Je cacherai

Chapitre 6 : Première sortie

2434 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 11/05/2020 13:53

Cette fois, Hermione avait été trop loin, elle le sentait. Malefoy ne s’était jamais montré aussi glacial avec elle. Comme il était encore plus irascible qu’à l’accoutumée, elle décida de faire comme tout le monde dans ces cas-là : l’ignorer le plus possible. Toutefois, si elle préférait faire profil bas pour l’instant, elle ne pouvait s’empêcher de s’interroger sur l’identité de la fille de la photographie. C’était la seule décoration dans la chambre de son homologue ; il devait donc beaucoup tenir à elle. « Il n’est pas franchement du genre sentimental, pourtant », se disait-elle. C’était si frustrant de ne pas avoir le fin mot de l'histoire…


En revanche, elle n’en avait parlé à personne. Pas même à Harry et Ron, ni à Ginny. Qui que soit cette adolescente, son existence et l’attachement que Malefoy semblait éprouver pour elle étaient comme un secret trop intime pour être révélé. De plus, elle ressentait un sentiment étrange à l’idée d’être la seule à savoir. D’avoir effleuré ce qui se cache sous le masque de ce Serpentard arrogant. « N’importe quoi », sermonna-t-elle son reflet avant de prendre son courage à deux mains et de rejoindre Malefoy dans leur petit salon. Le mercredi, jour de leur ronde commune, était arrivé bien trop tôt à son goût. Plus question d’éviter son homologue cette fois.


Le silence s’épaississait à mesure qu’ils parcouraient les couloirs sombres. Même après avoir surpris deux élèves de quatrième année en train de s’embrasser en douce, Malefoy ne décrochait toujours pas un mot. Hermione s’en trouvait à la fois soulagée et agacée. Alors que leur ronde était sur le point de se terminer, elle pensa être tirée d’affaire. Malheureusement, au moment de franchir l’entrée de leurs appartements communs, le bras tendu du Serpentard lui barra le passage. Hermione frémit.


- Quoi ? Osa-t-elle demander malgré tout en prenant un air détaché.


- Quoi ? Répéta Malefoy avec un rictus mauvais. Ne t’avise plus jamais de rentrer dans ma chambre. Tu as eu de la chance la dernière fois, mais crois bien que ça ne se reproduira pas.


Sa voix basse était lourde de menace, la proximité de leurs corps dérangeante. Mais la Gryffondor ne voulait pas lui donner la satisfaction de la voir reculer devant lui. Au contraire, tête haute, elle dégagea son bras et lui assena un simple « Bien, bien » avant de rejoindre sa chambre, scrutée par son regard d’acier. Une fois à l’intérieur, elle se laissa aller à un soupir, soulagée d’avoir éviter une dispute.


Le lendemain, tout le château était en effervescence. La première sortie au village de Préaulard allait enfin avoir lieu. Hermione, Harry, Ron et Ginny avaient bien sûr décidé de s’y rendre ensemble. Ron se demandait déjà quelles friandises il allait ramener de Zonko, et Ginny s’enthousiasmait à l’idée de cette sortie avec son petit-ami. Toute cette bonne humeur changea les idées d’Hermione.


Le jour J, les quatre Gryffondors présentèrent joyeusement leur autorisation de sortie à Rusard, avant de faire tranquillement le tour du village. L’après-midi filait vite, et malgré leurs gros manteaux, ils commençaient à avoir froid. Ils optèrent donc pour une pause aux Trois-balais afin de se mettre au chaud. Alors qu’Hermione récupérait quatre bièraubeurres, un jeune homme l’aborda. Elle eut la bonne surprise de découvrir Ethan.


Après un échange de banalités, il lui demanda :


- Tu te souviens des livres dont je t’ai parlé l’autre jour ?


- Bien sûr, répondit-elle. Ils avaient l’air très complets.


- Si tu veux, ma tante tient sa boutique ici, je pourrais t’y emmener et te les montrer. Je lui en ai déjà touché deux mots. Je lui ai dit que tu es une élève particulièrement intelligente et sérieuse, alors elle est même d’accord pour que tu en empruntes une sélection. Tu pourras les rapporter à la prochaine sortie. Qu’en dis-tu ?


Hermione n’en revenait pas.


- J’adorerais ! S’exclama-t-elle. Mais tu es vraiment sûr que ça ne te dérange pas ?


- Au contraire, lui assura-t-il. Tu es dispo maintenant ?


Hermione lui adressa un sourire ravi et rejoint ses amis à leur table. Elle leur expliqua la situation et tous trois l’encouragèrent à y aller.


- Comment est-ce que tu pourrais résister à tant de vieux livres poussiéreux ? Se moqua gentiment Harry.


- Impossible, c’est sûr, confirma Hermione avec un clin d’œil. Je vous laisse ma bièraubeurre, et j’ai déjà tout payé au comptoir. Amusez-vous bien, on se retrouve au château !


Elle enfila son écharpe à la hâte, avant de suivre Ethan à l’extérieur. Le vent soufflait fort, ses cheveux virevoltaient devant des yeux et elle fut soulagée quand ils s’arrêtèrent enfin devant une toute petite boutique. Située à l’angle de deux étroites ruelles, sa devanture ne payait pas de mine. Une enseigne qui grinçait au rythme des courants d’air indiquait sobrement « La magie des mystères ». Hermione se pencha pour regarder au travers des carreaux embués de la vitrine et distingua avec étonnement que la boutique semblait très profonde.


- Prête ?


- Et comment !


L’intérieur était très chaleureux. De nombreuses bougies flottaient tranquillement entre les rangées d’étagères et au dessus des tables de consultation. Les livres étaient rangés selon un classement très précis, comme l’indiquaient les différents écriteaux.


Hermione était aux anges. Elle ne savait pas par quel rayonnage commencer.


- Viens, je vais te présenter ma tante, lui dit Ethan, apparemment ravi de la voir si enthousiaste.


- Je te suis.


Tout au fond de la boutique, une femme était en train de restaurer un ouvrage avec application. D’une quarantaine d’années, elle avait le regard vif et des cheveux coupés courts d’une incroyable couleur pourpre. Son apparence surprit Hermione, mais son sourire la mit instantanément à l’aise.


- Bonjour Ethan, dit-elle chaleureusement en serrant son neveu contre elle. Je suppose que tu dois être la fameuse Hermione ? Enchantée, je suis Adelais.


- Bonjour, c’est bien moi, répondit l’intéressée, les joues légèrement rosies. Je suis enchantée aussi. Votre boutique est merveilleuse. Tous ces livres et ces thématiques, c’est impressionnant !


- Merci, je suis ravie que ça te plaise. Tu t’intéresses à un sujet en particulier ?


- Oh, et bien à plein de choses ! Mais en ce moment j’aimerais faire des recherches plus poussées concernant l’arithmancie…


Hermione essayait de ne pas s’emballer, mais elle réalisa bien vite que la tante d’Ethan était au moins autant passionnée qu’elle. Elles se lancèrent dans des débats animés et Adelais lui conseilla d’énormes pavés. Ethan de son côté consultait tranquillement des livres de métamorphose animale dans un autre rayon en les attendant.


Le temps fila à vive allure et les deux élèves furent contraints de se préparer à partir afin de rentrer à l’heure au château. Hermione remercia chaleureusement Adelais et ce fut les bras chargés de deux gros sacs qu’elle suivit Ethan. La température avait baissé et la nuit était déjà tombée. La Gryffondor resserra son manteau contre elle avant se s’adresse à son homologue, presque gênée :


- Merci beaucoup de m’avoir montré cet endroit, Ethan. Je n’arrive pas à croire que J’ai loupé tant d’occasions. Si j’avais su, j’aurais passé toutes mes sorties à Préaulard dans cette boutique !


Ethan éclata de rire.


- Et désolée, rajouta-t-elle penaude. Je n’ai pas vu le temps passer là-bas, j’espère que tu ne t’es pas ennuyé.


- Tu plaisantes, ça ne risque pas. Je suis un Serdaigle, après tout, plaisanta-t-il. En plus, j’en ai profité pour récupérer trois livres dont j’avais besoin.


Il lui montra le renflement dans le sac en toile qu’il transportait. Ils échangèrent un sourire complice.


- En plus, rajouta-t-il, ça me fait vraiment plaisir d’avoir l’occasion de passer du temps avec toi en dehors des cours et des révisions à la bibliothèque.


« Ethan est vraiment sympa », se dit Hermione, qui avait elle aussi passé un très bon moment. Sur le chemin du retour, ils discutèrent de tout et de rien avec animation.


- En tout cas, ta tante est vraiment extra ! S’exclama Hermione.


- Tu l’as dit ! Je l’aime beaucoup. J’ai passé de longues heures chez elle quand j’étais gamin. C’est elle qui m’a donné le goût de la lecture et l’envie d’apprendre.


- Vous avez l’air très proches, constata-t-elle avec tendresse.


- C’est vrai. Du coup, je lui rends visite dès que j’en ai l’occasion.


Hermione s’apprêtait à le questionner sur ses parents quand elle entendit à l’angle d’un couloir une voix familière évoquer Malefoy. Intriguée, cette curiosité prit le dessus et elle fit signe à Ethan de s’arrêter. Surpris, celui-ci heurta son bras tendu.


- Qu’est-ce qu’il t’arrive ?


- Chut, lui intima-t-elle, un doigt sur la bouche.


La voix aigüe de Pansy Parkinson reprit, plus audible cette fois :


- Arrête de plaisanter, Blaise. Je te dis que ça cache quelque chose !


- Tu te montes trop la tête, rétorqua Blaise Zabini.


Il semblait perdre patience et son ton se fit plus agacé.


- Laisse-le. Il a dit qu’il avait ses raisons pour quitter Poudlard aujourd’hui.


« Quitter Poudlard ? » Hermione était perplexe. D’ordinaire, aucun élève ne pouvait quitter l’école hors vacances scolaires, pas même pour une seule journée.


- Tu sais bien que Drago n’aime pas qu’on fouine dans ses affaires, rajouta Zabini avec dédain. Lâche l’affaire. Viens, on va manger, J’ai la dalle.


Parkinson poussa un soupir résigné et les deux Serpentards s’éloignèrent.


Plongée dans ses réflexions, Hermione sursauta quand Ethan posa une main sur son épaule et lui demanda, penché vers elle :


- Hermione, ça va ?


- Oh, désolée Ethan.


Elle ne savait pas comment réagir.


- Ne t’en fais pas, la rassura-t-il. Moi aussi J’ai tendance à me méfier quand je croise la bande de Malefoy dans les couloirs.


Elle lui adressa un sourire gêné. Elle lui était reconnaissante de ne pas souligner le ridicule de sa réaction. Elle eut un petit rire nerveux et il aida Hermione à transporter ses livres jusqu’à l’entrée de son dortoir. Ils redescendirent ensuite dans la Grande salle pour le dîner. Hermione le remercia encore une fois, et c’est tout sourire qu’ils se séparèrent, chacun rejoignant la table de sa maison.


Une fois assise, elle eut à peine le temps d’attraper l’un des plats que Ginny lui demanda, l’air malicieux :


- Alors, cette excursion avec Lysander ?


- C’était génial, répondit Hermione.


Elle savait pertinemment où son amie voulait en venir, mais elle n’avait pas l’intention d’entrer dans son jeu.


- Mais encore ?


- Il m’a emmenée dans la boutique de sa tante. C’était passionnant ! Et en plus, J’ai pu rentrer avec une dizaine de livres. Quand je pense que je suis déjà débordée, s’enthousiasma Hermione.


Ginny lui adressa un sourire en coin.


- Je suis super contente pour toi, mais je reformule : alors, comment ça s’est passé avec Lysander ?


- Très bien, capitula Hermione. On a beaucoup discuté. C’était agréable de parler avec lui d’autre chose que des cours. Mais c’est tout. Alors garde pour toi tes fameuses intuitions !


Hermione essaya de prendre un ton menaçant, mais sa tentative se solda par un échec car elle ne put s’empêcher de s’attendrir devant la petite moue de son amie. Cette dernière leva les bras en signe de résignation. Depuis qu’elle avait commencé à sortir avec Harry l’année précédente, Ginny s’était trouvé une nouvelle occupation : entremetteuse. Du moins, elle essayait de l’être. Et cette rouquine au tempérament de feu avait bien du mal à ne pas s’agacer devant l’indifférence d’Hermione à ce sujet. À force de questions, la préfète avait fini par avouer qu’elle avait éprouvé des sentiments pour Ron pendant longtemps, mais qu’à présent elle le considérait davantage comme un frère. Mais de temps en temps, Ginny revenait à la charge...


Les desserts venait à peine d’apparaître sur la table, quand Malefoy fit son entrée dans la Grande salle. Toujours aussi hautain, il se dirigea vers la table des Serpentards sans accorder la moindre attention à toutes les paires d’yeux braquées sur lui. Quand il s’assit, Parkinson se colla contre lui en affichant une moue boudeuse. Il l’ignora royalement et quand il releva la tête, son regard rencontra celui d’Hermione. Il la déstabilisa : plus qu’haineux, il était plutôt soupçonneux. Comme si Malefoy essayait de la jauger. Perplexe, Hermione détourna les yeux, et alors qu’elle écoutait d’une oreille ses trois amis qui débattaient à propos de leurs chances de réussite dans le prochain match de Quidditch contre Serdaigle, elle repensa à la conversation surprise un peu plus tôt dans la soirée.


Malefoy avait donc bénéficié d’une autorisation de sortie exceptionnelle ? Mais sur quels motifs ? « Ça a peut-être un rapport avec la fameuse convocation que je lui ai transmise ce soir-là », songea Hermione. Un nouveau mystère…

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