Vivian_damor_blok, « Au revers de la Terre », traduction du russe

Au départ, Rick n'a aucune chance. Même s'il se cache derrière son apparence de bien-être et d'imperturbabilité, l'arrivée de Melinda Gordon près de son bureau bouleverse tout. Ce n'est pas qu'il aime aider les inconnus, non, mais il lui est tout simplement impossible de lui refuser quoi que ce soit, et ses questions sont bien plus intéressantes que le contenu habituel des cours. Une bonne excuse pour mettre de côté les affaires urgentes de l'université ? Parfait, cela convient parfaitement à Rick, il pourra réfléchir aux conséquences plus tard.

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Melinda n'apprécie manifestement pas ses méthodes. Elle lève simplement les yeux au ciel devant ses excuses incessantes et ses changements de sujet, qui semblent de moins en moins convaincants à chacune de ses visites. Il pare chacune de ses suppositions d'une remarque sarcastique, en feignant de continuer à apprécier la situation. Il est tout simplement dangereux de s'approcher trop près du professeur Payne et de le prendre à la gorge sur les lieux du crime, car à chaque pas en avant, il s'écarte sur le côté, puis se cache dans un angle, en zigzaguant, ce qui est plus sûr. Rick n'éprouve plus depuis longtemps d'enthousiasme pour les jeux mystiques et les jolies femmes qui se retrouvent toujours impliquées dans ceux-ci ; il n'abandonne pas, s'imposant cette idée malgré ses doutes concernant cette nouvelle pseudo-enquête.   

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Être ivre, c'est bien parce qu'on acquiert un faux sentiment d'invulnérabilité. 

En réalité, Rick n'avait pas du tout l'intention de s'introduire dans la maison du couple pour écouter les lamentations de Melinda sur l'absence de son mari. Il se passe quelque chose d'étrange et d'inimaginable dans son bureau, et il ne sait absolument pas à quoi il est confronté cette fois-ci ni quel est le rapport avec ces maudits (dans tous les sens du terme) idoles du Pérou, mais les jérémiades au sujet de l’époux de Mélinda l'énervent énormément, au point de grincer des dents et de hurler vers le plafond.

Bien sûr, il se souvient de ce que c'est que d'être marié et de rayonner de bonheur à la simple évocation de ce sujet ; il s'en souvient si bien que même complètement ivre, il ne mentionne pas la raison principale de son intrusion.

Oui, tout doit avoir une explication rationnelle.        

Non, il n'est pas du tout effrayé par les fantômes qui errent dans la ville, en particulier ce sympathique jeune homme des jungles péruviennes. 

Il y a peu, Rick était encore convaincu qu'il ne croirait jamais en quelque chose de supérieur et de surnaturel, pas avec ses publications scientifiques et son expérience d'occultiste. 

Seulement Melinda Gordon ne s'intéressait pas vraiment à ses doutes. 

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Il revient chercher sa voiture, complètement sobre, et ne trouve plus ses mots. Il a vraiment peur que Melinda puisse voir ses fantômes, que tous ces gens passent à travers elle, mais elle continue de lui sourire amicalement et de rire aux blagues habituelles qu'elle ne comprenait pas auparavant.

Il souhaite garder ce moment en mémoire aussi longtemps que possible.  

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Rick aurait aimé ressentir réellement cette convoitise qu'il avoue à Melinda, mais en réalité, il ne ressent qu'une admiration sincère. Melinda est vraiment la personne la plus courageuse qu'il ait jamais rencontrée ; elle peut à tout moment suivre un fantôme n'importe où et faire face à la situation sans se laisser déstabiliser. La raison en est l'admiration et rien d'autre, mais ce fichu sentiment l'empêche soudainement de partir en vacances tant attendues et prévues depuis longtemps.

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Il y a trop de gêne entre eux. Rick ne veut pas parler de son intention de rester à Grandview et de renoncer à l'expédition. Melinda soupçonne manifestement quelque chose, mais elle est mariée et, bon sang, avant toute cette histoire de catastrophe, elle était parfaitement heureuse, sans le professeur d'université égoïste et sarcastique, c'est certain.

Et pourtant, le cœur de Rick fait traîtreusement un bond lorsqu'elle l'embrasse. Pour la première fois de sa vie, il est incapable de répondre à cette marque d'affection par une remarque acerbe. 

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Melinda Gordon n'a jamais de faux pressentiments, c'est pourquoi Rick conduit docilement à une vitesse folle, distinguant à peine les contours des bâtiments et des arbres dans l'obscurité. Et pourquoi les cérémonies funéraires sont-elles toujours fixées en fin de soirée ou pendant la nuit ? À un autre moment, il aurait eu le temps de se lancer dans une tirade indignée sur ce sujet, mais pas le 11 mai, pas dans l'attente du maudit cinquième signe.  

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Melinda est morte. 

Il reste là, à fixer son corps. Il est resté figé sur place quand elle s'est précipitée vers le monument qui s'effondrait pour sauver les enfants, les sauvant une fois de plus d'une force obscure qui avait encore une fois provoqué une catastrophe.

Melinda est morte. Même le crash de l'avion au-dessus de la ville ne lui aurait pas causé une réaction plus forte, ni à ce moment-là, ni maintenant que ne le peut cette réalité. Rick a l'impression d'étouffer tandis que les enfants et le mari de Melinda tentent de lui porter secours. Il sait déjà qu'ils n'y parviendront pas.

Il lui semble que les gens qui l’entourent les fixent, les enfants et lui. Il scrute Jim en pleurs comme paralysé, recule, les jambes flageolantes, et a le sentiment qu'il ne peut plus plaisanter, qu'il ne pourra plus jamais prononcer un mot, car Melinda est morte.   

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Il répète obstinément son discours à la veille de la rencontre, mais change à nouveau de sujet et fait semblant de ne s'intéresser qu'à l'affaire. Il a désormais une raison de photographier Melinda et même d'être pris en photo à ses côtés, même si après, il permettera volontiers de s'effacer, ne laissant que son mari et Delia. Après sa résurrection, Melinda a beaucoup trop de soucis pour penser à ses sentiments. Au moins, c'est plus commode pour eux deux, et pourquoi Rick devrait-il tout gâcher maintenant, si la fin sera la même, et que les expéditions, après tout, ne sont que reportées et non définitivement annulées.

Et un jour, Rick partira pour le Pérou, sans avoir prononcé une seule phrase de son discours le plus sincère.