L'Ecole des Hautes Etudes Ministérielles

Chapitre 8

3161 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 22/02/2022 14:13

Le samedi matin, quelques minutes avant le rendez vous, Hermione ne savait pas sur quel pied danser. Elle était inquiète de la tournure que prendraient les événements si Malefoy n'appréciait pas ce qu'elle avait à dire. D'autant plus qu'elle l'avait invité dans ce café sous un faux prétexte. En fait, elle ne savait même pas si il allait la rejoindre, il n'avait pas répondu.


Une fois installée sur une petite table près de la vitrine, elle regarda la pluie tomber encore et encore sur les trottoirs. Elle avait choisi un petit café moldu qui se trouvait non loin de la bibliothèque et du Chemin de Traverse. Son impatience et son angoisse grandissaient à chaque fois que l'aiguille de l'horloge du commerce avançait de quelques minutes. Il n'allait quand même pas lui faire faux bond ?! C'est cet instant que choisit le jeune homme pour entrer. Avant qu'il ne la voit, Hermione put le regarder quelques secondes. Elle remarqua ses cheveux mouillés par la pluie qu'il ramena en arrière avec sa main, avec nonchalance. Leurs regards se croisèrent alors, et Hermione ne sut pas si c'était l'intensité de ce regard ou bien l'angoisse qui lui coupa le souffle. Elle reprit rapidement ses esprits le temps que Drago s'installe en face d'elle et sorte quelques notes.


- Euh, bonjour, osa-t-elle, devant le mutisme de son interlocuteur.


Il hocha la tête en guise de réponse.


- Voici mes notes. Je crois que j'ai fait une avancée dans le domaine de l'énergie invoquée dans certains sortilèges disons neutres, elle ne serait pas en même quantité que lorsqu'un sortilège blanc tel que le Patronus est lancé... Je pense que...


- Malefoy, tout ça a l'air extrêmement intéressant, je t'assure, mais je... Je suis désolée de te couper d'abord, mais je t'ai fait venir ici pour parler d'autre chose en fait... le coupa-t-elle, en baissant légèrement la tête, gênée.


Drago la regarda, étonné de son malaise. Il se décida à en profiter quelques instants, et préféra se taire en attendant que la jeune femme développe. Il voyait ses joues devenir de plus en rouges devant son silence.


- Bon. Je crois que nous avons besoin de discuter, tous les deux. Du passé. De ce qu'il s'est passé, avant, pour nous deux. Il faut que je puisse comprendre ton point de vue, je ne veux pas que cette situation … perdure. Et je ne voudrais pas te blesser ou que tu me blesses dans le futur, donc je pense que cette conversation s'impose. Dans l'intérêt de notre projet de recherches, il va s'en dire, rougit Hermione de plus belle devant le regard inquisiteur de Drago.


- Si tu veux qu'on se livre Granger, il va falloir commencer par être un peu plus honnête que ça, se décida-t-il enfin à parler.


- A propos de quoi ? bredouilla-t-elle.


- De la véritable raison pour laquelle tu veux qu'aucun de nous ne soit blessé dans l'avenir.


- Je te l'ai dis, le projet de recherche me tient vraiment à cœur, il serait dommage d'échouer parce que nous ne nous entendons pas, répondit-elle, en détournant le regard.


- Bon et bien si tu n'es pas capable d'admettre ta mauvaise foi, je ne vois pas l'intérêt de rester ici plus longtemps, fit-il calmement, en faisant mine de se lever.


- Je... Malefoy reste là ! s'exclama Hermione. D'accord, c'est bon, tu as gagné. Ce n'est pas QUE pour le projet.


- J'attends...


Hermione leva les yeux au ciel. Ce n'était pourtant pas si compliqué de lui dire que leur relation était devenue disons, importante pour elle, si ? Elle soupira fortement pour se donner du courage, et se força à le regarder dans les yeux.


- C'est aussi parce que... parce que oui, bon, très bien, nous ne sommes plus vraiment des ennemis, à ce que je sache.


- Si tu dis que nous sommes des collègues, je me lève immédiatement, ajouta Drago, avec un sourire en coin.


- Très bien, j'ai passé une très désagréable semaine sans ta compagnie, ça te va ? répondit-elle rageusement.


Il fit mine de réfléchir un moment, puis se décida à répondre à la jeune femme.


- Pour le moment, cela me convient.


- Comment ça pour le moment ? rétorqua Hermione. Je ne vais pas non plus t'implorer Malefoy.


- On ne devrait pas en arriver à de telles extrémités, fit-il, quoique...


La jeune femme leva les yeux au ciel, tout en souriant d'avoir retrouvé un semblant de normalité entre eux.


- Bon, alors je commence j'imagine ?


- Évidemment Granger.


- Très bien. Par où commencer... Et bien en sixième année, là où tu as du faire ta … mission. Dès le premier jour d'école, Harry nous a dit à Ron et moi que tu étais devenu un Mangemort. Et cela a été son obsession toute l'année, comme tu as du t'en rendre compte à l'époque. Finalement, il se trouve qu'il avait raison, mais Ron et moi ne le croyions pas. Je savais que Voldemort devenait de plus en plus fort, qu'il recrutait et tuait. Je savais que nous allions tôt ou tard devoir l'affronter. Harry prenait des cours avec Dumbledore, tu ne le savais peut être pas à l'époque, mais ils ont étudié la vie de Voldemort, pour qu'Harry comprenne son fonctionnement, et ils ont commencé à parler des Horcruxes. Lorsqu'il est devenu évident que tu manigançais quelque chose, et que Dumbledore partait avec Harry en mission, j'ai tout de suite compris que je ne reviendrai probablement pas à Poudlard l''année suivante. J'ai commencé à préparer des livres, à me renseigner sur comment nous protéger, nous cacher... Malefoy ! Arrête de faire ton air ennuyé et sois attentif !


Le jeune homme sourit, puis s'installa plus confortablement et se concentra sur les paroles d'Hermione.


- Bon, tu sais que nous avons du fuir et nous cacher pendant la septième année, nous cherchions les Horcruxes. Tu ne le sais peut être pas, mais c'était très dur. De vivre tous les trois, de ne pas forcément avoir de quoi manger chaque jour. Nous avons pris des risques insensés, entrer au Ministère, quelle folie...


Hermione reprit sa respiration et ferma les yeux pour raconter la suite.


- Nous avons été capturés et emmenés au Manoir. J'ai encore beaucoup de mal à parler de ces moments là... Tu n'avais pas l'air d'être très à ton aise non plus, là bas. Tu sais, nous te sommes très reconnaissants de ne pas nous avoir dénoncé... Tu aurais pu. Enfin, tu n'as rien fait pour nous aider non plus à nous échapper à l'époque, et ne te braque pas, mais je t'en ai voulu pendant un temps. J'ai toujours un peu de mal à imaginer comment tu n'as pu réagir alors que ta tante me torturait... J'ai encore des cicatrices au bras, je n'ai pas pu les effacer... raconte la jeune femme, en se tenant l'avant bras, par réflexe. Après Gringotts, quand nous sommes revenus à Poudlard, nous touchions au but mais j'étais terrorisée. Mais il fallait continuer, jusqu'au bout. Quand Harry a disparu dans la Forêt, je me suis dis que tout était perdu. Je me suis vue torturée, livrée en esclavage à des Sangs Purs, à ton père... Et quand j'ai vu tous les morts... C'était horrible.


La jeune femme semblait comme hantée à cet instant. Elle ne voulait pas ouvrir les yeux, perdue dans ses souvenirs douloureux.


- Granger, dit doucement Drago. Ca va aller.


Elle fut étonnée d'entendre de la douceur dans sa voix, mais elle put enfin continuer.


- C'est toujours très dur... Bref, quand Harry s'est relevé, mon cœur a explosé. Et quand il l'a défié, devant tout le monde dans la Grande Salle. Pour enfin en finir. J'étais épuisée mais c'était terminé, enfin. Sans m'en rendre compte, depuis ma première année à Poudlard j'avais vécu avec un énorme poids sur mes épaules, celui d'être amie avec Harry parce que cela nous mettait en danger, et notre responsabilité était de ne pas laisser Voldemort gagner. Et d'autant plus parce que j'étais une née moldue. Tu sais, avant d'arriver à Poudlard, quand j'ai su que j'étais une sorcière, je me suis procurée tous les livres possibles sur le monde des sorciers, j'ai essayé de tout apprendre sur ce monde, j'ai lu tous les manuels car je pensais que je serai forcément en retard par rapport aux élèves issus de familles sorcières. J'avais peur de ne pas être acceptée. Et ton acharnement à mon sujet, à me rappeler qu'effectivement, j'étais en quelque sorte exclue du monde des sorciers, pendant toutes ces années, tu ne sais pas à quel point ça me touchait, et me faisait du mal. Même aujourd'hui, ce n'est pas simple d'être une née moldue. D'un coté, je n'ai pas grandi dans ton monde, donc je suis toujours considérée comme à part, mais dans l'autre monde, je ne peux rien révéler sur ma vie. Rien n'est simple, conclut-elle, en n'osant pas croiser son regard.


Elle n'avait jamais évoqué ce sujet avec Harry et Ron, elle ne savait pas trop pourquoi elle l'avait fait aujourd'hui, mais cela lui faisait beaucoup de bien de pouvoir exprimer tout ce qu'elle ressentait par rapport à sa condition de sorcière. Elle attendait avec appréhension la réaction de Drago. Pour se donner une contenance, elle but une gorgée de thé.


Il ne répondait rien. Il semblait perturbé, et remuait sur sa chaise. Il finit par enlever son écharpe.


- Euh … je crois que c'est ton tour, Malefoy, dit doucement Hermione.


Ils se regardèrent dans les yeux quelques instants. Cela devenait une habitude, et il semblait qu'à chaque fois, ces regards en disaient long sur ce qu'ils pensaient. Elle vit de l'hésitation dans ses yeux d'acier, elle l'encouragea du regard. Il se redressa et remonta ses manches de chemise. Et au grand étonnement et soulagement d'Hermione, il se mit à parler.


- Je ne sais pas trop par quoi commencer... J'ai grandi, comme tu le sais, dans une famille très fortunée et privilégiée. On m'a inculqué dès mon plus jeune âge tout l'idéologie concernant la pureté du sang, c'était ma réalité, mon monde était construit sur ces idées. J'étais aussi très fier de mon père, qui semblait inspirer de la crainte, même si il m'en inspirait parfois aussi. Ma mère était aimante, mais a toujours fait en sorte de ne pas trop le montrer devant mon père, ce qui était troublant, enfant. J'avais hâte d'entrer à Poudlard, je savais déjà qu'elle était ma position dans le monde des sorciers, et je voulais qu'on me reconnaisse comme tel ; comme mon père. Sur le quai de la gare, mon père, qui avait su que Harry Potter serait aussi élève, m'a demandé d'être ami avec lui. Il pensait qu'il deviendrait peut être un mage noir, ou en tout cas, qu'il était puissant, et qu'il valait mieux l'avoir dans ses amis, ce qui pourrait également être utile si un jour, le Seigneur des Ténèbres revenait. Ce jour là, Potter a rejeté mon offre. Je l'ai très mal vécu. C'était la première fois qu'on me refusait réellement quelque chose. J'avais toujours tout eu, et ce garçon que tout le monde connaissait, a refusé de me serrer la main pour s'acoquiner avec un traître à son sang, selon les termes de mon père... Mon père était extrêmement déçu d'apprendre ça. Et puis tu es arrivée, et tu ne le sais probablement pas, mais ton existence me posait énormément de problèmes à Poudlard. Comment expliquer à mon père qu'une née moldue soit la meilleure élève, et pas moi ? Non seulement ça allait à l'encontre de tout ce qu'on m'avait appris, mais en plus, je voyais la déception chaque vacances dans les yeux de mon père, qui me demandait toujours qui m'avait battu. Tu ne l'as peut être jamais remarqué, mais je n'étais pas du tout un mauvais élève à l'époque. Je ne travaillais pas beaucoup, mes capacités me permettaient de valider tranquillement mes examens. En tout cas, mon père me rabaissait de plus en plus chaque année. Je pense que c'est en parti pourquoi je m'acharnais sur toi... Je suis désolé Granger.


Elle opina, mais ne dit rien. Il reprit :


- Quand le Seigneur des Ténèbres est revenu, j'ai vite réalisé que malgré les beaux discours que j'entendais chez mon père depuis des années, c'est la peur qui dominait chez mes parents. Mon père était terrorisé par son Maître. Et moi, encore plus. C'était devenu réel. Et puis lorsque mon père fut … déchu, après le fiasco du Ministère, notre quotidien devint un enfer. Je l'ai vu se faire torturer par le Seigneur des Ténèbres lui même. Il n'était plus rien. Nous n'étions plus rien. Alors quand il m'a donné cette mission, de tuer Dumbledore, de faire entrer des Mangemorts à Poudlard, je me suis dis que j'avais une chance de racheter l'honneur de ma famille. Et en plus, de retourner à Poudlard et de ne plus vivre dans ses parages. Ma mère m'avait pourtant dit que ce n'était qu'une punition pour notre famille, puisque si j'échouais, j'étais promis à une mort certaine. Mais j'étais aveuglé par mon ambition et par mon besoin de sauver notre famille. J'ai passé une année atroce. Potter sur mes talons en permanence, qui avait bien compris que je tramais quelque chose. Je ne mangeais presque plus, je ne dormais plus. Alors quand j'ai réussi à réparer l'Armoire sur Demande, j'étais enfin débarrassé d'un lourd fardeau. Sauf que quand j'ai eu l'occasion de tuer Dumbledore... Je ne pouvais pas. Je m'en suis trouvé incapable... A ce moment précis, je voulais juste vivre, sauver ma peau. Comme c'est Rogue qui a tué Dumbledore, le Seigneur des Ténèbres m'a puni. Il m'a torturé, Bellatrix également, il m'a... Tu vas avoir une horrible opinion de moi Granger, si ce n'est pas déjà le cas... hésita-t-il.


- Je t'écoute, dit-elle simplement.


- Il m'a fait torturé des gens, des familles entières. Devant mes parents. J'étais son jouet... C'était d'une extrême violence. Je sais que ma mère, à ce moment là, avait envie que tout s'arrête, mais elle ne pouvait qu'à peine le formuler, car elle avait peur des talents de légimens du Seigneur des Ténèbres. Le jour de la bataille finale, j'ai essayé de faire échouer Potter, quoiqu'il cherchait... J'ai échoué, et il m'a sauvé la vie. Comme je l'avais fait pour vous quand vous êtes arrivés au Manoir. Mais je ne me ferai pas passer pour quelqu'un de bon ou de courageux Granger. Si je ne vous ai pas dénoncé ce jour là, c'est parce que je n'avais pas envie qu'ils l'appellent. Je ne voulais pas qu'il revienne au Manoir, j'étais terrorisé... Quand il est enfin mort... j'étais tellement soulagé. Je savais qu'Azkaban m'attendait probablement, mais en réalité, je me sentais enfin libre. Et puis j'ai enfin pu avoir le temps de remettre toute cette idéologie de la pureté du sang en question. Ma mère a refusé d'entendre ne serait-ce qu'une seule remarque sur le statut du sang, disant que nous avions suffisamment souffert pour ces inepties. Donc j'ai remis en cause mon éducation, et j'ai travaillé énormément pour en arriver là, pour qu'on me voit autrement qu'en … Mangemort. J'ai mérité cette place à l'école, j'ai payé ma dette à la société en allant à Azkaban. Maintenant je veux être légitime dans cette nouvelle société. Tout simplement.


Il fit une courte pause, presque étonné d'avoir tant parlé.


- J'espère également que ta mémoire a tout enregistré, car tu n'entendras ça qu'une seule fois dans ta vie.


Hermione était bouche bée. Tellement d'émotions contradictoires se mélangeaient dans son cerveau. La surprise dominait, elle n'aurait jamais pensé que Drago Malefoy soit capable de se livrer à ce point, et surtout à elle. L'effroi également, elle qui n'avait qu'effleuré ce qu'il avait pu vivre de son coté. Elle croisa son regard, qui semblait agacé.


- Je ne ferai pas de commentaires Malefoy... Mais... Merci.


Il haussa un sourcil, hocha la tête, et il se remit à parler des avancées qu'il avait fait pour leur projet. Elle l'écouta avec joie. Une heure plus tard, Drago semblait regarder de plus en plus souvent la grande horloge présente dans le café.


- Tu es attendu quelque part ? demanda Hermione, qui commençait à s'agacer de son comportement.


- Pas vraiment, mais je ne suis pas seul chez moi en ce moment, et je devais rentrer il y a presque une heure. Je vais devoir y aller. On verra demain après midi pour la suite Granger, si tu n'as rien d'autre de prévu ?


Il cru déceler une pointe de déception lorsqu'il prononça sa phrase, dans le regard de la jeune femme. Il ne put s'empêcher de sourire en coin, comme il en avait l'habitude, devant cette réaction... inattendue.


- Pas demain matin ? demanda-t-elle d'un air trop détaché pour être innocent.


- Non, j'ai quelqu'un à la maison, comme je viens de te dire. A demain après midi alors Granger.


Il avait sciemment omis de préciser que cette personne était Blaise, mais à voir l'expression contrariée de la jeune femme, il avait eu raison. Pourquoi réagissait-elle de cette manière ? Cela l'intriguait... Drago avait remarqué que parfois, lorsqu'il la fixait intensément, Granger devenait mal à l'aise. Il avait aussi remarqué ces rares regards posés sur lui un peu trop longtemps lorsqu'il ne la regardait pas, et le trouble qui s'en suivait chez elle. Cela l'amusait un peu. Si la jeune femme n'avait pas été Hermione Granger, Drago en aurait conclu qu'il avait toutes ses chances de ramener cette femme chez lui. Mais dans ce cas précis... il n'en était pas si sûr. D'autant qu'il ne savait pas non plus s'il en avait vraiment envie. Il se garderait bien de parler de tout cela à Blaise, qui sinon, n'allait plus le lâcher.

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