Le poids des Apparences

Chapitre 10 : Sentiments enfouis

4394 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/04/2020 18:46

Hello !


Merci à ma lectrice loyale et bien aimée, tes commentaires me vont droit au cœur et je suis tellement ravie que tu passes un agréable moment moment en lisant ma fic ! Merciiii !


Bonne lecture à tous !


Il était resté là, silencieux, insondable, incapable de réagir. Incapable ? Non, plutôt en réflexion aurait-il dit. Il arrivait fréquemment à Erwin Smith de prendre son temps pour répondre. Personne ne le pressait jamais, et ses subordonnées étaient même habitués au point de se résigner à ne pas avoir de réponse si le Commandant n'était pas disposé à leur en donner une sur le champ. Erwin aimait être sûr de lui. Livaï lui même se plaignait souvent des risques qu'il prenait, et il avait raison sur un point : il ne choisissait jamais le chemin le plus simple. Mais toujours celui dans lequel il avait foi. Livaï devait sûrement le savoir car il l'avait toujours soutenu et suivi. Cependant tout ceci relevait du professionnel, et se justifiait facilement par les énormes responsabilités qui reposaient sur ses épaules. Chacune de ses décisions pouvait amener à la perte de ses hommes, il y avait tout de même de quoi prendre son temps.


En revanche, laisser le désespoir et la honte grandir dans les yeux de Lilith Everglow était un choix plus discutable. Il devait bien admettre qu'il n'avait pas été tendre, et reconnaissait volontiers que l'ignorer en direct pour prendre le temps d'y réfléchir n'était pas la chose la plus sympathique qu'il lui ait fait. Surtout que ce n'était pas la première fois. Pourtant, il avait également lu dans ses yeux que l'intervention brutale de son garde du corps ne l'avait en rien soulagée de ce supplice : elle avait vu qu'il s'apprêtait à répondre et attendait le verdict. Il s'était dit qu'elle avait un certain courage, d'autant plus qu'elle n'avait aucunement détourné regard. Sa manière quelque peu brusque de se dégager d'elle n'avait pas non plus dû lui faire très plaisir, mais elle n'avait rien laissé paraître devant Ghérart. Pour être précis, elle lui avait même tendu une perche à la fin de la conversation… C'était une jeune femme influente, orgueilleuse et sûre d'elle. Elle avait parfois des attitudes qui le surprenait à son égard mas il y avait des limites. Il était plus crédible de penser qu'elle l'avait charrié pour garder la tête haute, ou qu'elle n'était pas en possession de tous ses moyens. Rappelons-le, elle venait quand même de lui parler du Majordome de son enfance, qui "sentait bon" et lui caressait "bien" les cheveux. Elle était fiévreuse et désinhibée.


Toujours est-il que maintenant qu'il avait eu une nuit complète et une partie de la matinée pour y réfléchir, Erwin avait pris position : il n'était pas contre l'idée. Elle n'aurait probablement rien tenté au vu de son état, et il lui était apparut de manière claire et limpide que Lilith cachait en elle un cruel manque d'affection, du moins lorsqu'elle était malade et que certaines de ses défenses tombaient. Cela aurait pu être une soirée intéressante. C'était d'ailleurs ce qu'il allait lui répondre si Ghérart n'avait pas tenté d'assassiner sa porte d'entrée à ce moment précis. Et même après toute la réflexion qu'il avait eu par la suite, il n'avait pas changé de position.


- Pourquoi tu ris Erwin ?


Hanji venait de le sortir de ses pensées. Il contourna la question en lui demandant un rapport sur la veille et elle n'insista pas. L'officier était très curieuse de nature, mais comme la plupart de ses camarades, Erwin étant tout de même le Commandant en Chef du Bataillon, elle n'était jamais plus intrusive que de raison. C'était quelque chose qu'elle n'appliquait pas avec Livaï, avec lequel elle entretenait une relation plutôt tumultueuse et mouvementée. Il faut dire que le petit brun n'était pas facile à vivre, et avait gardé ce côté très sauvage propre à son passé.


- C'est aujourd'hui que nos escouades reviennent ? Demanda Mike d'un air faussement détaché.

- C'est aujourd'hui que Nanaba revient, oui, Mike. Le railla Hanji un large sourire aux lèvres.


Le grand officier aux cheveux châtain se défendit du mieux qu'il le put, mais Hanji ne lâcha pas l'affaire. Nanaba faisait partie de son escouade, c'était une jeune femme blonde aux cheveux courts et aux yeux bleus perçants. Mike avait toujours eu un faible pour elle depuis son recrutement au Bataillon. Elle était calme, loyale et agile sur le terrain. Erwin lui même jugeait qu'ils iraient bien ensemble. Mais Mike était un homme réservé, et visiblement timide, car il n'avait jamais osé faire le premier pas. Nanaba quand à elle, était très à cheval sur les règles et la hiérarchie. Erwin doutait qu'elle nourrisse des sentiments pour son camarade sans qu'il n'aille d'abord vers elle. Qui sait, une fois que ce serait fait, ce qui pourrait bien arriver ?


- Tu peux parler toi, avec Moblit. Répliqua Mike, en dernière défense.


Hanji se mit alors à rire de bon cœur, nullement gênée. Moblit était l'assistant personnel de la brune. Un gentil soldat aux cheveux brun clair, taille normale, niveau moyen sur le terrain, un soldat assez commun, si ce n'est qu'il avait l'incroyable don de savoir gérer Hanji. Il était d'une patience divine, toujours raisonné et attentif, et avait les bons mots quand il fallait calmer sa supérieure. Il était retourné dans son village natal quelques temps avec la permission de la scientifique, car sa mère était mourante. Il arrivait à Hanji de se retourner pour lui parler, par habitude, et personne ne faisait jamais la moindre réflexion à ce sujet, pas même Erwin. Après tout, Moblit était un des seuls êtres humains que la brunette chérissait vraiment, et la seule personne qui réussissait à la raisonner. Il était reconnaissant qu'il existe : Moblit était une bénédiction. Contrairement à Mike, elle ne semblait pas le voir d'une quelconque manière romantique, et ne cachait pas non plus toute l'affection qu'elle lui portait devant les autres. La défense de Mike avait donc été très mal choisie, et il accepta sa défaite en se murant dans le silence.


- En parlant de tout ça, on peut savoir pourquoi Lilith est rentrée dans ton bureau en parfaite santé et est ressortie à moitié morte, dans les gros bras de son garde du corps ? Demanda Hanji avec sa délicatesse habituelle.

- Elle était déjà malade quand elle est arrivée, je lui ai proposé de se reposer dans mon bureau.


Erwin n'eut guère le temps de regretter sa réponse que tout le monde, excepté Livaï, répondit un « ooohhhhh » accompagné d'un sourire entendu. Le Commandant fit mine de ne pas s'attarder sur leur réaction et jeta un œil à son capitaine pour le remercier mentalement de son soutien. Mais celui-ci le fixait d'un air désapprobateur. Ce fut ce moment précis que Naile Dork choisit pour sortir de l'ombre, un expression interdite sur son visage. L'officier des Brigades Spéciales s'avança vers Erwin avant de le saisir par les épaules.


- Lilith Everglow est le mal, Erwin. Ne fais pas ça.

- Je croyais que tu ne voulais plus parler d'elle, Naile. Lui répondit-il d'un ton narquois.

- Je travaille en étroite collaboration avec la noblesse. J'entends beaucoup de choses. Ne pense pas que son soudain rapprochement avec ton Bataillon est passé inaperçu. Ce n'est pas n'importe qui à Mitras. Tu ne pourras pas dire que je ne t'avais pas prévenu.


Il s'éloigna alors aussi vite qu'il avait surgi, laissant les collègues d'Erwin avec un sourire encore plus moqueur qu'avant son intervention. Erwin haussa les épaules et retourna à son bureau. Les chefs d'escouade décidèrent quant à eux d'aller accueillir leurs soldats à l'entrée du mur. C'était assez rare qu'ils les envoient partir seuls, étant par définition les meneurs de chaque équipe, mais selon la mission, il n'avaient pas forcément à être présents. C'était là tout l'intérêt de choisir leurs recrues, afin de ne pas s'inquiéter lorsque cela arrivait. Les officiers avaient alors mis en place un petit rituel, et buvaient un verre ou deux (ou dix…) dans un bar non loin de la porte, en attendant leur escouade. C'était un petit bar sans prétention, et il n'y avait jamais trop de monde lorsqu'ils y allaient. La serveuse principale avait un petit faible pour Livaï, et ils s'amusaient à la voir se dandiner et lui sourire, alors que Livaï, fidèle à lui même, ne réagissait nullement.


La porte s'ouvrit en plein milieu de l'après-midi, et les chefs d'escouade apprécièrent silencieusement qu'aucun membre de leur escouade respective ne manque à l'appel. Il s'agissait d'une mission simple, mais qui aurait pu mal tourner. Cinq hommes avaient été portés disparus depuis la dernière sortie du Bataillon. Il s'avérait qu'un riche noble les avait missionnés pour récupérer « un objet spécifique » comme il l'avait lui-même dit, de son ancien château, dans l'enceinte du mur Maria. Les pauvres bougres avaient dû se cacher dans un chargement de l'armée pour passer en douce, et essayer de rejoindre le fameux château à pied. Passée la furieuse envie de taper ce Marquis contre un mur, Erwin Smith avait dû céder à son caprice et envoyer des soldats les récupérer. Obligation politique lui avait-on dit avant de l'informer qu'il n'aurait guère le choix, il devait les retrouver. Il y avait bien entendu la probabilité qu'ils soient tombés sur un Titan, mais Erwin avait bien compris que le Marquis n'avait guère d'empathie pour ses hommes : il voulait son objet. Refusant catégoriquement d'envoyer des hommes à la mort pour si peu, il avait obtenu la permission des trois chefs d'escouade principaux d'envoyer des soldats expérimentés pour mener à bien cette ridicule quête. Livaï avait très gracieusement exprimé son mécontentement mais avait fini par céder à la requête de son supérieur. Mike et Hanji quant à eux avaient accepté sans protestation. Puis finalement, seules l'escouade de Mike et Livaï furent envoyée pour la mission. L'escouade d'Hanji sortaient peu des murs, la jeune femme se concentrant surtout sur l'étude des Titans.


Livaï reconnut immédiatement les intrus parmi les soldats : trois hommes penauds, livides mais soulagés de s'en être sortis indemnes. Il se rappela que le noble avait parlé de cinq hommes et soupira. Quel gâchis. Il n'avait même pas envie de savoir quel était ce fameux objet. Tout ce cirque l'irritait au plus haut point.

Une fois les hommes de main relâchés, les officiers invitèrent leurs soldats pour une seconde tournée. Personne ne protesta, pas même Petra Ral, de l'escouade de Livaï, qui n'appréciait guère ni la bière, ni l'attitude de ses camarades une fois joyeux. C'était en quelque sorte le rayon de soleil de son escouade : une jeune femme adorable aux cheveux orangés, énergique et loyale, attentionnée et attachante. Elle n'en demeurait pas moins un excellent soldat, mais le fait que, comme pour le reste de son escouade, Livaï Ackerman l'ait choisi personnellement avait quelque peu surpris. Elle était trop mignonne pour devoir supporter un tel calvaire. Hanji aurait tué pour la récupérer, mais la jolie rousse vénérant quasiment son supérieur : elle ne serait jamais partie de son plein gré.


Hanji ricana devant l'agitation que provoquait l'escouade de Livaï. Quelque soit l'endroit où ils étaient, Petra et Oruo se faisaient toujours remarquer. Oruo, contrairement aux deux autres membres de son escouade qui restaient réservés et calmes, était bruyant et arrogant. Il semblait évident qu'il avait un faible pour Petra, et supportait mal toute l'admiration et l'affection que la petite rousse témoignait à Livaï. Par dépit, il imitait souvent son capitaine, ce qui avait le don de faire sortir Petra de ses gonds. Elle regrettait alors immédiatement son attitude, et tentait de retrouver son calme tout en maudissant son collègue de lui donner une mauvaise image, surtout devant Livaï. Ils étaient amusants. L'escouade de Mike n'était pas si animée, mais une chose les unifiait unanimement : leur amour et tenue de l'alcool. Même la jolie Nanaba ne disait jamais non à une bonne pinte de bière, et personne ne sortait jamais d'un bar en titubant. À croire que Mike leur avait fait passer un test d'entrée. Ce n'était pas le cas de son assistant, Moblit, qui refusait systématiquement de boire. Elle se souvint encore ce soir où elle avait réussi à le faire consommer. Il s'était mis à chanter d'une voix aigüe et s'était écroulé, inconscient, en à peine une heure. Cette anecdote continuait de le suivre, à son grand damne. On le surnommait « Alcool chantant » en soirée. Elle ricana. Puis se tourna subitement vers la rousse.


- Et donc, ça valait le coup ? Demanda Hanji en regardant Petra droit dans les yeux.

- De quoi ? L'objet ? Lui fit-elle d'un air mystérieux.

- Ne lui dit rien ! Lui somma Oruo comme si c'était déjà arrivé qu'elle lui obéisse.


La jeune femme jeta un regard en biais à son capitaine, et nota sans surprise qu'il n'était pas intéressé par le sujet. Elle décida de parler tout de même, pour ne pas donner ce plaisir à Oruo.


- Qui sait ce que c'est vraiment… C'était une boîte scellée. Il aurait fallu qu'on la force pour en savoir le contenu, et franchement on avait autre chose à faire.


Cette fois-ci, elle sentit une certaine satisfaction émaner de son supérieur et se félicita de sa réponse. Oruo leva les yeux au ciel.


- Peut-être que Lilith sait quelque chose à propos de cette histoire, je VEUX savoir ! S'exclama Hanji, un sourire déterminé aux lèvres.

- Qui est Lilith ? Demanda Nanaba entre deux gorgées de bière.

- Le nouveau crush d'Erwin. Répondit Mike d'une voix monocorde.


Les soldats restèrent silencieux, ne sachant s'il s'agissait d'une plaisanterie ou non, jusqu'à ce qu'Hanji explose de rire et ne leur raconte les derniers évènements dans les grandes lignes. Livaï ne put s'empêcher de compléter sa description.


- Je vais devoir assurer moi même sa protection jusqu'à Karanese dans quelques jours, et pour avoir vu ses capacités physiques inexistantes, ça ne va pas être une partie de plaisir.

- Elle est comment ? Demanda soudainement la jolie rousse, ne résistant pas à la tentation.

- Comment je le saurais, elle est aveuglante avec toutes ses merdes de bijoux qui brillent.


Petra pouvait se détendre, Livaï avait craché sa réplique avec tout le dédain et le mépris dont il était capable. Mike raconta alors à sa protégée le fameux test physique qu'ils avaient fait au quartier puis après quelques éclats de rire, la conversation se recentra sur leur sujets de conversations habituels, c'est à dire : le prix de l'alcool et la corruption aux sein des Brigades Spéciales. Hanji remarqua avec amusement que Mike parlait beaucoup plus avec Nanaba que les autres membres de son escouade. La belle blonde ne semblait pas mal à l'aise et s'adressait à lui de manière naturelle et cordiale. Il avait du chemin à faire le pauvre.


Elle regarda l'heure. Il n'était pas si tard que ça. Peut-être oserait-elle aller voir la Duchesse pour discuter avec elle de cette étrange affaire. « Marquis » n'était pas en soi un titre suffisant pour obliger le Bataillon à intervenir grâce à des obligations politiques. Il avait dû demander de l'aide. Cette boite devait être sacrément importante pour qu'on l'aide à la récupérer. Le noble les avait attendu tout l'après-midi et s'était jeté sur ses hommes afin de la récupérer, à peine l'escouade au sein du mur. Il était venu personnellement. Ce n'était pas anodin. Hanji prétexta être fatiguée et s'éloigna du groupe avant de les saluer cordialement. Liam et elle s'entendaient bien, et le second de la Duchesse lui avait indiqué la localisation du Domaine où elle séjournait. Cela l'avait d'ailleurs surprise, après tout, Lilith se donnait du mal à le cacher aux autres, et Liam lui avait donné l'information durant une conversation, sans même qu'elle ne l'ait demandé. Il devait lui faire confiance. En soit, c'est vrai qu'il n'avait rien à craindre d'elle, si ce n'est que sa curiosité pouvait l'amener à s'affranchir des conventions sociales et venir toquer à sa porte à 22h du soir pour parler d'une boite secrète.


Le Domaine en question n'était pas très éloigné du centre ville à cheval, et elle arriva rapidement devant la bâtisse. Liam n'avait pas menti, ça ne payait pas de mine de l'extérieur : un petite demeure quelconque. Il n'y avait même pas de portail. Elle pénétra dans le domaine d'un pas léger et se retrouva face à une ombre menaçante. Elle reconnut Ghérart sans effort et le salua innocemment. Il n'était ni loquace ni sympathique, et il lui ordonna rapidement d'annoncer ses intentions si elle tenait à la vie.


- J'ai besoin de parler à la Duchesse, c'est important. Je suis sûre qu'elle me laisserait passer.


Il n'eut pas l'air convaincu et elle se demanda si elle allait devoir le maitriser pour pouvoir passer. Elle eut un petit rictus en se rappelant comment Livaï l'avait humilié quelques jours plus tôt et se sentit enthousiaste d'essayer. Liam sortit à ce moment là de la demeure et salua chaleureusement Hanji. Ghérart soupira et la laissa passer.


- Quel bon vent t'amène ! Tu t'inquiétais pour moi ? Je suis guéri ! S'exclama-t-il tout sourire.

- Évidemment, t'as tout refilé à Lilith, CONNARD. Le coupa Ghérart, aimable comme à son habitude.


Hanji laissa échapper un rire. Ces deux là ne devait pas travailler souvent ensemble. Elle contre-dit le beau brun en demandant à voir Lilith, et il l'accompagna à l'intérieur en laissant Ghérart dehors. La belle Duchesse était confortablement installée dans la pièce à vivre, et lisait un livre avec un plaid autour d'elle. Elle devait être encore un peu malade. Elle fut surprise de voir Hanji mais lui proposa gentiment de prendre place, attendant ensuite qu'elle lui explique la raison de sa venue. Elle ne parut pas contrariée qu'elle connaisse l'endroit où elle couchait, Hanji en déduit rapidement que Liam avait dû lui confesser la fuite le jour même. Elle inspira un grand coup et expliqua la situation à Lilith avant de lui demander sans détour tout ce qu'elle savait à ce sujet. Elle explosa de rire.


- Donc selon toi, cette boite contient un secret politique ? Tu sais, ça peut-être un bijou ancien… Le Marquis Grant est un pauvre raté, alcoolique et ruiné… Et concernant l'aide qu'il a pu recevoir, il y a deux raisons pour lesquelles un noble de la haute peut aider quelqu'un : la première, oui, il est directement concerné, la seconde, on le fait chanter. Tu n'imagines même pas le nombre de fois où le fait de connaitre un secret m'a permis d'arriver à mes fins. Les nobles ont des activités et personnalités tellement tordues, on n'a jamais à creuser bien longtemps pour déterrer une sale vérité.

- Vous savez exactement de quoi il s'agit n'est-ce pas ? Répliqua Hanji d'une voix plus froide.

- Bien sûr. C'est très rare que je ne sois pas au courant de quelque chose concernant mes pairs, qui plus est, si ça concerne le Bataillon. Tu es sûre qu'ils allaient au château de Grant ? Parce que je suis quasiment sûre que ce n'était pas le cas.

- Ils ont été retrouvés à plusieurs kilomètres de là, on n'a effectivement aucune certitude, juste la parole du Marquis. Les hommes n'ont rien voulu dire.


Lilith arbora un sourire satisfait et referma son livre avant de le poser sur une commode à proximité. Hanji ne bougea pas d'un cil.


- C'est une histoire qui ne concerne pas l'armée. On a tous des informateurs pour connaitre au maximum nos ennemis et chercher les failles. Il y a quelques semaines, un des sous-fifres d'un noble de Mitras dont tu n'as pas à connaitre le nom a plus ou moins avoué avoir rassemblé beaucoup d'informations de la haute grâce à un espion parmi la noblesse, dont tu n'as pas non plus à connaitre le nom… Et cet idiot du village gardait tout dans un carnet, lui même dans une boite, dans un château de l'enceinte du mur Rosa qui, je le crois très fort, se trouve non loin de là où vous avez trouvé les hommes de main de Grant. Celui qui avait le plus à perdre a sûrement œuvré pour récupérer la boite…

- Vous êtes mêlée à tout ça ? C'est vous qui avez demandé à récupérer cette boite ? Vous réalisez que des hommes ont mis leurs vies en danger en sortant des murs ? S'impatienta Hanji qui s'était relevée, prise de colère.


Lilith se leva à son tour et lui fit face en la toisant d'une expression de visage extrêmement froide, inconnue jusqu'alors. Hanji soupira alors avant de hausser les épaules et s'excuser. La lueur qu'elle avait perçu dans les yeux de la Duchesse lui donnait l'intime conviction qu'elle n'était pas en colère, mais profondément offensée par ses accusations. Et Hanji avait une intuition quasi infaillible, dans laquelle elle avait une confiance aveugle. C'était notamment ce qui la rendait très forte en interrogatoire.


- Je ne vous mettrais jamais dans une telle position. Et je ne suis pas à la tête de mon empire et de la haute société pour rien : je sais parfaitement protéger mes intérêts et cacher ce qu'i cacher. S'il a quelque chose contre moi, je doute fortement que ça puisse me nuire. Ça sera anecdotique ou encore mieux : monté de toute pièce par mes soins. De toute façon ça fait des années...

- Vous êtes bien sûre de vous…

- Parce que je sais ce que j'ai à cacher, et comment je le fais. Je suis hors de portée. Toujours est-il que ça ne concerne pas le Bataillon. C'est une lutte interne de pouvoir, des informations qui peuvent détrôner certains… Tous les nobles sont remplaçables, c'est pour ça qu'ils ont peur. Je comprends que tu sois en colère, vous êtes, on va dire, un dommage collatéral dans cette lutte de pouvoir. À l'heure qu'il est, il a dû mettre la main sur la boîte et la forcer. Quelques têtes vont tomber, mais rien de bien important à mon humble avis. Je ne suis pas inquiète. J'ai entendu qu'aucune de vos recrues n'avaient été blessées aussi.

- Ils sont à peine revenus cet après-midi comment pouvez-vous déjà le savoir ?

- Les oiseaux messagers sont des animaux très rapides. Répondit Lilith tout en regardant un corbeau qui se tenait devant la fenêtre, encore ouverte.

- Un corbeau. Je peux le toucher ?


Lilith regarda Hanji d'un air sceptique. Comment était-elle passée d'énervée, à confiante, puis de nouveau suspicieuse et maintenant complètement attendrie par un oiseau ? Cette femme était un sacré personnage. Elle leva son index pour indiquer au bel oiseau noir de s'approcher, puis lorsque le corbeau fut perché sur son doigt, elle le tendit à Hanji. Elle l'effleura à peine et roucoulait devant l'animal comme si elle tentait de communiquer avec lui. Si le corbeau avait pu parler, il aurait probablement appeler à l'aide.


- Au fait… Je ne suis jamais venue. Précisa Hanji en reprenant ses esprits.

- Ça va de soi.


L'officier caressa une dernière fois l'oiseau, salua Lilith et partit de la demeure. Liam se mit alors à énumérer tout ce qu'elle avait fait d'étrange ou de dérangeant au cours de ces dernières minutes.


- C'est ta copine hein, pas la mienne Liam…

- J'avais plus ou moins sentie qu'elle était bizarre mais là on a atteint un niveau professionnel !

- J'ai proposé à Erwin de passer la nuit avec moi et il est resté silencieux.


Liam regarda Lilith, interloqué.


- Tu me dis ça pour que je me sente moins seul à mal choisir mes relations sociales ?

- C'est terrible Liam. Je ne l'intéresse vraiment pas.

- Tu exagères, il t'aime bien ça se voit.

- Je le divertis à ses heures perdues. Mais même ça je n'y arrive pas vraiment !

- Ah bon ? Moi je te trouve très divertissante. Tu es même…la personne la plus divertissante que je connaisse…! Se moqua-t-il.

- Tu n'as pas l'air de saisir la gravité de la situation Liam. Je ne suis même pas un divertissement suffisant à ses yeux pour qu'il ait envie d'aller jusqu'au bout !


« Jusqu'au bout de quoi ? Qui ? »


Liam se retint de rire alors que Lilith posa sa tête entre ses mains. Ghérart venait d'entrer dans la pièce, et ne semblait pas comprendre pourquoi toute discussion avait cessée après son irruption.


- Jusqu'au bout de la nuit. Je vais dormir jusqu'au bout de la nuit… seule et malheureuse. Marmonna la belle Duchesse.


Une fois que Lilith arriva en haut des escaliers menant à sa chambre, Liam explosa de rire devant Ghérart. Il marcha vers lui et voulu lui tapoter amicalement l'épaule. Ce dernier évita le contact de sa main et soupira.


- Ne me dis pas que la raison de tout ce qu'on fait est Erwin Smith ? Grogna-t-il.

- Non, enfin, oui, mais ne t'inquiètes pas, ça va beaucoup plus loin. Beaucoup plus loin. Lui assura Liam avant de rejoindre à son tour ses appartements.

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