce jour-ci n'échappa pas à la règle. Il attendit patiemment que les enfants se soient salués pour les rejoindre discrètement.


Si son plan fonctionnait, il aurait William et se serait débarrassé d'un témoin gênant, le tout en quelques minutes. Il s'avança vers les adolescents, un sourire charmeur plaqué sur le visage. Les adolescents le dévisagèrent avec méfiance alors qu'il s'installa sans aucune gêne contre le mur.


"Eh, les gosses, ça vous dirait de gagner de l'argent facilement ?"


Plusieurs regards devinrent immédiatement plus intéressés. Michael, comme son père, se montrait déjà plus méfiant. Il ne cessait de lancer des regards vers la porte avec nervosité.


"On vendra pas de drogues, lâcha un des gamins d'une voix hautaine.

— Oh, je ne parle pas de drogues, mais d'une tâche beaucoup plus simple. Je n'aime pas le gérant de ce restaurant, il a fait certaines choses dans le passé qui m'ont beaucoup déplu, et je voudrais me venger, l'embêter un petit peu. Je veux que vous vous en preniez à son fils. Quelque chose de pas trop méchant, par exemple en le mettant dans la gueule d'un animatronique pendant quelques secondes. Si vous faites ça pour moi, vous serez riches. Je peux y mettre les moyens, un chiffre avec au moins trois zéros."


Les gamins se regardèrent les uns les autres avec suspicion, mais aussi avec envie. La fille était déjà acquise à sa cause, les trois garçons étaient plus partagés. L'un d'eux se tourna vers Michael.


"Demain, il y a pas une fête d'anniversaire pour ton frère ?

— Oh, c'est ton frère ? s'étonna Henry, faussement choqué. Je comprendrais si tu ne veux pas le faire, je ne veux pas t'attirer des ennuis avec tes parents, le provoqua-t-il d'une voix doucereuse. Je comprends si tu souhaites abandonner le navire.

— C'est pas mon frère, cracha Michael. Il existe pas pour moi. Si on le fait, comment on sera payé ?

— Eh bien, si vous le faites demain, nous pouvons nous retrouver à la même heure ici. Voici une avance pour vous encourager."


Il déposa quatre billets de cent euros devant lui. Cette fois, les yeux des adolescents luirent de joie. Oh oui, ils lui mangeaient dans la main. 


"C'est d'accord, répondit Michael. Rendez-vous demain, même endroit."


L'adolescent sonna l'heure du départ et les quatre adolescents quittèrent la ruelle. Henry sourit sadiquement et sortit un petit boîtier de commande de sa poche, un brouilleur d'ondes créé spécialement pour brouiller les circuits des animatroniques. 


Cette fête d'anniversaire serait mémorable. Ce n'était plus qu'une question d'heures avant que William ne revienne en rampant vers lui.


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