Le Souhait d'un Père Indigne

Chapitre 0 : Le Souhait d'un Père Indigne

Chapitre final

885 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 16/09/2025 13:52

« Kaeya... Tu es notre seul espoir. »


Ce fût les derniers mots que je te murmurai... à toi, mon cher fils, avant de lâcher ta main avec encore quelques doutes qui rongeaient mon cœur. Je pouvais lire dans ton regard paniqué d'innombrables questions, que ma lâcheté m'empêchait de répondre et... à travers tes larmes qui se dissimulaient derrière la violence de cette pluie, un autre cataclysme encore plus bouleversant s'y cachait, envahissant mon esprit dans un désespoir criant.


Comme si le monde entier me jugeait pour mes péchés, ma gorge se nouait subitement. Tes yeux qui brillaient telles des perles à l'éclat de la Lune me rendaient si faible, dépourvu de toute dignité, emprisonné dans mon déshonneur en tant que père. De là à m'éloigner de mon propre fils, les Dieux que je haïssais tant doivent me trouver bien ridicule, n'est-ce pas ?


Tel un châtiment imposé par les Dieux, le temps semblait me bloquer dans le temps. L'atmosphère étouffante de ces bois embrassait le supplice qui me dévorait. Tous les orages de cette tempête n'attendaient que de s'abattre sur moi, pour me punir de ma faiblesse. La froideur du sol voulait entrer désespérément dans ce corps gelé dans une malédiction divine. Et toi, tu me dévisageais innocemment, ignorant tout de cette torture infâme. Mais je ne t'en voulais pas, au contraire... Tout ce que je voulais était de t'éteindre plus fort encore qu'avant.


Mon envie douloureuse de te serrer dans mes bras me plongeait encore plus dans une mer d'incertitudes. Je détestais cette poignée sur ma vieille cape... à la fois fragile, mais si puissante. Je détestais cette expression pathétique que tu me donnais... Je détestais tes petits sanglots suffisamment bruyants pour faire vaciller ma détermination. Je voulais te rassurer, t'enlacer et t'encourager, mais le temps pressait...


Non. Nous avions tout le temps du monde pour nous dire au revoir... Je n'en étais juste plus capable. Si je t'avais montré une dernière fois mon affection, j'aurais pensé à abandonner cette mission sans intérêt, à vivre loin dans une petite maison, rien que tous les deux et à vouloir te voir sourire tous les jours dans de magnifiques champs de blés.


Le vent me frappait sans cesse, rendant cette solitude encore plus pesante. Le froid de mon abjection glaçait mes doigts qui tremblaient d'indécisions. Des pensées qui se contredisaient s'enchaînaient dans mon esprit, ne me laissant pas le moindre répit. Suis-je en train de succomber à la folie ? Paralysé au milieu d'un labyrinthe de contradictions, je n'arrivais pas à trouver le courage de te quitter.


Mon cœur s'écrasant sous le poids de la culpabilité, je reculai et te tournai le dos, tentant de fuir cette cruelle réalité. Jetant encore un petit coup d'œil vers toi, tu me regardais, éprouvant une tristesse sûrement inimaginable. Et ce vide que je ressens au fond de moi... Est-ce le regret de devoir t'abandonner avec un secret aussi lourd, au lieu d'une étreinte tendre, assez chaude pour que tu ne m'oublies jamais ?


Après ce que je m'apprête à faire, non... je n'ai plus le droit de m'appeler ton père. Bientôt, tu trouveras le bonheur, dans cette région de poème, de liberté et de temps, et... peut-être que l'amour d'un père sera suffisamment grand, dépassant les liens du sang et de la terre, pour t'accueillir dans ses bras.


Puis, je pris un pas, puis deux, puis trois. Plus j'avançais loin de toi hurlant de toutes tes forces derrière moi, plus le chagrin de notre séparation grandissait en moi. Quelle naïveté... Je pensais que mes craintes allaient toutes disparaître en t'effaçant de ma vision, mais à chacun de mes pas, des souvenirs doux d'une époque lointaine désormais effacée brisaient ma raison érodée par le temps.


Perdu au milieu de ces souvenirs, je me retournai brusquement, accourant vers la lumière éclatante qui représentait toute ma vie. Celle qui brillait et qui me guidait dans mon chemin infesté de racines sombres. Celle qui me réconfortait même dans une agonie éternelle. Toi.


Au milieu de la forêt où tu me suppliais, les échos de ton angoisse résonnaient dans ma tête, plus forts que jamais. À mon arrivée, rien... Un néant. Une absence que j'ai moi-même causé. Feuilletant les alentours comme un livre abîmé, tu étais introuvable. Je ne cessais de t'appeler et de m'excuser dans l'espoir que tu reviennes, que tu en ris, que tu me pardonnes... Comme tu le faisais avec moi. Mais rien.


Et lorsque je te trouvai enfin, tu tenais fermement la main d'une flamme aussi chaleureuse qu'un rayon de soleil, après une interminable nuit d'hiver. Tu ne pleurais plus, mais tu ne souriais pas non plus. Tu étais terrifié, mais plus courageux que je ne l'ai jamais été.


« Je suis vraiment détestable... »


Moi qui t'ai abandonné, je regrette. Si j'avais l'occasion de faire un vœu sous une étoile filante, je ne voudrais que ton bonheur, même si cela voudrait dire être loin de moi, pour toujours.

Laisser un commentaire ?