Dollhouse

Chapitre 32 : Impuissants

13763 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 20/02/2024 17:40

Theodore avait tenu sa promesse le lendemain matin, quand bien même Pansy avait décompensé la veille au soir. Une fois que Blaise et elle avaient assez décuvé et qu’ils nous avaient rejoint dans la salle sur demande, nous leur avions raconté notre soirée, et plus particulièrement le moment où le Seigneur des Ténèbres avait annoncé qu’il cherchait son prochain Grand Intendant, et qu’il envisageait Theo pour le poste. Il avait raconté ce qu’il lui avait demandé de faire, et la façon dont il avait fait exploser la fille sur tous les partisans du Seigneur des Ténèbres, en se tenant debout devant nos amis. J’avais observé Pansy tout le long du récit de Theodore, cherchant à appréhender sa réaction. Elle avait des cernes violettes sous ses yeux dénués de toute trace de maquillage, ses yeux qui étaient encore gonflés de toutes les larmes qu’elle avait pleurées la veille. Elle n’avait rien dit, tout le temps que Theo avait pris pour leur raconter. Elle n’avait pas non plus bougé d’un seul centimètre sur sa chaise dans la salle sur demande. Elle était restée assise, ses yeux tous droits rivés sur son homme, écoutant chacune de ses paroles, fixant ses yeux, attendant la fin de son récit. Il me semblait qu’elle avait à peine cligner des yeux. Mais lorsqu’il eut terminé de leur raconter en quoi avait consisté notre soirée, elle avait avalé sa salive distinctement, sa bouche avait formée une moue pincée désapprobatrice et son visage avait commencé à effectuer des mouvements de tête qui disaient « non » à la place de ses mots. Un silence pesant s’en était suivi alors que Theo regardait sa partenaire, attendant qu’elle puisse dire ce qu’elle n'arrivait pas encore à exprimer, et finalement, elle avait parlé : 

-       Non. 

Elle continuait d’appuyer sa négation de mouvements de tête qui s’intensifiaient, la moue de colère sur son visage grandissant également. Je prenais une profonde inspiration face à ce qui allait suivre, quand bien même je savais que j’allais la rejoindre dans ses propos. Mais quels choix avions-nous ? 

-       Non, répéta-t-elle alors. Putain non ! s’exclama-t-elle alors en se levant de sa chaise. 

Ses mains trouvèrent leur place sur ses hanches alors qu’elle continuait frénétiquement de faire non de la tête. 

-       Il n’y a encore rien de fait Pansy, tenta alors Theo sur un ton qu’il voulut doux. 

Blaise et moi observions la scène en retrait. Ils se tenaient tous deux debout, Theo bien ancré sur ses pieds, ses bras le long de son corps, tandis que Pansy face à lui tournait sur elle-même, ses mains sur ses hanches, sa tête ne pouvant arrêter de dire « non » pour elle. Elle pouffa aux mots de Theodore sans qu’une seule pointe d’amusement ne s’exprime dans son geste. 

-       Oui parce que s’il te propose le job tu peux tout simplement refuser, n’est-ce pas ? lança-t-elle alors de son ton tranchant. 

-       Il ne me l’a pas encore proposé, essaya-t-il encore de temporiser sans s’approcher d’elle, lui laissant tout l’espace dont elle avait clairement besoin. Il n’y a encore rien d’officiel, ajouta-t-il ensuite. 

Pansy continua de tourner sur elle-même, et prit quelques secondes pour tenter de réfléchir avant d’enchaîner avec haine : 

-       Et quand il t’a demandé de donner un « beau spectacle », tu as fait quoi Theodore ? Ah oui, tu as littéralement fait exploser la meuf ! Tu as donc donné un beau spectacle, appuya-t-elle avec rage. Tu la veux cette place, Theo ? demanda-t-elle d’un ton accusateur. 

-       Non, répondit-il sans se laisser démonter une seule seconde, son ton et son attitude demeurant inchangée, ancrée. 

Pansy sembla pouvoir prendre une profonde inspiration à ces mots. 

-       Mais si ça doit être l’un d’entre nous, je préfère que ce soit moi, ajouta-t-il alors. 

Et ce fut trop pour Pansy. Un large sourire qui n’avait absolument rien d’amical ou d’amoureux se dessina sur son visage alors que sa tête continuait de se secouer, et un rire épuisé et douloureux sorti de ma meilleure amie. Elle leva le visage vers le plafond et soupira profondément alors qu’elle continuait de rire. 

-       Oh mon dieu, soupira-t-elle alors que son visage continuait de sourire au plafond. 

Lorsque ses yeux se baissèrent à nouveau sur l’homme qu’elle aimait, ils étaient pleins de larmes. 

-       J’en peux plus, lâcha-t-elle en continuant de sourire, j’en peux plus de cette merde Theo, soupira-t-elle alors que sa voix changeait. J’en peux plus de ces « tenez, prenez, c’est mon corps », continua-t-elle en ouvrant les bras, j’en peux plus de cette merde de sacrifice constant comme si t’étais putain de rien, appuya-t-elle alors que les larmes coulaient silencieusement sur ses joues. Putain Theo, t’es plus tout seul ! hurla-t-elle soudainement. T’es plus tout seul ! Je suis là maintenant ! Je suis là ! pleura-t-elle de plus belle. Est-ce que ça n’a pas la moindre putain d’importance ? 

Theodore ne broncha pas, et il ne baissa pas les yeux, mais ceux-ci se remplissaient de larmes devant la douleur de celle qu’il aimait plus que tout au monde. 

-       Il y a des gens qui t’aiment toi aussi Theo, il y a des gens qui t’aiment et qui ne veulent pas que tu meures ! Il y a des putains de gens qui s’inquiètent pour toi, et qui veulent te protéger, eux aussi ! Et je suis pas ok avec le fait que tu te sacrifies encore pour nous, c’est clair ?! demanda-t-elle alors qu’elle continuait de pleurer. On parle de la position de Grand Intendant là, on parle de l’ennemi mondial numéro 2, on parle du putain de monde entier qui va vouloir ta tête, on parle des Mangemorts qui vont vouloir ta place et de tous les autres qui vont vouloir ta mort Theo ! On parle de la position qui fait que t’as pas le droit à la moindre putain d’erreur ! De la putain de position qui a envoyé Lucius dans la tombe Theo ! Après vingt ans de loyauté ! hurla-t-elle alors que les larmes qu’elle pleurait brisaient sa voix. Tu crois qu’il va se passer quoi pour toi, Theo ? demanda-t-elle soudainement à voix bien plus basse en s’approchant de lui. Tu crois que les rangs vont t’accueillir à bras ouverts, toi qui n’as aucune putain d’expérience, qui a moins de la moitié de leur âge, qui n’as jamais vu une putain de guerre de ta vie ? Et tu crois qu’ils vont te laisser les commander tranquillement ? Voler leurs opportunités, leur argent, leur pouvoir, leur notoriété ? Tu crois qu’ils vont dire « mais oui, mais oui Theodore, emmène-nous au bout du monde ! » ? Tu crois qu’ils vont être dociles, ce putain de groupe qui rassemble tous les malades les plus dangereux du pays ?! TU CROIS QU’ILS VONT TE SUIVRE ?! hurla-t-elle alors. Tu crois qu’ils vont te regarder aller à l’étranger, commander nos armées, représenter le Seigneur des Ténèbres dans le monde entier en devant commettre des atrocités que tu n’imagines même pas pour inspirer putain de terreur rien qu’à l’évocation de ton nom ?! Et si par miracle c’est pas les Mangemorts qui te tuent, t’auras le monde entier à ton cul Theo ! Donc non, chuchota-t-elle en pleurant. Non, répéta-t-elle alors que les traits de son visage se déformaient sous la douleur et l’inquiétude qu’elle ressentait. Non Theo, non, pleura-t-elle encore. Je ne suis pas ok avec ça, et je ne suis pas ok avec le fait que tu te sacrifies pour que ce ne soit pas l’un d’entre nous, non. Cette fois je dis non. 

Elle sanglota un instant, et Theodore la laissa faire. Il n’avait pas bougé d’un seul centimètre. Il demeurait ancré et fort, et je savais que ce qui allait suivre n’était pas ce que Pansy attendait. Parce qu’il était ancré. Parce qu’il était serein. Touché et attristé de constater de la souffrance qu’il imposait à Pansy, mais aligné avec lui-même. Il lui laissa quelques secondes pour s’assurer qu’elle avait pu dire tout ce qu’elle avait à dire, puis il répliqua sur un ton ni tranchant, ni doux pour autant, mais sur un ton qui annonçait simplement une vérité inébranlable et immuable : 

-       C’est ce que je suis, Pansy. Tu l’as toujours su, et je pense que c’est en partie pour ça que tu m’aimes. Tu peux me demander tout ce que tu veux dans cette vie, absolument tout ce que tu veux, sauf ça, ajouta-t-il d’une voix plus basse, et plus douce. Quoi qu’il arrive, j’irai toujours en première ligne pour vous. Et il n’existe pas de quantité d’amour que tu puisses me donner qui puisse me pousser à être si égoïste que je me ferai passer avant vous. 

-       Mais je te demande de faire ça pour moi, chuchota-t-elle alors qu’elle sanglotait, réalisant qu’il ne lui donnerait pas ce qu’elle demandait de lui. Pour moi, Theo. 

-       Je le fais pour toi, chuchota-t-il en retour. 

Elle recommença à faire non frénétiquement de la tête alors qu’elle se prenait en pleine gueule qu’elle ne pourrait pas l’empêcher de faire ce qu’il comptait faire pour nous. Pour elle. Elle porta ses mains en position de prière à ses lèvres en s’approchant de son amoureux alors qu’elle ne pouvait s’arrêter de sangloter. Elle s’arrêta contre lui, ses mains positionnées contre ses lèvres comme si elle le suppliait. Il baissa les yeux pour pouvoir soutenir son regard alors qu’elle rencontrait son torse : 

-       Tu n’es pas non important, Theo, chuchota-t-elle en pleurant. Tu n’es pas remplaçable, continua-t-elle doucement. Je sais…, renifla-t-elle difficilement, je sais que tu as vécu des choses qui font que tu as du mal à exister en tant que personne avec ses propres désirs, ses propres projets pour la vie, mais je te jure Theo, tu es important. Au même titre que nous tous, continua-t-elle alors qu’une larme perlait sur ma propre joue devant ce spectacle. Au même titre que Blaise, au même titre que Drago, et au même titre que moi, tu es important Theo. Alors s’il-te-plaît, s’il-te-plaît, arrête d’agir comme si ce n’était pas le cas, pleura-t-elle contre lui. 

Il ne l’entoura pas de ses bras, et il ne la rassura pas, il ne fit rien de tout cela. Il ne lui donna pas ce qu’elle attendait de lui, et il ne lui promit pas qu’il ne prendrait pas le poste si le Seigneur des Ténèbres le lui offrait. Une larme coula simplement sur sa joue, et il regarda Pansy, tout contre lui, et chuchota doucement : 

-       Je suis désolé. Je ne peux pas te donner ce que tu attends de moi. 

Les bras de Pansy retombèrent le long de son corps et des larmes plus lourdes coulèrent de ses yeux alors qu’elle s’éloignait de lui. Elle pleura de façon audible et bascula son visage en arrière, tournant le dos à l’homme qu’elle aimait un instant alors qu’elle fixait le plafond. Quelques instants plus tard, alors que Theodore demeurait immobile, ses yeux toujours posés sur elle, elle se retourna pour lui faire face à nouveau, et alors qu’une nouvelle larme coulait le long de sa joue, elle lui demanda doucement, impuissante :

-       Et je fais quoi maintenant Theodore ? Je ne peux pas, ça, tout ça, tous ces sacrifices comme si tu n’étais rien, je peux pas, je peux pas Theo, pleura-t-elle à bout de forces. Alors je fais quoi maintenant ? chuchota-t-elle dans toute son impuissance. 

Des larmes épaisses coulèrent le long des joues de Theo et sa mâchoire se contracta violemment, mais il ne bougea pas, et il ne céda pas. Voyant qu’il n’avait rien à lui répondre, Pansy continua sur le même ton désarmé : 

-       Tu m’ôtes toute possibilité de choix. On est censé être une équipe, et tu décides tout seul sans me laisser le moindre choix, ou la moindre voix au chapitre, alors que je te demande de ne pas le faire, pleura-t-elle encore. Et j’en ai marre de subir Theo, j’en ai marre, sanglota-t-elle doucement. J’en peux plus de ne rien pouvoir décider, de ne rien pouvoir contrôler de ma propre putain de vie, j’en ai marre Theo, j’en ai marre, j’te jure j’en peux plus, pleura-t-elle de plus belle. 

Elle sanglota un instant en le regardant avec douleur. Il pleura, mais il ne broncha pas. Il la regardait avec douleur, lui aussi. Elle finit par soupirer, et elle haussa les épaules. 

-       Mais je vais continuer à le faire, chuchota-t-elle alors. Parce que j’peux pas être sans toi. Je ne peux pas, pleura-t-elle avec un sourire vaincu. Tu l’as dit toi-même, où d’autre est-ce que je pourrais aller Theo ? Chez moi, c’est toi, avoua-t-elle dans toute son impuissance. J’existe pas sans toi. Et oui, j’aime la façon dont tu m’aimes, avoua-t-elle doucement. Mais putain…, soupira-t-elle difficilement, je te déteste de me faire ça, chuchota-t-elle finalement. 

Elle le regarda encore un instant, et il lui rendit l’intensité de son regard, puis Pansy acquiesça en silence, et elle quitta la salle sur demande alors que les larmes continuaient de couler le long de ses grands yeux verts. 

Theo demeura immobile, debout au milieu de la salle sur demande alors que Blaise était assis en face de lui, et moi à ses côtés. 

-       Ne la laisse pas seule, ordonna-t-il alors d’une voix froide et contenue à Blaise. 

Ce dernier se leva immédiatement en acquiesçant et parti rejoindre Pansy. Dès qu’il eut passé la porte, le corps de Theo tomba accroupi sur ses pieds, ses mains contenant fermement son visage comme s’il perdait la tête, et sa voix puissante vibra dans l’intégralité de la salle sur demande alors qu’il hurla de toute son âme : 

-       PUTAAAAAAAAAAAAIN !

Mon cœur se brisa en mille morceaux dans mon poitrail et une nouvelle larme perla sur ma joue alors que je me levai pour le trouver. Je me laissai tomber à genoux devant lui et plaçai mes propres mains sur les siens autour de son crâne, posant mon front sur le sien alors qu’il respirait violemment. Mon frère. Mon âme. Je ne pouvais supporter sa douleur. Sa douleur était mienne. Ses peines étaient miennes. Et ses cris raisonnaient jusque dans mes entrailles. 

-       Merde, merde, merde, MERDE ! pesta-t-il en sanglotant sans relever le visage. 

J’embrassai son front alors qu’aucune parole réconfortante ne venait en moi, et que tout ce que je trouvais à faire c’était le contenir. Parce que je ne pouvais pas lui dire que tout irait bien, ce n’était pas le cas. Quoi qu’il se passerait désormais, rien n’irait. Le Seigneur des Ténèbres voulait faire de lui son Grand Intendant. Nous passions dans autre chose encore, dans plus de danger, dans plus de responsabilités, dans plus de risques, et dans bien plus de noirceur. Et cela détruisait Pansy. Et ce fait-là, le fait de lui faire cela à elle, cela le détruisait lui. Quand bien même il ne pouvait pas faire autrement. Elle ne le laisserait pas, non. Elle resterait. Quitte à ce que cela la détruise intégralement et totalement. 

-       Je n’ai pas le droit, chuchota-t-il alors entre ses cuisses, je n’ai pas le droit de lui faire ça à elle. Je n’ai pas le droit de lui faire du mal, pas à elle. Pas à elle, répéta-t-il encore. 

Je caressai ses cheveux avec tout mon amour, tout mon soutien, et toute mon impuissance alors que mon front demeurait collé au sien. Il blessait celle qu’il aimait plus que tout malgré lui, et ce sans pouvoir s’en empêcher. Sans pouvoir faire autrement. Parce qu’il l’aimait tellement qu’il était impossible pour lui de ne pas sacrifier pour elle. Pour nous. Pour notre famille. Parce que s’il parvenait à devenir Grand Intendant, et s’il parvenait à asseoir sa position, quand bien même cela serait difficile si ce n’était impossible, il nous protégerait. Il serait si influent, si terrifiant, et si respecté que nous serions tous protégés. Comme mon père l’avait fait avant lui. S’il y parvenait, s’il faisait ce qu’il fallait et qu’il était si craint et respecté du monde entier, quand bien même tous essayeraient de lui nuire, s’il résistait, et s’il y parvenait, nous serions tous protégés. Même si pour cela il devait sacrifier tout ce qu’il restait de son âme. Parce que c’était cela, le prix à payer du Grand Intendant. Nous, Mangemorts, payons notre place de notre vie, et de tout ce qui la composait. Le Grand Intendant, lui, le payait de l’intégralité de son âme. 

-       Elle ne mérite pas ça, pleura-t-il. Elle ne mérite pas cette vie. 

-       Elle mérite quelqu’un qui est prêt à tout pour elle, et tu le sais, chuchotai-je alors contre son visage. 

J’attrapais ses joues et relevai son visage vers moi. Ses grands yeux bleus inondés de larmes rencontrèrent les miens. 

-       Personne ne peut l’aimer comme toi tu l’aimes, lui assurai-je avec conviction. C’est la peur de te perdre qui parle en elle, elle a juste peur de te perdre Theo, mais elle t’aime pour tout ça, elle t’aime pour tout ce que tu es et tu le sais très bien. 

Il me regarda gravement un instant, sans ne rien me dire. Buvant mes paroles. S’y accrochant. Sachant pertinemment qu’au fond, elles étaient vraies. 

-       Je vais le tuer, promit-il alors. Pour tout ce qu’il a fait, et pour ça. Je vais le tuer pour ça, assura-t-il de sa voix si basse, et pourtant si vibrante. 

De sa voix de Grand Intendant. 

J’étais resté avec lui, accroupis au milieu de la salle sur demande un certain moment. Tout le temps qu’il avait fallu pour qu’il puisse retrouver ses esprits, et s’aligner avec lui-même. Il n’avait pas remis en question sa position une seule fois, parce que ce n’était tout simplement pas possible pour lui. Il n’y avait aucune question à se poser pour Theo : s’il fallait se sacrifier pour le reste de notre famille, il le ferait, peu importait les conséquences. Et cela avait toujours été de la sorte, et nous savions tous que rien ne pourrait changer cela. Pas même le fait que Pansy et lui étaient ensemble désormais. Il était notre guerrier. Notre protecteur. Celui qui était prêt à tout, à tout subir et à tout faire pour nous, dénué de tout état d’âme et de toute peur si cela signifiait que nous serions protégés. Cela avait toujours été le cas, et ce le serait toujours. Et quelqu’un devait le rappeler à Pansy. Alors lorsque ce fut possible, j’avais laissé Theo, et j’étais parti trouver Pansy dans notre salle commune. J’avais demandé à Blaise d’aller retrouver Theo pour réfléchir au problème de l’armoire à disparaître pendant que je parlerai avec Pansy qui pleurait encore sur le canapé. J’avais pris position à côté d’elle, et j’avais placé mon bras autour de ses épaules. Elle avait déposé sa tête dans le creux de mon épaule, et elle avait commencé d’elle-même : 

-       Je sais ce que tu vas me dire. J’ai juste trop peur de le perdre Drago, je…, j’ai trop peur de le perdre, pleura-t-elle contre moi. 

-       Je sais, chuchotai-je en déposant un baiser sur son front. Je sais. 

-       Je le savais, continua-t-elle, je l’ai toujours su qu’il se mettrait en danger si ça pouvait nous sauver nous, mais là c’est trop concret, ça devient trop concret, pleura-t-elle encore. 

Je laissai ma main autour de ses épaules caresser quelques mèches de ses cheveux avant de lui faire remarquer : 

-       Quand il s’est jeté sur des Mangemorts pour que le Seigneur des Ténèbres ne puisse pas fouiller ton esprit, ce n’était pas concret ?

-       C’est pas pareil, réfléchit-elle doucement, ça s’est passé tellement vite. Je n’ai pas eu le temps de penser, où d’avoir peur. Et puis, au final, il n’est pas mort, et moi je…, j’étais traumatisée de ce que j’avais fait, avoua-t-elle à voix basse. Je sais que je suis folle de lui pour tout ça aussi, mais là j’ai juste… j’ai beaucoup trop peur de le perdre Drago, on ne parle plus d’être un petit Mangemort, c’est…, c’est trop. Et je sais que c’est la peur de le perdre qui parle mais je…, je voudrais qu’il ne soit plus comme ça, pour pouvoir le garder avec moi, chuchota-t-elle alors que de nouvelles larmes coulaient sur ses joues, retombant sur ma chemise. 

Je portai mon autre main à son visage que je relevai vers moi, et je lui souriais tendrement. 

-       Mais s’il faisait ça, lui dis-je doucement, ce ne serait plus vraiment l’homme dont tu es tombée raide dingue amoureuse. 

Elle pouffa doucement et m’accorda un sourire en retour. Elle acquiesça discrètement, et finalement avoua : 

-       Touché.

Je continuai de caresser ses cheveux un moment avant d’ajouter sans pouvoir le garder en moi : 

-       Je sais que tu as peur, et je sais que c’est une situation particulière et qu’on vit des choses…, qu’on ne pouvait même pas imaginer, et avec tout ça il y a des conditions particulières qui font que beaucoup de choses peuvent s’entendre. Mais tu ne peux plus lui reprocher quelque chose qu’il a toujours été, que tu as toujours accepté, et que tu as même aimé, juste parce que ça ne sert plus tes intérêts aujourd’hui, d’accord ? 

J’avais vu mon frère pleurer. Je l’avais vu tomber sur le sol et se torturer de lui faire du mal à elle, à cause de ce qu’elle lui avait dit, et de ce qu’elle lui avait demandé. Elle était ma meilleure amie, et je détestais la voir souffrir, et pire encore je comprenais parfaitement sa demande, parce que quelque part, moi aussi, j’aurais aimé que Theodore ne soit pas ainsi parfois. Mais il l’était, et nous le savions depuis le tout premier jour. Et je n’allais laisser personne le faire se sentir mal d’être ce qu’il était, et qu’il avait toujours été. Pas même elle. 

Elle acquiesça doucement à mes mots : 

-       Je sais, m’accorda-t-elle alors. 

Alors, une fois qu’elle avait séché ses larmes, nous étions tous les deux retournés dans la salle sur demande pour retrouver nos deux autres amis, et Theodore et elle étaient partis pour discuter en toute intimité. Blaise s’avachit dans sa chaise alors que je prenais place face à lui, et je lui demandai à son tour : 

-       Comment tu vas ? 

Il m’adressa un faible sourire, mais un sourire tout de même. 

-       Pas bien, m’avoua-t-il, mais il faut continuer d’avancer, n’est-ce pas ? 

J’acquiesçai gravement. 

-       Oui, il le faut. 

Il sembla réfléchir un instant, puis il continua à voix basse : 

-       Merci de m’avoir donné le temps et l’espace pour faire mon deuil. 

Je fis non de la tête. 

-       C’est normal. 

C’était le minimum, quelques jours pour pleurer sa mère. La femme qui lui avait donné la vie et qui l’avait élevé. La femme qui nous avait tous accueillis dans sa maison et qui avait rempli nos assiettes d’amour. 

-       Je pense que je vais tout dire à Daphné, reprit-il alors. 

Je l’interrogeai du regard. 

-       Elle fait partie d’une famille de Sang Pur qui bien qu’ils ne fassent pas partie des rangs, sont quand même en lien avec ce monde-là, expliqua-t-il donc. Je ne pense pas courir de risque en lui révélant ce que je suis, pour pouvoir lui parler vraiment de ce qui m’est arrivé et de ce qui est arrivé à ma mère pendant ces vacances. Et je crois…, je crois que j’ai besoin de son soutien, confessa-t-il avec difficulté. 

J’acquiesçai doucement. Effectivement, la famille Greengrass ne représentait pas une menace pour nous, et je ne pensais pas non plus qu’elle serait du genre à partager notre secret à qui voudrait bien l’entendre. C’était une fille au sens des responsabilités, dans une famille qui n’était pas toute blanche non plus. Et mon ami voulait donner une vraie chance à la relation qui démarrait entre eux, et il me semblait que pour cela, l’honnêteté, lorsqu’elle était possible, était de mise. 

-       Ça me semble être une bonne idée, oui, appuyai-je alors avec un sourire qu’il me rendit. 

C’était là son espoir. L’espoir d’être épaulé par une femme autre que Pansy, son amie, et qui pourrait lui apporter toutes les choses que l’on ne pouvait trouver ni chez une mère, ni chez une amie. Et il me semblait que lui aussi, s’il le désirait, avait droit à cela. 

Quand Theo et Pansy nous rejoignirent, finalement rabibochés, des heures étaient passées depuis le début de cette journée, et il fallait que nous nous préoccupions de l’armoire à disparaître pour laquelle nous étions là. Les cours allaient reprendre, et les autres élèves n’allaient plus tarder à rentrer. Nous devions mettre à profit tout le temps dont nous disposions, nous avions d’ores et déjà laissé trop de place à nos états d’âmes. C’était pour cela, pour tout cela qu’il fallait que nous parvenions à nous fermer. A nous concentrer. C’était cela, notre vie. Les peurs et désirs des uns et des autres n’avaient plus lieu d’être. Les regrets non plus. Pas même les deuils. Nous, nous étions toujours vivants. Pour l’instant. Et si nous voulions pouvoir nous protéger les uns les autres, il fallait se remettre en route immédiatement. Alors nous avions passé le restant de l’après-midi à parler de l’armoire à disparaître, puis à effectuer encore d’innombrables recherches à la bibliothèque, sans succès, pour changer. 

-       Est-ce qu’on est arrivé au point où mon idée de sacrifier un élève dans l’armoire mérite d’être mentionnée à nouveau ? demanda Pansy en fin de journée. 

Je me grattais la tête, épuisé. Je supposai que d’une certaine façon, oui, cette option commençait à devenir envisageable, et ce peu important à quel point nous détestions tous ce constat. Personne ne lui répondit directement, ce qui répondait largement plus à sa question que n’importe quel mot que nous aurions pu employer. Nous en étions vraiment là. Je me passai la main sur la bouche, et fis non de la tête après un moment. 

-       Pas encore, murmurai-je alors, voulant m’accrocher au peu d’espoir qu’il restait. 

Je supposai que nous avions encore un peu de temps. Je ne savais combien, mais un peu. Et nous avions d’autres problèmes qu’il nous fallait régler, parmi eux, tuer Dumbledore. Cela devait également être envisagé, quand bien même la priorité pour le Seigneur des Ténèbres était de permettre aux Mangemorts de pénétrer Poudlard. Parce que s’ils le pouvaient, nous pouvions plus facilement tuer Dumbledore, et la Guerre était de fait déclarée. Suite à sa mort, l’Ordre aurait besoin d’un certain temps pour le pleurer, puis pour s’organiser et se préparer à la Guerre. Cela nous laisserait, à nous également, le temps d’élargir et d’entraîner nos rangs à ce qui allait suivre. Le timing serait bon, et le Seigneur des Ténèbres serait satisfait. Il pourrait nommer officiellement son Grand Intendant, qu’il s’agisse de Theo ou non. Ce Grand Intendant aurait le temps de faire pour lui ce que lui était trop prudent pour faire. Se montrer au monde, tuer, torturer, terroriser et rallier à notre cause des sorcières et sorciers du monde entier. Et nous serions ensuite prêts. Alors oui, je supposai que nous pouvions disposer d’encore un peu de temps avant d’envoyer un élève innocent à la mort, dans le néant de l’armoire à disparaître. 

Nous avions rejoint notre salle commune pour prendre un verre bien mérité après cette journée chargée avant d’aller dîner. J’avais fait le service pour tout le monde, Pansy et Theo blottis l’un contre l’autre sur le fauteuil de ce dernier, et Blaise exténué dans le canapé. C’était son premier jour de retour concret au travail, après la mort de sa mère, et ce avec une gueule de bois carabinée. Après tout ce qu’il s’était passé aujourd’hui, il me semblait que j’étais le seul avec encore assez d’énergie pour pourvoir à nos besoins mutuels. 

-       Je l’ai dit tout à l’heure à Drago pendant que vous régliez vos affaires comme le vieux couple que vous êtes, commença Blaise en direction de Pansy et Theo, mais je crois que je vais tout raconter à Daphné. 

-       Oula, attends, attends, tempéra Pansy en se relevant un peu de sa position avachie sur Theodore. Premièrement qu’est-ce que t’entends par « tout raconter à Daphné » ? 

-       Je veux dire littéralement « tout lui raconter ». 

Pansy pouffa et me regarda, puis Theodore, à la recherche d’un peu de soutien. 

-       Quoi ? s’indigna-t-elle. Est-ce qu’on raconte juste à tout le monde qu’on est des Mangemorts maintenant ? 

-       Daphné c’est pas « tout le monde » Pansy, abuse pas, lui fit remarquer Blaise. 

-       Sa famille s’est déjà retrouvée impliquée avec Voldemort, rappela Theo en pleine réflexion, je ne pense pas que notre secret soit en danger avec elle, ou les siens. 

-       Ok attends, reprit Pansy vers Blaise, pour commencer déjà qu’est-ce qui la rend si spéciale, cette fille-là ? 

Blaise s’enfonça dans le canapé à mes côtés en soupirant alors que nous étions tous pendus à ses lèvres pour en apprendre plus sur son histoire. Daphné et lui avaient commencés à se fréquenter juste avant les vacances de Noël, et celles-ci ayant consisté en un enchaînement de cauchemars pour nous, nous n’avions pas vraiment pris le temps d’échanger réellement sur ce qu’il aimait chez elle, et ce qu’il se passait entre eux. 

-       Elle est…, commença-t-il alors, elle est impressionnante. Je crois que j’ai jamais vraiment rencontré une meuf comme elle, songea-t-il en fixant notre table basse. 

Il passa ses deux mains sur son visage alors qu’il réfléchissait aux mots qu’il allait choisir. 

-       Elle est magnifique, elle est intelligente, elle a de la répartie comme très, très peu de filles en ont, elle est drôle mais pourtant elle reste tout à fait…, parfaite en société, elle est…, elle est drôle et elle a du piment mais en même temps c’est la fille parfaite à avoir à ses côtés. Et elle me fout pas la moindre pression, elle est pas jalouse alors que putain faut dire les termes, avec moi y aurait de quoi avoir des doutes, elle me flic pas, elle me saoule pas, énuméra-t-il alors en ayant l’air de difficilement y croire lui-même, elle a sa propre vie de son côté, avec ses désirs, ses opinions, elle…, j’sais pas putain sérieusement elle est impressionnante. C’est pas le genre de meuf que juste tu baises, tu vois ? dit-il à Pansy. C’est le genre de nana que tu rencontres une fois dans ta vie, et c’est le genre que t’épouses, tu vois c’que j’veux dire ? 

-       Parce qu’elle rigole à tes blagues et qu’elle passe bien en société ? creusa donc une Pansy septique. 

-       Mais non, reprit Blaise, pas que ça. J’sais pas c’est dur à expliquer, genre à mettre en mots. T’arrives à dire pourquoi t’aimes Theo toi ? 

-       Oui, répliqua-t-elle immédiatement avec une moue consternée tellement c’était évident pour elle. 

-       Et pourquoi ? continua-t-il donc. 

-       Mec, tu l’as rencontré ou quoi ? C’est littéralement la personne la moins autocentrée au monde, il ferait absolument n’importe quoi pour les gens qu’il aime…

-       … C’est drôle que tu dises ça après aujourd’hui, la coupa Blaise avec un sourire. 

-       La ferme, trancha-t-elle avant de continuer sous le regard attendri de Theo. Il est aussi violent qu’il est doux, il est bourré de valeurs et de sagesse malgré ce qu’il a vécu, plus vrai et authentique que lui tu meurs, enchaîna-t-elle sans réfléchir une seule seconde. Il sait ce qu’il veut et il se donne les moyens même quand c’est difficile, il a toujours la tête sur les épaules et il est toujours putain de solide peu importe ce qui se passe et à quel point c’est la merde, on peut toujours compter sur lui quand nous on pète les plombs, c’est un putain d’homme capable comme y en a pas beaucoup. Il est dévoué et déterminé, continua-t-elle avec facilité, il est intéressant et intéressé, quand il dit quelque chose il le pense vraiment, y a pas de questions à se poser. Il est capable de gérer ma violence et mon caractère parce qu’il a la même richesse en lui, il est intense dans littéralement tout ce qu’il est et tout ce qu’il fait et en plus c’est l’homme le plus soutenant et compréhensif que j’ai jamais rencontré et il apporte nuance là où moi j’ai tendance à être très manichéenne. Et à côté de tout ça c’est un putain de dieu magnifique qui me fait de l’effet comme j’peux même pas le mettre en mots tellement il me rend barge juste en posant les yeux sur moi, donc ouais, je sais pourquoi je l’aime ouais, conclut-elle finalement. 

Theodore demeura silencieux, mais sa main caressa tendrement et de façon possessive la cuisse de Pansy assise sur lui. 

-       Ouais, eh ben…, bégaya Blaise, Daphné est…, elle est intéressante, elle a des idées et de l’esprit, comme j’ai dit elle a de la répartie et ça face à moi c’est quand même important je pense, et puis elle est drôle aussi même si elle reste toujours dans la bienséance, c’est un truc qui me plaît aussi tu vois, moi je veux une lady dans les rues mais une coquine au pieu, et elle correspond à la définition. Je me suis jamais vu rester longuement avec la même personne sans m’en lasser mais elle…, songea-t-il, elle je crois vraiment que ça pourrait le faire. Je crois qu’elle a ce qu’il faut pour que je ne me lasse pas. 

-       Putain si on m’avait dit que le jour où Zabini dirait ce genre de trucs d’une femme viendrait j’y aurais pas cru, commentai-je alors. 

-       Notre Don Juan est mordu, enchaîna Theo avec un sourire en sa direction. 

-       La ferme, tenta-t-il de nous couper sans pouvoir masquer son propre sourire. 

-       Ok tu l’apprécies vraiment, reprit sérieusement Pansy, mais est-ce que ça signifie que tu dois tout lui balancer ? J’veux dire déjà ça ne te concerne pas que toi, mais surtout on ne sait pas ce qu’elle va en faire. 

Il sembla réfléchir à son propos avant de répliquer : 

-       Comme Theo l’a dit, sa famille s’est déjà retrouvée impliquée avec le Seigneur des Ténèbres, même s’ils ne font pas parti des rangs. Et je commence à la connaître maintenant, et elle n’est pas du genre à vouloir faire du mal aux autres en utilisant des choses qu’on lui a confiées en les racontant à qui veut bien écouter. 

-       Tu la connais à peine, remarqua une Pansy sur la réserve. 

-       Franchement je rejoins Blaise, m’insérai-je alors. Et tu la connais toi aussi, dis-je à Pansy, tu crois vraiment qu’elle serait du genre à balancer une telle information ?

-       On ne sait jamais ! Fin merde je sais pas, c’est pas un truc qu’on peut balancer comme ça aveuglément à n’importe qui ! 

-       C’est pas n’importe qui Pansy, temporisa Blaise avec sérieux. Je déconne pas, elle me plaît vraiment, vraiment vraiment, appuya-t-il. Et si je vais construire quelque chose avec elle, tu crois pas qu’il faut que je sois honnête avec elle sur qui je suis et ce qui se passe dans ma vie ? 

Pansy demeura silencieuse alors qu’elle considérait ses mots. 

-       Et puis, comment je vais lui expliquer que je suis soudainement moins drôle et exaspérant qu’avant ? continua-t-il devant son silence. J’ai envie…, hésita-t-il un instant, j’ai envie qu’elle sache. J’ai envie qu’elle sache ce qu’il a fait à ma mère, et ce que ça me fait à moi. J’ai envie de lui parler de ce que je ressens, et j’ai envie qu’elle soit là pour moi, qu’elle me soutienne, dit-il alors que des larmes naissaient dans ses yeux. Moi aussi, j’ai envie d’avoir quelqu’un sur qui je peux me reposer, qui peut être mon pilier, qui peut me soutenir dans les trucs horribles que je traverse, tu vois ? lui demanda-t-il doucement. 

Elle le regarda silencieusement, ses propres yeux se mouillant de larmes en constatant de la douleur de son meilleur ami. Sa bouche forma une moue triste alors qu’elle répliquait avec une voix enfantine : 

-       Je croyais que c’était moi ton pilier. 

Blaise pouffa avec un grand sourire et essuya ses yeux. 

-       Bien sûr que tu l’es, répliqua-t-il tout sourire. 

Pansy baissa le visage en accentuant sa moue d’enfant triste : 

-       J’suis jalouse, t’es ma meuf à moi. J’aime pas trop ça, pesta-t-elle. 

Le somptueux et chaleureux rire de Blaise raisonna dans notre salle commune. 

-       Viens là p’tit monstre, lui ordonna chaleureusement Blaise en lui ouvrant les bras. 

Elle se leva des genoux de Theodore pour trouver ceux de Blaise, et s’y blottit en croisant les bras sur sa poitrine pour marquer son mécontentement. Il entoura son corps frêle de ses bras musclés et déposa un baiser appuyé sur sa joue alors qu’elle continuait de bouder. 

-       Promis s’il ne te passe pas la bague au doigt, je le ferai, lui dit-il en souriant à Theodore. 

-       Calme tes ardeurs Zabini, il y en a une seule au monde que tu ne peux pas avoir, et c’est celle-là, trancha Theo qui souriait tout de même en retour. 

-       Je crois que ton mec m’aime pas, chuchota Blaise à l’oreille de Pansy qui rit doucement.

Il serra Pansy plus chaleureusement contre lui, inspira son odeur, et lui murmura plus sérieusement : 

-       Tu seras toujours la numéro un. 

-       Frérot y a intérêt sinon j’vous pète les dents à tous les dents en vous frappant mutuellement vos sales gueules, répliqua une Pansy bien plus égale à elle-même.

Et le rire de Blaise qui nous avait tant manqué raisonna une nouvelle fois jusque dans nos entrailles. Parce que c’était l’effet que Pansy avait sur lui, et qu’elle était la seule ici présente à lui rendre cette vie en lui. Parce c’était sa p’tite meuf à lui. 

-       Ah ouais ? la provoqua-t-il en commençant à lui chatouiller les hanches. 

Pansy se tordit sur lui alors qu’un immense sourire prit place sur son visage pour remplacer sa moue boudeuse, et ce fut bientôt son rire à elle qui remplit les murs de notre salle commune alors qu’il l’allongeait sur le sol pour la ruer de chatouilles. 

Ce fut lorsque quelqu’un toqua à la porte de notre salle commune que nos rires cessèrent finalement. Ce fut Pansy qui se leva la première, après que nous ayons échangé des regards interrogateurs les uns avec les autres, pour aller ouvrir : 

-       Y en a un qui attend quelqu’un ? demanda Pansy sur le chemin. 

Nous fîmes tous non de la tête. Elle ouvrit le portrait, se décala pour nous laisser entrevoir qui se tenait là après quelques secondes de silence et mon cœur cessa brusquement de battre dans mon poitrail. C’était elle. Elle était là. Ce fut comme si tout s’arrêtait soudainement. Comme si Pansy, Blaise et Theo n’étaient plus là. Comme si moi-même je n’étais pas vraiment là. Parce qu’elle, elle l’était. Elle se tenait là, debout devant l’entrée de ma salle commune. Ses yeux ambrés inquiets et tristes enfoncés dans les miens alors que je restai interdit. Bloqué. Elle était là. Elle était là, et tous mes murs d’occlumencie tombaient. Parce qu’elle était là. Vêtue d’un pull marron et d’un jean de couleur bleue, ses longs cheveux bouclés retombant sur ses épaules. Et mon monde s’écroulait. Tout ce que je m’étais appliqué à construire. Et je restai interdit, la bouche entre-ouverte, perdu dans ses yeux. Parce qu’elle était là.

-       Hey, chuchota-t-elle tout bas en ma direction. 

Et mon cœur pu battre à nouveau à l’écoute de sa voix. De sa voix angélique que je n’avais plus entendue depuis trop, bien trop longtemps. Du ton qu’elle n’employait que quand elle me parlait à moi, et qui faisait de moi quelqu’un de si, si spécial à cause d’elle. Devant mon silence interdit, elle murmura, hésitante :

-       Est-ce qu’on peut parler ? 

Je m’étais préparé à cela. A devoir lui expliquer les choses comme elles étaient. Nous n’en étions plus au stade où je lui mentais pour l’éloigner, cela n’aurait plus eu le moindre sens. Elle savait, désormais. Et je savais que j’allais devoir lui expliquer ce qu’il s’était passé, et pourquoi je ne pouvais plus la voir. Mais je ne m’étais pas préparé à ce que ce soit là, maintenant. Je clignais des yeux pour revenir à la réalité, quittant son visage parfait et l’inquiétude de ses yeux, et acquiesçai. Je me levai du canapé en silence, et ignorait les pairs d’yeux de mes amis rivés sur moi. Je m’approchai d’elle alors que mon cœur se serrait dans mon poitrail, et me retournait vers ma famille. Mes yeux étaient rivés sur Theodore, qui me regardait gravement, alors que je leur annonçai : 

-       Je vous verrai demain. 

Il me sourit tendrement. 

-       Et tous les jours d’après, me renvoya-t-il d’une voix qui se voulait rassurante. 

J’acquiesçai doucement, et passai la porte avec Granger. Pansy la referma derrière moi, et il ne restait plus que nous. Elle me sondait, de ses grands yeux inquiets, et je le lui rendais. Elle était là. Elle était revenue pour moi. 

-       Qu’est-ce que tu fais là ? parvins-je alors à articuler à voix basse. 

-       Tu as dit que tu étais en sécurité, chuchota-t-elle, apeurée, et que tu n’étais plus chez toi. Où pouvais-tu être d’autre ? 

Oui, elle était revenue pour moi. Et je me noyai dans ses yeux. Dans la couleur ambrée de ceux-ci, dans leur chaleur sans pareille. Dans la magnificence de son visage et la douceur de sa voix. 

-       Ça ne répond pas à ma question, murmurai-je en retour. 

Je tentai désespérément de m’accrocher à ce qu’il me restait de rationnel, pour ainsi dire rien qu’un putain de fil. Parce qu’elle était là, et que dès que je la voyais, peu importait toute ma détermination, elle faisait tomber toutes mes barrières que je croyais solidement installées. Ses yeux m’analysaient avec inquiétude, d’ores et déjà rougis de ses appréhensions. Elle était morte d’inquiétude pour moi. 

-       Tu m’as laissée sans nouvelle, dit-elle tout doucement. Je devais savoir ce qu’il se passait, comment tu allais. 

Je mordais l’intérieur de mes joues alors que je me prenais en plein visage à quel point je lui avais fait défaut. Elle était rentrée de chez ses parents plus tôt pour moi. Parce qu’elle avait peur pour moi. Parce que je lui avais promis que je la tiendrais au courant, et que je ne l’avais pas fait. Parce que je m’étais défilé, encore une fois. Et elle méritait de savoir. Elle méritait de comprendre réellement pourquoi tout cela devait s’arrêter. J’acquiesçai en sa direction. 

-       Viens, chuchotai-je en menant le pas vers la tour d’astronomie. 

Elle me suivit en silence. Elle savait que j’allais lui dire, encore une fois, qu’il fallait que nous arrêtions tout, c’était palpable. Et elle en avait peur autant que moi. Et elle détestait cela autant que moi. Mais j’étais impuissant, et je ne pouvais plus l’être. Et elle était en danger, et elle ne pouvait pas l’être. Pas à cause de moi. Pas comme ça. Pas avec tout ce qui se dessinait devant Theo et moi. 

Nous prîmes nos places habituelles au bord de la tour, nos jambes balançant dans le vide alors que toute la peine et toute la douleur que je m’étais appliqué à mettre de côté la concernant montait violemment en moi, entraînant mon cœur à battre plus fort dans mon poitrail, et mes entrailles à se nouer dans mon estomac. Elle ne lança pas la conversation, elle attendit, ses yeux rivés sur moi alors que j’étais incapable de les rencontrer à nouveau. Je devais lui dire adieu. Je devais mettre un point final à tout cela, peu importait à quel point je ne voulais pas le faire. Tout cela était bien plus grand que nous. Ça nous dépassait complètement. Je soupirai de façon audible alors que je tentai d’apaiser mon corps qui s’activait violemment. 

-       Je passe des heures, commençai-je à voix basse alors que je ne la regardai pas, putain des jours à me préparer à te voir, à ériger des murs d’occlumencie plus épais que les précédents, et tu débarques sans prévenir, et mes yeux se posent sur toi, et tout s’écroule. 

Je tournai difficilement le visage vers elle, et rencontrait ses yeux déjà mouillés de larmes. 

-       Et les murs tombent, chuchotai-je alors que mon cœur se brisait en moi. 

Une larme coula le long de sa joue. Parce qu’elle savait. Elle savait parfaitement.

-       Qu’est-ce qu’il se passe, Malefoy ? murmura-t-elle sans quitter mes yeux. 

Moi je quittai les siens, et laissai mon visage basculer en arrière alors que j’essayai désespérément de me reprendre. De me ressaisir. De faire ce que j’avais à faire. Avec toute l’honnêteté et la vulnérabilité que je lui devais. Parce que peu importait ce que j’essayai de me dire, elle n’était pas personne. Elle n’était pas rien. Elle n’était pas qu’un jeu. Et je lui devais cela. Je pris une profonde inspiration en fermant les yeux, mon visage tourné vers le plafond, et commençai en fixant le jardin de l’école :

-       La mère de Blaise, Alexa, est une femme avec…, des problèmes. Je suppose que tu as déjà entendu des rumeurs sur la façon dont chacun de ses maris mourrait mystérieusement. Elle n’en a jamais tué un seul pour l’argent, expliquai-je sans pouvoir la regarder, elle était…, elle était malade, elle perdait la tête. Il y a quelques temps, quand nous avons tous séché les cours, elle a appelé Blaise à l’aide parce qu’elle avait fait une nouvelle crise, et elle avait tué son dernier mari. Nous sommes allés nous débarrasser du corps, et nous occuper de la remettre en état, lui appris-je doucement. Ce n’est pas…, ce n’était pas une mauvaise personne. Elle nous a tous accueillis chez elle avec beaucoup d’amour, et beaucoup de chaleur. Elle a toujours tout fait pour Blaise. Elle était juste…, malade. Il est venu chez moi, sans prévenir, à Noël, repris-je difficilement. Il y avait Blaise, Pansy, leurs parents respectifs, et Theo. Aucun d’entre nous ne le savait, mais le dernier mari d’Alexa était un espion de tu-sais-qui. Alors, il a puni Alexa pour ce qu’elle a fait malgré elle. Il…, il lui a arraché les cheveux, et il a forcé Pansy à jouer du violon avec ses cheveux pour cordes tout le temps que ça a duré. 

Mon estomac se noua plus violemment encore et je passai une main sur ma bouche alors que la nausée me montait à l’évocation explicite de ce souvenir douloureux. 

-       Il a fait bouillir son sang dans ses veines jusqu’à ce qu’elle meure sous nos yeux à tous. Sous les yeux de Blaise, qui ne pouvait rien faire, dis-je difficilement alors que des larmes naissaient dans mes yeux. On a…, on a tous dû rester là, à regarder, sans rien faire, et Pansy à jouer du violon avec les cheveux ensanglantés de la mère de son meilleur ami, pendant que le corps d’Alexa tremblait et saignait devant nous. Pendant que Blaise perdait sa mère, lâchai-je en tournant finalement le visage vers elle. 

Elle pleurait. Elle pleurait devant tant de cruauté. Devant tant de douleur. Devant ce que nous traversions. 

-       Il nous a ordonné de rentrer à Poudlard rapidement pour faire ce qu’il attend de nous, repris-je en quittant son regard. En sous-entendant implicitement que si nous ne lui obéissions pas, il se passerait d’autres choses de cet ordre-là. Alors on a enterré Alexa, et on est rentrés. Je…, hésitai-je alors que ma propre douleur me rendait la tâche de parler difficile, je croyais que ça irait. Je croyais qu’on pourrait avoir quelque chose, toi et moi, qu’on pourrait se cacher, que ça irait, chuchotai-je. Mais c’est ça, ce qu’il se passe dans mon monde à moi, lâchai-je en la regardant alors qu’une larme coulait sur ma joue. C’est ça, ma vie maintenant. Et c’est ça, la menace qui pèse sur les gens qui m’entourent. La menace qui pèse sur toi. 

Je me redressai et séchai mes larmes d’un mouvement de main. 

-       Et je dois faire ce qu’il attend de moi. Je ne peux plus n’être qu’à moitié là-dedans, n’être qu’à moitié sien, parce qu’il finit par tout savoir, et qu’il fait pression sur nous avec des moyens que tu n’imagines même pas. Ça doit s’arrêter Granger, chuchotai-je en la regardant. Ce qu’il y a entre toi et moi, ça doit s’arrêter, répétai-je alors qu’une nouvelle larme coulait de mes yeux. Je te le dis avec toute ma vulnérabilité, et en toute honnêteté. Sans mensonge, sans excuse bidon, sans te cacher quoi que ce soit. Tu dois me faire confiance cette fois-ci, murmurai-je, ça doit s’arrêter. 

Ses yeux analysèrent les miens alors que ses sourcils froncés témoignaient de sa douleur. Sa douleur que je partageais. 

-       Tu crois que je ne savais pas ? chuchota-t-elle finalement. Je les ai combattus Malefoy. J’ai combattu ton père. J’ai vu Voldemort, énuméra-t-elle. Je suis aux côtés d’Harry depuis la première année. Tu penses que je ne prends pas la mesure ? Tu penses que je divague et que je me dis juste « ce n’est rien, ce n’est pas grave, il n’y a aucun risque » ? Tu penses sincèrement que je ne suis pas au courant de tout ça ? 

Je pinçai mes lèvres alors que des larmes plus imposantes montaient en moi. Elle ne comprenait pas. 

-       Tu sais tout ça au niveau intellectuel, murmurai-je en retour, comme moi je savais au niveau intellectuel alors même que j’étais au plein milieu de ça. Mais quand tu le vis, quand tu es confronté à ça en vrai, c’est différent Granger. Ça prend une autre dimension, et ça, tu ne l’as pas, sinon tu fuirais aussi loin que tu le pourrais de moi. 

Elle fit non de la tête alors qu’elle pleurait de plus belle. 

-       Ce n’était pas intellectuel quand il a tué Cédric. Ce n’était pas intellectuel quand ils ont tué Sirius. Et ça ne l’était encore pas pendant ces vacances quand on a appris qu’ils nous avaient pris Lupin. 

Je fermais les yeux alors que mon cœur se brisait en mille morceaux dans mon poitrail. C’était nous. Nous lui avions pris Lupin. 

-       TUEZ-MOI ! lui hurlai-je au visage. 

Je fermai les yeux et ma respiration se fit rapide et courte. Mon poitrail se soulevait vivement alors que j’inspirai et expirai violemment, préparé à ce que tout s’arrête. Attendant que tout s’arrête. La douleur, la culpabilité, les cauchemars devenus réalité. Que tout s’arrête. 

-       ALLER ! criai-je alors que ma voix tremblait. TUEZ-MOI ! 

Je pris de nouvelles inspirations rapides alors que j’hyperventilais à mesure que j’hurlais. J’étais prêt. C’était maintenant. L’autre côté n’était que de l’autre extrémité de sa baguette. Et j’étais prêt. 

-       TUEZ-MOI ! 

Un éclair de lumière verte jaillit soudain, et je tombais à genoux, en larmes, son poignet glissant entre mes doigts alors que le corps de Lupin s’écrasait sur le sol. Mort. Theodore. Je regardai son corps soudainement inanimé alors que des larmes perlaient sur mes joues et que je ne parvenais plus à respirer convenablement. 

-       Occupez-vous du corps, ordonna la voix tranchante de Theodore. 

Le souvenir s’imposait à moi malgré ma volonté, et de nouvelles larmes coulaient de mes yeux alors que je me trouvais incapable de le lui dire. De lui dire ce que j’étais vraiment. Ce que nous avions vraiment fait. De voir ce que cela lui ferait. 

-       Il envisage Theodore comme son futur bras droit, lui appris-je alors en me raccrochant à d’autres faits dont je pouvais parler. Et en tant que prémisse d’entretien d’embauche il lui a ramené une fille née de parents moldus dans nos âges Granger, pour qu’il la tue devant tout le monde avec le plus de cruauté possible. Que crois-tu qu’il te ferait, à toi ? 

-       Je risque ma vie contre lui depuis des années Malefoy, continua-t-elle alors. Je…

-       … Granger…, soupirai-je alors que les larmes continuaient de couler de mes yeux. 

-       Je sais ce qu’il se passe autour de toi et je…

-       … Ce n’est pas que ce qu’il se passe autour de moi Granger, la coupai-je plus fermement bien que douloureusement. C’est ce que moi je dois faire, ce que je dois devenir pour survivre. Celui que j’étais, celui avec qui tu as fait toutes ces choses, celui qui t’as attendri, il n’existe plus, pleurai-je en rencontrant ses yeux terrifiés. Je…, je le sens, en moi. Quand…, quand j’ai vu Blaise, et après quand j’ai vu Pansy s’écrouler, l’un après l’autre, je…, j’en suis à un stade où je ne ressens plus rien, je n’arrive plus à ressentir la peine ou la douleur alors que c’est ma famille, alors que c’est ma famille et qu’ils sont détruits, et qu’ils tombent sous mes yeux, l’un après l’autre, et ça me fait peur Granger. Ça me fait peur et à la fois je n’ai même plus vraiment peur, parce que je n’ai plus le droit à cette option, tu comprends ? Je n’ai plus le droit d’avoir peur, je n’ai plus le droit d’hésiter, je n’ai plus le droit d’avoir des remords, pleurai-je de plus belle. Parce que sinon il va tuer tous ceux que j’aime. Je n’ai pas de choix. Et je sens que…, que cette partie de moi, celle qui t’a touchée, elle s’éteint. 

-       C’est faux, chuchota-t-elle alors qu’elle pleurait silencieusement. Regarde-moi, c’est faux. Peut-être que toi tu ne le ressens pas là, maintenant, parce que tu n’as pas le choix de faire autrement pour pouvoir survire, et pour pouvoir supporter l’insupportable, mais tu me dis tout ça et tes yeux ne cessent de pleurer. Je sais ce qu’il y a moi, Drago, je sais ce qu’il y a sous cette armure, sous ce masque de Mangemort. 

Je fermais les yeux à l’écoute de mon prénom dans sa bouche. C’était douloureux. Ce n’était pas doux. Ce n’était pas apaisant. C’était douloureux. Trop douloureux. Parce que je n’y avais pas droit. Je n’y avais plus droit. Je trouvais la force de la regarder à nouveau alors que les larmes continuaient de perler de mes yeux, et chuchotai : 

-       Je crois qu’il n’en restera bientôt plus rien. 

Elle pleura, elle aussi. Mes mots lui étaient douloureux. Tout était trop douloureux. Et je ne le supportai pas. Mais je lui devais la vérité. Sa main trouva sa place sur mon bras qu’elle serra alors qu’elle pleurait : 

-       Je suis tellement désolée que tu vives tout ça…, mais tu n’es pas obligé d’être seul là-dedans. 

Je soutins son regard difficilement. Ses yeux en amande. Son nez fin. Ses lèvres parfaitement tracées. Ses cheveux rebelles. 

-       Je ne le suis pas, murmurai-je en retour. 

C’était vrai, je ne l’étais pas. Elle lâcha mon bras et se couvrit le visage un instant, essuyant ses propres larmes alors que mes mots étaient aussi tranchants que des lames pour son cœur. Elle pleura cependant de plus belle quand elle tenta de reprendre : 

-       Je ne suis pas complètement illusionnée Malefoy. Comment tu crois que c’est, pour moi ? Est-ce que tu crois que je suis complètement dans le déni ? Que je n’ai pas conscience du danger dans lequel ça nous met, nous et nos amis ? Je sais tout ça, continua-t-elle sans pouvoir s’arrêter de pleurer, et ça me terrorise. Mais c’est une guerre, et toutes nos vies sont déjà en danger. Et…, et je crois que dans tout ça, dans toutes cette noirceur, continua-t-elle difficilement, il n’y a que ça qu’il nous reste, murmura-t-elle en nous montrant chacun tour à tour. 

Elle n’arrêtait pas. Elle n’arrêtait jamais. Elle n’abandonnait jamais. Je venais de lui dire ce qu’il avait fait à la mère de Blaise. Ce qu’il avait fait faire à une femme de son sang. Je lui avais tout dit. Je lui avais dit ce que je devenais. Et elle ne lâchait pas. Et elle continuait. Et mon cœur ne le supportait pas. Et mon corps ne le supportait pas. Et mon esprit ne le supportait pas. Parce que je voulais lui céder. Parce que je ne parvenais pas à lui résister. Alors même qu’elle devait disparaître de ma vie. 

-       Arrête, pleurai-je à mon tour. 

-       Et je n’arrive pas à l’abandonner, ça, sanglota-t-elle. Je t’entends, je t’assure, je t’entends. J’entends ce que tu attends de moi. 

Je levai les yeux vers elle. Elle me regardait avec toute la douleur du monde. 

-       Mais je n’ai pas assez de peur en moi pour pouvoir rester loin de toi. 

Je saisi mon visage entre mes deux mains alors que je le baissai vers le sol, un grondement douloureux s’échappant de mes lèvres alors que je tentai de me combattre moi-même, et mes sentiments pour elle. 

-       Arrête, pleurai-je encore. 

-       J’ai essayé, continua-t-elle en sanglotant, j’ai vraiment essayé. Mais tu crois quoi Malefoy ? Tu crois que je me suis accrochée à toi, et que je me suis battue pour les pauvres miettes que tu me donnais pour le plaisir ? Juste…, comme ça ?

-       Tais-toi, chuchotai-je en maintenant fermement mon visage entre mes mains, essayant de ne pas perdre la tête. 

-       J’ai essayé de me dire que tu n’étais qu’un enfant arrogant, méchant et mauvais, qu’il n’y avait rien de bon en toi, et que tu n’étais qu’une peine perdue, j’ai essayé de n’avoir rien à faire de toi et de ce que tu traversais, j’ai essayé de ne pas adorer la façon dont tes yeux argentés se posaient sur moi, j’ai essayé de ne pas frissonner sous ton touché, et j’ai essayé de ne pas te trouver aussi inspirant, mais tu m’as rendu la tâche trop difficile. 

Mon cœur se brisa en même temps que sa voix sous la pression des sanglots qu’elle pleurait. Mes mains qui tentaient de contrôler mon visage et mon esprit étaient inondées des larmes que je ne pouvais m’arrêter de verser. Parce que je la voulais. Parce que je l’aimais. Parce qu’elle était parfaite et que je n’avais pas le droit à elle. Parce que je devais me fermer. Parce que je devais devenir un monstre. Parce que je devais l’abandonner, et abandonner tout ce qui faisait de moi un homme encore respectable. Parce que je ne pouvais plus fuir mon destin. Et parce que peu importait à quel point j’essayais, je ne parvenais pas à me fermer à elle. 

-       Arrête de parler Granger, la suppliai-je alors que je me perdais dans ses mots. 

-       Et je sais à quel point c’est terrorisant parce que je le ressens aussi, parce que je suis aussi consciente que toi, et parce que je ne peux pas m’en empêcher non plus, sanglota-t-elle encore. Mais la peur que j’ai de Voldemort n’est rien, absolument rien à côté de la peur que j’ai de te perdre, murmura-t-elle finalement. 

-       ARRÊTE ! hurlai-je en me levant soudainement. 

Je maintenais une prise ferme sur ma tête, tentant désespérément de ne pas la perdre. Mon monde s’écroulait. Mon cœur et mon âme se brisaient. Elle bouleversait tout. Je ne contrôlais rien. Je ne contrôlais plus rien. Elle bouleversait tout. 

-       ARRÊTE ! répétai-je en tournant en rond, sanglotant dans le creux de mes mains. ARRÊTE ! ARRÊTE !

Elle se leva lentement pour se tenir face à moi, effrayée. Détruite. 

-       Je peux pas, sanglotai-je entre mes mains, je peux pas, je peux pas, je peux pas ! JE PEUX PAS !

Un hurlement déchirant contenant l’intégralité de ma douleur, de mon impuissance et de ma frustration sorti de moi alors que je me penchai en avant, ayant l’impression que des milliers de lames me tailladaient de l’intérieur. Je laissai mes bras retomber le long de mon corps et rencontrai son visage déchiré une nouvelle fois. 

-       JE PEUX PAS TOMBER AMOUREUX DE TOI GRANGER ! sanglotai-je alors. JE PEUX PAS ! JE PEUX PAS TOMBER AMOUREUX DE TOI ! 

Je laissai une main cacher ma bouche alors que je reprenais difficilement mon souffle, la douleur et les sanglots arrachant tout ce qui me restait de vie, tout ce qui restait de viable en moi. 

-       JE FAIS QUOI GRANGER ?! SI TU MEURS À CAUSE DE MOI ?! DIS-LE-MOI ! lui hurlai-je au visage. COMMENT JE VIS AVEC ÇA ?! PUTAIN ! 

Mes mains tentèrent de contenir mon esprit une nouvelle fois, tremblantes alors que je perdais pied. 

-       Tu ne comprends pas ? murmurai-je, à bout. J’essaye…, j’essaye de me dire que ce n’est qu’un jeu, que c’est faux, que je ne ressens rien pour toi, qu’on ne fait que jouer, que ce n’était qu’un passe-temps, qu’un putain d’exutoire, parce que je peux pas, parce qu’on ne peut pas, mais tu es… tu es tout le temps dans ma tête, tu es… PUTAIN DE TOUT LE TEMPS DANS MA TÊTE, pleurai-je en me frappant le crâne de mes mains alors que je sanglotais violemment, et je n’arrive plus à respirer parce que quoi que je fasse, je n’arrête pas de penser à toi ! 

Son corps s’élança sur le mien, ses bras s’enroulant autour de ma nuque, ses lèvres rencontrant violemment les miennes. J’allais le regretter. Mais elle était à sa juste place. Et je la recevais. Et je la goûtais. Je recevais son corps contre le mien, enfermant sa taille et la pressant plus fort contre moi. Prêtant attention à la sensation brûlante et enivrante de ses lèvres se mêlant aux miennes, et de sa langue caressant la mienne. Parce qu’il n’y avait rien de semblable à cela. Parce que son corps m’appelait, et que le mien répondait à son appel. Parce que quoi je fasse, elle était putain de mienne, et je lui appartenais. Et j’allais le regretter. Je le savais. Mais alors que je sentais son odeur de vanille, que je sentais son cœur battre contre le mien, que je pouvais sentir ses bras autour de moi, sa poitrine contre mon torse, et le goût de ses lèvres contre les miennes, il n’y avait rien d’autre. Rien d’autre que cela. Rien de plus vrai que cela. Rien de plus juste que cela. Parce que c’était ma juste place, et que c’était la sienne. Peu importait les conditions. Peu importait le contexte. Peu importait qui elle était, et ce que j’étais. C’était ma juste place, et c’était la sienne également. Elle m’embrassa avec toute la fougue et l’amour qu’elle avait dû contenir en elle jusqu’alors, et je le lui rendais. Je la dévorai. Parce que je brûlais pour elle. Parce que peu importait à quel point j’essayais de contrôler ce feu qui brûlait en moi pour elle, elle était mon putain de déclencheur. Mon putain d’incendio. Et elle emportait tout de moi sur son passage. Parce que ses lèvres étaient les lèvres les plus délicieuses que je n’avais jamais goûtées. Parce que quand elle me touchait, quand son corps était contre le mien, que sa langue se mêlait à la mienne, que son odeur remplissait mes narines, je trouvais quelque chose que je n’avais jamais connu avant : la plénitude absolue. Elle était mon enfer autant qu’elle était mon paradis. Et je ne pouvais pas luter. Je ne pouvais pas lui résister. Parce que tout de moi lui appartenait. 

Ses mains caressèrent frénétiquement mes joues qu’elle séchait de leurs larmes alors qu’elle ne pouvait arrêter de m’embrasser une seule seconde. Et je l’attirais plus encore contre moi. Parce que j’avais besoin d’elle, et que j’avais besoin de plus. Je pressai ses hanches contre les miennes alors qu’elle gémissait au creux de ma bouche. J’allais le regretter. Mais cela n’avait plus la moindre importance. Elle était là. Elle était contre moi. Elle me touchait. Elle me voulait. Rien d’autre n’importait. Rien d’autre que cela. Rien d’autre qu’elle.  Je me noyai dans sa bouche. Je me noyai dans la douceur de ses lèvres contre les miennes. Je me noyai dans la sensation sans pareille de sa langue mêlée à la mienne. Je me laissai submerger par les vagues de chaleur intenses qui traversaient mon corps quand le sien était contre moi. J’offrais le luxe à mes mains de parcourir son corps, la cambrure de son dos, l’arrondissement de ses fesses, la finesse de sa nuque, la douceur de ses cheveux. Et je m’abandonnai à elle. A son touché. A sa peau qui caressait la mienne. A ses mains qui me défaisaient hâtivement de mes vêtements. A ses yeux qui se noyaient dans les miens avec plus de feu, plus d’ardeur et de passion que je n’en avais jamais vu. A sa bouche qui ne pouvait supporter de s’éloigner de la mienne plus d’un instant. Au son de ses gémissements quand j’embrassai sa poitrine, sa nuque, son ventre, et tout ce qu’elle m’offrait d’elle. Je m’abandonnai à la chaleur qu’elle m’offrait en se tenant si près de moi, en me touchant avec tant de frénésie que je ne pouvais sentir la fraicheur de l’air autour de nous. Je m’abandonnai à ses yeux ambrés qui me regardaient avec plus d’amour et de tendresse que jamais auparavant alors qu’elle m’enfonçait en elle, nue contre moi, sur le sol de la tour d’astronomie. Je m’abandonnai à la vue qu’elle m’offrait, son corps nu au-dessus du mien, et à l’extase qu’elle m’offrait en m’insérant en elle. A la douceur de son touché alors que ses mains se renfermaient sur mes joues, ses yeux incapables de quitter les miens tandis que toute la douleur du monde, que toute l’intensité brute de ce qu’elle ressentait m’était exposée, juste-là, au creux de ses yeux. Je m’abandonnai à sa beauté saisissante, alors qu’elle me chevauchait lentement, passionnément. Je m’abandonnai à l’ivresse qui me submergeait pour elle. Pour sa beauté irréelle. Pour sa douceur sans pareille. Pour son touché enivrant. Pour son goût grisant. Pour son odeur exquise. Parce qu’elle était parfaite pour moi. Elle me regardait. Elle me chevauchait. Elle m’embrassait. Et la seule chose qui me traversait alors que nous autorisions nos corps à exprimer ce que nos mots ne savaient dire, c’était cela. Qu’elle était parfaite pour moi. Parfaite. 

Je caressai son épaule nue en pleine conscience. Conscient des frissons que lui causait ce contact juste après que nous ayons partagé autant d’amour. Juste après qu’elle m’ait fait l’amour. Conscient de ce que ce contact faisait à ma propre peau. Absolument et totalement conscient de l’effet qu’elle me faisait, elle. De l’effet qu’elle faisait à mon corps, qui ne pouvait résister à la toucher. De l’effet qu’elle faisait à mon esprit, qui ne pouvait se contrôler en sa présence. De l’effet qu’elle faisait à mon cœur, qui s’emballait à sa vue. De l’effet qu’elle faisait à mon âme, qui se réparait quand elle m’offrait son amour. J’en étais absolument et totalement conscient. Alors je le sentis, quand mon cœur se brisa, encore une fois, dans mon poitrail, et quand une nouvelle larme perla sur ma joue alors que j’embrassai longuement son épaule, nos deux corps nus allongés l’un contre l’autre au milieu de la tour d’astronomie. 

-       Tu dois me laisser partir maintenant, chuchotai-je douloureusement. 

Et alors que je regardai une larme couler sur la joue de celle que je voulais tant protéger, de celle que je voulais tant préserver, je constatai qu’en effet, je le regrettai. Je regrettai tout. Je regrettai chaque fois que je l’avais regardée. Chaque fois que je lui avais parlé. Chaque fois que je l’avais touchée. Chaque fois que je l’avais embrassée. Parce que maintenant, je la laissais. Maintenant, je l’abandonnais. Et elle aussi, de bien des façons, je la détruisais. 


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