Chocolat chaud et Potions

Chapitre 4 : Manoir Prince

2691 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 21/01/2018 17:20

Kathleen marchait en compagnie de ses sœurs dans la fraîcheur de ce matin d’août. Il n’était pas encore huit heures et le soleil ne réchauffait pas la ville. Elle resserra en frissonnant sa cape bordeaux sur ses épaules. Hier, elles avaient accepté d’aller habiter chez un père dont elles ne connaissaient que le nom, et elles allaient aujourd’hui le rencontrer. Et partir vivre avec lui. Tout s’enchainait à une vitesse fulgurante.

Elyanna marchait juste à ses côtés et Kathleen la couvait d’un coup d’œil maternel. La fragilité émotionnelle évidente de sa sœur la rendait encore plus protectrice. Un peu devant, les jumelles encadraient la médicomage Stéphanie. Bientôt elles quittèrent le centre de la ville et se retrouvèrent dans la banlieue. Finalement, elles s’arrêtèrent face à une maison à l’air sombre. Allée du Tisseur. Kathleen sentait son cœur battre à tout rompre. Stéphanie semblait la plus excitée. Elle frappa joyeusement à la porte. Elle ne tarda pas à s’ouvrir. L’homme qu’elle découvrit fut tout le contraire de ce que Kathleen avait imaginé. Il était plutôt grand, vêtu de longues robes noires, assorti à la couleur de ses cheveux raides. Il avait également deux yeux noirs, identiques à ceux de Lily, mais les siens étaient inexpressifs. D’ailleurs tout dans son attitude laissait transparaître un homme au visage lisse auquel il était incapable de deviner le moindre de ses pensées. Il semblait tout simplement inaccessible. Non, ce n’était définitivement pas le père que Kathleen s’était imaginée, mais elle qui avait toujours rêvé de le rencontrer, n’allait pas s’arrêter à une image.

Stéphanie avait pris la parole.

- Voilà vos filles : Kathleen, Emma, Lily et Elyanna Martins. Sur ce, je vous laisse, mais je rêverai bientôt Elyanna de toute façon.

Elle étreignit brièvement les filles avant de disparaître en transplanant. Elyanna fut très tenté de s’accrocher à elle et de s’enfuir d’ici, mais évidemment elle ne le fit pas, car elle avait une peur monstre de ce mode de transport mais également parce qu’elle ne souhaitait pas être séparée de ses sœurs.

La plus courageuse, Kathleen, se résolut à prendre la parole.

- Enchantée, déclara-t-elle. Nous sommes très heureuses de vous…de te –se reprit-t-elle, rencontrer.

Elle ne savait pas vraiment quoi lui dire. Que pouvait-elle dire à un inconnu qui était son père ? Cependant, elle semblait rayonner de le rencontrer enfin.

Severus la gratifia d’un hochement de tête poli. Savait-il sourire ?

- Vous pouvez m’appeler Severus, lâcha-t-il finalement d’une voix rauque.

Il semblait presque ne pas croire lui-même qu’il venait de dire ça, mais à nouveau ses émotions étaient très difficiles à cerner. Il les invita à entrer dans sa demeure moldue. Kathleen fut donc la première, suivie d’Emily qui le gratifia d’un « Salut » désinvolte et visiblement détachée. Lorsque ce fut Lily qui passa devant lui, la jeune fille l’étreignit soudainement. Severus se figea d’un seul coup, ses muscles semblant se tendre. Pour qui se prenait-elle à lui faire un câlin ? Certes il était censé être son père, mais un peu de tenue tout de même ! Il la repoussa doucement mais fermement. Il ne manquait plus que ça ! Deux yeux noirs identiques aux siens le fixèrent et elle eut un grand sourire.

- Je suis vraiment contente de te connaître ! Certes ce n’est pas dans ces circonstances là qu’on s’était imaginé faire ta rencontre, mais ça ne fait rien.

Severus retient une moue contrariée face au ton dégoulinant de gentillesse. Il n’aimait pas les effusions d’amour. Enfin, ce fut la benjamine qui entra. Il y en avait au moins une qui semblait aussi contrariée que lui. Aussi distante qu’il l’était, ils se dévisagèrent deux secondes avant qu’elle ne détourne le regard et passe devant lui sans un mot.

Certes elle semblait très déçue d’être là mais Severus ne tolérait pas l’impolitesse.

- Tu pourrais dire bonjour, à moins que ça ne soit aussi dessus de toi, lâcha-t-il d’un ton sarcastique qui faisait toujours frémir ses élèves.

Ça ne manqua pas. Elle frémit légèrement face à ton venimeux, mais elle eut un sourire ironique à son tour et elle le gratifia d’un hochement de tête moqueur qu’avait fait Severus juste auparavant.

Continue comme ça Severus et toutes tes filles te détesteront en deux jours, se moqua la

voix de la raison dans sa tête.

Severus soupira, il ne savait pas s’y prendre avec les enfants.


Dans le salon de la maison Rogue, Emma fixait d’un air critique les murs froids et les décorations sombres de la maison. Il n’y avait que des livres, et ce n’était clairement pas ce qu’elle aimait.

- J’espère que ce n’est pas ici que l’on va vivre.

Lily haussa les épaules.

- Ce n’est pas trop mal…

- Tu rigoles, j’espère. C’est sombre, il n’y a que des bouquins et niveau décorations, ce n’est vraiment pas ça.

- Non, ce n’est pas ici que l’on va vivre, mais merci pour ses informations, renchérit une voix moqueuse juste derrière les jumelles.

Lily sursauta et rougit brusquement, mais Emma ne broncha pas et haussa les épaules.

- Tant mieux, je n’aurais pas supporté de vivre dans un endroit comme ça…Aie ! Lily fait attention, tu m’as écrasé le pied.

Severus eut un sourire encore plus moqueur. C’était les seuls sourires qu’il semblait capable de faire.

- Nous allons transplaner dehors. Venez.

Du coin de l’œil, il vit Elyanna s’arrêter brusquement. La médicomage l’avait informé de sa peur immense pour le transplanage, mais ils n’avaient pas le choix. Son manoir se trouvait beaucoup plus loin et ses filles ne pouvaient pas emprunter la cheminée car les protections du manoir les rejetteraient. Ils allèrent dans le parc au pied de la maison. Severus sembla nostalgique en le fixant, mais aucune de ses filles ne put le remarquer.

- Kathleen sais-tu transplaner ?

L’aînée hocha la tête. Severus eut un hochement de tête appréciateur.

- Bien, dans ce cas, tu transplaneras avec les jumelles en pensant dans ta tête au manoir Prince. Tu devrais pouvoir y arriver.

Elle hocha la tête. Les jumelles se placèrent de part et d’autres d’elle, s’accrochèrent à chacun de ses bras et bientôt elles disparurent.

Severus se tourna vers sa plus jeune fille, qui semblait figée par la peur.

- Qu’est-ce qui te fait si peur dans le transplanage ?

- Je n’ai pas peur, s’exclama-t-elle sur la défensive.

Tiens, tiens, elle n’aime pas avouer ses faiblesses. Comme toi.

- Dans ce cas, allons-y, accroche-toi à moi.

Mais Elyanna ne bougea pas comme il s’y était attendu.

- D’accord, j’ai peur, avoua-t-elle.

- Qu’est-ce qui te fait peur ?

Elle haussa les épaules.

- Tout. En fait c’est à cause de ma mère –Julie, précisa-t-elle, elle a toujours été maladroite et quand j’avais huit ans, elle a voulu qu’on transplane. Elle voulait qu’on se rende chez une amie moldue à elle, qui habitait près de Bordeaux – c’est une ville française, mais quand elle a transplané avec moi, elle n’était pas concentré, et elle m’a désarticulé. C’était hyper douloureux, elle avait laissé mon bras derrière moi. En plus, le transplanage me rend malade et je vomis.

- Je n’ai jamais désarticulé quiquonque pour ma part. Et une peur est une peur. Pour ne plus l’avoir, il faut la surmonter.

Il tendit son bras vers la jeune fille, attendant qu’elle l’attrape.

Il n’avait jamais été aussi patient, c’était en soi un miracle.

Elle semblait pourtant peu décidée à l’attraper.

- Elyanna, fais-moi confiance pour deux secondes. Il ne va rien t’arriver.

Finalement, à contrecœur, la jeune fille s’agrippa à son bras et ils transplanèrent dans un bruissement de capes.

Ils atterrirent dans une clairière au beau milieu de la forêt. Kathleen et les jumelles étaient bien là. L’aînée sembla très heureuse de voir qu’Elyanna l’avait fait. Emma ronchonna en donnant deux gallions à Lily. Elles avaient parié sur le fait qu’Elyanna transplane. Lily avait assuré qu’elle y arriverait, Emma avait dit le contraire.

Elyanna s’éloigna de son père, chancelante, pour rendre tripes et boyaux. Kathleen lui caressa gentiment le dos.

- Tu vois ce n’était pas si horrible que ça, Ely’.

Severus, lui, s’était attelé à modifier ses barrières pour que les filles y soient acceptées. Il avait toujours été très paranoïaque, et sa maison était un havre de sécurité ainsi qu’une partie de la forêt qui l’entourait. Finalement, elles entrèrent dans le domaine et elles firent bientôt face à un manoir imposant.

Emma lâcha une exclamation admirative alors qu’elle-même n’était pas du genre à apprécier les endroits éloignés de la ville.

- C’est immense !

Severus les fit entrer dans un grand hall.

- Bienvenue au manoir Prince.

Un elfe de maison apparut devant les sœurs.

- Voici Poppy, mon elfe de maison. Il y a aussi Klaus en cuisine. Elle va vous faire visiter, je dois aller dans mon bureau. Nous nous retrouverons à midi pour le déjeuner.

- Suivez-moi, leur dit la vieille elfe.

Elle leur montra d’abord, la grande salle-à-manger qui s’étendait en largeur, les cuisines où Klaus leur donna des chocolats chauds fumants, puis elles s’arrêtèrent dans un grand salon où des moelleux fauteuils faisaient face à une cheminée éteinte – c’était le plein mois d’août. Poppy leur désigna la salle de potions du professeur dans laquelle il était interdit d’aller –trois regards méfiants se tournèrent vers celui d’Emma qui adorait braver les interdits. Enfin, elles montèrent à l’étage où elles purent choisir parmi les six chambres inoccupées. Emma s’installa dans une vaste chambre lumineuse où trônait un grand lit à baldaquin et où il avait surtout un dressing. Lily s’installa dans celle juste en face, qui était dans les tons du rose très pâle, et qui offrait une vue sur le bois incroyable. Elyanna au contraire, choisit la chambre la plus éloignée des autres, moins grande mais avec une atmosphère agréable. Enfin Kathleen s’arrêta dans une chambre non loin de celle qu’occupait Severus. Immédiatement en y entrant, elle se sentit bien. Le lit double était recouvert d’une couette bordeaux –sa couleur préférée. C’est comme si elle connaissait cette pièce. Sa vision se brouilla soudainement.

« Kathleen avait fait un cauchemar.

Serrant son nounours contre elle, elle posa un pied au sol en frissonnant, craignant de réveiller le monstre endormi sous son lit. En tout cas, dans son cauchemar il y en avait un. La fillette de quatre ans, aux cheveux d’un roux foncé tout emmêlé quitta la pièce et s’aventura silencieusement dans la chambre de ses parents. Ely’ aussi y dormait, ce n’était encore qu’un bébé.

Elle s’approcha de son père. A peine posa-t-elle sa main sur son épaule que Severus s’éveilla en sursaut. Il avait toujours eu le sommeil très léger. Son père était inquiet mais Kathleen était trop jeune pour en comprendre les causes.

Lorsqu’il la vit, Severus fronça les sourcils.

- Qu’est-ce qu’il y a ma puce ?

- J’ai fait un cauchemar, chuchota-t-elle. J’ai peur.

Les traits de Severus s’adoucirent. Il se leva, lui prit la main et ils retournèrent dans la chambre de Kathleen. Severus alluma la lampe d’un coup de baguette. Il prit Kathleen dans ses bras et la reposa dans son lit.

- Il y avait un monstre sous mon lit, lui murmura Kathleen.

Severus haussa un sourcil, l’air légèrement amusé.

- Tu vois bien qu’il n’y en a pas. Tu n’as rien à craindre.

- Peut-être qu’il s’est caché.

- Il ne t’arrivera jamais rien tant que je serais là.

Severus avait dit ça en pensant à bien d’autres dangers que le monstre sous le lit.

Kathleen hocha la tête, rassurée.

- Tu peux me raconter une histoire pour que je refasse dodo ?

Severus hocha la tête, attendri par la bouille fatiguée de sa fille.

Il commença à parler, lui racontant un conte qu’il avait déjà dû lui raconter une bonne trentaine de fois.  Au fur-et-à-mesure, les yeux de la petite fille se fermèrent, et Severus ne tarda pas à s’endormir à ses côtés. »

Kathleen revient à elle, ses yeux noisette écarquillés. Alors c’était ça de se remémorer des souvenirs ?

Dans son souvenir, la chambre était identique, à l’exception que des nombreux jouets emplissaient la pièce ainsi que des photos et des dessins d’enfant aux murs. Elle avait dormi dans cette pièce dans le passé !

Elle se souvint alors de la douceur de l’homme. Il ne semblait plus être le même.


A midi piles, les quatre sœurs et Severus se retrouvèrent autour de la table, et Poppy et Klaus firent le service. Le repas se fit dans un silence pesant. Kathleen semblait ailleurs, Elyanna ne touchait presque pas à son assiette, Severus observait justement sa cadette qui ne touchait pas à son assiette, Lily semblait hésiter à prendre la parole et Emma s’ennuyait ferme. A peine finit-elle son assiette qu’elle se leva, prête à regagner sa chambre. Or Severus ne l’entendait pas de cette manière.

- Qu’es-tu en train de faire Emma ? Lâcha-t-il d’une voix dure qu’il avait pourtant tenté de rendre moins menaçante qu’à l’ordinaire.

Emma étant Emma, elle ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel.

- Actuellement je marche.

Severus ne sembla pas le moins du monde amusé, voir même tout le contraire.

- Assis-toi.

Ce fut plus les regards appuyés de ses sœurs que le ton de Severus qui la fit regagner sagement sa place.

- Nous devons d’abord établir quelques règles, déclara-t-il.

Emma souffla bruyamment mais il l’ignora.

- Tout d’abord, avant de quitter la table, on attend que tout le monde ait fini de manger. Coup d’œil à l’adresse d’Emma. Deuxièment, lorsque vous voulez vous promenez, restez dans les protections que j’ai dressées. Une partie de la forêt est protégé par ailleurs. Enfin, je voulais vous prévenir que dans deux semaines, vous ferrez votre rentrée à Poudlard, l’école de sorcellerie anglaise.

- On ne va pas retourner à Beauxbâtons ?

Lily semblait déçue.

- Vous êtes considérées, désormais par la loi, comme des étudiantes anglaises. Légalement parlant, vous avez d’ailleurs pris mon nom de famille.

- Emma Rogue, gloussa la blonde. Ça va, ça sonne pas trop mal.

Cette nuit-là, tous les habitants du manoir Prince se couchèrent épuisés par cette journée.  Et ce n’était que le début.

Laisser un commentaire ?