Eris Quod Sum

Chapitre 3 : Les Flèches d'Appleby

1706 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 17/09/2020 18:42

Une partie de son front était collée à la fenêtre presque gelée du train. Tom avait dû s’assoupir quelques minutes alors qu’il contemplait le soleil en train de se coucher progressivement et gracieusement à l’ouest, derrière les sommets des Pennines définissant l’horizon. Ils devaient sûrement traverser en ce moment-même la frontière entre l’Angleterre et l’Écosse. La gare de Pré-au-Lard n’était plus très loin, désormais. Tom avait l’impression que le voyage s’était passé encore plus rapidement que les fois précédentes.

Pendant une bonne moitié du trajet, lui et ses coéquipiers n’avaient fait que de parler de leurs vacances. Entre autres, Mark était parti se perdre pendant un peu plus d’un mois avec sa famille dans le pays de Galles tandis qu’Alice était partie en compagnie de sa mère visiter la ville de Paris, capitale de la France, mais aussi – paraît-il – de la mode, de la gastronomie, de l’architecture et de l’amour romantique. Après réflexion, et connaissant selon lui assez bien son caractère, Tom se demandait si Alice s’y était vraiment plu là-bas. Peut-être se trompait-il, ou alors ne la connaissait-il pas aussi si bien que cela en fin de compte. De son côté, Tom n’avait pas beaucoup bougé cet été. En effet, ses parents travaillaient ensemble au Ministère de la Magie, au sein du Département des accidents et catastrophes magiques, et leurs dernières obligations les avaient empêchés de partir en vacances ailleurs dans le pays ou à l’étranger.

En décollant son visage de la vitre, Tom se surprit en train de bailler. Après avoir machinalement frotté ses yeux fatigués, il décida d’observer minutieusement l’environnement qui l’entourait au sein du wagon tout en restant assis à sa place.

Situés à deux ou trois tables en face de lui et sur la rangée opposée à la sienne, Adam et Tobey étaient tous les deux concentrés sur leur jeu d’échecs version sorciers. Tom ne parvenait pas vraiment à voir lequel des deux était en train de gagner même si le léger sourire en coin de son capitaine pouvait lui indiquer que ce dernier était actuellement dans une bonne posture. Tout juste derrière lui se trouvait Alice – seule elle aussi – la tête plongée à l’intérieur de ses bras, soutenus par la table. Elle devait très certainement être en train de dormir. Enfin, Caleb était assis plus loin, dans l’un des quatre recoins du compartiment. Tom remarqua que ce dernier était en train de feuilleter le numéro du jour de la Gazette du sorcier. Mark et Rachel, quant à eux, s’étaient absentés il y a quelques minutes pour aller acheter quelques friandises à la dame du chariot, qui avait arrêté de faire ses allers et retours.

Après quelques douloureux étirements suivis de longues secondes à rester éveiller sans rien faire, Tom décida finalement de se lever pour aller rejoindre Caleb et lui tenir compagnie.

« Alors, quelles nouvelles aujourd’hui ? lui demanda-t-il en pointant du doigt son journal tout en s’asseyant confortablement en face de lui.

– Bah, souffla Caleb, tu le sais très bien, le même blabla habituel à l’occasion de la rentrée des élèves de Poudlard. La moitié du numéro d’aujourd’hui ne parle que de ça, mais je n’ai pas vraiment relevé quelque-chose en particulier.

– Et côté sport, ça dit quoi ? La Ligue de Quidditch devrait normalement bientôt débuter, ils ont annoncé quelles seront les équipes qui vont se rencontrer lors de la première journée ?

– Attends que je vérifie, dit-il calmement en cherchant la rubrique dédiée aux sports. Non, pas encore apparemment. (Il se frotta le menton avant de reprendre) Vivement la reprise en tout cas, on n’a pas eu grand-chose à se mettre sous la dent cet été.

– Ça, c’est sûr ! En revanche, ça va être la folie l’été prochain avec la nouvelle édition de la Coupe du Monde.

– Ouais, et ça commencera pile au moment où l’on aura terminé nos études ! Dès que les billets seront disponibles, je suis certain que mon père s’arrachera pour réserver des places pour les matchs de l’Angleterre.

– En espérant qu’on aille loin cette fois-ci, répliqua Tom en soupirant, parce que ce n’était pas fameux lors de la précédente édition.

– C’est parce que l’équipe était en pleine reconstruction à l’époque, souviens-toi. Je suis plutôt confiant personnellement, d’ailleurs je nous vois bien atteindre le carré final.

– Tu m’as l’air bien sûr de toi, dis donc.

– Eh bien, il faut dire que je me base un peu sur notre propre parcours. On était exactement dans le même cas qu’eux auparavant, et cela ne nous a pas empêché de rouler sur tout le monde en cinquième année !

– M’ouais, ça se tient. Mais là tu compares de pauvres petites équipes scolaires à des sélections nationales ! Ce n’est pas vraiment la même chose, se moqua Tom.

– Dans le fond, ça revient au même, s’entêta Caleb, c’est juste l’échelle qui change, c’est tout.

– Le verdict dans un peu plus d’un an je suppose, marmonna Tom après quelques secondes de silence, pour l’heure, mieux vaut se concentrer sur la Ligue. »

Une boîte de Chocogrenouilles atterrit soudainement devant lui sur la table, ce qui le fit légèrement sursauter. Tom lança un regard interrogatif en direction de Caleb, qui reçut aussitôt une Baguette réglisse en pleine figure. En se retournant, Tom aperçut Rachel traînant un sac rempli de friandises derrière Mark qui, quant à lui, s’esclaffait.

« Paf ! cria-t-il, dans le mille !

– Tu aurais pu me prévenir avant de lancer, je l’aurais gobé en plein air ton bonbon, plaisanta Caleb dans le but de ne pas se faire ridiculiser davantage.

– Euh… les gars, s’inquiéta Tom en observant en détails le sac que portait Rachel, vous êtes au courant qu’on arrive bientôt ? Vous comptez sérieusement vous enfiler tout ça avant d’arriver ?

– Bien sûr, seulement si vous comptez nous aider, rétorqua Rachel en vidant le reste des friandises sur la table.

– Bon, fit Tom en se rendant compte qu’il n’avait pas vraiment le choix, qu’il en soit ainsi. »

Il prit alors une poignée de dragées surprises tandis que Rachel s’installa à sa gauche et que Mark prit place à côté de Caleb, en lui subtilisant au passage la Gazette du sorcier. Il passa rapidement en revue la rubrique sportive avant de replier avec vigueur le papier du journal.

« Alors les gars, vous supportez quel club cette année ? demanda-t-il en se frottant les mains.

– Tu supportes qui toi, déjà ? interrogea Caleb.

– Les Frelons de Wimbourne, affirma-t-il fièrement. »

Quel drôle de nom pour une équipe quand même, pensa Tom. D’après ce que l’on racontait, au dix-septième siècle, un batteur de l’équipe aurait aperçu parmi les branches d'un arbre situé en bordure de terrain un nid de guêpes. Il l’aurait alors projeté d'un coup de batte sur l'un des attrapeurs de l’équipe adverse, qui dut se retirer du match après avoir été victime de terribles piqûres. L'équipe aurait après cela remporté la victoire et donc adopté l'emblème de la guêpe en plus du surnom de « Frelons » de Wimbourne. Depuis, leurs supporters – surnommés les Piqueurs – avaient pour coutume d'émettre un bourdonnement sonore pour troubler la concentration des poursuiveurs adverses lors des pénaltys.

« Je suis toujours pour le club de Flaquemare, intervint à son tour Rachel »

Fondé en 1163, il s’agissait de la plus ancienne équipe de la Ligue britannique et irlandaise. C’était aussi le club anglais le plus titré, avec vingt-deux Coupes de la Ligue et deux Coupes d’Europe. Rachel idolâtrait Jocelyn Wadcock – une ancienne poursuiveuse de l’équipe – car elle détenait depuis 1931 le record du plus grand nombre de buts marqués en une saison.

« Je n’ai pas vraiment de club favori, continua Caleb, mais j’apprécie pas mal les Faucons de Falmouth.

– Ah ouais ? s’étonna Mark, ils sont pourtant réputés pour leur brutalité. D’ailleurs il me semble que leur devise est Remportons la victoire, mais si nous ne pouvons gagner, il y a aura quelques crânes fêlés. De quoi bien effrayer les joueurs adverses.

– Je verrais bien les frères Wilcox là-bas, ils se sentiraient comme à la maison, plaisanta Tom tout en se rappelant de mauvais souvenirs.

– Surtout que ce ne serait pas la première fois que l’équipe engagerait des frères jumeaux comme batteurs, reprit Mark, car il y avait les frères Kevin et Karl Broadmoor qui jouaient entre 1958 et 1969. Ils ont d’ailleurs largement contribué à la réputation du club.

– Et toi, alors ? demanda Rachel à Tom après un bref silence, tu supportes qui ?

– Je soutiens la plupart des clubs anglais comme toujours, répondit-il, mais si je devais en choisir un en particulier, ce serait les Flèches d’Appleby. Petite anecdote pour vous d’ailleurs : sachez que mon grand-père a assisté, en 1932, au fameux match de Coupe d’Europe contre les Vautours de Vrasta, qui étaient les champions en titre à l’époque. D’après lui, la rencontre avait duré seize jours sous une pluie et un brouillard d’une rare intensité, mais à la fin, les Flèches l’avaient finalement emporté.

– Dément, s’exclama Mark alors qu’il avalait un Fondant du Chaudron, je tuerais pour voir un tel match. »

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