Blaireaux : sorciers de l'ombre

Chapitre 6 : Premier envol

4559 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 14/05/2020 14:41

Après la répartition par le Choixpeau, Pete et Arthur, qui avaient tous les deux été envoyés à la maison des Poufsouffle, devinrent officiellement inséparables.

Ils découvrirent avec émerveillement leur salle commune et leur dortoir, et choisirent évidemment des lits côte-à-côte. Mais ils n’eurent pas le temps de partir à la découverte de leur nouveau lieu de vie car les cours commencèrent très peu de temps après leur arrivée.

Les premières salles furent si difficiles à trouver que les deux garçons ne firent aucun trajet l’un sans l’autre, de peur de se perdre tout seul au beau milieu du Château. En arrivant à l’école, ils s’étaient attendus à apprendre des méthodes magiques pour se déplacer d’un endroit à un autre, comme se téléporter ou traverser les murs, comme ils l’avaient fait au sein de la gare de King’s Cross. Pourtant, il n’en fut rien. Au contraire, leurs déplacements s’avérèrent encore plus compliqués que dans les établissements moldus qu’ils avaient fréquentés auparavant dans la mesure où les structures présentaient chacune une personnalité et une autonomie propre. Certains escaliers, par exemple, se mettaient parfois en grève et se détachaient des plateformes qu’ils étaient censés joindre pour aller discuter avec un autre étage, ou pour se rapprocher simplement d’un mur amical. Les murs, quant à eux, pouvaient se montrer farceurs et dissimuler les portes d’un couloir, ou encore faire apparaître des portes qui étaient de simples murs.

Quand ils arrivaient enfin en classe, les leçons passaient à une telle vitesse qu’ils avaient finalement l’impression de passer plus de temps à courir dans les couloirs et à se battre avec les murs qu’à réellement suivre un enseignement scolaire. En effet, les leçons de magie leur faisaient l’effet de montagnes russes. Lors de leur premier cours de métamorphose, le Professeur McGonagall changea la table de Suzan Bones, une autre élève de Poufsouffle, en un mouton blanc aux petites oreilles, et toute la classe en eut le souffle coupé. Tous les nouveaux concepts magiques qu’ils étudiaient venaient contredire tout ce qu’ils avaient appris jusqu’alors, et Pete et Arthur ressortaient bien souvent de cours avec un mal de tête carabiné.

De plus, ils avaient beau apprendre à se servir de baguettes, découvrir les potions magiques et voir des objets léviter ou se transformer en animaux, ils ne réalisaient toujours pas qu’ils étaient, vraiment, deux sorciers dans une école de magie, apprenant la pratique des enchantements.

Le vrai déclic, le jour où ils comprirent réellement que leur vie allait changer pour toujours, arriva en fin de semaine, lors de leur premier cours de…


- Pete, chuchota Arthur, dis-moi que c’est une blague…

A mon signal

- Non, Arthur, je crois que tu ne rêves pas…

…vous tendrez le bras vers le sol…

- Pete, on va vraiment le faire ?

…et crierez avec autorité : « Debout ». Allez-y ! s’époumona Madame Bibine

Essayant d’attirer avec leur main le balai paille-de-riz au manche en bois qui gisait à côté d’eux, tous les élèves se mirent à crier « Debout ! » dans un grand brouhaha, à l’exception des deux enfants de moldus qui regardaient le sol d’un air interdit. Jamais balai n’avait eu vocation à s’élever dans les airs jusqu’à présent et ils ne voyaient pas pourquoi il en serait autrement aujourd’hui.

Ces balais ressemblaient en effet beaucoup à des balais moldus, hormis leur frange qui avait été ramassée en queue de cheval et qui était trop rêche pour balayer quoique ce soit. Le manche était également plus court qu’un balai classique, comme s’il était destiné à un enfant, mais trop épais pour être manié facilement.

- Je crois que oui, répondit enfin Pete.

Ils marmonnèrent des « debout » vagues et gênés en tendant une main peu assurée vers les balais qui somnolaient à leurs pieds. Mais vexés d’avoir été comparés à de simples ustensiles de ménage, ceux-ci ne réagirent à leur appel que par un léger sursaut dédaigneux.

- Les sorciers volent…vraiment sur des balais ? murmura Pete. Comme la méchante sorcière dans le Magicien d’Oz ?

- Tu crois qu’ils retroussent leurs nez pour faire le café ? plaisanta Arthur

- Hein ? Mais de quoi tu me parles ?

- Quoi ? s’écria Arthur, mais t’as jamais regardé Ma Sorcière Bien Aimée avec ta mère ?

- Pete ! Arthur ! Pourquoi vos balais sont-ils encore par terre ?

Les deux garçons s’interrompirent et jetèrent un coup d’œil alentour. Tous les élèves autour d’eux, dont les Serdaigle avec qui le cours avait lieu, tenaient leurs balais à la main, tandis que les leurs étaient encore confortablement étendus sur le sol – « Et je ne vois absolument pas le problème. », pensa Pete.

- Heu… commença-t-il, je ne suis pas sûr que…

- Dépêchez-vous, ou bien j’enlève cinq points à Poufsouffle pour mauvaise volonté.

- Ce qui est bien avec ce système, commenta Arthur à voix basse, c’est que ce n’est pas du tout stalinien. On peut te demander de chanter Let It Be en caleçon dans la forêt interdite et t’enlever des points si t’es pas dans le rythme.

Pete étouffa un éclat de rire. Les deux garçons s’écrièrent alors : « DEBOUT ! » et leurs deux balais sautèrent énergiquement jusque dans leurs mains, comme si un aimant était tout à coup apparu au creux de leurs paumes.

Madame Bibine eut un léger mouvement de recul et sembla murmurer quelque chose comme : « Bon, ben, c’est pas si mal pour une première fois » tout en tournant les talons pour continuer son va-et-vient entre les élèves.

Quand elle se fut suffisamment éloignée, les deux garçons se regardèrent et crièrent « Debout ! » d’un ton railleur, avant d’exploser de rire.


Même si Madame Bibine (qu’ils surnommaient désormais « Madame Staline ») les faisait beaucoup rire avec ses airs autoritaires et ses leçons qui avaient pour objet… les balais, ils ne purent s’empêcher d’admettre que le cours de vol avait été le meilleur qu’ils aient eu jusqu’à présent. Jusqu’à la pause déjeuner, ils ne parlèrent que d’une chose : l’extase que l’on ressentait en s’élevant naturellement au-dessus du sol et le bonheur de savoir enfin ce que ressentaient les oiseaux.

- Voler sur un balai, c’est quand même le plus gros kiff qu’on ait eu jusqu’à présent, répétait Pete à tout va.

- C’est génial ! C’est gé-nial ! C’est INCROYABLE, répondait Arthur de plus belle. Je vais enfin arrêter d’essayer de me réveiller dans mes rêves pour pouvoir voler. Je ne me suis jamais senti aussi libre !

- C’est ouf !

- C’est ouf !

- Et puis comparé au cours d’hier…

Leur dernière leçon de la veille contrastait fortement avec la première de ce jour.

Ils avaient en effet assisté à leur tout premier cours de potions avec le Professeur Severus Rogue. Leurs aînés parmi les Poufsouffle les avaient prévenus que cet enseignant était le moins conventionnel de tous. Plus pervers que strict, Rogue avait la réputation d’un être épouvantable, aussi doué pour terroriser les élèves que pour les dégoûter à tout jamais de l’art des potions. Arrogant et sarcastique, il n’hésitait pas à humilier les cancres et à favoriser ouvertement les Serpentard dont il était le directeur. L’atmosphère qui régnait pendant ses cours était donc pour le moins tendue.

- En fait, reprit Arthur, je crois que je l’aime plutôt bien, ce Rogue ! On a de la chance, on est toujours avec les Serdaigle, pendant ses cours. J’avoue que si je le voyais chouchouter des Serpentard à longueur de temps, ça me taperait sur les nerfs, mais je lui trouve un certain style.

- Moi, je ne sais pas trop, répondit Pete.

Pete détestait les persécuteurs qui l’avaient stigmatisé durant son enfance. Il n’aimait ni ceux qui s’en prenaient aux plus faibles, ni ceux qui ne laissaient pas leur chance aux personnes différentes. C’est pourquoi, de prime abord, le Professeur Rogue ne lui inspira aucune sympathie. Pourtant, sans qu’il ne puisse mettre le doigt dessus, il sentait que quelque chose chez Rogue ne collait pas avec son personnage.

- J’attends nos prochains cours avec lui, poursuivit Pete. Hier, c’était quand même sportif. Je ne sais plus qui de Serdaigle ou Poufsouffle a perdu le plus de points, mais je pense que ce pauvre Terry Boot a passé la soirée à pleurer aux toilettes…

- Oui, j’avoue qu’il a été horrible, sur ce coup-là, répondit Arthur en hochant tristement la tête. Qu’est-ce qu’il lui a dit exactement, déjà ?

- Je crois qu’il a dit : « Boot, si l’échec avait une couleur, il y a fort à parier qu’elle serait de celle du contenu de votre chaudron ».

- Outch… fit Arthur avec une grimace. Il est vraiment affreux. Mais j’ai trouvé son cours plutôt intéressant. Tu te rends compte de tout ce qu’on peut faire, avec des potions ? Changer de forme, guérir, influer sur notre environnement… C’est assez incroyable !

- Oui, mais on peut faire tout ça avec une baguette, commenta Pete. Une potion, ça prend du temps et il faut avoir tous les ingrédients sous la main !

- Je ne suis pas d’accord, je ne pense pas que toutes les potions aient leur équivalent en sortilèges.

- Arthur, je crois qu’on est les derniers, l’interrompit Pete. Il faudrait y aller.

Ils avaient tellement discuté qu’ils ne voyaient plus aucun élève de première année à leur table et la Grande Salle s’était largement vidée. Ils ramassèrent rapidement leurs affaires et se mirent en marche vers leur prochain cours : les sortilèges, avec le Professeur Flitwick.

- Oh-oh, commenta Arthur en regardant son emploi du temps. Je commence à comprendre pourquoi tout le monde est déjà parti. C’est à l’autre bout du château et je n’ai toujours pas compris comment on prenait les escaliers.

- Ok, viens on se dépêche ! répondit Pete

Ils pressèrent le pas et montèrent rapidement les étages, mais ils ralentissaient à chaque fois qu’ils voyaient quelque chose de singulier, comme les personnages papotant et déambulant à travers leurs tableaux, encadrés sur les murs.

- Ces tableaux qui bougent, fit Arthur, ça me donne la chair de poule ! J’ai l’impression qu’ils nous observent et qu’ils vont le dire.

- Dire quoi, à qui ? s’étonna Pete

- Je l’ignore, mais vu dans quel écosystème on est, il doit bien y avoir une police des sorciers, ou quelque chose comme ça.

- Oh, j’adorerais être dans la police des sorciers ! Je suis sûr qu’il y a des course-poursuites sur balais ! s’écria Pete

- Bien vu !

- Ça me rappelle la fois où j’ai dit à ma mère que je voulais être astronaute, et où elle m’a répondu que…

Mais Pete s’interrompit.

- Que quoi ? demanda Arthur

- Que… Désolé, Arthur, mais ça m’agace. C’est la troisième fois depuis ce matin que j’entends des gens parler de « Harry Potter » dans un couloir. Franchement, c’est pas parce que t’as la tâche de naissance la plus ingrate du monde en plein visage que tu dois te faire insulter du matin au soir !

Arthur explosa de rire.

- Mais t’es idiot, toi ! T’as pas compris que c’était un héros-sorcier ? Il a vaincu Lord Machintruc, là…

- Hein ? fit Pete, déconcerté. Tu peux préciser ?

- En gros, quand il était petit, il s’est fait attaquer par le Hitler magique et sa bande de Nazgûl ; mais là où tous les plus grands sorciers du monde se sont fait dézinguer, lui s’en est tiré avec une cicatrice et des ragots de couloir.

Pete eut un regard d’admiration et lui répondit :

- Ça y est, tu lis des livres de sorcier ?

- Je n’en peux plus de passer pour un outsider, j’ai l’impression de m’être infiltré dans un groupe de tricot sans avoir touché une aiguille de ma vie. Je ne comprends rien à leurs conversations, je ne comprends rien à leur technologie, et je n’arrive toujours pas à écrire une phrase entière avec leurs plumes à la noix ! Donc hier, j’ai retrouvé Miss Crapaud à la bibliothèque et je lui ai emprunté son livre sur Poudlard. Et je me cultive, très cher !

- Fort bien, très cher ! Mais, donc… ? Pourquoi est-ce que les gens parlent encore de Harry Potter ? 

- Bah, il faut bien parler de quelque chose, j’imagine, quand son mode d’éclairage c’est toujours la bougie.

Les deux garçons pouffèrent de rire au beau milieu du couloir, mais au même moment, ils croisèrent le regard sévère de Severus Rogue, le redoutable professeur de potions. Il leur lança un regard en coin et ne détourna les yeux qu’après les avoir dépassés.

- Dis-moi Arthur, demanda Pete, ce n’serait pas lui, Magique-Hitler ?

- Mais non ! répondit Arthur avec un grand sourire. Hitler, il est mort. Mais c’est vrai que Rogue a une bonne tête de Nazgûl.

- Et c’était quoi son vrai nom, à « Lord Machintruc » ?

- Un truc du genre « Voldemort », mais je crois qu’il ne faut pas trop le di…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que deux élèves d’un groupe de Serdaigle qui croisait leur chemin poussèrent un grand cri d’effroi. Avant même d’avoir pu comprendre ce qui se passait, Pete et Arthur se retrouvaient dans le bureau de la directrice adjointe de l’école, et leur professeur de métamorphose, le Professeur McGonagall.


- Pete ! Arthur ! aboya-t-elle sèchement. Il est des sujets avec lesquels on ne plaisante pas, dans cet établissement. Qu’est-ce qui vous a pris ?

- Mais… Mais… bafouilla Pete

- En fait, professeur, déclara Arthur l’air inquiet, vraiment, on ne sait pas pourquoi on est là…

- Ah vous ne savez pas ? Vous trouvez ça drôle, peut-être ?

- Mais… Mais quoi, enfin ? implora Arthur

- Vous niez donc ce que vous avez fait ?

Arthur et Pete ne répondirent plus rien, tant ils étaient désemparés.

- Alors ? reprit McGonagall.

- Mais, on a fait quoi… ? grommela Pete, de plus en plus agacé.

- Vous niez bien avoir tenté de terroriser vos camarades dans les couloirs, en plaisantant sur un sujet odieusement douloureux ?

- Vous parlez d’Harry Potter ? demanda Pete.

McGonagall leva un sourcil.

- Laissez Potter en dehors de ça. Vous ricaniez ouvertement à propos d’une sombre époque et d’un sombre personnage ! Sachez, si cela vous fait tant rire, qu’autour de vous, il y a encore bon nombre d’orphelins et de personnes endeuillées par la perte d’un être cher. Perte causée par l’objet de vos quolibets macabres et honteusement déplacés !

- Mais… enfin… répondit Artur, on ne plaisantait pas du tout. Pete me demandait pourquoi tout le monde parlait d’Harry Potter et de sa cicatrice, et je lui expliquais ce que j’ai compris de ce qui s’est passé lors de son enfance… J’avoue n’avoir pas encore bien tout compris mais je ne me moquais absolument pas…

McGonagall s’interrompit, éclairée par une soudaine révélation. Son visage changea d’expression et elle articula :

- Vous voulez dire, jeunes hommes, que vous ignorez tout de la guerre provoquée par Vous-Savez-Qui ?

- Voldemort ? demandèrent-ils en chœur.

McGonagall porta ses mains à son cœur, et sa bouche s’ouvrit comme pour pousser un cri silencieux. Elle fixait les deux garçons avec stupéfaction et semblait à deux doigts de faire un arrêt cardiaque.

Devant sa réaction clairement disproportionnée, les deux garçons tentèrent de s’excuser maladroitement. Ils étaient si désemparés et effrayés par cette sorcière aux traits sévères que leurs genoux s’étaient mis à trembler tandis qu’ils marmonnaient : « Pardon, Madame… Pardon Professeur McGonagall, qu’est-ce qu’on a fait ? ».

McGonagall resta silencieuse quelques instants. Elle reprit sa respiration et répondit calmement :

- Je veux que vous veniez en colle avec Monsieur Binns, votre professeur d’histoire. Il est normal qu’en tant qu’enfants de familles entièrement moldues, vous ne connaissiez pas aussi bien la culture magique que les autres élèves. Mais vous vous devez de rattraper certains sujets importants.

- En colle, mais… ? commença Arthur.

- …mais on a déjà des cours d’histoire ! acheva Pete.

- Oui, mais vous partez avec un lourd retard, un grave retard. Je veux donc que vous passiez une heure pour une remise à niveau.

- Je ne comprends pas, professeur, reprit Pete. Il y a d’autres enfants dont les parents sont des non-sor… sont des moldus, et qui ne doivent pas en savoir beaucoup plus que nous. Pourquoi eux ne vont-ils pas en colle ?

Le Professeur McGonagall remit machinalement ses lunettes carrées en haut de son nez et se racla la gorge, semblant quelque peu désarçonnée. Elle leur répondit enfin :

- Normalement, si vos parents ou vos tuteurs sont des moldus, la lettre d’admission à Poudlard vous est remise en main propre par un représentant de l’école, ou envoyée par hiboux et suivi d’une visite de ce représentant quelques jours plus tard, tout au plus. Toutefois, si la famille répond au courrier avant que le représentant se soit déplacé, on estime que c’est une famille avertie, et que cette visite n’est pas nécessaire. Ce cas de figure n’est pas, disons, exceptionnel… Mais plutôt rare, il faut l’admettre. Vos deux familles ont répondu suffisamment tôt à nos hiboux, c’est pourquoi vous n’avez reçu aucune visite.

Pete repensa alors à la réaction de son père à la lecture de leur deuxième courrier de Poudlard : « Comment ça, "rappelons" ? ».

- Cependant, vous auriez dû être pris en entretiens individuels le jour de la rentrée. Nous avons quelques… quelques affaires exceptionnelles au Château, dont le Professeur Dumbledore vous a parlé le soir de la cérémonie de la répartition, qui nous ont, et bien… distraits, dans la démarche. Et j’en suis désolée, conclut-elle sèchement.

Le fait de s’excuser auprès de première année ne semblait visiblement pas la réjouir.

- C’est pourquoi, reprit-elle, vous passerez une heure avec le Professeur Binns. C’est votre professeur d’histoire de la magie ; il est donc tout à fait indiqué pour vous communiquer les informations nécessaires.

- Mais… commença Arthur.

- Il n’y a pas de « mais » qui tienne, Mr Clay. C’est une nécessité. A présent, retournez en classe. J’expliquerai votre retard au Professeur Flitwick.

Elle tourna les talons et quitta la pièce d’un pas pressé.

- Pourquoi est-ce qu’elle sort de son propre bureau ? interrogea Pete.

- Je ne sais pas, répondit Arthur, mais c’est l’occasion de récupérer la game boy qu’elle m’a confisquée mardi !


Après ce drôle d’épisode, Pete et Arthur décidèrent d’en apprendre plus sur l’histoire de la Magie et des Sorciers, et de se montrer plus discrets lors de leurs discussions dans les couloirs.

Leur colle avec Mr. Binns, un professeur d’histoire d’un ennui mortel, une caractéristique corroborée par sa qualité de fantôme, fût d’un intérêt mineur. Il leur expliqua en détails ce qu’Arthur avait déjà à peu près lu juste avant leur incident et que le professeur McGonagall avait fortement sous-entendu : quelque vingt ans plus tôt avait éclaté une terrible guerre dans le monde magique. Un dénommé Voldemort (que Binns avait continuellement désigné par la circonlocution de « Vous-Savez-Qui ») et l’armée de ses adeptes, appelés « Mangemorts », avaient fait régner la terreur en voulant imposer une société de castes dont la plus haute était celle des « sorciers de pur-sang », c’est-à-dire ceux nés de deux parents sorciers. Cette période s’était traduite par une peur perpétuelle, des atrocités et des meurtres sans nom.

- Tu avais complètement raison, déclara Pete tandis qu’ils se rendaient en cours de Défense Contre les Forces du Mal.

Quelques jours s’étaient écoulés depuis leur colle mais Pete éprouvait beaucoup de curiosité concernant cette époque du monde magique et revenait souvent à ce sujet de conversation.

- A propos de quoi, en particulier ? lança Arthur d’un ton espiègle.

- La guerre des sorciers… Tu ne pouvais plus faire confiance à ton voisin, tu devais dénoncer ceux qui avaient des parents moldus, comme nous… Et ce Tu-Sais-Quoi, qui voulait faire des sang-purs la caste maîtresse, alors que lui-même avait un père moldu…

- Je te dis que c’est Hitler, ce mec !

- Je suis d’accord, c’est fou. Le monde des sorciers et des non-sorciers sont totalement partis en vrille presque au même moment.

- C’est une coïncidence curieuse, en effet.


Ils s’installèrent en cours mais commencèrent à rire dans leurs métaphoriques barbes de onze ans dès que le professeur Quirrell eut commencé à bégayer ses premières phrases avec une voix d’enfant.

- Dites, vous deux, chuchota une voix autoritaire derrière eux, ça suffit de vous moquer des gens qui ont du mal à parler !

- Désolé, Hannah, répondirent-ils en chœur.

Contrairement à ce qu’ils espéraient (des incantations de magie noire, des combats contre des démons ou encore un geyser de flammes infernales), le cours n’eut rien de passionnant car le Professeur Quirrell ne fit que raconter des anecdotes à propos de loups-garous et ne semblait pas enclin à leur expliquer ce que pouvaient bien être ces « forces du mal ».

Pour s’occuper, Arthur imitait silencieusement les mimiques nerveuses du petit professeur enturbanné. Pete tentait de ne pas se laisser distraire car il voulait apprendre le plus possible en cours. Malgré ses difficultés à adhérer à cette nouvelle culture et à s’intégrer aux autres élèves, il adorait la sensation de liberté et de nouveauté qui lui traversait l’estomac chaque fois qu’il défiait toutes les lois de la physique avec un simple bout de bois.


- Dépêche-toi, je meurs de faim ! cria Arthur à son camarade à la fin du cours.

- Garde-moi une place, je finis juste de copier ça et j’arrive.

Pete écrivait très lentement et sortait presque à chaque fois le dernier de la salle de classe. Il finit de gribouiller à toute vitesse les devoirs qui étaient inscrits au tableau et plongea sous sa table pour ramasser les plumes et les parchemins qu’il avait renversés au fur et à mesure du cours.

Il avait juste fini de mettre toutes ses affaires dans son sac-à-dos qu’une voix étrange l’interpella.

Qu’eeeest-cccccce que tout ce bruit ?

Cette voix, qui était à la fois sifflante et stridente, provenait de l'autre côté de la pièce, à l'endroit où se tenait Quirrell. Pete entendit ce dernier lui répondre :

- Ce sont mes cours, Maître. Je suis désolé de devoir vous infliger ça.

Quelle humiliattttions, répondit l'étrange voix. Allons… Abreuve-moi…

Pete n’y prêta pas attention et sortit de la salle de cours. Il sortit de la classe, mais avant de refermer la porte derrière lui, il ne put s’empêcher d’espionner quelques secondes la chose la plus surprenante qu’il ait vu jusqu’ici. Quirrell finissait de retirer méticuleusement son turban et découvrait ce qui ressemblait très fortement à un visage gris et émacié, comme collé à la glu à l’arrière de son crâne. « C’est sûrement cette tête-là qui a une drôle de voix » pensa Pete. Il détourna les yeux avant que le professeur (ou son autre tête) ne le remarque et referma la porte.


Quelques minutes plus tard, il entra dans la grande salle en cherchant Arthur des yeux.

- Pete ! Pete, par ici, cria Arthur du milieu de la table des Poufsouffle.

- Eh, Arthur, tu ne vas jamais me croire ! s’écria Pete en s’asseyant à côté de lui ! Quirrell, il a une tête, en dessous de son turban !

- Mais non ! Comment ça ?

- Si, si, je te jure ! Il a un gros visage, tout gris, collé à son crâne… et quiiiii paaaaarle comme çççççççaaaaa… ajouta-t-il d’une petite voix stridente tout en imitant un zombie.

Arthur explosa de rire et déclara :

- Ils sont complètement cinglés, ces sorciers ! Ils se font greffer des têtes à l’arrière du crâne !

- Ha ha ha !

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