Survivre à Gantz

Chapitre 15 : S'accrocher à une promesse

4425 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 19/06/2021 15:36

John n'attendit pas une seconde pour repasser à l'attaque car il avait très rapidement compris la situation. Les armures ne valaient rien contre cet énorme bestiau, Lucie était pratiquement hors combat, moi aussi, sans compter que je n'avais même pas de combinaison, et Mélanie était encore une bleue. Comme à l'époque du monstre à la guitare en acier, il allait devoir se farcir le monstre final seul, ou presque. Car Mélanie se mit aussitôt à tirer, et bien que la créature n'est rien perdu de sa vitesse malgré sa taille, elle faisait une cible assez grande pour être facilement touchée. Néanmoins, si elle tira plusieurs fois, elle ne fit mouche que deux fois, un coup à la jambe et l'autre à l'épaule. Le reptile géant ne fut que légèrement blessé, sa masse musculaire encaissant les chocs bien mieux que ses congénères plus petits. Si ces bestioles là étaient capables de fusionner depuis le début, je fus quelque peu heureux de savoir qu'elles aient attendus la toute fin pour le faire. Mon imagination débordante me fit visualiser un monstre d'une bonne centaine de mètres si la horde avait fusionné dès le début.


John attaqua donc, car il était le seul véritablement encore capable d'en finir. Son arme ne faisait que de maigre dommage et la lame de son katana ne s'enfonçait que peu profondément dans la chair de ce Goliath. Mais, avec une certaine joie, le monstre accumulait les dégâts, ralentissant de plus en plus en plus. John était remarquable, évitant avec brio les attaques désespérées du monstre final, parfois de justesse. On aurait presque dit qu'il dansait face à l'imposante masse de l'ennemi, rivalisant de vitesse avec lui, poussant l'armure dans ses derniers retranchements. Il réagissait au quart de tour, presque en transe. J'imaginais qu'il avait atteint ce même stade étrange dans lequel je m'étais retrouvé auparavant, totalement déconnecté, simplement concentré sur l'ennemi, ses gestes, les soubresauts dans ses mouvements, cherchant à anticiper ses mouvements. Nous pouvions nous en sortir !


Je me mis aussi à faire feu, et si mon X Gun faisait encore moins de dommage, il s'ajoutait aux dégâts causés pas Mélanie et ceux de John. Un tir de ce dernier à la jambe du monstre lui fit mettre un genoux au sol et, soudainement, dans un cri, une Lucie au moignon sanguinolent s'envola dans les airs après un saut remarquable, son armure gonflée par la force et son katana ayant au moins triplé de taille. Dans un cri de rage, l'éclair blond tomba sur le colosse, abattant son immense lame sur l'épaule de ce dernier. La lame entailla profondément la chair de ce dernier ennemi, le fendant en deux jusqu'à l'abdomen. Son cri fut long et rauque déchirant le silence de cette fin de nuit. Puis, enfin, il s'effondra.


Lucie tomba au sol, allongée aux côtés de l'ennemi qu'elle venait d'abattre, John lui aussi se renversa, tombant sur ses fesses, visiblement à bout de souffle. Mélanie lâcha son arme, ses jambes s'effondrant sous son corps, certainement vaincue par le trop plein d'émotions. Moi, je posais ma tête contre le sol, tentant de calmer la douleur me foudroyant le dos. Je relevais un instant les yeux, et je vis Lucie, relevant légèrement la tête et le bras tendu, levant le pouce vers le ciel. John se mit à rire doucement et fit le même geste avec la main, j'en fis autant et, amusée, Mélanie nous imita. Je me relevais péniblement, attendant d'être téléporté, mais quelques secondes passèrent, puis une bonne minute, et rien ne se passa. Lucie se releva tant bien que mal, le visage particulièrement blafard et s'approcha de moi. John l'imita, rejoignant rapidement notre petit groupe de plus en plus paniqué.


- Il doit y en avoir un autre, un dernier, dit Lucie dont la voix faiblissait à chaque seconde.

- Lucie, allonge toi, fit Mélanie, Alessio, ne bouge pas.


La jeune femme subtilisa le katana des mains de notre amie blonde et coupa...sans demander bien entendu, un morceau de mon pantalon, qu'elle coupa en une bandelette plus fine qu'elle serra autour du moignon de Lucie.


- Tu devrais pouvoir tenir un peu plus longtemps comme ça.

- Je ne vois rien sur le radar, dit alors John.


Il n'était pas blessé, mais il semblait à bout de souffle.


- Je ne comprends pas, ce devrait être fini, ajouta-il.


De rage il frappa la moto encore toute proche, et regarda avec inquiétude Lucie, dans le visage se blanchissait à vue d’œil. Même sans armure, des côtes en miette, et un mince filet de sang me coulant du bide, j'étais désormais en meilleur état qu'elle. Où pouvait être ce dernier monstre ? John agrandissait la carte, encore et encore, couvrant toute la ville et ses alentours mais il n'y avait pas la moindre trace d'un point rouge quelconque. Sans compter qu'il ne nous restait plus beaucoup de temps. Marchant péniblement, je regardais autour de nous. Vu leur agressivité, cette saloperie ne pouvait être bien loin, peut-être sous terre pour ne pas apparaître sur le radar. Je ne pouvais m'empêcher d'être abattu. Lorsque les monstres s'étaient réunis en un seul et que Lucie avait fait les frais de son attaque, je pensais que nos chances de victoire. Pourtant, ce monstre, aussi redoutable fut-il, fut rapidement vaincu par notre travail d'équipe. Il y avait eu de l'espoir, et maintenant une panique totale. Putain d'ascenseur émotionnel.


- Vous avez entendu, fit Mélanie.

- Quoi ?


Et comme pour nous répondre, on entendit alors le bruit d'une respiration, profonde et rauque, inhumaine. John poussa un cri de surprise lorsqu'un point s'afficha sur le radar, juste à côté de nous. Si Lucie ne put que bouger la tête vers l'esplanade encore flambante, John, Mélanie et moi assistâmes à un spectacle terrifiant. De la carcasse du reptile Goliath, émergea un être de petite taille, squelettique, déchirant les chairs pour se faire un passage, et se tenant debout, le regard vide, bille entièrement noire dans des globes profonds. Il avait les bras très long, touchant presque le sol, des griffes semblables à ses congénères, et une peau si fine que l'on aurait cru apercevoir son squelette en dessous. Il nous regarda de ses yeux vides, émettant ce sifflement devenu beaucoup trop familier.


Sans même la regarder, je sentis Mélanie se tétaniser, c'est à peine si j'osais moi même respirer et John ne fit qu'un seul pas, hésitant, en avant. Un seul, avant de soudainement cracher une gerbe de sang. En l'espace d'un instant, plus éphémère qu'un battement de cil, le monstre avait réduit la distance entre nous et son bras griffu s'était enfoncé profondément dans l'abdomen de mon ami. I retira presque aussitôt, laissant John tomber à genoux, à demi conscient tentant de ses mains tremblantes d'empêcher son sang de couler, ses tripes de tomber. De l'autre côté, je vis Mélanie tomber au sol, le visage blême, secouée par de tous petits tremblements. Elle était en état de choc, totalement perdue. Et c'est vers elle que le monstre se tourna ensuite. Il marchait lentement, prenant son temps alors qu'il pouvait nous tuer en un éclair...c'était à croire qu'il y prenait du plaisir, il voulait nous voir avoir peur, nous faire souffrir mentalement avant de nous achever rapidement.


- Alessio...


La voix presque éteinte de Lucie me ramena à la raison, il n'y avait plus que moi. Elle n'en avait plus pour longtemps et John n'allait pas faire long feu non plus. Mélanie était sur le point d'être abattue. Mais que pouvais-je faire ? Que faire ? Comment ? Ta gueule Alessio me hurlais-je intérieurement, il n'y avait rien à faire, si ce n'était de tuer cette abomination le plus rapidement possible, ou mourir en essayant. Si je gagnais, j'avais une chance de sauver tout le monde, et si je perdais...et bien le jeu s'arrêtait pour nous tous, la fin de notre deuxième vie. Nous n'avions, en réalité, plus rien à perdre, si ce n'est une vie que nous avions déjà techniquement perdue.


Je rassemblais ce qu'il me restait de souffle et d'énergie, ignorant les multiples douleurs qui déchiraient mon corps tout entier. Je bougeais péniblement vers un coin un peu plus éloigné de l'esplanade car il fallait que je l'attire vers moi. Il ne devait surtout pas faire plus de mal à mes compagnons. Lucie utilisa ce qui lui restait de force pour rouler sur elle même et me regarder, John en revanche ne semblait plus conscient. Le monstre lui avançait toujours lentement vers Mélanie qui semblait désormais morte tellement elle se tenait immobile. Et là, à une quinzaine de mètres de mes compagnons, transpirant à cause de la douleur et des flammes brûlant encore autour de moi, je jetais mon fusil au sol ainsi que mon flingue avant d'empoigner mon katana. Lui tirer dessus n'avait aucun sens, il était bien trop rapide. Sa fin devait venir de ma lame, je n'avais qu'une seule chance, une chance éphémère, impossible.


- Le serpent, viens ici !


J'hurlais, cherchant à attirer son attention, et cela marcha car il se stoppa net et tourna les billes noires qui lui servaient d'yeux vers moi.


- Viens te battre contre moi, tu vois tous tes pourritures de potes qui crame, c'est moi qui leur ai foutu, je viens d'exterminer ton espèce, alors viens m'éliminer !


Il siffla longuement, très doucement, à peine audible derrière le bruit des flammes. Mais il finit par se tourner entièrement vers moi. Je n'osais plus fermer les yeux, car son attaque pouvait arriver en un instant, une simple seconde. Je tenais mon katana comme si il était dans son fourreau, cherchant à le dégainer le plus rapidement possible lorsque mon ennemi passerait à l'attaque. Je n'avais aucune formation, pourquoi cette posture, pourquoi cette idée ? J'avais du voir ça dans un anime...paye ta technique pas crédible. Et surtout, pourquoi est-ce que je divaguais ainsi alors que je pourrais sentir le souffle de la mort sur ma nuque. Je devais être fou.


Je me concentrais, encore et toujours plus, me focalisant uniquement sur lui. Lentement mais sûrement, je n'entendis plus le bruit des flammes, le décor autour de moi sembla s'estomper, seul les traits de ce monstre restèrent précis. Puis, il n'y eu plus que lui et moi dans un grand espace vide. Je ne sentais plus rien, si ce n'est la sensation de l'ennemi sur le point de bondir et le katana que je tenais entre mes mains. J'expirais une dernière fois...et le monstre disparut. Mon arme frappa.


Après avoir été perdu dans cette transe très courte mais qui sembla une éternité, je put sentir du sang couler à ma bouche, je baissais les yeux pour voir la patte du monstre plantée droit dans mon ventre. Je manquais de m'évanouir, mais je tins bon...je relevais la tête, un sourire aux lèvres, un regard fou, les dents blanches tachées par mon propre sang.


- Ose revenir...après ça...enfoiré...


J'avais attaqué en même temps que lui, et mon sabre le frappa au flanc gauche, le découpant d'un trait jusqu'à l'aisselle droite. Le bas de son corps se détacha, tombant au sol, et le haut du corps suivi, sa main sorti de ma plaie, laissant le sang couler en abondance. Je tombais à genoux dans les restes de mon ennemi.


- GAAAAAAANTZ !


Un dernier cri, mes dernières énergies, et je tombais à mon tour au sol, mon visage baignant dans un mélange de mon sang et celui de cette dernière créature. Je sombrais dans l'inconscience, j'avais gagné, mais à quel prix, était-ce le dernier monstre ? Avions nous vraiment gagné ? Puis mes yeux s'ouvrir dans l'appartement.


Ma première émotion fut un profond soulagement, j'étais entier, plus aucune douleur dans le corps, mais j'étais seul. Heureusement, une première personne fut téléportée juste après moi et c'est sans surprise que je découvris la silhouette de Mélanie s'afficher petit à petit.


- Alessio...tu...tu as réussi.

- Oui mais... Gantz, Gantz !


Je m'approchais vers la sphère, frappant violemment sa surface.


- Dit moi que les autres sont en vie !


Mais il n'y avait plus de rayon, pas de téléportation. Est-ce que j'avais trop tardé ? Non, ce n'était pas possible. Ils ne pouvaient pas mourir avant d'avoir ramené Déborah et Roman. Je ne pouvais pas continuer sans eux, je ne pouvais pas tous les ramener !


- Gantz...ne me fais pas ça !


Et je criais à nouveau, sans tenir compte des larmes chaudes qui coulaient sur mon visage, j'avais perdu mes amis, mes compagnons dans cette galère, je n'avais pas su les protéger, je n'avais pas tenu ma promesse de les aider. Mais un rayon apparut alors et John apparut au bout de quelques secondes.


- Je suis en vie, furent ses premiers mots interloqués, je croyais que c'en était fini, je devais encore avoir un dernier souffle.


Puis, à mon grand soulagement alors que je séchais déjà mes larmes, Lucie fut elle aussi matérialisée.


- Je crois bien que j'ai eu chaud, fut sa seule réplique.

- Vous débarquez ici tous les deux, alors que je vous croyais morts, et vous prenez tout ça à la légère, vous êtes vraiment des enculés, dis-je non sans humour.


Je cachais ma joie et mon soulagement derrière mon second degré, mais je crus en cet instant n'avoir que rarement ressenti de plus fortes émotions.


- Merci Alessio, sans toi, tout ceci se terminait ici, commenta Lucie.

- Je n'ai rien vu de la fin, mais je suppose que tu as éliminé cette saloperie, termina John.


Mélanie me posa alors une main sur le bras.


- Merci, me dit-elle simplement.

- C'est normal.

- Si j'ai bien compris, c'est le moment où on va avoir nos points, demanda Mélanie.

- Oui, d'ici quelques instants, le jingle devrait se lancer, et j'espère qu'avec tout ça, nous auront tous enfin 100 points !


Et comme pour souligner ma réplique, Gantz lança son jingle à peine eus-je finit de parler.


John, le fin conducteur, 85 Points, Tu en as 120, Bravo, c'est mieux que la dernière fois !


- Quatre...quatre vingt cinq, bégaya John, je n'ai pas l'impression d'avoir fait tant de choses que ça.

- On s'en fiche, même à 1 points, ou 0,5 points par monstre, il y en avait tellement que ce n'est pas étonnant, mais mieux encore, tu as 100 points, lui fis-je en lui collant une grande claque dans le dos.

- Alors ça veut dire, commença-t-il.


Avant qu'il n'eut le temps d'en dire plus, l'écran de Gantz changea pour nous en montrer un que nous n'avions encore jamais vu, celui du choix des 100 points. Le premier choix permettait d'être libéré de cette spirale et d'avoir le souvenir de tous ces événements effacés de sa mémoire. Le second permettait d'obtenir une arme plus puissante à ajouter à l'arsenal. Et le troisième, celui que nous attendions, la possibilité de ramener quelqu'un à la vie présent dans la mémoire de Gantz.


- Je prends le troisième choix, dit John avec assurance.


L'écran s'effaça, faisant apparaître le tableau des portraits de ceux morts durant les missions précédentes. Vers le bas, John fixait avec intensité le petit portrait de Déborah.


- Ramène Déborah Vesti à la vie.


Presque aussitôt, un rayon parti de la sphère et se figea au centre de la pièce, sous nos yeux ébahis, tranche par tranche, la silhouette de ma vieille amie, la bien aimée de John, se dessina. Nous retînmes tous notre souffle alors qu'elle commençait à regarder autour d'elle.


- John...Alessio ? Que se passe-t-il ? Où est le monstre avec sa guitare ?


John avait de lourdes larmes qui roulaient sur son visage, il s'approcha d'elle et la serra dans ses bras. Il arrivait à peine à parler, bégayant entre plusieurs sanglots qu'elle lui avait tant manqué. Elle le serra fort contre lui, ne comprenant pas vraiment ce qu'il se passait. Puis il s'écarta, la regardant, cherchant à vois si tout allait bien chez elle, avant de l'embrasser. Elle lui répondit, non sans un certaine fougue, avant de le repousser gentiment.


- John, je...enfin, je ne comprends pas...

- Tu es morte Debs, dis-je très simplement, durant cette mission, le monstre à la guitare t'a tué, et John vient de te ramener à la vie.

- Quoi ?! Mais, je...

- Je t'expliquerais tout une fois que l'on sera rentré, termina John en la serrant de nouveau contre lui.


Je remarquais alors que Lucie, après avoir partagé la joie de revoir Déborah, se mit à fixer l'écran avec intensité.


Lucie, l'experte en essence, 67 Points, Tu en as 148, Tu auras mis le temps, mais tu as réussi !


De nouveau l'écran passa à celui des choix, et sans hésitation elle demanda le troisième choix.


- Ramène Roman Theaud à la vie.


Et comme si il n'avait jamais disparu, Roman fut bientôt de retour parmi nous, le visage surpris, regardant aussitôt partout autour de lui. Il avait un air panique, comme si il était encore en train de se battre au milieu de cette forêt. Mais, aussi perdu qu'il fut, le vétéran qu'il était reconnu rapidement la pièce et les circonstances de son retour parmi nous.


- Je...je suis mort c'est ça ?


Encore une fois, je fus surpris par cette réaction, il ne se souvenait pas avoir péri lors de son combat contre le scolopendre géant. Peut-être que Gantz réinitialisait leur mémoire quelques minutes avant leurs morts. Quoiqu'il en soit, Lucie s'approcha de lui rapidement, les yeux gonflés de larmes.


- Lucie, murmura Roman...


En guise de retrouvailles elle lui colla une immense gifle qui résonna dans toute la pièce. Roman fut certainement le plus surpris par ce geste, mais il baissa ensuite les yeux, ne cherchant pas à répondre. Pour ma part, je n'en attendais pas moins de la part de mon amie, elle s'était promis de le cogner lorsqu'il reviendrait pour lui avoir caché autant de choses. Le désarroi de leur séparation, l'acte égoïste de Roman était certainement ce qui avait précipité sa mort durant la précédente mission. Mais, la colère de Lucie passa aussi rapidement qu'elle était arrivée, puis elle se plongea dans ses bras, ce à quoi le jeune homme répondit en l'enlaçant maladroitement.


- Peu importe que l'on perde la mémoire, dit alors la jeune femme blonde, on se débrouillera tous les deux pour se retrouver, ne t'avises plus jamais de me quitter.

- Non...définitivement non, je ne vais nulle part.


Et tandis que les deux amants s'embrassèrent, je ne pus retenir un sourire et sentir une petite larme couler sur ma joue...j'étais peut-être un peu plus fleur bleue que je ne le croyais. Mais le prochain jingle des scores me ramena à la réalité.


Mélanie, la bonne débutante, 38 points. Tu en as 38, encore 62. Bien pour une première fois, mais la prochaine fois, tâche de plus te concentrer sur les monstres que sur Alessio.


J'osais à peine regarder Mélanie en cet instant, Gantz était vraiment un petit enfoiré..et son humour était plus que douteux. Mais la machine ne se trompait pas dans ses commentaires et il était fort probable que ma nouvelle amie s'intéresse à moi plus que je ne le croyais. En tout cas, à voir rosir ses joues, il n'en restait pas moins qu'elle était troublée.


Alessio, dénudé mais invincible, 105 points. Tu en as 165 ! T'es un vrai tueur toi, pas vrai ?


Je regardais le score s'effacer avec effarement, ne m'attendant pas à un tel résultats. En avais-je tué autant ? Je m'étais bien défendu, pour sûr, mais tant que ça ? Peut-être tous les reptiles morts par le feu me revenait ? Peut-être aussi que le monstre squelettique rapportait à lui seul un nombre important de points. Je n'en savais rien, tout n'était que supposition. Mais je pouvais désormais moi aussi faire un choix, et j'avais beaucoup de points en suppléments. Le tableau des scores s'afficha alors.


- Tu vas pouvoir rentrer, me dit John.

- Quoi ?

- Oui, ajouta Lucie, Déborah et Roman sont de retour, tes points ne sont plus utiles pour les ramener, tu as donc droit à ta liberté.

- Mais je...


L'idée ne m'avais jamais traversé l'esprit. Partir d'ici, être libre, en finir avec ces missions, au risque d'avoir toute ma mémoire effacée. Mais au moins, une fois le trouble passé, j'aurais le loisir de reprendre une vie normale. J'oublierais ainsi toutes les atrocités, les douleurs et la mort. Mais ce faisant, j'oublierais aussi tellement de choses. En premier lieu, ma rencontre avec le groupe qui m'entourait, mon changement assez radical de style de vie, tous les efforts fournis pour profiter de cette deuxième chance. Je les laisserais tous seuls, à se battre sans moi jusqu'à ce qu'ils puissent tous être libres. Ils pouvaient s'en sortir, mais je n'en aurais jamais la certitude en quittant cette pièce. Et de plus, il y avait désormais Mélanie, une belle addition à notre compagnie et qui se débrouillait drôlement bien. Et merde, tous ces souvenirs, même si il y en avait d'horribles, je ne voulais pas m'en séparer ! Merde, même la beauté fatale aperçue dans ce bar avec Roman quelques temps auparavant, un souvenir insignifiant, mais je ne voulais pas le perdre.


- Gantz, je prends le second choix, donne moi une meilleure arme pour la prochaine fois.


J'entendis alors les protestations et la surprise de mes camarades, et je réalisais aussitôt à quel point mon choix était...égoïste en quelque sorte. Il y avait encore tant de morts dans la mémoire de Gantz, j'aurais très bien pu ramener quelqu'un. Mais qui ? Le médecin qui se battait bien ? La jeune serveuse violée par les trois businessmen ? La femme secrétaire qui m'avait suivi lors de la première mission ? Une des amies de Déborah et John, ou leur professeur ? Il y avait tellement de choix, et techniquement, je n'étais réellement attaché à aucune de ces personnes. Roman s'approcha alors de moi et me prit par les épaules, me secouant comme un prunier.


- Pourquoi rester Alessio ?

- Je comprends que tu ne ramènes personnes d'autre à la vie, commenta John, mais tu aurais pu en profiter !

- Je ne t'aurais jamais demandé d'utiliser tes points pour ramener quelqu'un d'autre, ajouta Déborah, même si j'aimerais savoir mes amies de retour parmi nous, mais toi, tu méritais d'être libre.


Je m'énervais soudainement face à leur gentillesse et leur compréhension. C'était mon choix, pas le leur.


- Je ne partirais que lorsque nous pourrons tous quitter cet endroit ! Déborah, lorsque tu nous as quitté, j'ai promis à John que je l'aiderais à te ramener, et que l'on quitterait cet endroit tous ensemble. Quant à toi Roman, même si je n'ai pas vraiment formulé la chose à haute voix à Lucie, il en allait de même !


Je regardais Mélanie un instant, seule à ne pas faire de commentaires. Par le regard, j'essayais de lui faire comprendre que cette promesse la concernait désormais elle aussi. Je m'étais senti rapidement connecté à elle et je ne souhaitais pas quitter cette dangereuse aventure sans m'être assuré de sa survie.


- Roman, Lucie, sans vous je n'aurais même pas tenu la première soirée, c'est un juste retour des choses. Et il s'est avéré que John est devenu un ami précieux. Partir sans vous, sans avoir aucun moyen de savoir si vous allez vous en sortir, m'est insupportable, alors je reste ! En espérant que cette nouvelle arme nous aidera pour les prochaines missions.


Ils gardèrent tous le silence, pesant mes mots. Le premier à réagir fut John, qui me prit par les épaules et me secoua vivement.


- Alors ça marche, on va faire comme ça ! On partira tous ensemble !

- Et puis merde, à ce point là, une mission sans toi ça serait trop bizarre, ajouta Lucie.

- Il te reste 65 points, commenta Roman, il ne sera pas difficile d'atteindre à nouveau les 100. Tu n'aurais qu'à nous aider, Déborah et moi, qui repartons de zéro.

- Techniquement je n'ai jamais dépassé le zéro, plaisanta Déborah un peu dépitée.

- Pour ma part j'ai encore 48 points, et John en a 20, en se débrouillant et en restant soudés, on devrait pouvoir le faire, calcula Lucie.

- J'aimerais pouvoir apporter ma pierre à cet édifice, ajouta Mélanie timidement.


Déborah et Roman regardèrent notre nouvelle recrue avec un certain étonnement, quoi de plus normal pour eux qui avaient ratés tant de choses. Mais Roman, toujours avec cet esprit entreprenant, fut le premier à s'avancer.


- Je suppose que tu l'as compris, mais moi c'est Roman, le compagnon de Lucie et...je dois te remercier aussi, c'est grâce à ton aide si ceux là ont pu me ramener.

- Et moi c'est Déborah, je suis avec John, je te remercie aussi.

- Pas besoin, fit Mélanie visiblement gênée et les joues rosies, je n'ai fait que ce que j'avais à faire.

- Et c'est ce que l'on va continuer à faire, affirma John, on va avancer tous ensemble.

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