Livre VII Ce qu'il advint du royaume de Logres

Chapitre 5 : Que la joie demeure

Chapitre final

8115 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 24/02/2020 20:14

À Kaamelott, le cor sonne. Guenièvre monte à la tour.

GUENIÈVRE – Qu’est-ce qui se passe ?

KAY – Là-bas Sire, un groupe important approche. Ils ont des cavaliers.

GUENIÈVRE – Avez-vous demandé une confirmation au Loin-voyant ?

LOIN-VOYANT, monte à la tour – Je suis là ma Reine.

GUENIÈVRE – Et bien alors que vois-tu ?

LOIN-VOYANT – C’est une procession. Les cavaliers sont menés par un homme et suivit par des paysans.

CLAIR-VOYANT – Tu oublies de mentionner que l’un d’eux apporte Excalibur et qu’un autre partage sa selle avec un fantôme.

GUENIÈVRE – Excalibur ? Qui a l’épée ?

LOIN-VOYANT – C’est Galahad ma Reine, et les cavaliers sont les membres de la Garde Royale.

Guenièvre explose de joie.


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Dans la procession qui approche Kaamelott.

SAGAMORA – Vous ne pensez pas qu’ils sont capables de nous attaquer si on arrive comme ça ?

GALAHAD – Ma mère pensera à consulter le Long-voyant ou le Clair-voyant.

ARTHUR – Pourquoi moi j’en avais pas des comme eux ?

EURYDICE, semblant s’adresser à Galahad – Tu savais que leur parents étaient de simples paysans de Carmélide et que c’est à l’occasion de l’assaut pour reconquérir Kaamelott qu’on s’est rendu compte de leur don.

GALAHAD – Ils étaient extra-ordinaires et ils ne s’en étaient jamais rendu compte.

UTHER – On vient vers nous. Deux cavaliers.

EURYDICE – Celui de droite c’est Fakir.

GALAHAD – Et l’autre c’est ma mère.

Eurydice se retourne pour constater que sa selle est vide.

GUENIÈVRE – Galahad ! Tu as réussi ?

Pour toute réponse Galahad sort Excalibur. Fakir bondit à terre pour s’agenouiller. Guenièvre s’approche pour lui poser une main sur la joue.

GUENIÈVRE – Je suis fière de toi.

GALAHAD – Est-ce qu’on pourra reparler de ça quand j’aurais vraiment commencé à être Roi. D’ailleurs maman, je pensais … est-ce que ça te dérangerait de rester Reine un petit peu, pour me seconder.

GUENIÈVRE – Mais pas du tout. Tu pourras me poser toutes les questions que tu veux.

FAKIR – Je savais que tu y arriverais. Ça ne pouvait être personne d’autre que toi. Allez venez on va fêter ça en grande pompe !


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Quelques jours plus tard, dans un couloir.

ARTHUR – Alors comme ça, ça y est. Le petit est Roi.

EURYDICE – Oui enfin pour l’instant Guenièvre l’aide beaucoup. Il peut apprendre à son rythme.

ARTHUR – Il sera bon.

EURYDICE – C’est une affirmation ou une prière ?

ARTHUR – Tu ne me posais jamais ce genre de questions avant.

EURYDICE – Parce que j’avais les réponses sans demander. Maintenant ce qui se passe dans ta tête, je n’en sais plus rien. Je suis réduite, comme les autres, à deviner.

ARTHUR – Et pour ça alors ? Qu’est-ce que tu devines ?

EURYDICE – Je dirais que tu as cette croyance que parce qu’il est à la fois ton fils et celui de Lancelot, il sera forcément un bon Roi.

ARTHUR – Comme quoi, tu n’as même pas besoin d’avoir accès à mes pensées.

Guenièvre apparaît au détour d’un couloir. Arthur glapit et disparaît.

EURYDICE, mine de rien – Tiens Guenièvre, comment vas-tu ?

GUENIÈVRE, perplexe – Ça va. Un instant j’ai cru que tu étais accompagnée …

EURYDICE – Ah oui ? Par qui ?

GUENIÈVRE – C’était … mais ça n’a pas d’importance. Tu viens avec moi, j’aimerais que l’on parle de la formation de nos soldats et de l’éducation du peuple.

Elle file. Eurydice lui lance un regard intrigué, regarde au ciel plus la suit.


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Salle de la Table Ronde, Galahad siège à la place du Roi, Guenièvre à sa droite.

GUENIÈVRE – Il faut vraiment réviser la façon dont on leur enseigne.

LÉODAGAN – C’est pas la faute de l’entraînement, c’est (montrant son crâne) là-haut que ça pédale dans la compote.

YVAIN, à Guenièvre – Excusez-moi mais je croyais que vous étiez là parce que vous étiez Reine mais maintenant qu’on a un Roi est-ce que vous ne devriez pas partir ?

GALAHAD – Non. Ma mère garde son statut de Reine, simplement maintenant il y a quelqu’un encore au dessus.

CALEOGRENANT – Ah bon ? C’est nouveau ça.

GALAHAD – Techniquement non, à l’époque d’Arthur la Reine avait déjà ce pouvoir.

GUENIÈVRE, surprise – On ne m’avait rien dit à moi.

LÉODAGAN – Il manquerait plus que ça.

GALAHAD – Je pense que le mieux c’est de tourner. Un jour le maître d’armes, un jour Léodagan, un autre Eurydice, Perceval, Venec pourquoi pas.

GUENIÈVRE – C’est une très bonne idée ça !

LÉODAGAN – Il est hors de question que je donne des leçons à ces cornichons.

EURYDICE – Tu es ministre de la guerre. Est-ce que tu sais au moins ce que ça veut dire ? Normalement c’est toi qui t’en charge de la formation des soldats mais si tu préfères prendre ta retraite je n’y vois pas d’inconvénients. Je récupérerais ta place et tu verras que les choses avanceront autrement plus vite !

LÉODAGAN, se levant de sa chaise – C’est bon je vais le faire !

Galahad se tourne vers Eurydice et lui adresse un sourire en coin.

GALAHAD – Quant à l’éducation … Père Blaise. J’aimerais que tous les Chevaliers sachent lire et écrire et qu’il en aille de même pour les écuyers. Il faudrait aussi organiser des classes où tout un chacun pourrait venir.

PÈRE BLAISE – Excusez-moi Sire mais avec la chrétienté, l’écriture de la légende et tout ça, je suis pas mal occupé …

BOHORT – Sire ce serait pour moi un honneur que d’enseigner les rouages de la langue à tous ceux qui souhaiteraient les découvrir.

GALAHAD – Merci Bohort votre aide serait la bienvenue.

PERCEVAL, debout derrière le Roi – Moi je pourrais le faire aussi si vous voulez Sire.

GALAHAD – Vous avez appris à lire dernièrement ?

PERCEVAL – Bah non, pourquoi ?

GALAHAD – Alors il faudra d’abord que vous appreniez avec le Seigneur Bohort.

EURYDICE – Galahad, si tu as besoin de renfort, j’ai appris à tous nos frères et sœurs à lire et à écrire. Tu peux leur demander de l’aide.

GALAHAD – Merci Eurydice. Maintenant j’aimerais parler à Merlin.

La salle reste silencieuse jusqu’à ce qu’un chat sorte du sac de Karadoc.

KARADOC, vérifie son sac – Quoi ! Il m’a laissé que les quignons le matou. Sire il faut le punir. Y a tentative d’assassinat là.

GALAHAD – Seigneur Karadoc, les cuisines sont juste en dessous. Si vous sentez que ça commence à tourner vous êtes autorisés à descendre, d’accord ?

KARADOC – Merci Sire.

Karadoc se lève et sort.

GALAHAD – Perceval, une place vient de se libérer, prenez-la donc.

PERCEVAL – Je peux pas je vous protège.

EURYDICE – Ne t’inquiète pas, je m’en charge.

Perceval s’assoit. Merlin est installé au centre de la Table Ronde.

GALAHAD – Merlin … vous avez aidé mon père à de nombreuses reprises quand il n’était qu’un enfant, quand il n’était même pas Roi. Aujourd’hui c’est à mon tour de le demander. Merlin, j’ai besoin de vous. Accepteriez-vous de reprendre votre poste de druide à Kaamelott ?

Le chat fait des éclairs. Soudain Merlin, sous forme humaine, est assis en tailleur au milieu de la Table Ronde.

MERLIN – D’accord mais à une seule condition ! Plus d’Élias de Kelliwic’h à Kaamelott.

GUENIÈVRE – Accordé !

Elle monte sur la table pour l’enlacer.

GUENIÈVRE – Oh vous m’avez manqué. J’ai bien cru que vous resteriez sous cette forme … répugnante.

Merlin écarquille les yeux, repousse Guenièvre et expulse une énorme boule de poils.

MERLIN – Désolé mais quand je suis en chat, j’arrive pas à le faire ça, du coup quand je me retransforme …

EURYDICE – Heureusement que maintenant la Table Ronde est en pierre sinon je ne vous raconterais pas comment elle aurait gueulé la Dame du Lac.


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Salle du trône. Gauvain entre en fracas. Guednoc y exposait un problème de couleur de fleur.

GUEDNOC – Moi je veux bien faire de la même couleur mais bon après, c’est vrai qu’après on se lasse vite.

GAUVAIN – Sire ! J’ai commis un crime. Une faute impardonnable. Une erreur qui me rend indigne des honneurs de Chevalier.

GALAHAD – Guednoc pouvez-vous nous laisser s’il vous plaît ?

GUEDNOC – Et mes fleurs Sire ?

GALAHAD – Faites ce que vous voulez, je vous donne totale liberté et je vous nomme … Grand … Fleuriste de Kaamelott.

GUEDNOC – Sire ça me touche beaucoup merci.

Il sort.

GALAHAD – Que se passe-t-il Gauvain ?

GAUVAIN – Vous m’en voyez désolé de vous forcer ainsi à condamner votre propre cousin.

GUENIÈVRE – Allez-y on vous écoute.

GAUVAIN – Cinamia attend un bébé.

GUENIÈVRE – Oh félicitations. Enfin si c’est vous le père.

GAUVAIN – Bien sûr ma tante sinon je ne répondais pas d’un tel crime si haut et fort.

GALAHAD – C’est quoi le problème exactement ?

GAUVAIN – Cinamia n’est pas ma femme !

GALAHAD – Épousez-là.

GAUVAIN – Je ne peux pas Sire. Je suis déjà engagée à Dame Aélis depuis des années.

GUENIÈVRE – Et ça fait des années qu’elle s’est barrée votre femme.

GAUVAIN – Croyez-vous que quand vous êtes partie le Roi Arthur vous ait répudié ?

GALAHAD – Les circonstances n’étaient pas les mêmes. Aélis vous a abandonné pour de bon. Ce que je peux vous proposer c’est soit de considérer votre mariage avec Aélis comme caduc et de vous laisser épouser Cinamia, soit faire comme si de rien n’était et vous laisser avoir un enfant avec une femme qui n’est pas la vôtre.

GAUVAIN, après un long temps de réflexion – Je peux aller demander à Cinamia ?


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L’aube se lève. Eurydice est assise sur un créneau du rempart. Elle tient une fiole. Elle a les yeux fermés et respire profondément.

ARTHUR – Fais attention, si tu t’endors ça pourrait mal finir.

Eurydice se tourne et jette le contenu de la fiole sur Arthur qui lui éclabousse le visage.

ARTHUR – T’es cinglé ? Depuis quand on balance des trucs sur les gens comme ça ?

EURYDICE, va embrasser son père – Bonjour papa.

ARTHUR – C’est comme ça qu’on se dit bonjour maintenant ? Attends … pourquoi elle ne m’a pas traversé ta potion ?

EURYDICE – Parce qu’elle est spécialement conçue pour les fantômes.

ARTHUR – Pour quoi faire exactement ?

EURYDICE – Tu verras. Viens on va se promener.

ARTHUR, soupire – Pourquoi j’ai l’impression que c’est toujours toi qui a le dernier mot ?

EURYDICE – Parce que quand c’est toi, tu disparais.

ARTHUR, après un silence – Je peux pas.

EURYDICE – Quoi ?

ARTHUR – Je ne peux pas disparaître.

EURYDICE – Ça veut dire que là tu voulais disparaître ?

ARTHUR – Oui, non mais pour la blague c’est bon. On a un sujet plus important à traiter là …

EURYDICE – Tu as raison. Qu’est-ce que tu me caches ?

ARTHUR – Te cacher par rapport à quoi ?

EURYDICE – Guenièvre.

ARTHUR, fuyant – Je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler.

EURYDICE – Tu crois vraiment que tu peux berner quelqu’un avec la tronche que tu fais ? De toute façon cette fois-ci tu ne vas pas t’échapper.

ARTHUR – C’est ça la potion. C’est vraiment pas cool de faire ça à un mort.

EURYDICE – Je fais ce que je veux. Tu sais pourquoi ? Parce que tu es mon père et tu es en train d’essayer de me mentir.

ARTHUR – Pas du tout.

EURYDICE – Chaque fois que je vais la voir ou qu’on la croise tu t’enfuis. Tu ne demandes jamais de ses nouvelles. Tu as peur qu’elle puisse te voir ou quoi ?

ARTHUR – Je ne vois pas le rapport. Toi, tu me vois bien et je ne t’évite pas.

EURYDICE, se rapprochant – Alors tu vois que tu l’évites.

ARTHUR, recule jusqu’à être dos au mur – Ce n’est pas ce que …

EURYDICE – Non passer à travers des trucs tu ne peux plus le faire non plus. De quoi est-ce que tu as peur ?

Arthur évite Eurydice et s’avance au rempart pour regarder au loin.

ARTHUR – Je suis le Roi Arthur. Je n’ai pas peur.

EURYDICE – Mais oui bien sûr. Déjà de ton vivant je l’aurais pas gobé celle-là. Le Roi Arthur est mort alors de quoi peut bien avoir peur mon père, au point de fuir sa femme ? C’est seulement elle ou il y en a d’autres ?

ARTHUR – Juste … Guenièvre.

Un garde passe et salue Eurydice.

EURYDICE – Si ce n’est pas de la peur alors qu’est-ce que c’est ?

ARTHUR – J’en sais rien. C’est quand je l’entends, quand je la vois … ça me fait un truc … (Arthur fouille dans ses entrailles) … là.

Eurydice sourit et s’approche. Arthur est de dos.

EURYDICE, à l’oreille de son père – Moi je sais ce que tu as.

ARTHUR, se retourne, surpris – Quoi ? Tu bluffes.

EURYDICE – Non, parce que je te connais.

ARTHUR – C’est quoi ? (implorant) Qu’est-ce qui m’arrive ? Dis-moi !

EURYDICE – Est-ce que si je te le dis tu me promets qu’on ira la voir après ?

ARTHUR – Non, non ça va pas être possible.

EURYDICE – Dommage alors.

Elle fait semblant de s’en aller.

ARTHUR, appelle – Attends ! Si on le fait … tu ne lui dis rien sur moi. Tu fais comme avec tous les autres. Tu fais comme si je n’étais pas là. D’accord ?

EURYDICE – Je ne vais pas m’amuser à raconter partout que je vois le fantôme de mon père. Ça marche pour moi. Allez viens.

Eurydice avance. Arthur essaye de l’attraper par le bras mais sa main traverse. Cependant Eurydice s’arrête pour la regarder.

ARTHUR, lentement – Dis-moi.

Perceval sort et s’installe pour pisser.

PERCEVAL – Salut Eurydice.

EURYDICE – Ça va ?

PERCEVAL – Comme un coq avec des plumes. Tu sais qu’il te lâche pas ce fantôme.

EURYDICE – C’est peut-être l’inverse.

PERCEVAL, hésitant – C’est pas faux.

Il rentre. Arthur reporte son attention sur Eurydice.

EURYDICE – C’est de l’attraction. Tu la désires ta femme, physiquement.

ARTHUR, fait un pas en arrière – Mais non c’est absurde, en plus je suis mort et puis … c’est Guenièvre …

EURYDICE – Tu vois c’est pour ça que tu ne sais pas reconnaître ce que c’est.

ARTHUR – Désolé mais je suis assez grand pour savoir ce que c’est d’avoir envie de quelqu’un.

EURYDICE, marche le long des remparts – Donc tu devrais être assez grand pour savoir que l’amour c’est différent à chaque fois.

ARTHUR, la suit – Non mais tu ne comprends pas. C’est pas très gentil de dire ça mais Guenièvre elle me … elle m’a toujours plus ou moins …

EURYDICE – Repoussée ? Écœurée ?

ARTHUR – Oui enfin dis comme ça, ça fait … pas bien.

EURYDICE – Comme si les choses n’avaient pas changé entre temps. Finie la fille effarouchée tout droit sortie de Carmélide. Partie aussi la femme naïve et enfantine. Maintenant Guenièvre est une Reine qui en impose, avec de l’autorité, une femme forte et capable.

ARTHUR – Arrête.

EURYDICE – Alors oui tu as un penchant pour les latines mais ce sont surtout les femmes de caractère que tu choisis sinon tu aurais pu résister à Mevanwi. Et maintenant Guenièvre …

Arthur la dépasse et veut prendre la première porte qu’il oublie d’ouvrir et s’écrase le nez dessus. La porte s’ouvre révélant Guenièvre.

EURYDICE – Salut Guenièvre, comment ça va ?

Guenièvre ne la regarde pas, elle fixe Arthur.

GUENIÈVRE – Vous ? Depuis combien de temps …

EURYDICE – Il est revenu le jour de ses funérailles.

ARTHUR – Je suis désolé.

Guenièvre le prend dans ses bras. Eurydice laisse la chose durer jusqu’à ce que cela devienne gênant pour elle, elle rappelle alors sa présence par un raclement de gorge. Guenièvre lâche Arthur.

GUENIÈVRE – Pardon. C’est juste que tant de choses se sont passées depuis votre …

EURYDICE – Mort ? Ça fait bizarre au début mais on s’habitue.

ARTHUR – Oui. Eurydice me raconte tout. Et vous … vous avez l’air en forme …

GUENIÈVRE, examine sa robe – Qu’est-ce qu’il y a ? J’ai un pli de travers ?

ARTHUR – Non pourquoi ?

GUENIÈVRE – Je ne sais pas vous me regardiez … bizarrement.

Arthur se retourne et part.

ARTHUR, en passant à la hauteur d’Eurydice – Tu m’emmerdes.

Il disparaît.

EURYDICE – Tiens ? L’effet de la potion s’est déjà estompé.

GUENIÈVRE – Qu’est-ce qui lui prend ?

EURYDICE – C’est le pouvoir de disparition, ça le rend soupe au lait. Mais ne t’inquiète pas, il sait que la conversation n’est pas finie. Il va revenir … à un moment.

ARTHUR, apparaît, énervé – Non mais c’est vrai ça ! Pourquoi ça me prend maintenant ? Des années à tortiller du fion pour que ça se pointe enfin, mais trop tard.

GUENIÈVRE – Alors moi je ne comprends rien à ce qui se passe.

EURYDICE – Quand il aura fini il s’expliquera sûrement.

Arthur tourne en rond en marmonnant.

GUENIÈVRE, autoritaire – Vous allez m’expliquer ce qui se passe. Peut-être que je pourrais vous aider.

ARTHUR – Certainement pas si vous continuez à me parlez comme ça, ça me …

GUENIÈVRE – Qu’est-ce qu’il y a ? À peine mort vous avez déjà oublié ce que c’était d’avoir une femme ?

ARTHUR, s’approchant – Non malheureusement.

GUENIÈVRE – Dites-moi ce qui ne va pas, ça vous libérera et puis ça vous fera du bien.

ARTHUR – À moi non, je suis mort mais à vous peut-être.

GUENIÈVRE – Qu’est-ce que vous racontez là ?

ARTHUR, gêné – On n’a jamais … (Guenièvre est perplexe) … vous et moi on ne l’a jamais fait …

GUENIÈVRE, comprenant – Ah non jamais. Mais je ne vois pas ce que ça a à voir avec …

ARTHUR – C’est ma faute, j’aurais dû …

GUENIÈVRE – Arrêtez c’est pas uniquement vous. Vous y arriviez bien avec vos maîtresses, ça venait aussi de moi.

ARTHUR – Justement non, c’est ce dont je voulais parler. C’est dommage que je sois mort parce que maintenant …

GUENIÈVRE – Quoi ? Maintenant ? C’est facile de dire ça, vous êtes mort.

ARTHUR, s’approchant – Et vous vous êtes la Reine du royaume de Logres.

Arthur l’embrasse et disparaît. Guenièvre reste bouche bée. Eurydice regarde au loin.

EURYDICE – C’est l’heure.

Elle part précipitamment. Guenièvre regarde au loin. Un cavalier arrive.


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Dans la cour Galahad est là. Il attend.

EURYDICE – Qu’est-ce que tu fais là ?

GALAHAD – Comme toi je pense. J’attends l’arrivée de ce mystérieux cavalier solitaire.

Le cavalier arrive dans la cour, tout encapuchonné de noir.

GALAHAD – Bienvenue à Kaamelott voyageur. Qu’est-ce qui t’amène ici ?

Le cavalier démonte et pose un genou à terre.

CAVALIER – Je suis venu pour avouer un crime.

GALAHAD – Quel crime ?

CAVALIER – Le pire de tous.

EURYDICE – Ne fais pas ça.

Galahad assiste à la bataille de regard entre les deux.

GALAHAD – Bon je pense qu’on va aller dans la salle du trône. Ce sera plus simple. Suivez-moi.

Le cavalier et Eurydice lui emboîtent le pas au même moment. Ils marchent en silence jusqu’à la salle du trône.

GALAHAD, aux gardes – Merci messieurs, j’aurais assez d’Eurydice dans la pièce.

Les gardes sortent. Galahad s’assoit sur le trône et attend.

GALAHAD – Eurydice. Tu es Garde Royale. Tu es conseillère. Tu ne crois pas que ta place est à côté de moi ?

EURYDICE – Oui désolée, j’étais …

Elle prend place à côté de Roi. Le cavalier ôte son capuchon.

GALAHAD – Mordred ? Quelle surprise, tu es enfin revenu.

Galahad essaye de se lever mais Eurydice le retient.

EURYDICE – Si Mordred est vraiment prêt à se confesser, je pense qu’il vaudrait mieux l’entendre avant de … faire quoi que ce soit.

GALAHAD, suspicieux – Ça te va Mordred ?

MORDRED – Parfaitement Gal. De toute façon je serais très court.

EURYDICE – Tu es sûr d’avoir bien réfléchi à ça ?

GALAHAD – On ne vais pas tarder à le savoir.

MORDRED – J’ai tué notre père. Le Roi Arthur n’est pas mort de son rhume d’hiver, il est mort empoisonné. Pendant que j’y suis, j’ai aussi raccourci Anna de Tintagel, ma mère, et son mari, le Roi Loth.

Soudain Mordred prend une grande inspiration frissonnante comme s’il venait d’être plongé dans l’eau glacée.

MORDRED – Qu’est-ce que c’est que ça ?

EURYDICE – Notre père est content de te voir.

Eurydice voit Arthur tripoter Mordred sous toutes les coutures et s’extasier de sa croissance.

MORDRED, blanchi – Tu mens.

GALAHAD – Si j’étais toi je n’en serais pas si sûr. Perceval dit qu’Eurydice est accompagnée d’un fantôme et ma mère a souvent cru voir Arthur à côté d’elle.

EURYDICE – Comme presque personne ne peut le voir, il a moins de tenue.

ARTHUR – Hey ! Ça va oui. C’est pas parce que je suis une fois en habit de nuit que c’est la décadence.

EURYDICE – Je ne parle pas tant en terme de style que de comportement. Regarde-toi tu lui tires sur les joues comme une grand-mère.

Mordred se passe une main sur la joue.

ARTHUR – Qu’est-ce qu’on s’en fout puisqu’il le sent pas.

EURYDICE – C’est bien ce que je disais.

MORDRED -Arrête ça ! C’est pas drôle.

EURYDICE – Mais je ne joue pas.

Eurydice dégaine Excalibur à la ceinture de Galahad. L’épée émet une douce lumière.

EURYDICE – Papa, s’il te plaît.

ARTHUR – Tu m’utilises bien quand tu veux.

Excalibur s’enflamme quand Arthur prend lui aussi l’épée.

ARTHUR – Je pensais pas que ça marcherait.

GALAHAD – Impressionnant.

Mordred se jette à terre.

MORDRED – Je suis désolé papa. Je faisais des rêves. Ça m’a rendu fou. Je suis …

EURYDICE – … désolé. Ça va on a compris.

Elle remet Excalibur à sa place.

ARTHUR – Faut le comprendre aussi. Je n’ai pas été clair dans mes réponses quand il est venu. J’avais la tête farcie avec mon rhume.

EURYDICE – Ça ne va pas le faire revenir alors maintenant tu te lèves et tu attends le jugement du Roi.

GALAHAD – Mordred, pour réparer ton acte innommable de parricide, de régicide et d’homicide, je te condamne à devoir devenir le nouveau souverain de Tintagel.

MORDRED – Quoi ?

Eurydice soupire. Arthur rit.

GALAHAD – Oui je voulais t’imposer là-bas mais puisque tu me dis qu’Anna de Tintagel est ta mère, ça arrange tout.

EURYDICE – Sire … si les gens viennent à savoir ce qu’à fait Mordred, ils trouveront certainement la sentence un peu … faiblarde.

GALAHAD – Ne me donne pas du « Sire » comme ça. Et puis pourquoi est-ce que les gens sauraient quoi que ce soit. Il n’y a que nous quatre au courant. L’un est mort, l’autre est le principal concerné, moi je ne dirais rien. Et toi Eurydice ?

MORDRED – Eurydice est au courant depuis le début et elle n’a rien dit. Mais je suis d’accord avec elle, pour un crime comme le mien il n’y a que la mort.

ARTHUR – Oh ! Calmez-vous.

GALAHAD, se lève – Assez ! J’ai déjà perdu mon père pourquoi est-ce que je voudrais la mort de mon frère ? Alors écoute-moi bien Mordred : je te condamne à vivre, le plus longtemps possible et à œuvrer chaque jour pour réparer le mal que tu as fait au royaume.

Eurydice pose un genou à terre, une main sur le cœur. Mordred s’incline bien bas.

MORDRED – Notre père a eu raison de te choisir toi.

Arthur arbore un sourire de fierté.


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Dans la forêt les enfants sont en rond autour de Cinamia. Elle est adossée à un arbre et sue à grosses gouttes.

CINAMIA – Il faut aller chercher Gauvain.

NAZIM – Moi je bouge pas d’ici.

Belane se lève et part en courant.

CINAMIA – Il faut faire vite.

CORA – T’inquiète pas, Belane c’est la plus rapide de Bretagne.

FAKIR – À moins que son petit frère soit encore plus rapide.

LION – Dis pas ça, ça porte malheur.

JANE, douce – De quoi est-ce que tu as besoin ?

FILLE DU VANNEUR – Elle aurait surtout besoin qu’on aille chercher Merlin non ?

CINAMIA – Allez remplir tous les récipients que vous pourrez avec de l’eau. Pendant ce temps d’autres vont allumer un feu et les derniers cherchent des tissus propres.

Ils se répartissent les tâches à une vitesse fulgurante et se mettent en action avec une efficacité remarquable. Un quart d’heure après tout est prêt et Belane revient avec Gauvain.

GAUVAIN – Cinamia ! La douleur est-elle supportable ?

CORA – Papa … elle n’a même pas dit qu’elle avait mal.

CINAMIA – Tout va mieux maintenant que vous êtes près de moi.

GAUVAIN – Que puis-je faire pour vous servir ?

CINAMIA – Avez-vous assisté votre femme lors de son accouchement ?

GAUVAIN – Je suis au regret de vous dire que non. Elle avait appelé Merlin et m’a fait sortir de la pièce à mon plus grand dam.

NAZIM – C’est moi qui suis restée pour aider Merlin. On pourrait aller le chercher.

CINAMIA – Non c’est trop tard, je sens qu’il vient.

NAZIM – Merlin a dit que j’étais douée. Je pourrais peut-être le faire ?

FAKIR – Il habite à l’autre bout de la forêt. Le temps d’y aller une heure, pour le trouver avec de la chance il en faudra deux et pour revenir avec lui une heure et demi. Ça peut se …

CINAMIA – De toute façon on n’a pas le choix !

Les heures qui suivent sont éprouvantes. Gauvain est un soutient sans faille bien que dépassé à de nombreuses reprises. Les enfants restent organisés et se relayent pour toutes les tâches demandées par Cinamia ou Nazim. Après presque 3 heures un cri perce dans la forêt.

LES ENFANTS – Hourra !

CINAMIA – Comme il te ressemble.

GAUVAIN – Je lui trouvais plutôt des airs de nèfle.

Il se ravise en croisant le regard noir de Nazim.

GAUVAIN – Mais à mieux y regarder il est vrai qu’il me ressemble plus qu’à un fruit blet.

Nazim, Belane et Cora sont au dessus de lui et le regardent avec des yeux ronds.

NAZIM – Salut petit frère.

BELANE – Bienvenue dans la famille.

CORA – Il va s’appeler comment ?

GAUVAIN – Umar.

CINAMIA – Vous êtes sûr ?

GAUVAIN – Je sais que ça ne fait pas très breton mais si ça vous fait plaisir, je ne peux pas lutter.

CINAMIA – Merci, vous êtes mon prince.

Elle l’embrasse. Cora fait une mine dégoûtée.


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Eurydice se présente à la chambre de la Reine. Uther monte la garde.

UTHER – Tu ne peux pas entrer Eurydice .

EURYDICE – C’est dommage, quand on me dit quelque chose, ça me donne envie de faire exactement l’inverse.

UTHER – Sauf que cette fois-ci c’est un ordre de la Reine. Elle ne veut pas être dérangée.

EURYDICE – Et moi Guenièvre m’a dit qu’elle voulait être tenue immédiatement au courant si Unagi revenait.

UTHER – Unagi revient ?

EURYDICE – Je t’en parlerais quand j’aurais vu Guenièvre.

UTHER – Mais je ne sais pas si je peux …

EURYDICE, ouvrant la porte – Je vais me risquer quand même.

Elle entre. La chambre est vide. Elle entend du bruit dans la salle de bain, s’approche. Elle écoute un moment à la porte puis va griffonner un parchemin qu’elle laisse bien en vue. Eurydice ressort.

UTHER – C’était rapide.

EURYDICE, un peu à l’ouest – Très. Unagi est en chemin. Il sera là demain.

UTHER – Il revient tout seul ?

EURYDICE – Sakor revient par la terre.

Eurydice s’apprête à repartir puis se retourne.

EURYDICE – Tu ne laisses personne entrer, sous aucun prétexte.

UTHER, perplexe – D’accord.


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La nuit est tombée mais la quiétude règne au coin du feu. Cinamia se repose pendant que les enfants jouent à des jeux muets. Gauvain les observe en berçant son fils nouveau-né. Jane arrive alors en tenant un cheval par la bride. Ce dernier tire un chariot recouvert de couvertures. 3 mules, un poney, une jeune jument, 2 chiens et un pigeon l’ont suivi aussi.

JANE – Il est temps de rentrer à la maison. Il ne faudrait pas attraper froid.

Gauvain acquiesce et réveille doucement Cinamia. Fakir et Uther les aident à s’installer dans le chariot pendant que Nazim et Belane distribuent les couvertures. Sur le chemin du retour les mules portent deux à trois enfants chacune. Fakir porte elle-même Lion et Jane guide cet étrange cortège avec la même aisance qu’elle menait le cheval seul. Uther fredonne.

UTHER, chantant – Belle qui tient ma vie …

Les autres enfants reprennent avec lui. Quand ils passent les portes du château, ils chantent toujours.

DÉMETRA, inquiète – Mais qu’est-ce qui vous est arrivé ? Ça fait des heures que vous devriez être revenu.

GUENIÈVRE – C’est vrai qu’on commençait à se faire du mouron.

YVAIN – C’est elles qui m’ont forcé à venir. Moi je savais qu’il pouvait rien vous arriver. Fakir elle est trop forte.

FAKIR – C’est gentil papa mais c’est plutôt Nazim qui nous a tiré d’affaire cette fois.

DÉMETRA – Je savais qu’il vous était arrivé quelque chose !

GUENIÈVRE – Et tout le monde va bien ?

CINAMIA, depuis le chariot – C’est bon tout va bien Démetra.

DÉMETRA – Cinamia ? (s’approchant) C’est pas vrai ! Ne me dites pas que vous avez accouché en pleine forêt.

GAUVAIN – Tout s’est bien passé.

GUENIÈVRE – C’est vous qui avez accouché peut-être ?

GAUVAIN, pris de court – Euh … non.

CINAMIA – Gauvain a raison. Pour un accouchement, ça c’est bien passé.

YVAIN – Alors c’est quoi ?

GAUVAIN, fier – Un petit garçon. Umar.

GUENIÈVRE – Ça fait pas très breton.

NAZIM – Il ne fait pas très breton lui-même de toute façon.

UTHER, noble – Ce n’est pas sa tête qu’on reconnaît un breton !

Les enfants l’approuvent à grands cris. Le bébé pleure.


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Le lendemain Eurydice prend un cheval et part. Elle rencontre un cortège d’un cinquantaine de personnes.

EURYDICE – Unagi ! Comment vas-tu ?

Il chevauche en tête à côté d’une femme.

UNAGI, jetant un regard à la femme – Je pourrais difficilement aller mieux.

EURYDICE – Tu ne me présentes pas ?

UNAGI – Si pardon. Eurydice voici Fiona, la fille du duc d’Aquitaine.

EURYDICE – Et … ?

UNAGI – Et ma fiancée. Nous comptons nous marier à Kaamelott.

ARTHUR – Je le savais.

EURYDICE, à Fiona – Enchantée de faire ta connaissance. Je suis Eurydice.

FIONA – Bonjour. Unagi m’a beaucoup parlé de toi.

EURYDICE – Il n’a pas que des sujets de conversation passionnants alors.

ARTHUR – Elle me plaît bien cette petite.

DUC D’AQUITAINE – La fille d’Arthur ! Quelle joie de vous revoir. Comment vous portez-vous ?

EURYDICE – Tout va bien Duc. Je suis ici en tant qu’escorte. Je vais vous accompagner jusqu’à Kaamelott. (à Unagi) Tu aurais dû nous prévenir que tu revenais, on aurait tout prévu en conséquence.

UNAGI – On ne voulait pas quelque chose de trop … imposant. On a emmené ce qu’il fallait avec nous et je savais qu’avec toi Kaamelott serait quand même prévenu à l’avance.

DUC D’AQUITAINE – C’est tout bonnement incroyable ce don que vous avez. Unagi m’en a parlé.

EURYDICE - J’ai surtout eu de la chance que ma sœur fasse partie du voyage.

DUC D’AQUITAINE – Sakor est repartie par les chemins.

EURYDICE – Je voulais parler de la fille de Machine.

DUC D’AQUITAINE – Mais oui bien sûr excusez-moi. Dites-moi Eurydice, pensez-vous que Léodagan acceptera que son petit-fils prenne la tête de l’Aquitaine plutôt que de la Carmélide ?

EURYDICE – Unagi , tu veux devenir duc d’Aquitaine ?

UNAGI – C’est-à-dire que là-bas les gens sont sympathiques. Les ports de Méditerranée font de Rome une escale proche. Il y fait bien moins froid qu’en Bretagne. Et surtout c’est là-bas que Fiona est la plus heureuse.

EURYDICE, au duc – Ne t’inquiète pas de Léodagan, s’il ne veut pas, je me charge personnellement de son cas.

Le duc acquiesce et s’en va. Eurydice reste seule à la tête du peloton.

EURYDICE – Tu savais que le duc avait une fille.

ARTHUR – Évidement on raconte partout qu’elle aime l’art, les lettres et la géographie. Il fallait qu’ils se rencontrent. Une amitié, ça sauve un royaume. Un mariage, c’est inespéré.

EURYDICE – En tout cas bravo, Unagi à l’air heureux et elle aussi.

Une minute passe.

EURYDICE – Je ne savais pas que les fantômes avaient besoin prendre des bains.

Arthur disparaît.


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Quand ils pénètrent dans la cour, une foule les accueille. Démetra court vers son fils. Léodagan reste en retrait mais sans pouvoir s’empêcher de sourire.

DÉMETRA – Tu es enfin là ! Tu es parti bien plus longtemps que ce que tu avais dis.

UNAGI – Je n’avais rien dit maman.

Unagi voit Yvain dans la foule. Il embrasse la main de Fiona et descend pour aller le voir.

UNAGI – Père, suis-je libre de me marier à qui me plaît ?

YVAIN – Carrément. Les parents ne devraient trop pas se mêler de ça.

SÉLI, lui frappant l’arrière de la tête – Idiot, et s’il nous ramène une pécore mal dégrossie ?

YVAIN – Il fera ce qu’il veut.

UNAGI, lui saute au cou – Merci papa.

Il court vers Fiona, la fait descendre de cheval. Il l’emmène vers Galahad et Guenièvre. Le duc les suit quelques pas derrière accompagné d’Eurydice.

UNAGI – Sire, me donneriez-vous votre consentement pour que j’épouse Fiona d’Aquitaine ?

GALAHAD – Ce sera avec grand plaisir.

GUENIÈVRE – À une seule condition.

FIONA, inquiète – Laquelle ?

GUENIÈVRE – On fait le mariage ici à Kaamelott.

DUC D’AQUITAINE – Sire je sais que ce serait vous prendre de court mais comme nous avons tout ce qu’il faut, convives et denrées, nous pensions qu’il serait possible de célébrer cette union dans les plus brefs délais.

GALAHAD – Et bien cher duc, comme nous serons bientôt de famille, votre date sera la mienne.

EURYDICE – Dans une semaine.

GALAHAD, au duc – Ça vous va ?

DUC D’AQUITAINE – Vous m’en voyez ravi.


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Salle du trône, Galahad est secondé par Guenièvre et Perceval. Eurydice se tient derrière eux.

MERLIN – Alors moi j’ai pas compris pourquoi j’étais convoqué. J’ai pourtant pas fait de conneries dernièrement.

GALAHAD – C’est Nazim qui a demandé à ce que vous soyez là aussi.

MERLIN, à Nazim – Pourquoi ?

NAZIM – Parce que ce que j’ai à dire te concerne aussi. Je veux devenir druide.

PERCEVAL – Ouah c’est cool.

GUENIÈVRE – C’est vrai que c’est un beau projet.

GALAHAD – Et tu veux apprendre où ?

NAZIM – Je voudrais devenir l’apprentie de Merlin et puis s’il veut pas je trouverais une école de druide.

MERLIN – Ils n’accepteront jamais une fille.

NAZIM – Je me ferais passer pour un garçon, une fois dans la robe de druide, ils n’y verront que du feu.

PERCEVAL – Les druides ils ont pas une barbe normalement ?

Nazim prend quelque chose dans sa poche et se passe la main sur le menton et les joues. Une barbe lui pousse presque immédiatement.

NAZIM – Je pense que je pourrais m’arranger.

GALAHAD, à Merlin – Pourquoi est-ce que vous ne voulez pas la prendre vous ?

MERLIN – J’ai jamais dit ça.

GALAHAD – Ah pardon, j’avais mal compris.

PERCEVAL – Moi aussi je m’étais gouré.

GUENIÈVRE – Donc vous accepteriez qu’elle soit votre apprentie ?

MERLIN – Qu’est-ce que ça change ? De toute façon elle passe déjà tout son temps dans mon labo.

Nazim lui saute au cou.

NAZIM – Merci Merlin ! Tu verras je ne te gênerais pas et j’apprendrais super vite.

MERLIN, gêné – Je sais, je sais.

Nazim le lâche pour filer vers Eurydice. Elles s’enlacent.

EURYDICE – Bravo Nazim.

NAZIM – C’est toi qui m’a convaincu de tenter ma chance.

EURYDICE – Avec un talent comme le tien, il ne pouvait pas te dire non.


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Dans leur chambre, Léodagan regarde par la fenêtre.

LÉODAGAN – Qu’est-ce qu’elle fait ?

SÉLI, parcourt un parchemin dans le lit – Qui ça ? Belane ? Elle court pardi !

LÉODAGAN – Elle court ? Pour quoi faire ?

SÉLI, quitte son parchemin des yeux – Vous n’avez jamais remarqué qu’elle passait son temps à courir ?

LÉODAGAN – Ah bon ? Depuis quand ?

SÉLI – Je sais pas, depuis toujours. Depuis qu’elle est gamine on a toujours l’impression qu’elle est pressée. Tous les matins elle part avec Jane et Sakor pour galoper, je ne sais où avec la chimère et la meute de chien de Jane.

LÉODAGAN – Vous appelez ça des chiens ? Je suis sûr qu’elle en a sorti plus de la moitié directement de la forêt.

SÉLI – Chiens, loups, on s’en fout, moi je vous dis qu’elle court dès l’aube, après toute la journée elle transmet des messages et le soir elle fait encore au moins trois fois le tour de Kaamelott comme ça.

LÉODAGAN – Les jeunes d’aujourd’hui ils ne savent plus comment occuper leur temps.


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Plus tard, au repas de noces.

SÉLI – C’est fou ça, je croyais que celui-là était à moitié raté et puis finalement il part quelques mois à l’autre bout du royaume et regardez ce qu’il nous ramène.

LÉODAGAN – Oui enfin dans le coup il risque plus de prendre la tête de la Carmélide.

SÉLI – Encore heureux.

FAKIR – T’inquiète pas, papy, il y aura toujours moi, Lion, Nature et Goustan.

EURYDICE, à Démetra – Même après le 3e il ne t’a pas laissé choisi le prénom ?

DÉMETRA – C’est pire que ça. Ce sont les enfants qui ont insisté pour le laisser faire.

YVAIN – Comment vous parlez toujours trop mal des prénoms que je choisis mais au moins les enfants ils les adorent.

DÉMETRA – C’est ce qui m’inquiète un peu.

SAGAMORA – Vous pensez qu’ils se sont mariés si vite parce que Fiona est grosse ?

LÉODAGAN – J’avouerais que j’y ai pensé aussi.

EURYDICE – Non c’est pas ça.

SÉLI – Comment tu sais ça toi ? Encore tes pouvoirs de sorcières ?

EURYDICE – Non j’ai demandé. Ils étaient tous les deux d’accord pour attendre le mariage.

DÉMETRA – C’est histoire de se donner un genre ça.

LÉODAGAN – Je suis sûr qu’un truc aussi tordu, ils le sortent d’un bouquin.

FAKIR – Moi je suis contente pour lui et en plus ça me donnera une excuse pour aller découvrir l’Aquitaine.

DÉMETRA, à Fakir – Attention si tu vas en Aquitaine, on te colle une escorte. Pas question que tu nous ramènes un gars de là-bas pour te marier et repartir aussi sec.

EURYDICE – Ça risque pas.

LÉODAGAN, suspicieux – Comment ça « ça risque pas » ? Fakir tu as quelque chose à nous dire ?

FAKIR – Je m’entends bien avec les gens de mon âge c’est tout.

EURYDICE – Notamment avec ce petit gars qu’Ederne a ramené de Carmélide la dernière fois … le fils de cordonnier.

FAKIR – Le père de Élouan fait des chaussures mais c’est un loisir. Il est chef de clan !

LÉODAGAN – Un chef de clan ! On aura tout vu. Et comment il s’appelle si je puis me permettre ?

FAKIR – Conan La Semelle.

LÉODAGAN – Quoi ! Mais c’est l’un des plus chiants celui-là.

EURYDICE – Raison de plus pour laisser ces jeunes gens tranquilles. Une fois que le fils succédera au père, ils se tiendront bien plus à carreaux.

LÉODAGAN – Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre alors.

Il se lève et sort.

FAKIR – Vous croyez qu’il va m’en vouloir ?

SÉLI – Non. S’il fait tout ce tintouin c’est qu’il sait qu’il n’a pas le choix. C’est sa façon à lui de ne pas abandonner trop vite.

BOHORT, arrive – Qui pour une partie de balle ?

EURYDICE – Je te suis.

SÉLI, à Fakir – Allez vas-y, ça te changera les idées.

Eurydice lui prend la main et la tire de sa chaise.


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Salle du trône, Galahad trône avec Guenièvre et Léodagan à ses côtés. Eurydice et Merlin sont debout derrière. Face à eux Mordred et Calogreben.

MORDRED – Galahad, le peuple de Tintagel gronde.

GUENIÈVRE – Eux-aussi ! On avait déjà bien fort à faire avec l’Irelande …

CALOGREBEN – Il fallait s’y attendre à ça. La nouvelle génération n’est pas dupe.

MERLIN – À propos de quoi, je vous prie ?

CALOGREBEN – Nos pères ont été fédérés par Arthur Pendragon, avant ça ils vivaient sous l’autorité d’Uther Pendragon. Et sauf votre respect, Sire, vous ne ressemblez ni à l’un, ni à l’autre.

MORDRED – Ce n’est pas pour en rajouter mais en venant je suis passé par l’Orcanie. Eux non plus ne sont pas jouasses. Plusieurs chefs de clan crient au bâtard. Sans vouloir te …

GALAHAD – C’est bon Mordred.

LÉODAGAN – Je peux faire cramer quelques baraques si vous voulez.

GUENIÈVRE – Mais enfin père, Arthur n’a pas fédéré les clans par la violence.

EURYDICE – Non il les a fédéré grâce à l’autorité divine accordée par Excalibur. Arthur était un bâtard mais en Bretagne, ça n’a pas d’importance parce que ce qui fait le Roi c’est Excalibur. On peut bien être un paysan, un artisan, un voleur ou un Chevalier, la seule chose qui compte c’est d’être capable de retirer Excalibur. Et Galahad l’a fait.

GALAHAD – On va faire une réunion des Rois et des Chefs de clan dans un mois. Eurydice, tu enverras le plus tôt possible la Garde Royale à travers le pays pour transmettre ce message « Vous êtes conviés à Kaamelott dans un mois par Galahad, porteur d’Excalibur. »

EURYDICE – Ce sera fait.

GALAHAD – Bien messieurs, je vous dis à dans un mois.

Guenièvre, Mordred et Eurydice acquiescent et font semblant de ne pas voir le tremblement des mains du Roi.


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Galahad et Guenièvre sont assis au bord du lac. Mu et Nu montent la garde juste assez loin pour ne pas entendre. Eurydice arrive.

GALAHAD, à Guenièvre – Et si je n’arrivais pas à les convaincre de rester fédérés ?

GUENIÈVRE – Ne dis pas n’importe quoi. Tout le monde a vu les avantages de la Fédération.

GALAHAD – Papa avait réuni tout le monde pour la recherche du Graal, maintenant qu’on l’a ils pourraient très bien partir.

EURYDICE – C’est pour ça que tu m’as demandé de l’apporter ?

GALAHAD – Le Graal qui apporte la lumière au peuple. J’espère qu’il pourra au moins éclairer ma lanterne.

Eurydice s’assoit et sort la coupe mais la garde hors de portée de Galahad.

GUENIÈVRE – Alors c’est ça qu’Arthur a cherché toute sa vie ?

EURYDICE – Je sais pas si on peut bien dire qu’il l’ait cherché toute sa vie. Avant 20 ans il ne savait même pas que le Graal existait et quand il est revenu il l’avait.

GUENIÈVRE – Non mais c’était histoire de dire.

GALAHAD – Comment il marche ?

EURYDICE – Quand on le touche on a des visions.

GALAHAD – Quel genre de visions ?

EURYDICE – Perceval a vu Arthur et Arthur a vu Guenièvre. Ce n’est pas pour sauver le royaume de la tyrannie de Lancelot que papa est revenu, c’est parce qu’il a vu que Guenièvre avait besoin de lui.

GUENIÈVRE – Toi tu vois quoi Eurydice ?

EURYDICE – Je vois déjà bien assez de choses, pas besoin que le Graal en rajoute.

GALAHAD, déçu – C’est juste un vase magique. Pas de quoi apporter la lumière au peuple.

EURYDICE – Tu sais avant que Perceval se ramène avec sa coupette à visions, je pensais que le Graal était une métaphore.

GALAHAD – Comment ça ?

EURYDICE – Cette histoire de recueillir le sang dans une coupe, j’étais persuadée que ça faisait référence à la procréation.

GALAHAD – Le Graal comme une personne ?

GUENIÈVRE – Et qui donc alors ?

EURYDICE – J’avais pensé à une femme ou à un enfant d’Arthur.

GALAHAD – Pff …

EURYDICE – J’ai toujours envie d’y croire. (à Guenièvre) Toi. Moi. (à Galahad) Toi. On est tous le Graal. On a tous pour mission d’apporter la lumière.

GUENIÈVRE – Et bien rien que ça !

Eurydice jette le Graal dans le lac.

EURYDICE, à Galahad – Comme ça tu seras libre de chercher le Graal comme tu veux.

Eurydice se lève.

GALAHAD, pensif – Apporter la lumière au peuple …

EURYDICE – Ça dépasse un peu le vase magique non ? Te fais pas trop de mouron, je suis sûre que dans 20 siècles on cherche encore. Tu viens Guenièvre ?

GUENIÈVRE – Mais j’aurais voulu …

EURYDICE – On va laisser notre Roi méditer un petit peu.

Elles s’en vont. Galahad reste au bord du lac jusqu’à la nuit tombée. Il ne sait pas que le fantôme d’Arthur est à côté de lui.

ARTHUR – Il commence à faire sombre non ?

Galahad dégaine Excalibur. Sa lumière lui illumine le visage. Il regarde son reflet.

GALAHAD – Apporter la lumière … comment je suis censé faire ça ?

Il passe l’épée devant son visage. C’est le reflet d’Arthur maintenant.

GALAHAD – Si seulement tu étais encore là. J’ai tellement de question.

ARTHUR – Auxquelles je n’aurais pas eu de réponses.

Il repasse l’épée. C’est de nouveau son reflet.

GALAHAD – Comment tu as fait toi pour être un bon Roi ?

Galahad déplace l’épée au milieu de son visage. Une partie du reflet est lui, l’autre est Arthur. Finalement il lui ressemblerait presque. Les lèvres de côté d’Arthur bougent.

ARTHUR - … on fait de notre mieux.

Galahad a entendu la dernière phrase de son père. Arthur lui sourit, il répond.


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