Aut vincere, aut mori

Chapitre 10 : Dissendium

2429 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 20/09/2020 21:25

La récupération du diadème dans la Salle des Objets Perdus fut un jeu d’enfant. Hermione s’empara de l’artefact caché dans le coffret poussiéreux et le mit en sécurité dans sa chambre, non sans avoir auparavant sécurisé sa malle avec divers sortilèges de protection. Il faudrait qu’elle trouve néanmoins rapidement une autre cachette pour ne pas risquer d’être découverte. Elle passa une bonne partie de la journée à la bibliothèque à réviser son cours de potions avec Remus qui l’avait rejointe, puis se rendit dans la Salle sur Demande pour s’entraîner au sortilège de désillusion. Elle avait tenté de prendre la cape d’invisibilité dans le dortoir des garçons, mais elle n’était pas parvenue à se faufiler sans éveiller les soupçons. Après maints essais, elle réussit son sortilège, mais il ne dura qu’une dizaine de minutes. Elle devrait donc se faufiler dans les couloirs dans la plus grande discrétion, et ne jeter le sortilège qu’à son arrivée à la réserve.


Le soir venu, elle se coucha avec les filles qui lui souhaitèrent bonne nuit, et attendit les douze coups de minuit. Elle se redressa doucement, se vêtit de sa cape noire et se glissa hors du dortoir. La Grossa Dame grogna lorsqu’elle la réveilla en passant le tableau, mais elle l’ignora et poursuivit son chemin jusqu’au quatrième étage. Aucun signe de Miss Teigne jusque-là. Se jetant le sortilège de désillusion, elle ouvrit silencieusement la lourde porte de la bibliothèque et se faufila entre les rayonnages, avant d’atteindre la porte de la réserve. Après un Alohomora parfaitement réalisé, elle poussa la grille et accéda à la partie interdite aux étudiants sans autorisation de la Bibliothèque de Poudlard. Elle se dirigea directement à l’endroit où elle avait trouvé lors de leur sixième année Les Grandes Noirceurs de la magie de Godelot, qui contenait la mention des horcruxes. Fouillant l’étagère, elle dénicha exactement ce qu’elle cherchait : Grands Langages Noirs du monde magique, par S. T. Hewitt. La jeune femme souleva la lourde couverture en cuir et commença à feuilleter les différents chapitres, parcourant les lignes calligraphiées. Chapitre 16 : Fourchelang, bases et applications. Gagné. Ne pouvant pas ressortir de la réserve avec le lourd ouvrage, elle inspira profondément et déchira les pages du chapitre. Elle savait qu’elle n’avait pas le choix, mais l’action en elle-même lui hérissa le poil. Elle s’excusa mentalement envers Mme Pince, fourra les feuilles du crime dans une poche de sa cape, se hâta de replacer le livre, rebroussa chemin, verrouilla la porte de la réserve et s’éclipsa. Mais alors qu’elle allait marchait dans le couloir pour rejoindre les escaliers, elle entendit un miaulement familier. Miss Teigne. Rusard allait arriver d’un moment à l’autre. Hermione courut pour s’éloigner au plus vite, et descendit le premier escalier qu’elle trouva. Arrivée au troisième étage, elle se souvint du passage de la sorcière borgne et tenta de l’atteindre au plus vite. Mais dans sa course elle buta contre un torse musclé qui n’aurait pas dû se trouver au milieu du couloir en plein nuit. Sirius Black la regardait, haussant les sourcils.

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 - Bon, Patmol, des idées ? C’est notre début d’année, il faut vraiment montrer aux Serpentards que nous allons leur faire regretter d’être des graines de Mangemorts. Je pensais partir sur un de nos classiques, la langue de vipère, mais je sens que cette année étant notre dernière, il faut marquer le coup et redoubler d’ingéniosité maléfique.


Cela faisait maintenant trente minutes que James essayait de fomenter un plan machiavélique contre les verts et argent, mais Sirius n’avait absolument pas la tête à cela. Remus avait abandonné l’idée de retenir James dans son flux d’idées plus démentes les unes que les autres, tandis que Peter, comme à son habitude, approuvait la moindre parole qui sortait de la bouche de son modèle. Il était maintenant 23h40, et Sirius avait plus envie de se retrouver seul face à lui-même devant la cheminée que de rejoindre James dans sa future blague contre les Serpentards. Il était toujours prêt d’ordinaire à les ridiculiser, notamment Servilus, mais il était préoccupé par autre chose. Depuis qu’il avait échangé avec Hermione sur sa famille et qu’il l’avait ensuite vue fraterniser avec leur ennemi en Potions, il avait d’abord été en colère contre la lionne, puis ses pensées s’étaient tournées vers son petit frère. Regulus. Lorsqu’il s’était enfui, il l’avait abandonné, seul face à leurs parents. Depuis leur enfance, Regulus l’avait toujours protégé comme il le pouvait, tentant d’apaiser la colère de leur mère lorsque Sirius en faisait les frais, ou le soignait comme il le pouvait après les démonstrations de haine maternelle qu’il subissait, récompense pour un mauvais comportement, indigne d’un sang-pur. En retour, Sirius avait toujours eu une affection particulière envers son petit frère, essayant de lui donner l’amour qu’ils n’avaient jamais eu de la part de leurs géniteurs.


Cependant, leur relation proche s’était brisée lorsque le Choixpeau avait envoyé Sirius à Gryffondor. Devenu la honte de la noble maison des Black, Sirius s’était renfermé sur lui-même, provoquant de plus en plus ses parents et défiant leurs convictions de sangs-purs. Ses étés étaient devenus des enfers, et il ne rentrait même plus pendant les différentes vacances qui rythmaient le cours de l’année, se tenant prudemment à l’écart de sa mère, mais également d’Orion, son père, qui s’il était moins présent au quotidien se rattrapait largement durant différentes séances de punition à la ceinture. Sirius avait vu l’étendue de la haine de ses parents lorsqu’il avait décoré sa chambre aux couleurs de Gryffondor avec de la glu perpétuelle, jetant l’opprobre sur la maison entière. Son corps se souvenait encore de la fureur de son père, marqué d’une large cicatrice s’étendant du bas droit de ses côtes au haut de son aine. Mais cela ne l’avait qu’incité à s’éloigner encore plus de sa famille, prenant un plaisir particulier à découvrir le monde moldu, sa culture et surtout sa musique. Sirius avait acquis en cachette un lecteur de cassettes et avait accumulé un nombre incalculable de tubes moldus, essentiellement du rock. Il appréciait particulièrement cette musique déchaînée qui pouvait parfois lui faire oublier sa situation, ou au moins lui fournir un exutoire. Bien sûr, Walburga avait découvert l’appareil et l’avait détruit par un Bombarda en bonne et due forme, mais Sirius en avait racheté un de suite, au grand dam de sa mère. Après une série de Bombarda lancés sur les pauvres walkmen qui s’étaient succédés, elle avait finalement capitulé et laissé cette musique infâme envahir les oreilles de infâme rejeton. Sirius gardait son précieux walkman depuis lors, et demandait régulièrement à Remus de lui trouver de nouvelles musiques.


Toute cette haine familiale envers l’aîné déchu des Black avait fini par trouver son salut en la personne du parfait petit Regulus, fierté de ses parents, digne héritier de la maison des Black. Lui savait se comporter en société, lui savait côtoyer les bonnes personnes, lui saurait assurer l’avenir de leur famille. Et plus Sirius s’éloignait de l’emprise de leurs parents, plus Regulus se faisait piéger dans leurs serres, cherchant sans cesse à les rendre fiers. C’était donc sans surprise qu’il avait été réparti à Serpentard, puis qu’il était devenu le petit prince de sa maison, s’alliant avec des futurs Mangemorts, des enfants de familles nobles qui sauraient porter les idéaux de leur caste. Sirius avait pourtant tenté de rallier son frère, de lui montrer une autre option que la voie tracée par leurs géniteurs, mais il avait rapidement déchanté en voyant le regard de mépris qui s’était affirmé lentement mais sûrement dans les yeux de Regulus, à mesure qu’il s’intégrait dans sa maison. Les deux frères étaient maintenant séparés, et c’était la solitude qui accueillait Sirius lorsqu’il revenait en juillet au Square Grimmaurd.


Tout avait basculé l’été dernier, cependant. Si les deux frères avaient chacun eu l’espoir d’une réconciliation, celle-ci avait été tuée dans l’œuf lorsqu’après une correction de trop, Sirius avait franchi pour la dernière fois le seuil de leur demeure familiale. L’aversion que son père lui portait s’était une énième fois exprimée, mais elle avait laissé des séquelles beaucoup trop importantes pour que Sirius l’accepte.


FLASHBACK. // ATTENTION, CETTE SCENE PEUT EN CHOQUER CERTAINS //


Immobile sur le sol de sa chambre, Sirius sanglotait sans bruit. La douleur irradiait dans son corps, et le paralysait. Orion avait été trop loin, et il lui semblait même avoir vu dans les yeux de sa mère une lueur de regret, disparue en un instant.


- Comment oses-tu hausser la voix contre moi ? Cette maison de lions traîtres à leur sang a été ta première erreur, et nous t’avons supporté beaucoup trop longtemps. Tu fais honte à la maison des Black, à te pavaner avec ce Potter et ce demi-sang, à nous regarder de haut.


Son père, les yeux fous, fulminait et semblait ne plus être que haine et démence. Sirius, une fois de trop, s’était opposé à son père, et affirmé que les nés-moldus n’étaient pas moins légitimes à utiliser la magie que ces familles dégénérées par une trop importante consanguinité. Orion avait défait sa ceinture et sans crier gare, s’était déchaîné contre Sirius, lui lacérant la peau, déchirant son âme. Malgré tous les sévices qu’il avait subis année après année, cette fois était la plus douloureuse. Du sang perlait déjà, tombant comme de la pluie, tandis que les coups pleuvaient sur le pauvre brun, prostré au sol. Mais ce qui le torturait à l’extrême était de voir son frère, posté à l’entrée de la pièce, les mains dans le dos, sans une once de compassion dans son regard. Il semblait avoir totalement abandonné son aîné, le laissant à la fureur sans limites de leur père. La boucle lui labourait la peau, lui déchirait le torse, lui brisait les jambes. La douleur atteignit son paroxysme lorsque, las de voir son rejeton gesticuler, Orion le pétrifia d’un maléfice, sans pour autant ralentir les coups. Son châtiment dura une éternité, et il lui sembla partir de son corps. Il ne reprit conscience que progressivement, après des heures passées emmuré dans la douleur.


Se redressant avec peine, il tituba jusqu’à son bureau, laissant des trainées de liquide rouge au sol ; attrapa sa baguette, son blouson et son walkman, et sans un regard en arrière, s’échappa de cet enfer.


Il avait transplané d’instinct, et atterri dans un village qu’il ne connaissait que trop bien, pour tous les moments heureux qu’il avait passés en compagnie de son frère de cœur. Godric’s Hollow. Il se tenait en bas de la colline menant au manoir Potter. S’armant de ses dernières forces, il commença sa route, serrant les dents pour ignorer la douleur qui le poignardait à chaque pas. Il finit par arriver sur le perron, et cogna dans un ultime élan à la lourde porte qui le mènerait à son refuge. Ce fut Twitty, l’elfe de maison, qui ouvrit la porte, et alerta Fleamont et Euphemia Potter. Sirius ne sut pas si c’étaient leurs voix rassurantes ou le soulagement d’avoir échappé à sa famille, mais il s’écroula, lâchant enfin prise. Il ne vit pas la famille de son meilleur ami le recueillir et le soigner ; épuisé, il sombra dans l’inconscience.


FIN DU FLASHBACK


Sirius se leva et marmonna une excuse à ses camarades de chambre, avant de descendre machinalement les escaliers du dortoir et de sortir de la tour de Gryffondor. Mettant le casque de son walkman, il tenta de noyer ses sentiments dans la musique, vibrant au rythme des percussions. Ses pas le menèrent au troisième étage de Poudlard, dépassant la salle des trophées et la galerie des armures. Ses promenades nocturnes dans le château l’avaient toujours apaisé. Il avait un réel besoin de se retrouver seul et l’immensité de l’endroit lui donnait la sensation de vide dont il avait besoin. Il n’avait cependant pas prévu qu’une lionne aux cheveux bouclés lui rentre dedans, interrompant ses pensées mélancoliques. Il enleva son casque et comprit à son air affolé et ses gesticulations, ses paroles inintelligibles n’aidant en rien, que Rusard allait arriver d’un instant à l’autre. Empoignant son bras, il la traîna jusqu’au passage de la Sorcière borgne, prononça rapidement un Dissendium et poussa sans ménagement la jeune fille dans la galerie, plaquant sa main sur sa bouche et l’emprisonnant de son corps. Les deux lions tendirent l’oreille puis soufflèrent une fois la menace passée.


Leurs corps étaient proches. Très proches. Et Sirius ne faisait pas mine de se dégager. Mais Hermione n’en avait aucune envie. Plongeant son regard dans le sien, elle se prit à se noyer dans ces yeux gris si tristes, si durs. Mais après tout, elle se doutait que les gens constataient les mêmes expressions dans ses yeux. L’un et l’autre avaient besoin de réconfort, si bien que cela fut presque naturellement que Sirius la bâillonna de sa bouche, l’embrassant avec fougue.


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