L'école des démons acte 1

Chapitre 35 : Rien ne s'arrange...

2391 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 18/04/2023 19:59

Elle a continué d'aider Hanakao en serrant les dents face à la douleur qu’elle ressent à chacun de ces mouvements. Se déplacer et tenir debout est un vrai supplice. La rousse continue de faire comme si ce n’était pas plus grave qu’un petit bleu sur la jambe. Aérin, oublie qu'elle a soumis son corps aux contraintes de sa magie. Qu’il en a subi les conséquences et qu’elle ne pourra pas toujours cacher les séquelles. Plus l’heure avance et plus ce faux sourire qu’elle affiche devient laid et douloureux.

Hana ne lui a plus rien dit, mais cela n’empêche pas la démone d’avoir les yeux sur la plus jeune. La faiblesse est considérée comme une humiliation. Les démons souffrent en silence, parce qu’ils savent que le moindre signe de faible attirera l’agressivité des autres.

Alors, elle continue d’aider la mère de son compagnon, même si sa vision se trouble, même si ce goût métallique devient de plus en plus fort, même si ces jambes tremblent et semblent prêtes à se dérober à tout instant. Concrètement, Aérin ne peut plus cacher son état quand ces organes tour à tour cessent leurs fonctions et que ces muscles se contractent de manière involontaire en d’innombrables crampes qu’elle ne peut plus ignorer.

Ces doigts se referment avec force sur le manche du ciseau qu’elle tient, l’autre main écrase les feuilles malades qu’elle vient d’enlever à la plante. Le sang s’écoule entre ces crocs qui grincent dans une plainte silencieuse. Elle recrache une gerbe de sang, tombant à genoux sur le sol.

Hanakao se rue vers elle pour la soutenir alors qu’elle voit la jeune démone convulser. Son mari est parti à son travail et son fils est absent. Que faire avec cette enfant mourante ?

La démone se revoit quelques années en arrière dans la même posture. Tenant son fils au visage défiguré dans ces bras, incertaine des soins à appliquer sur une pareille blessure qui lui aura couté la joue droite. Elle peut tout à fait comprendre l’inquiétude de Shichiro à l’égard de cette démone. Elle-même l’a déjà connue alors qu’elle appliquait les onguents et bandages sur le visage de son si jeune fils. Tout cela parce que la curiosité l’aura emportée sur la raison, qu’il aura franchi une barrière pourtant défendue de l’être, tout ça pour voir ces créatures qu’il aime tant !

 

— Courage Aérin, ça va passer, chuchote Hana, tout en caressant les cheveux de la démone.

 

Contrairement à ces derniers jours où les crises se faisaient de plus en plus rare et moins violente. Celle-ci est bien la plus difficile à supporter ! L’air ne rentre pas dans ces poumons en feu, son corps lui fait mal, elle a peur, vraiment peur. Elle va mourir, elle le sent, mais au moins ses frères et compagnons n’auront pas le malheur de la voir dans cet état.

Le réveil fut compliqué pour Azael, non pas qu’il se plaigne d’être dans les bras de Zya. C'est un plaisir de voir que la démone semble s’habituer à lui. Non, il va encore devoir supporter cette situation humiliante d’être inutile. Opéra va sans doute l’énerver en le prenant pour un poids mort. Il soupire baissant son visage vers celui de Zya qui vient de se réveiller et qui tourne au rouge une fois qu’elle s'aperçoit qu’elle est contre le bicolore. Réaction qui amuse Azael qui en profite pour se redresser tout en saluant l’albinos qui le rattrape, alors qu’il veut se lever.

 

— Tu as laissé tes béquilles dans ta chambre, je vais te les chercher, s'empresse l'albinos.

 

Il soupire en regardant Zya partir, quelle plaie d’être blessé ! Azael comprend la frustration qui touche Aérin depuis maintenant un peu plus de deux ans. Le démon remonte les yeux vers Zya qui entre en hâte dans sa chambre avec les béquilles encore plus rouge qu’à son réveil et semblant ne pas savoir où se cacher.

 

— Qu'y a-t-il ?

— Je viens de croiser Opéra et je suis en pyjama, tente-t-elle d’arranger un minimum ces cheveux tout en revenant vers le bicolore.

 

Azael la dévisage puis sourit plus sereinement.

 

— On est entre nous et Opéra est bien le dernier qui fera une remarque au fait qu’il te croise à la tombée du lit, ricane Azael.

— Mais ce n’est pas correct pour une dame, dit Zya.

 

Le démon sourit, elle lui parait plus naturelle, non ? Azael retourne dans sa chambre pour se changer. Opéra lui est réveillé depuis un moment, Degan dort encore et l’aîné n’a pas l’humeur pour l’aider à se lever.

Les démons suivent le félin qui leur a servi le déjeuner et la même rengaine reprend. Il y a des serviteurs chez Zya, mais ils ont pour ordre du père, chef de la famille, d’ignorer femme et fille qui font elle-même leurs corvées. Enfin, Zya le fait, sa mère estime que sa fille doit bien lui servir en attendant. Opéra fut un peu perdu devant l’assistance de l’albinos et finit par accepter son aide. Azael voudrait bien le faire, mais cette fois, il en a deux sur le dos alors, il reste assis dans le divan à se plaindre.

Degan est enfin venu les rejoindre et lui aussi aide au grand désarroi d’Opéra qui ne se sent plus utile dans ce manoir qui lui appartient plus qu’à eux. Aujourd’hui Sullivan est là et il vient de rejoindre les jeunes. Zya s’écrase totalement face au démon, se cachant derrière Azael.

 

— Oh, je m’attendais à voir Aérin, tu n’es pas de mon établissement toi ? Comment t'appelles-tu ?

— Z…Zya Divalis, balbutie la démone.

— Soit la bienvenue chez moi, jeune Divalis. Opéra m’a expliqué la situation, je ne suis absolument pas dérangé par votre présence, mais vos parents sont-ils au courant eux ?

— Oui, je l’ai fait hier en arrivant, répond Degan.

— Ils n’ont rien dit ? demande Azael.

— Bien sûr que si ! Ils étaient furieux que tu fasses appelle à Zya et non à eux. Ils veulent que je les informe de votre rétablissement.

— Où sont passés les trois autres ? Demande Sullivan.

— Chez Balam, monsieur, ces parents ont accepté d'assurer Aérin, explique, une nouvelle fois Degan.

— Je vois, il ne reste qu’une semaine avant la reprise des cours. Vous pouvez rester jusqu’à votre guérison complète Azael. S’il faut te couvrir le temps de ta rémission pour les cours, je le ferais également.

— C’est gentil monsieur, mais je suivrai les cours, réplique Azael.

— Et moi, je ne peux pas être couvert ? J’ai la flemmardise aiguë des cours, ricane Degan.

— Ça, je ne peux pas, dit le démon.

 

Azael soupire, Zya sourit et Opéra reste stoïque comme à son habitude. Zya ne pourra pas perdurer plus que la soirée. Par ailleurs, elle devra retourner chez elle pour ses propres cours.

 

Durant l’après-midi, Degan et Opéra se sont affrontés sur un jeu tandis que Azael et Zya eux parlent cours.

Le rouge s’énerve, il n’arrive pas à battre Opéra et après une énième défaite, Degan abandonne. Il s’allonge vaincu au sol, comme si c’était lui qui avait fourni les efforts de son personnage. Opéra assit en tailleurs le dévisage, ces oreilles se secouent de malice, puis son regard change alors qu’il est toujours sur celui de Degan qui serre les dents et gémit, ce qui attire l’attention des autres.

 

— Si ça te met dans un tel état de perdre, je te laisse gagner à la prochaine partie, dit Opéra.

— Ça n’a rien avoir avec ça, dit le démon.

— Degan, ça va ? demande son frère.

— Non, Aérin va mal… J’ai un mauvais pressentiment, stresse le jumeau.

 

Sa voix est étrange, comme s’il… Les larmes se mettent à couler sans qu’il puisse se retenir. Degan a beau essuyer ces yeux, cela ne change rien. Le rouge tremble et n’arrive pas à répondre aux autres qui ne comprennent pas ce qu’il lui prend. Il sent la détresse de sa sœur quand elle fait une crise, il sait quand elle ne se sent pas bien. Son cœur lui fait mal, il peine à respirer, Degan en est terrifié, c’est comme s’il venait de découvrir son corps sans vie. Le démon secoue sa tête, chassant cette affreuse image de son esprit. Non, elle est avec Shichiro, elle est saine et sauve, il le lui a dit hier !

Opéra tapote le haut de son dos dans une vaine tentative de réconfort, sans comprendre ce qu’il se passe chez le jumeau. Azael se tient en avant, ces jambes douloureuses, le garde sur place et Zya est venue s’asseoir à ces côtés, cherchant à le réconforter. Sullivan appelle actuellement la famille Balam suite aux dires du jeune.

Shichiro est devant le brun, il lui ouvre la voie. Il se retourne plusieurs fois sur son congénère qui a toujours le regard bas et qui ne semble pas plus décidé à le suivre bien qu’il le fasse.

 

— Tu as peur de te faire réprimander par Aérin que tu es aussi lent ? dit Shichiro.

— Je n’ai peur de rien et je suis juste derrière toi et si tu arrêtais de te retourner, nous irions plus vite, si tu es aussi pressé ! râle ce dernier.

— Ah ! Je commençais à m’inquiéter de ne pas t’avoir entendu bougonner jusqu’à maintenant, répond le jeune.

— C’est ça, rigole ! rétorque le brun, en détournant la tête.

 

Le duo arrive vers la demeure de Shichiro… Des plantes qui grimpent dans tous les sens et qui sortent de partout. Oui, c’est un peu l’idée qu’il se faisait de la maison de son camarade. Ils mettent pieds au sol et Shichiro entre dans la maison en se manifestant, surpris de ne pas voir sa mère près de ces plantes. Le blanc s’avance davantage, Callego, lui emboitant le pas.

 

— Maman, Aérin, où êtes-vous ?

 

Des pas hâtifs résonnent alors dans la pièce et la mère surgie de la serre, le regard inquiet.

 

— Mon chéri, ton camarade et toi, rester dans le salon ! Aérin a eu une vilaine crise, ton père scelle sa magie.

 

Elle disparaît aussi vite sous le regard inquiet des garçons qui ne peuvent qu’approcher, pour finalement se retourner l’un sur l’autre. Shichiro guide Callego dans le salon et lui sert une boisson dans un silence pesant.

 

— Elle n’avait pourtant pas l’air d’aller aussi mal ce matin, sanglote Shichiro.

— Excuse-moi, si j’avais au moins eu le cran de vous dire la vérité, tu n’aurais pas dû te déplacer pour moi, rage de plus belle, Callego.

— Aérin serait la première à nous dire de ne pas culpabiliser… J’étais près d’elle, j’aurais dû être plus attentif.

— Tu ne viens pas d'affirmer qu'il ne fallait pas culpabiliser ? reprend Callego.

 

Ils se regardent puis devient les yeux.

 

— Quelle est cette histoire de sceller sa magie ?

— Mon père va le tenter pour que ces éléments ne s'opposent plus.

— Ces parents auraient dû y penser, râle Callego.

— Ils n’ont peut-être pas le rang nécessaire pour le faire, mon père lui-même a eu dur à trouver une formule accessible à un rang 6.

 

Le blanc se tourne en direction de la serre. Pourquoi là-bas ? Dans quel état est Aérin ? Il soupire en balançant ces jambes. Aucun des deux n’a encore pris une gorgée de leur jus, malgré leur gorge sèche. Les jeunes ne font qu’attendre désespérément de savoir comment Aérin va s’en sortir.

Un téléphone vient à sonner, ils sortent le leur… Shichiro se retourne vers la table derrière eux et aperçoit l’appareil d’Aérin. Il se lève et va le chercher et panique en apercevant le numéro.

 

— Merde, c’est Azael ! Que lui dire ? panique Shichiro.

— Donne… dit Callego.

 

Shichiro le lui tend et le brun rappelle Azael qui décroche pensant avoir sa sœur. Callego fait semblant de rien, mais son cœur palpite et sa gorge se noue :

 

— Azael ?

— Callego ? C’est bien toi ? Es-tu avec Aérin et Shichiro ?

— Je suis chez lui, oui.

— Ta voix est bizarre, pourquoi ce n’est pas Aérin qui répond ?

— Azael… Elle a eu une crise, les parents de Shichiro s’occupent d’elle, mais nous n’en savons pas plus pour le moment.

— Cela explique la réaction de Degan, il a perdu conscience. Tiens-moi au courant dès que vous obtenez des nouvelles, bonne ou mauvaise ! impose Azael avant de raccrocher.

 

Le bicolore soupire en levant la tête au plafond. Après cette perte de contrôle, c’était trop beau pour qu’elle soit sans séquelles plus graves. Opéra a emmené Degan dans sa chambre. Ça aussi, c'est une première, Degan qui s’évanouit après une crise de panique. Il le sent vraiment mal cette fois-ci, il serre ces poings, c’est sa faute ! Il n’est même pas capable de protéger ses cadets !

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