Demi-sang.

Chapitre 2 : Initiation.

2793 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 21/02/2022 13:53

Les bruits de pas qui résonne dans la pièce la réveille en sursaut. Elle se redresse tout en se frottant les yeux, alors que sa couverture lui retombe sur les jambes. Elle a mal partout, mais elle ne s’en plaindra pas. Elle fait le point et vient à sauter en apercevant le démon et les murs recouvert de racines autour d’elle… Ah oui, c’est vrai.

 

Shichiro l’a entendue bouger et il se retourne de ce fait sur la dragonne. Il s’en rapproche et la salue tout en venant glisser ces bras sous elle. Ce qui lui vaut un coup de pied soudain en plein visage, qui lui font également reprendre d’un coup ces distances alors qu’il regarde la demi–sang penaud. Celle–ci se rétractant, le regard mauvais.

 

–Que faites–vous ? S’énerve la jeune.

–Je voulais t’emmener à la salle de bain, lui répond le démon confus en se massant la joue.

–Vous ne saviez pas me prévenir ? Je n’ai qu’une jambe de cassée !

–Je pensais que tu aurais tout de suite envie de te laver, je pourrais refaire tes pansements aussi, rajoute Shichiro.

 

Kikai le regard agressivement. Elle se tend alors qu’il se penche sur elle pour la soulevée. La dragonne l’attrape cette fois en panique et s’agrippe à son coup, comme si sa vie en dépendait ! Elle en rougit tout autant gênée, que vexée.

 

–Ne t’en fais pas, je ne fais que te déposer.

–J’espère bien ! Réplique sèchement la demi-sang.

–Tu as un sacré caractère, rie–t–il doucement.

–Je suis une Bahamut, rétorque alors Kikai.

–C’est vrai. Tu ne te sens pas trop dépaysée ? Ce que tu as mangé hier ne te rend pas malade ?

–Je n’en ai pas l’impression et je n’ai de toute façon pas le choix, ronchonne la violette.

–Je ne veux pas te brusquer, mais j’aimerais quand même savoir la raison de ta venue dans notre monde ? Tente alors Shichiro.

 

Elle fronce les sourcils, toujours accrochée à son cou et le visage bas. Il la pose sur le bord de la baignoire et lui sort de quoi se laver et s’essuyer. Baignoire qu’elle regarde avec étonnement, bien qu’en fait non, elle est juste proportionnée à la taille du démon. Elle regarde le shampoing qu’il vient de poser le prend en main et lit la marque.

–Vous utilisez un shampoing de fille ? En rie-t-elle.

–J’aime bien l’odeur, il me rappelle une certaine personne, répond-il simplement.

 

Il quitte la pièce en fermant la porte derrière lui et s’immobilise ensuite en réalisant qu’elle vient de lire du démonique ! Son père a certainement dû le lui apprendre.

 

Elle attend quelques instants et s’assure de l’entendre s’éloigner. Elle soupire évacuant un peu de son stress en se frottant les bras de nervosité. Il a l’air plutôt sympa pour un démon. Il lui rappelle un peu son père de par sa taille et sa carrure. Son père n’avait pas une tel tignasse par contre et il avait une voix plus rude que celle du démon.

 

Elle inspire tout en se glissant dans l’eau avec précaution pour ne pas glisser et se noyer inutilement dans une baignoire de géant. Elle s’allonge au fond du bac, seule son visage sort de l’eau chaude. L’eau est à une température agréable, pourtant elle frissonne de mal-être.

 

"Nous devions rester ensembles pour toujours.

Que tu serais toujours à mes côtés.

Puis, tu disparais…"

 

Elle sert les dents et ferme les yeux, s’interdisant de pleurer, tout en serrant son bras de l’autre main. Tout est de sa faute ! Si seulement elle était une vrai Bahamut !

 

Elle se lave pour chasser sa tristesse et penser à autre choses. Elle se hisse jusque dans le couloir et descend les marches à sa façon. C'est–à–dire en se trainant sur ces fesses et se hisse jusqu’au fauteuil. Elle entend alors frapper à la porte, elle appelle pour vérifier après Balam, mais il ne semble pas présent. Elle regarde discrètement qui est là et reconnaît tout de suite Sullivan. Elle lui crie alors qu’elle arrive et celui-ci entre de cette faite, pour qu’elle ne tente pas de venir lui ouvrir.

 

Le seigneur démon l’aide à rejoindre sa place et s’assoit face à elle. Il est grand, mais a l’inverse de son père et Balam, il est fin comme un spaghetti. Il lui tend alors plusieurs photos de lui, d’un démon avec des oreilles de chat et un garçon aux cheveux bleu. Elle remonte les yeux vers le vieil homme sans trop comprendre.

 

–Il est mignon n’est-ce pas ? C’est mon petit-fils chéri, Iruma, tu seras dans sa classe, vous vous trouverez peut-être des points communs, lui dit-il en lui faisant un clin d’œil.

–Vous avez décidé de ce qu’il va advenir de moi ? Demande alors kai.

–Oui. Rien de mieux pour cette surveillance obligatoire que de te confier à un professeur de confiance. Il viendra après sa journée de cours, te voir, l’en informe Sullivan.

–D’accord… Mais pour suivre les cours, je vais faire comment ? Je sais parler votre langue, mais le lire ce n’est pas trop ça.

–Balam s’en chargera ne t’en fais pas. Petit conseil, évite de dire aux autres démons que tu possèdes du sang humain en toi.

 

Où est passé l’aura pesante qu’il émanait hier ? On dirait un autre démon. Enfin, elle sourit face à l’affection qu’il semble manifester pour son petit-fils, alors qu’il lui a sorti plusieurs albums photos. Son père n’était peut-être pas une exception…

 

La porte s’ouvre sur le blanc qui rentre sans être surpris de voir le directeur qu’il salue tout en donnant ces béquilles à la demi–sang.

 

–Ça va, je n’ai pas été trop long ? Lui demande le géant.

–Non, Monsieur Sullivan m’a tenue compagnie, lui répond Kikai sur un ton moins agressif.

 

La méfiance de Kikai c’est atténué depuis la veille. Shichiro le ressent, elle est moins mordante dans ces paroles et sa voix. Cela le rassure, il avait peur qu’elle ait trop peur de lui et qu’elle n’arrive pas à se faire à sa présence et n’en vienne à devoir la confier à un autre démon. Lui qui se fait un plaisir d’avoir une moitié d’humaine à observer !

 

La demi-sang est quelque peu perdue, mais elle n’a pas le choix que de se plier aux contraintes de ce monde. Sullivan échange quelques mots avec le professeur et s’en va. Shichiro revient vers la démone qu’il observe un instant avant de s’asseoir à ces côtés, tout en lui présentant son plat. Il retire alors la partie amovible de son masque pour manger, ce qui surprend la dragonne en apercevant sa joue à vif.

 

–Je la cache habituellement, mais comme je t’ai mise à nue hier. Je te dois au moins ça.

–Vous n’êtes pas obligé. *A nue… Je préférais oublier ce détail. *

–Tu es gentille. Kikai, maintenant que tu as l’air plus docile. Est–ce que je peux te poser des questions ?

–Oui. *Docile ? *

–Ta mère était donc une humaine ?

–Oui.

–Tu n’as jamais ressenti l’envie de la dévorée ?

 

Elle penche la tête sur le côté en clignant des yeux.

 

–Non. C’était ma mère, en est-elle étonnée.

–Et ton père ? Il n’avait pas de problème à côtoyer les humains ? Continue-t-il.

–Non. Les sentiments passent au-dessus de l’envie de prédation, lui explique Kikai.

–Ton père t’a appris quoi sur notre monde ?

–Votre langue… Votre hiérarchie… En gros.

–C’est déjà bien. Je crée des livres éducatifs, je t'enseignerais tout ce qu’il faut.

–Je ne sais pas lire, grimace la dragonne.

–Tu as su lire ce qui était écrit sur le flacon tout à l’heure ?

–J’ai reconnu un mot, ça ne veut pas dire que je sais lire votre langue.

 

Elle remonte les yeux vers le géant puis les baisses. Elle n’avait pas regardé sa cicatrice. Qu’a–t–il eu ?

 

–D’autres démons ne toléraient pas l’union de mes parents et encore moins l’existence d’une bâtarde.

–Tu es métisse, pas bâtarde, la reprend Shichiro.

–Peu importe. Ça ne changeait rien à leurs yeux. Ma mère est morte peu de temps après ma naissance. Mon père a repoussé les démons qui nous attaquaient, jusqu’au jour où il ne l’a plus su. Et voilà, ce que je gagne… Soupire-t-elle.

 

Elle avait 2 ans quand sa mère est morte. Elle a du mal à se rappeler d’elle, mais dès qu'elle y pense, elle a toujours ce visage radieux qui lui sourit, comme souvenir. Son père lui apprenait tout et il l'a initié aux arts martiaux. Il aimait lui dire qu’elle était sa fierté. Elle a le visage assombrit. Shichiro se penche pour poser sa main sur sa tête et lui ébouriffe les cheveux, ce qui sur le coup, la surprend. Son père faisait pareil quand elle était maussade. Elle inspire lentement ravalant sa peine, préférant afficher ce regard coléreux.

 

–Et le reste de ta famille ? Lui demande Shichiro.

–Je suis née avec une aile atrophiée, ils ne m’ont jamais regardée.

–Je vais veiller sur toi, n’aie crainte, lui sourit l’adulte.

–Je me demande pourquoi mon père est parti de ce monde, réalise Kai.

–Il a sans doute préféré vivre parmi les humains quand il nous a été interdit d’aller d’un monde à l’autre, suppose Shichiro.

–Lorsque je vous entends parler, j’ai l’impression que mon père semblait vieux ?

 

Elle regarde le géant. Sullivan a dit qu’il était plus vieux que Shichiro. Il ne parait pas si jeune par rapport à son père, pourtant ?

 

–Les démons ont une longue espérance de vie, lui explique–t–il.

 

Elle se recroqueville… Pourquoi il lui flatte la tête comme si elle était un chien ?

 

Shichiro regarde dans le vide. Il envierait presque Fatak. Heureusement que son apparence est plus proche des démons, parce que son odeur s'avère franchement attirante. Elle parait plus calme que la veille et moins belliqueuse.

 

–Tu n’as plus l’air de me détester, tente le blanc.

–Pardon. Je ne vous déteste pas, lui dit-elle.

–J’ai l’habitude de faire peur au premier abord, lui répond-il tout en se grattant la joue.

–Juste au premier abord, lui sourit-elle gentiment.

 

Il se sent rassuré de voir cette expression sur son visage. Au moins elle n’a pas peur de lui. Le repas de fini, il lui propose de commencer l’apprentissage. Les élèves vont bientôt passer les examens trimestriels, il se doute que Sullivan le lui fera passer et rejoindre la classe à ce moment-là. Il commence par lui apprendre l’alphabet et les chiffres démoniques dans un premier temps. Elle est concentrée, petite, elle adorait quand son père lui parlait du monde des démons. Ce n’est pas si compliqué de comprendre et le démon explique bien… Pourquoi est-ce qu’il continue de la cajolée comme si elle était un animal ? On dirait qu’il fait ça par réflexe, mais elle a vraiment l’impression d’être un caniche ! Elle ne peut pas voir tout son visage, mais son expression ne cache en rien sa joie à lui enseigner ses matières.

 

La journée s’écoule. Elle avait presque oublié le fameux professeur qui doit passer la voir. Plongée dans sa lecture. Elle vient à sursauter alors que l’on frappe à la porte faisant également sursauter Shichiro qui ne s’y attendait pas.

 

Il se lève pour aller ouvrir. Elle observe le démon qui vient à entrer dans la demeure. Il y en a donc de taille normale ! Il n’a pas l’air plaisant se mec... Il est sombre, autant par ses vêtements que son expression. Kikai se dresse sur sa béquille, elle se penche pour le saluer… Est–ce que Les démons font ça ? Elle remonte ses yeux vers le prof qui la regarde froidement.

 

–Voici Callego Nebarius, il sera ton professeur principal, lui explique Shichiro.

–Enchanté monsieur Nebarius… Je suppose.

 

Il lève un sourcil quant à sa dernière réplique.

 

Kikai le scrute un instant… Ah d’accord ! C’est son humeur normale, c’est juste un démon renfrogné de nature.

 

–J’ai entendu dire que tu étais blessé, mais je ne m’attendais pas à ce que tu le sois autant. Je pensais te faire passer le rituel d’invocation de familier.

–Je suis blessé, pas à court de magie, faire venir un familier ne doit pas être éprouvant ? Se pose-t-elle la question à elle-même.

 

Le démon remonte les yeux vers le géant qui hausse les épaules en réponse. Soit, si elle veut quand même le tenter. Il est vrai que le rituel n’est pas dangereux en soi. Il y a de la place pour tracé le cercle, que les démons préparent. Callego explique alors le rituel à Kikai, lui prêtant son propre sceau ou elle doit juste rajouter un cercle de sang par–dessus. Elle remonte les yeux vers Shichiro qu'elle sent suspicieux. L’invocation se déclenche et une fumée jaillit pour laisser apparaître un petit reptile semblable à un gecko à crête, mais pleins d’épines de couleur rouge et brun avec des ailes minuscules.

 

–Un gecko ? Les Bahamut n’ont pas une wyverne habituellement, se tourne-t-il vers Callego.

–Il me semble. T’es vraiment une Bahamut, toi ?

 

Elle regarde alors Shichiro ennuyée, elle a raté son teste ? C’est parce qu’elle est à demi–humaine ?

 

–J’ai pris la magie de ma mère, c’est peut-être pour cela…

–De quelle famille vient-elle ? Lui demande le brun.

–Je n'aie jamais demandé à mon père, répond-elle en essayant d’être le plus convaincante possible.

 

Il tique, montant les yeux vers Balam qui lui sourit simplement. Il salue la demi-sang, Balam le raccompagnant sur le pas de la porte discutant tout en se tournant plusieurs fois sur elle. Il est assurément froid ce démon ou est–ce Shichiro et Sullivan qui paraissent sympas ?

 

La soirée s’avance. Elle est épuisée. Elle a absolument tenu à traduire un maximum de mot pour réussir à lire les livres que Shichiro dessine. Pendant qu’il cuisine, elle est devenue le professeur. Elle lui parle du monde des humains et de comment eux voient les démons. Ils mangent et comme la vielle reste dans le canapé pour passer sa nuit.

 

Bien que la fatigue soit présente, elle n’arrive cependant pas à trouver le repos. Elle est allongée dans le divan et regarde le plafond. Elle respire lentement serrant les dents de frustration. Elle ne peut pas se plaindre de sa situation, mais elle a l’impression que la vie lui demande de mettre un trait sur son passé.

 

Elle a peur… Peur d’oublié leurs visages, ce qu’ils étaient. De son ancienne vie qu’elle ne regrette que pour sa fin. Elle pince sa lèvre, elle refuse de laisser sa peine l’emporter, elle refuse de s’en vouloir, de lui en vouloir ! Elle n’a pas le droit d’être triste. Si elle n’avait pas été si faible, si têtue… Jamais elle n’aurait dû faire ce choix.


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