Les yeux verts

Chapitre 1 : Les yeux verts

Chapitre final

4087 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 21/12/2024 14:25

Note de l'auteur : Cette histoire poursuit les aventures du clan de la Manticore. Il n'est pas indispensable de lire le premier volet "Action ou vérité" pour comprendre cette histoire, bien que vous puissiez le faire si vous le souhaitez. L'essentiel à savoir : "Action ou vérité", raconte comment, lors d'une soirée festive bien arrosée, les anciens élèves de Gryffondor et de Serpentard, dans un élan de réconciliation, avaient décidé d'enterrer la hache de la guerre et de créer le clan unificateur de la Manticore et puis quelque temps plus tard avaient débusqué Professeur Rogue, qui se cachait chez les Moldus.

 

***

 

Harry s'éveilla le matin radieux de décembre, plein d'entrain et de bonne humeur. Il avait bien dormi, confortablement installé dans son lit, dans sa chambre, dans sa maison du square Grimmaurd. Pas de réveil en fanfare au potron-minet par des cris stridents à vous faire perforer les tympans du sergent Auror responsable des stagiaires.

Il était en vacances de Noël ! Et oui, Potter, même après de nombreuses années dans le monde magique, avait encore du mal à passer de Noël à Yule, la fête célébrée par les sorciers.

Bien que réalisant avec bonne volonté tous les rituels magiques prévus durant cette période : allumer une nouvelle bûche dans la cheminée, offrir des fruits secs et des gâteaux aux âmes des ancêtres, invoquer la magie pour bénir la nouvelle année, - le souvenir des Noëls de son enfance brillait toujours au fond de son cœur. Même si, à l'époque, il n'apercevait le sapin et les cadeaux que par l'entrebâillement de la porte du salon des Dursley.

Pour couronner son bonheur, en guise de cerise sur le gâteau, Harry bénéficiait d'un congé supplémentaire de deux jours. Avant tous ses camarades de formation, en récompense de sa brillante performance lors de la dernière opération de maintien de l'ordre à laquelle les stagiaires avaient participé.

Et il avait bien l'intention d'en profiter pleinement !

 

La veille, Kreattur installa l’arbre de noël dans la salle de réception de la maison des Black et Harry avec un immense plaisir l'orna des merveilleuses décorations magiques dénichées dans le grenier.

Seul ombre au tableau, l'unique cuillère de fiel dans le tonneau de miel, c'était le fait que son elfe de maison, le dévoué Kreattur, s'obstinait à ne servir pour le petit déjeuner que ce qu'il jugeait bon pour la santé de son maître adoré : flocons d'avoine cuits à l'eau, œuf à la coque, jus de citrouille et thé au lait. Rien ni personne ne parvenait à le faire changer d’avis. Et obtenir une tasse de café relevait du miracle plutôt que de la magie.

 

Le stagiaire Auror Potter se leva rapidement, s'habilla en quarante-cinq secondes, comme d'habitude à la caserne. Il se rafraîchit sommairement en passant un peu d'eau sur le visage, se coiffa avec les doigts et, considérant les préparatifs suffisants, descendit au salon bleu pour se soumettre à la torture que Kreattur appelait pompeusement le petit déjeuner du maître de la noble maison Black.

Comme prévu, sur la table recouverte d'une nappe blanche en dentelle, à côté d'une serviette de table impeccable, se trouvait une assiette en porcelaine fine aux armoiries des Black remplie d'une masse grisâtre. Tout près trônaient un œuf dans un coquetier en argent et un verre à pieds contenant un liquide orange.

Harry avait abandonné depuis longtemps les efforts totalement inutiles, pour obtenir de son elfe le droit de prendre les repas dans la cuisine et de ne pas manger de la bouillie. Cependant, il tenta pour une dernière fois d'améliorer la qualité de son "pain quotidien" :

- Encore du jus de citrouille, constata Harry avec un soupir de dépit, pourquoi pas du jus d'orange pour changer ? Kreattur, tu sais qu’il est, également, très bon pour la santé et riche en vitamines !

- Le vieux Kreattur ne connaît rien aux perversions des Moldus, tels que ces vitamines ! Mais le fidèle Kreattur sait parfaitement ce que les nobles magiciens prennent au petit déjeuner ! Et ce n'est pas des vitamines, c'est du jus de citrouille !

 

Alors que Harry, résigné, s'apprêtait à s’attabler pour déjeuner, une chose incroyable et même impossible se produisit : quelqu'un frappa à la porte. Quelqu'un frappa à la porte d'entrée de la noble demeure des Black ! Quelqu'un frappa à la porte d'entrée de la noble demeure des Black, protégée par Fidelitas et invisible aux yeux de tous, sauf des amis proches de Potter. Mais ses amis n'avaient nul besoin d'attendre sur le seuil, car ils pouvaient entrer par le réseau des cheminées ou, en cas d'urgence, transplaner directement dans le salon, même si cela allait à l'encontre de l'étiquette sorcière.

 

Potter, tout en se promettant de vérifier les sortilèges de protection sur sa maison, se précipita armé de sa baguette pour ouvrir, ainsi retardant lâchement le rendez-vous avec le détestable jus de citrouille. Derrière la porte, il ne vit personne, ni livreur s'étant trompé d'adresse, ni témoins de Jéhovah, ni même de facteur essayant de placer les calendriers kitsch décorés de chatons. Kreattur, qui le suivait de près, émit un son étouffé, ce qui amena Harry à baisser les yeux et à remarquer un grand panier, tout à fait ordinaire et recouvert d'un chiffon brodé, posé sur le perron.

 

Harry avait déjà reçu par le passé, outre le courrier et les présents de ses admirateurs, des beuglantes, des lettres de menaces voilées et des cadeaux assortis de maléfices. Il fit donc preuve de prudence en lévitant la corbeille sans la toucher jusqu'au centre du hall d'entrée. Il agita sa baguette à plusieurs reprises au-dessus de l'objet suspect, sans déceler la moindre trace de sortilège pernicieux, seulement un charme visant à maintenir une température agréable pour un être humain.

 

Kreattur tira doucement sur le pantalon de Harry :

- Maître, Kreattur entend un toc-toc-toc, comme un cœur qui bat, venant de là-dedans.


 Harry, fort de ses connaissances issues du cinéma moldu, en particulier de "Mission impossible", effectua un bond en arrière faisant s’écrouler au passage le portemanteau chargé des vêtements d’hiver et demanda :

- Tu es sûr que c'est toc-toc-toc que tu entends et non Tic-tac ?

 

Une pensée affolée tourbillonnait dans son esprit : "Une Bombe ! Un mangemort rescapé a fini par me déposer une bombe, puisque les tentatives magiques se sont avérées infructueuses !"

 

- Kreattur est vieux, mais pas sourd, il entend parfaitement des battements d’un cœur !

Après avoir prononcé ces mots, l'elfe claqua des doigts et la petite couverture colorée qui enveloppait le panier s'éleva dans les airs et plana sur la pile de vêtements sur le sol.

 

Harry et Kreattur s'approchèrent et se penchèrent avec curiosité au-dessus de la hotte pour s'apercevoir qu'elle ne contenait ni bombe, ni objet maléfique, ni chaton, ni chiot, mais un bébé qui dormait paisiblement, les poings fermés, comme un bienheureux.

 

- Un enfant, constata l'évidence Potter, que ce qu’on va en faire ? Moi je ne me suis jamais occupé de bébés aussi jeunes, ni, d'ailleurs, d'aucun bébé !

Harry toussota pour s’éclaircir la voix et continua sentencieusement :

- Kreattur, comme tu me l'avais mentionné auparavant et à plusieurs reprises, tu étais autrefois responsable de l'éducation des jeunes maîtres, Sirius et Regulus. Par conséquent, le soin de cet être, que la magie a mis entre nos mains, te revient de droit ! conclut-il avec emphase.

 

Kreattur pâlit, recula d'un pas et, avec un air de repentir exagéré, se tordit les oreilles qui retombaient tristement autour de son visage, puis avoua :

- Le maître, excellent et compatissant, n'a pas bien compris ! Le vieux Kreattur avait pris en charge l'instruction des jeunes maîtres quand ils étaient âgés de cinq ans. Avant cela, c'était Missi, la nounou, qui s'occupait d'eux ! Et le pauvre Kreattur ne sait vraiment pas comment faire !

Il écarta les bras d'un air faussement contrit en baissant la tête puis continua :

- Mais il peut suggérer au généreux Maître de faire appel à cette rousse traîtresse à son sang, qui a eu sept marmots !

Potter esquissa une grimace, comme s'il avait goûté un citron, et prononça avec fatalisme :

- Je t’avais interdit d'insulter mes amis... mais l'idée n'est pas mauvaise en soi, sauf que Molly et Arthur sont partis en Roumanie rendre visite à Charlie.

- L'indigne Kreattur a désobéi aux ordres de son naïf Maître ! Kreattur va se punir ! l’elfe poussa un hurlement aussi strident que la sirène des pompiers.

Puis il s'approcha du portemanteau écroulé et donna pompeusement trois coups de tête très légers contre la pile de vêtements sur le sol.

- Kreattur, arrête ton cirque, tu vas le réveiller ! hurla à son tour Harry.

Il lança un regard inquiet vers la corbeille et remarqua que le mouflet fronçait déjà les sourcils dans une expression qui n'augurait rien de bon pour son entourage en s'apprêtant de toute évidence à joindre sa voix au concert impromptu.

 

Potter réfléchit un instant, tout en imprimant un léger mouvement de balancement avec son pied au couffin improvisé, avant de faire un geste avec sa baguette magique pour invoquer le Patronus. Dès que le cerf spectral apparut dans la pièce, il lui ordonna :

" Va trouver Ginny Weasley et dit lui que j'ai besoin d'elle de toute urgence".

L’animal fantomatique inclina la tête ornée de magnifiques bois pour signifier son accord, puis s'éclipsa en galopant à travers les murs.

Harry l’accompagna de regard et déclara, bien qu'il eût l'impression que son raisonnement comportait quelque faille, en s'adressant à Kreattur, faute d'autre interlocuteur :

- Elle a six frères, elle doit bien savoir s’occuper d’un nourrisson !

Puis ajouta :

- Kreattur, rendons-nous au salon pour attendre Ginny. Prends le petit et suis-moi. Et par Merlin, fais très attention !

 

***

 

Ils venaient à peine de s'asseoir devant la cheminée quand les flammes virèrent au vert et que Ginny en émergea, vêtue de son uniforme de Quidditch et tenant le balai fermement dans sa main droite.

- Harry, j'espère que c'est réellement urgent, car tu m'as tiré des sélections pour place de l'attrapeur chez les Harpies...Et je risque de laisser passer ma chance !

 

Potter, légèrement surpris car il pensait que les sélections devaient avoir lieu en avril, désigna du doigt la corbeille et chuchota :

- Quelqu'un m'a déposé ça sur le seuil, et je ne comprends vraiment pas quoi faire... Toi qui as eu six frères, tu dois bien savoir comment s'y prendre...

 

Miss Weasley jeta un coup d'œil dans le panier, puis elle releva la tête et tourna un doigt sur sa tempe dans un geste emprunté aux Moldus pour signifier clairement "Tu es fou !".

- Je te rappelle que je suis la cadette et que c'étaient mes frères qui prenaient soin de moi et non l'inverse. Si c'est tout, je retourne aux sélections...

Puis elle fit guili-guili vague au bébé en disant "qu'il est mignon" avant de se diriger vers la cheminée. C'était ce moment précis que le marmouset choisit pour ouvrir ses yeux... Ses beaux yeux verts !

- Harry James Potter ! glapit Ginny. Il a tes yeux ! Tu m'as non seulement arraché à un événement très important pour moi, tu as voulu me charger d'un bâtard que tu m'as fait dans le dos ! Tu as de la chance que je sois extrêmement pressée, mais tu ne perds rien pour attendre ! Et prie Merlin pour qu’en plus de cette humiliation, je ne rate pas, par ta faute, les sélections !

- Il n'est pas à moi ! beugla à son tour Harry en s'adressant à la flamme verte qui engloutissait déjà son amie.

Puis il déclara avec désarroi :

- On peut croire que je suis le seul au monde à avoir les yeux verts.

 

Le gosse qui jusqu'alors avait supporté avec stoïcisme et en silence tout ce remue-ménage : les déplacements de pièce en pièce, les cris et les passes magiques sur le berceau, rompit soudain son mutisme d'abord par un vagissement mécontent, puis par un braillement semblable au chant des sirènes hors de l’eau.

Harry et Kreattur sursautèrent, échangèrent de regards et Potter brandit à nouveau sa baguette magique pour invoquer le Patronus, auquel, dans un cri, pour passer par-dessus l'onde sonore engendrée par l’enfant, il confia le message suivant :

" À tous les membres du clan de La Manticore, rassemblement immédiat, Square Grimmaurd ! S.O.S ! J'ai besoin de vous ! Rassemblement !" Puis il ajouta : "Trouve-les tous où qu'ils soient !"

 

***

Les sorciers affluent rapidement dans le salon de la noble maison des Black, formant un cercle protecteur autour de Potter et de son elfe, les baguettes pointées vers l'extérieur, prêts à faire face à toute menace potentielle.

Le groupe était hétéroclite, composé de magiciens aux tenues variées, allant de l'uniforme de Quidditch pour Flint et Dubois, aux pyjamas pour le couple Malefoy, en passant par le tailleur de femme d'affaires de Hermione, la robe rouge de stagiaire Auror de Ron, le survêtement de Parkinson et l’habit de noctambule pour Zabini.

Ils examinèrent la pièce avec soin, abaissèrent les baguettes et se mirent à parler en même temps :

 

- Que se passe-t-il ? Où est l'ennemi ?

 

Puis :

 

...- Tu m'as arraché des cours de la transfiguration de combat (Ron)

 

...- Tu nous as tirés du lit (couple Malefoy)

 

...- Nous étions à l'entraînement (Flint et Dubois)

 

...- Mes leçons d'autodéfense (Parkinson)

 

...- Ma réunion de travail au ministère (Hermione)

 

...- Je m'apprêtai à me coucher après une nuit mouvementée (Zabini)

 

Et tous ensemble, tel un chœur antique :

- Nous espérons réellement, et il vaudrait mieux pour toi, que ce ne soit pas pour rien !

- Et pourquoi laisses-tu ce bébé pleurer, ajouta Hermione.

Elle saisit fermement le petit, dont le visage était aussi écarlate que la robe de Ron, et le plaça résolument dans les bras de Harry.

Le bambin, posa la tête d'un geste confiant sur l'épaule de Potter et, comme par magie, se calma tout en continuant de hoqueter et de renifler par intermittence.

Harry caressa doucement le dos du gamin, dans un élan soudain d'affection. L'abandon total avec lequel ce petit être se blottit contre lui éveillait un sentiment de poignante tendresse.

- Voilà, quelqu’un l’a laissé sur le pas de ma porte et je n’ai jamais eu à faire avec des enfants si jeunes, expliqua-t-il.

Potter balaya du regard ses amis, qui ne semblaient guère intéressés par ce qu'il disait. Il sentait qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas, et était sur le point de comprendre qu’est-ce qui clochait, quand Astoria lui fit perdre le fil en gazouillant :

- Ses yeux verts sont magnifiques et il ressemble tellement à son papa ! Tu es vraiment chanceux, Harry !

- Il n’est pas de moi ! s'exclama Harry perdant à la fois patience et concentration.

Mais personne ne paraissait l’entendre.

 

- Le pauvre chérubin doit être affamé, il faudrait du lait, ajouta Hermione à la cacophonie ambiante.

Kreattur se dirigea vers la cuisine en maugréant :

- Pauvre, vieux Kreattur va chercher du lait pour le petit-maître !

Hermione l’arrêta :

- Attends ! Kreattur, pas de lait de vache, il ne le supportera pas. Il faut du lait maternel ou du lait de chèvre au pis-aller. Mais le mieux...

 Elle n'eut pas le temps d'achever sa phrase que Zabini avait déjà disparu dans un tourbillon de transplanage.

- Mais où va-t-il ? demanda-t-elle un brin perplexe.

- Chercher une chèvre, je suppose, il est si impulsif notre Blaise ! Aussitôt dit, aussitôt fait ! répondit Drago en étirant paresseusement les voyelles.

- J’étais sur le point de dire que le mieux c’est d’acheter le lait maternisé à la pharmacie…

Hermione parut quelque peu décontenancée, mais elle s’était promptement ressaisie.

- Harry, quel âge a-t-il ?

- Comment veux-tu que je le sache ? murmura Harry tout en continuant à bercer l'enfantelet.

Hermione leva les yeux au ciel d'un air de sainte martyre.

- Harry, tu es le mieux placé pour connaître l’âge de ton fils…

- Ce n’est pas…

- Il a tes yeux verts, mais bon, si tu préfères nier, je me débrouillerai sans ton aide !

Hermione haussa les épaules avec un air mi-consterné, mi-résigné et sortit, pour changer, par la grande porte, au lieu de transplaner.

 

***

 

Elle revint peu de temps après, les bras chargés : boîte de lait maternisé, eau minérale, biberon, couches et d'autres articles dont l'utilité était moins évidente.

 

Et l'action s'emballa, entraînant tout le monde dans son sillage. Kreattur prépara le biberon, Astoria nourrit le bébé, et Pancy lui changea la couche en faisant une remarque plutôt perfide :

- Mais tu as raison Harry. Ce n’est pas ton fils… C’est ta fille !

La fillette lança un "Boo!" en montrant du doigt Pancy, et une fleur rouge orna les cheveux de cette dernière, les ébouriffant quelque peu.

Pancy s'exclama joyeusement tout en ajustant sa coiffure :

- Elle a les mêmes yeux verts que toi, et la même magie également !


Harry lui arracha la gamine, inspira profondément pour commencer à réfuter, mais c'était à ce moment précis que Zabini réapparut, traînant derrière lui une créature blanche, cornue et bêlante.

Blaise déclara fièrement en montrant l’animal qu'il tenait fermement par une corne :

- Voilà, je l'ai trouvée ! Au départ, je voulais juste apporter le lait, mais je n'ai pas réussi à la traire, elle se débat comme une forcenée...

Zabini se frotta la fesse et continua :

- Donc je vous l'amène, vous y arriverez peut-être mieux !

Dubois écarquilla les yeux, porta les mains devant la bouche pour retenir un éclat de fou rire, puis, dès qu'il retrouva à peu près la capacité de s'exprimer, articula :

- Blaise, je sens que je vais te décevoir, mais ce n'est pas une chèvre...

- Mais qu'est-ce que c'est alors ? Elle bêle comme une chèvre. Elle a une fourrure blanche, des sabots, des cornes et même des pis d’une chèvre. Donc c'est une chèvre !

Tout en débitant cette tirade, Zabini souleva la queue de la malheureuse pour faire la démonstration des mamelles.

Flint, très pince-sans-rire compléta l'affirmation de son partenaire :

- La description est exacte : fourrure blanche, sabots, cornes et bêlement. Néanmoins, ce n'est pas une chèvre... C'est un bouc ! Et si tu avais essayé de le traire en tirant sur ce que tu nous as montré en soulevant sa queue, je ne suis guère étonné qu'il t'ait récompensé de tes efforts par un coup de cornes !

- Et heureusement qu'on ne t'a pas attendu pour nourrir cette môme, ajouta son grain de sel Pancy. Sinon la pauvre petite aux yeux verts, la fille de Potter, serait restée affamée...

- Mais enfin, vous allez m'écouter ? Ce n'est pas ma fille ! rugit Harry totalement exaspéré. Cela ne peut pas être mon enfant, bien que j'aurais aimé que ce soit le cas ! Pour la bonne raison, je suis gay et je n'ai jamais couché avec une femme !!!

- Si ce n'est pas ta fille, tu n'as qu'à la ramener d'où elle vient. Dans le panier, il y avait une carte de visite, proposa assez calmement Astoria en tendant un petit carton blanc comportant l’inscription :"Orphelinat Sainte-Barbe"

 

Ron, qui parut un instant se changer en statue de sel, sursauta et gueula en regardant son ami avec incrédulité et fureur :

- Tu es gay et tu continues de tourner autour de ma sœur, lui donnant des faux espoirs, mais je vais te...

 

Harry voulut répliquer, mais il resta muet, foudroyé par une soudaine révélation. Il comprit alors ce qui lui semblait si étrange depuis le début de la journée. Par exemple, cette conversation avec Ron, il l'avait déjà eue un an auparavant, quelques jours après avoir retrouvé le professeur Rogue qui se cachait chez les Moldus.

Il saisit ce fil conducteur et démêla tout l'écheveau des bizarreries et des incohérences qui ponctuèrent la folle matinée :

 

...Les coups frappés à la porte invisible de sa maison,

 

...Ginny qui passait la sélection chez les Harpies en plein mois de décembre au lieu d'avril,

 

...Drago et Astoria en pyjamas ! Les Malefoy qui ne sortiraient pas en tel tenu même si leur manoir était en feu,

 

 ...Hermione qui allait à la pharmacie sous la neige vêtue uniquement d'un petit tailleur,

 

...Blaise avec son bouc, bien que ce soit un comportement presque normal pour lui.

 

Potter chuchota d'abord puis éleva progressivement la voix :

- Tout ceci n'est pas réel ! Vous tous n'êtes pas réels !

Et le monde tournoya dans une sarabande effrénée autour de Harry, qui continuait de serrer la gosse dans ses bras. Une ronde infernale l'entoura : les membres de clan de la Manticore, Manticore elle-même, Kreattur, le bouc, le salon, la cheminée. Harry se débattit pris de vertige et...

 

***

 

 ... se réveilla sur le sol à côté de son lit, entortillé dans le drap à la manière d'un saucisson.

 

"Quel rêve étrange et si détaillé", songea Harry en se dégageant péniblement du drap et en s'asseyant.

 

- Kreattur ! appela-t-il.

L'elfe apparut presque immédiatement avec un discret "flop".

- Que désire le Maître du pauvre, vieux Kreattur ?

- Tu ne sais pas où est Severus ?

- Maître Severus déguste le petit déjeuner au salon bleu en attendant Maître Harry, rapporta cérémonieusement Kreattur.

 

Le stagiaire Auror Potter se leva rapidement, s'habilla en un rien de temps comme d'habitude à la caserne. Il se rafraîchit sommairement en passant un peu d'eau sur le visage, se coiffa avec les doigts et, considérant les préparatifs terminés, se dirigea vers la porte de sa chambre. Sur le seuil il remarqua un petit carton blanc qu'il ramassa machinalement. Il le retourna et lut avec l'étonnement croissant : Orphelinat Sainte-Barbe.

 

Harry dévala rapidement les marches, tenant fermement la carte de visite dans sa main, entra dans le salon, salua son partenaire en l'embrassant avant de dire :

- Severus, je t'invite après le déjeuner à faire une petite promenade jusqu'à l'Orphelinat Sainte-Barbe, qui n'est qu'à deux rues de chez nous.

- Et que ce que nous avons oublié dans cet orphelinat ? questionna Rogue en levant les yeux de la fraîche édition de la Gazette du sorcier.

- Une toute petite magicienne aux yeux verts ! Elle nous y attend !

- Potter, soupira Severus en repliant le journal, es-tu en train de me dire que tu avais eu une fille dont tu ne m'as jamais parlé, et que tu l’as, en plus, abandonné chez les moldus ?

- Non, pas du tout ! C'est une petite magicienne et elle a de magnifiques yeux verts, néanmoins ce n'est pas ma fille… Mais j'aimerais beaucoup qu'elle le devienne !

 

FIN


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