R.A.B

Chapitre 7

1396 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 02/07/2022 20:08

Alors que Régulus souffrait mille morts, avec l’impression que chaque os de son corps se brisait, que sa peau se fendait, tout en supportant le poids de la culpabilité de chacun de ses actes passés, de chaque acte des Mangemorts qu’il n’avait jamais tenté d’arrêter, il trouva la force de donner un dernier ordre à son elfe. À son unique véritable ami.

   — Rentre à la maison Kreattur. Détruis cette chose. Et ne parle jamais de tout ça.


L’elfe se crispa, visiblement indécis, prêt à désobéir à son Maître, mais le regard gris implacable du jeune homme le força à obéir.


Avec des yeux larmoyants, le médaillon maudit serré dans ses petites mains, Kreattur disparut, quittant la caverne sans un regard en arrière.



Régulus se laissa tomber à terre en lâchant un long gémissement de souffrance, perdant le contrôle de son corps. Il avait tenu bon jusqu’à cet instant, déterminé à empêcher Kreattur de mettre en péril son plan en voulant le sauver, mais maintenant, il se laissait submerger par la douleur et le désespoir.

Il haleta, les larmes aux yeux, conscient qu’il allait mourir en cet endroit maudit. Sa gorge se serra et il regarda l’eau de lac avec envie, alors que quelques instants plus tôt il se méfiait de cette étendue liquide sombre et lisse comme un miroir.



Régulus laissa échapper une unique larme, roulant sur sa joue, brûlante, alors que ses regrets l’étouffaient. Puis il rampa lentement, gémissant, serrant des dents pour ne pas hurler. Lorsqu’il arriva presque au bord de l’eau, il marqua une pause pour reprendre son souffle, haletant, si proche du liquide vital qui l’attirait inexorablement. La douleur le submergeait, le consumait et il ignorait comment il pouvait être encore conscient.

Il priait presque pour que son corps lâche, pour qu’il sombre enfin dans une bienheureuse inconscience, pour ne plus ressentir ce mal qui le rongeait et qui le rendait petit à petit fou.


Il tendit la main vers l’eau, ressentant le besoin impérieux de boire. La soif s’ajoutait à la douleur et le doux clapotis du lac à proximité l’appelait, comme le chant des sirènes. Il avait envie de s’approcher un peu plus de l’eau, pour s’y immerger, pour soulager cette soif qui le torturait, pour apaiser sa gorge douloureuse. Il avait l’impression que s’il arrivait jusqu’au contact de l’eau du lac, il serait sauvé. Soulagé de ses tourments.


Il eut à peine touché l’eau, brouillant la surface de petits cercles concentriques, que des ombres apparurent et se déplacèrent juste sous l’étendue luisante, montant vers lui. Il les vit, mais il les ignora, incapable de réfléchir de façon sensée.

Il avait mal, il avait soif, et l’eau froide semblait être le remède à tous ses maux. Seule l’eau importait, il se moquait bien de ce qu’il y avait dans le lac, même si un lointain écho dans son esprit, sous la douleur, sous la soif, lui hurlait de s’écarter, de prendre garde.




Quelque chose saisit soudain sa main, le faisant sursauter, mais il n’avait plus la force de se dégager ou de reculer. Il gémit pitoyablement au contact désagréable, avec l’impression que sa peau brûlait. La chose qui le tenait était gélatineuse et provoquait chez lui des frissons d’horreur et l’envie de fuir au plus loin, de se dégager de cette poigne visqueuse qui l’entraînait vers l’eau.

Il n’avait pas encore vu ce qu’était son assaillant — ses assaillants, corrigea-t-il malgré lui en sentant un autre contact tout aussi abject que le premier — mais il présumait que Voldemort avait protégé son secret par les pires créatures qui puissent exister. Il se refusait à lister les créatures les plus répugnantes de la magie noire, bridant son imagination sans peine alors que sa vie était en jeu, tout en secouant mollement son bras pour se dégager, sans succès. La potion émeraude qu’il avait bue l’avait bien trop affaibli, faisant de lui une cible de choix.



L’ombre s’approcha de la surface, et Régulus eut un nouveau mouvement de recul, alors qu’il se sentait entraîné vers le lac, inexorablement. Il secoua la tête, hagard, refusant de voir ce qui allait le tuer, préférant l’ignorance bénie à la vérité cruelle.

Il fut tiré brutalement en avant, alors que les créatures gluantes se faisaient plus nombreuses — et plus impatientes — et il glissa sur le bord de l’île, les galets roulant sous lui et l’entraînant sans possibilité de fuite vers l’eau sombre, soudain bien moins accueillante que dans l’illusion provoquée par la mystérieuse potion de la vasque.



Le jeune homme était déchiré entre la soif qui le torturait, l’envie de boire cette eau si fraîche - presque glacée, et la peur des créatures qu’il ne voulait surtout pas découvrir.


Lorsque la première chose squelettique creva la surface, se dévoilant enfin à lui, Régulus hurla avec toutes les forces qui lui restaient. Les yeux blancs enfoncés dans le crâne décharné de la créature qui avait un jour été humaine le renseignèrent immédiatement sur sa nature. Le lac était empli d’Inferi. La pire chose qui soit dans le monde magique. Voldemort avait ensorcelé des cadavres humains pour garder un morceau de ce qui lui donnait une parcelle d’immortalité. Des choses mortes pour préserver sa vie maudite.

Aucune Magie noire ne semblait rebuter celui qu’il appelait Maître, puisqu’il n’hésitait pas à profaner des tombes pour suivre des plans.


Le jeune homme serra les doigts sur une aspérité de la petite île, avec désespoir, s’écorchant la main profondément, sentant le sang couler sur le sol, essayant d’échapper à la prise mortelle de la créature, les larmes coulant librement sur ses joues. Il se savait condamné, il était prêt à mourir. Il pensait qu’il était prêt à se sacrifier, plus tôt. Pourtant, il ne voulait pas de cette mort atroce qui l’attendait. Il ne voulait pas être dépecé vivant par ces monstruosités, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de lui.



Il avait lâché sa baguette près de la vasque lorsque la douleur avait commencé à le submerger, hors de sa portée, mais il n’aurait probablement pas eu la présence d’esprit de la saisir pour s’en servir et se défendre. Il était bien trop affaibli et il n’était plus guidé que par ses instincts de survie les plus primaires, l’adrénaline se déversant dans son corps lui faisant oublier provisoirement la souffrance intense et insensée causée par la potion qu’il s’était forcé à boire pour épargner son elfe.


Un second inferius apparut, puis d’autres encore, un par un, de plus en plus nombreux, crevant la surface de l’eau les uns après les autres, le fixant de leurs yeux blancs aveugles, prêts à obéir à l’ordre de tuer tout ce qui s’approchait de cet îlot désolé dans la caverne maudite. La peau commençait à se détacher de leurs corps décharnés, et ils étaient si pâles qu’ils semblaient luire dans l’obscurité de la caverne. Le jeune homme savait que la Magie noire les avait dotés d’une force surhumaine, et il n’avait aucune chance de leur échapper.


Régulus laissa échapper un sanglot rauque, comprenant qu’il était perdu, et pria de toute son âme que son sacrifice puisse provoquer la chute de Voldemort. Puis, dans un geste désespéré, il ferma les yeux de toutes ses forces, refusant de voir ce qui allait le tuer, et il cessa de lutter pour se laisser entraîner, espérant qu’il se noierait avant d’être démembré par les monstruosités qui peuplaient le lac sombre.

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