Le poids des Apparences

Chapitre 13 : Comme des soeurs

3950 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/04/2020 18:48

« Allez, je sens que tu en meurs d'envie, viens avec moi, je vais t'apprendre plein de trucs…»


Elle toisa le jeune homme d'un air dépité. Certes, elle était énervée et blessée, mais Erwin étant déjà parti, devait-elle vraiment s'infliger une telle sentence ? Son égo était sûrement inversement proportionnel à sa délicatesse et elle aurait juré qu'il pouvait être le genre de personne à parler de lui à la troisième personne pendant ses ébats. Elle jaugea le bar d'un regard rapide mais ne trouva guère d'autres prétendants. Il fallait bien avouer qu'elle l'avait simplement choisi car il était suffisamment proche pour qu'Erwin puisse le détailler. Et il avait fière allure. Ceci dit il suffisait d'un seul coup d'œil pour deviner qu'il n'avait pas inventé l'eau chaude.


- Y'a un problème ma petite ? Ne me dis pas que tu cherches ton blondinet ? Il t'as planté comme une…

- Ouai je sais. Le coupa-t-elle.


Puis sans explication, elle se dégagea du comptoir et rejoignit Ghérart dehors. L'homme resta un instant immobile, perdu. Puis il la suivit dans l'espoir de la faire revenir, mais elle ne lui accorda pas même un regard. Il exprima alors sa colère, mais n'osa insulter la jeune femme lorsqu'il aperçut le garde du corps à son service. Ghérart n'eut même pas besoin de lui adresser un quelconque regard noir : l'homme retourna simplement à l'intérieur en marmonnant.


- C'était qui lui ? Demanda Ghérart.

- Aucune importante. Lui répondit-elle d'une voix froide. Tu as vu Erwin partir ?


Il lui confirma que le Major n'était plus sur les lieux. Lilith annonça alors à son homme de main qu'elle avait besoin de se détendre, et qu'elle finirait probablement la nuit dans le bar de Jen. Ghérart se décomposa intérieurement. Il avait passé l'après-midi à écouter le Marquis de Stohess déblatérer des idioties, habillé en clown, bien qu'il avait conscience que ses vêtements valaient plus chers que sa paye mensuelle, et maintenant elle lui annonçait qu'elle voulait terminer sa soirée dans un bar à prostituées ? Il regretta ses temps paisibles à enquêter dans l'ombre et intimider ses cibles. Il avait beaucoup d'affection pour Lilith, mais devait reconnaitre qu'il ne se sentait guère dans son élément à ses côtés. Ce n'était cependant pas le moment de lui parler de ses états d'âme, aussi le grand brun se contenta de l'escorter jusqu'au bar où travaillait Jen.


À cette heure déjà avancée de la nuit, il n'y avait plus grand monde dans la rue, mais la fréquentation de l'établissement lui, était à son apogée. Cela ne découragea pas la jolie Duchesse, qui se fraya un chemin jusqu'à son amie, en pleine opération séduction. Elle remarqua instantanément la détresse émotionnelle de son amie et cessa de séduire son potentiel client pour faire face à la brune.


- C'est grave à quel point ? Demanda-t-elle.

- Ton prix sera le mien pour le reste de la soirée.


Ah. Oui, ça devait être sérieux. Elle caressa les cheveux de Lilith pour lui signifier qu'elle serait à elle pour le reste de la soirée. La belle blonde s'excusa distraitement auprès de l'homme qu'elle aguichait, et proposa à la Duchesse de s'éloigner un peu du vacarme. Elle l'amena à l'arrière du bar et l'invita à rentrer dans une des chambres. Lilith devait être sacrément ailleurs car elle ne fit aucune remarque désobligeante à ce propos et s'assit sans broncher sur le lit souillé de la maison close. Elle lui raconta alors brièvement ce qui s'était passé, et termina son récit sur le commerçant avec qui elle avait failli passer la nuit. Jen explosa alors de rire. Elle reconnut sans peine de qui elle parlait. Elle les connaissait quasiment tous après tout...


- Jorg… Tu as failli coucher avec Jorg… S'étouffa-t-elle. Crois-moi, ta soirée aurait pu être encore pire ma jolie…


C'est à ce moment là que Lilith reprit un peu conscience de ce qu'elle faisait et se dégagea avec dégoût du lit. Elles restèrent silencieuse quelques instants, tandis que des sons plus ou moins inquiétants s'échappaient de la dizaine de chambres occupées. Jen lui adressa un clin d'œil et lui proposa de sortir prendre l'air dans l'arrière cours. Il faisait froid, mais la brune jugea que ce n'était pas très cher payé. Elles se blottirent l'une contre l'autre. Il faisait nuit noire, et on entendait le chahut étouffé de l'établissement au loin. Le temps semblait s'être suspendu.


- Ça va être super ta mission jusqu'à Karanese dis-moi…

- Je préfère ne pas y penser… Normalement je serai surtout avec Ackerman tu me diras…

- Si un jour on t'avait dit que tu te réjouirais de ça… La taquina-t-elle.


Lilith sourit faiblement. Elle n'était pas très enclin à rire ce soir. Il lui avait fallu beaucoup de contrôle pour ne pas s'effondrer plus tôt dans la journée, alors qu'Erwin l'avait fait brutalement descendre de son petit nuage. Elle qui redoutait ses regards froids, elle avait été servie.


- Tu te rends compte quand même Jen… Bon ma foi, qu'il ne veuille pas de moi dans sa vie c'est compréhensible vu sa situation…Je m'y étais préparée… Sa vie c'est le Bataillon… Il se bat pour sauver l'humanité blablabla… Mais vu toutes les perches que je lui ai tendue je suis aussi sûre qu'il ne veut même pas coucher avec moi… Et ça… c'est franchement…

- Je suis consternée… Se moqua Jen tout en continuant à câliner son amie.

- Au point où j'en suis, la seule chose qui me remonterait le moral c'est d'apprendre qu'il aime les hommes. Ouai… Tu vois, s'il se tapait Levi, je n'aurai aucun regret. J'accepterai de perdre face à lui.


Le timbre de sa voix trahissait que Lilith était on ne peut plus sérieuse, mais Jen ne résista pas à un fou rire. Elle finit par emporter son amie avec elle, et l'atmosphère se détendit enfin un peu.


- Quand je pense que tu n'es même pas bourrée pour sortir ce genre de choses…

- Ça va hein… Mets-toi à ma place… C'est l'humiliation suprême… Et le pire c'est que je n'ai aucun moyen de me sentir mieux… Je sais très bien que je peux avoir n'importe qui d'autre. Ça n'aurait aucune saveur.

- Quelle modestie… S'étouffa la jolie blonde.

- Je suis réaliste, tu es bien placée pour le savoir.


Jen haussa les épaules. Ça oui, elle était bien placée pour le savoir. Lilith semblait un peu plus apaisée. Elle devina qu'elle avait emmené Ghérart avec elle et non Liam, car son garde du corps actuel ne s'était pas montré à l'intérieur. La jeune courtisane avait cependant noté qu'une ombre bienveillante les avait suivit à l'extérieur. Elle connaissait peu le grand brun, mais avait vite saisi qu'il pouvait facilement être mal à l'aise, et n'appréciait pas les lieux. Déjà que Liam ne la portait pas forcément dans son cœur… Il l'accusait d'avoir une influence « néfaste » sur la Duchesse. Qu'est-ce qu'il ne fallait pas entendre…


Elle fixa son amie un instant, songeuse. Ce n'était peut-être pas le moment de lui dire qu'une de ses collègues l'avait informé de la venue d'Erwin plus tôt dans la soirée. La jeune courtisane avait jugé bon de la tenir au courant, puisqu'elle s'était renseigné quelques semaines plus tôt auprès de tous les bordels de la ville. Elle avait d'ailleurs pensé que Lilith l'avait appris, et qu'elle était venue l'insulter pour évacuer sa colère. Elle s'imaginait déjà Lilith hurler plein poumon et cracher toute son amertume… D'un autre côté, elle n'avait aucune raison de garder ça pour elle, et n'avait jamais épargné son amie auparavant. Elle était partisane de la vérité, crue, sans détour, et Lilith ne s'en était jamais plaint. Après tout, elle avait vu bien pire, elle survivrait.


- Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça. Tu me fais peur. Tu sais que tu as la même tête que la fois où tu n'osais pas me dire que vous aviez mangé votre chien ?

- Déjà j'ai réussi à te le cacher longtemps avant que tu me démasques…

- Tu rigoles ? Il était toujours avec toi d'habitude et t'avais dégagé ses affaires ! S'étouffa Lilith.

- Hé ! Ma mère en était malade aussi OK ? On n'avait pas le choix !


Lilith planta son regard dans celui de son amie. Elle capitula rapidement.


- Erwin s'est tapé une courtisane plus tôt dans la soirée. Pas ici, mais on est venu me le dire… Comme je m'étais renseignée il y a peu….


La brunette laissa échapper un râle qui se termina par un hurlement. Un son mi humain mi animal, mais suffisamment fort pour que Jen ressente le besoin de couvrir ses tympans. Comme elle l'avait deviné, la nouvelle l'avait achevé.


- Je vais aller me coucher… Je risque ma vie demain et j'ai rendez-vous à l'aube à leur quartier général pour tester les manœuvres tridimensionnelles avec Levi. Fais-moi un câlin.


Jen enlaça tendrement son amie d'enfance. Elle n'était pas très inquiète pour elle. Certes, elle avait développé cette étrange obsession pour le seul homme du Royaume qui ne semblait pas la désirer, et il n'y était pas allé de main morte pour la tenir à distance, mais ce n'était pas si grave que ça en avait l'air selon elle. Elle s'inquiétait davantage pour son retour dans la ville de Karanese après toutes ces années. La Duchesse n'y avait jamais remis les pieds depuis l'exécution de son père biologique, lorsqu'elle n'était encore qu'une enfant. Elle n'en avait jamais fait allusion, mais Jen savait que Lilith n'avait jamais digéré ce qu'il s'était passé. Elle en avait fait un sujet tabou, un sujet qui la mettait très rapidement en colère, comme si elle détestait cet homme, et qu'elle ne voulait plus jamais entendre parler de lui. Et pourtant, la jolie blonde savait combien elle avait pu être proche de son père, même si à l'époque, elle n'avait pas conscience de qui il était. Du moins pas au début.


- Lilith, je n'aime pas te savoir seule à Karanese, est-ce que tu veux que je vienne t'accueillir, et on passe la soirée ensemble avant de repartir au petit matin ?


La jeune femme resta un instant silenceieuse. Jen était perspicace. Elle radoucit rapidement son regard et esquissa un sourire.


- Oui, merci Jen. Tu pourras voyager avec Liam si tu le souhaite, je paierai les frais de déplacement.


Elle se sourirent tendrement puis Lilith regagna l'extérieur accompagné de son homme de main. Ils regagnèrent le QG des Brigades Spéciales et retrouvèrent leurs chevaux dans l'écurie militaire. Lilith se décomposa lorsqu'elle tomba nez à nez avec Erwin, qui s'apprêtait également à rentrer à cheval. Il la toisa de haut en bas comme s'il cherchait quelque chose et la fixa étrangement. Elle remarqua qu'il entre-ouvrait légèrement la bouche pour parler mais lui coupa net la parole.


- TOI, ne me parle pas.


Même Ghérart s'immobilisa, surpris de son attitude. Il jura d'ailleurs qu'Erwin avait sourit, comme amusé de la situation. Le beau militaire n'insista pas et chevaucha sa monture avant de disparaître dans l'obscurité. Lilith et Ghérart en firent de même, puis enfin seule dans sa chambre, la Duchesse s'écroula dans son lit, exténuée. Elle ne tarda pas à s'endormir.


Les premiers rayons du soleil suffirent à la réveiller, et Lilith rassembla ses affaires pour partir. Sous les conseils de Levi, elle emporta une tenue confortable, et un pull chaud pour la nuit. Un pantalon marron, une blouse noire et un pull ample jaune moutarde feraient parfaitement l'affaire. Elle ne résista pas à l'envie de porter quelques bijoux et opta pour des boucles d'oreilles en diamants discrètes en plus de sa chevalière. Elle se retourna frénétiquement, Liam était devant la porte.


- Tu peux arrêter de me regarder comme si c'était la dernière fois qu'on se voyait ?

- Franchement, je me sens maussade… Avoua-t-il.

- Tu veux venir ? Lui répondit-elle d'une voix ironique.

- NON. Je vais très bien. Je me sens en pleine forme et tu peux compter sur moi pour t'attendre devant la porte de Karanese !


Elle sourit. Liam n'avait nullement l'ambition de découvrir l'extérieur. Il était même terrifié par cette idée. Elle s'assura que son second ait bien compris quelles affaires emmener pour son retour, car il était bien entendu hors de question que le Compte de Karanese la voit dans une tenue aussi négligée. Ils étaient sensés arriver en fin d'après-midi dans deux jours, et le Compte l'avait donc invité à dîner le soir-même. Encore une merveilleuse soirée qui s'annonçait…


La jeune femme salua ses deux gardes du corps et rejoignit le QG du Bataillon à cheval. Ce fut Hanji qui l'accueillit, et elle ne tarda pas à exprimer sa surprise, que Liam ne l'accompagne pas. Elle sourit. Liam était fichu. Il n'allait pouvoir fuir la promesse qu'il lui avait fait, et devoir passer au moins une journée à l'écouter parler des Titans. Elle le plaignit sincèrement.


- Tant pis. Souffla-t-elle. Viens, tu as mangé ? On prenait le petit déjeuner !


Et voilà, même Hanji la tutoyait maintenant.


- J'ai hâte que tu rencontres Pétra ! C'est une membre de l'escouade de Levi, elle est trop mignonne !

- Ah oui ? Ça ne doit pas être facile pour elle tous les jours…

- Oh, elle aime ça ! Lui répondit la scientifique avant de l'inviter à rentrer dans le château.


Comme elle l'avait dit, toute l'équipe était installée dans la salle commune et prenait tranquillement leur petit déjeuner. Chaque chef d'escouade était entouré de ses membres. Erwin quant à lui se tenait en bout de table. Il se leva pour la présenter au Bataillon, et Lilith les salua collectivement de manière respectueuse.


- Assieds-toi ! Je pensais que tu viendrais avec Erwin hier soir, t'as dû te lever tôt… Fit remarquer Hanji avant d'engloutir une tartine de pain.

- Erwin et moi on avait nos propres occupations respectives hier…


Elle ne put s'empêcher de jeter un regard furtif en direction du Commandant. Il semblait interdit. Elle détourna rapidement les yeux et remarqua une jeune femme rousse aux côtés de Levi. Une sorte d'aura douce et agréable lui donna la conviction qu'il s'agissait de la recrue qu'avait mentionné Hanji plus tôt.


- Tu dois être Pétra ? Lui demanda-t-elle.

- Euh… oui… Enchantée… Comment le savez-vous ?

- Tu peux me tutoyer, ton supérieur ne s'embête pas avec ce genre de politesse… Hanji m'a parlé de toi.


Il eut quelques éclats de rire. Visiblement Hanji était connue pour encenser la jolie rousse. Elle lui avoua même vouloir la recruter dans sa propre escouade, ce à quoi Levi marmonna un « ça n'arrivera jamais ».


- Qu'est-ce que tu as au niveau du cou ? S'étonna Hanji.


Lilith esquissa un sourire. Cette femme avait inventé le concept de l'intrusion. Elle toucha délicatement l'endroit que la brunette pointait du doigt et sentit plusieurs griffures. Elle avait sûrement dû se mutiler la veille en hurlant dans l'arrière cours, la tête entre les mains… C'était d'ailleurs peut-être ceci qu'Erwin avait fixé la veille…


- Ça ? Hmm… Une mauvaise rencontre on va dire. Répondit-elle tout sourire.


Hanji n'insista pas et le repas se termina sans encombre. Les membres des deux escouades allèrent s'occuper des chevaux tandis qu'Erwin s'excusa et regagna son bureau. Le Caporal se leva alors et proposa à la Duchesse de sortir. Elle déglutit. Elle avait déjà vu le Bataillon en action aux portes de la ville avec leurs équipements. Ils étaient rapides, précis : impressionnants. De nature, elle avait toujours aimé les sensations fortes, les grands galops, le goût du danger, mais là, elle doutait de pouvoir supporter l'adrénaline. C'était d'un autre niveau.


- Normalement, on n'aura pas à l'utiliser, mais si c'est le cas, je veux que tu saches te positionner pour ne pas me gêner.

- Je me mets comment ? Comment est-ce que je ne te gêne pas ?


Il prit un instant pour apprécier la scène. Elle le regardait avec des yeux ronds et inquiets, comme une enfant. Il se prit à penser qu'elle était bien plus agréable lorsqu'elle n'était pas en position de force.


- On va faire un essai, tu te mets comme tu veux, enfin comme tu peux… et on va voir.

- Mais… euh… je veux dire si je me rate tu me rattrapes ?


Il ricana tandis qu'elle répétait sa dernière question. D'un geste expert, il libéra le gaz de son équipement et Lilith s'agrippa violemment à lui pour survivre. Elle n'eut pas le temps de cligner des yeux qu'ils se retrouvèrent sur une large branche d'un arbre qu'elle n'avait même pas eu le temps de voir.


- Refais ça, et on va mourir tous les deux.

- Pourquoi est-ce que tu ne m'expliquerais pas simplement comment tu veux que je me tienne ? S'impatienta-t-elle alors qu'elle tentait tant bien que mal de reprendre son souffle.

- Ce n'est pas compliqué ce que je demande Everglow, j'ai juste besoin d'avoir une parfaite mobilité de mes épaules, OK ? Donc tu t'accroches comme tu veux, mais ne touche pas aux gaines sur les côtés. Tu peux par contre taper dans la cartouche ça c'est solide.

- Mais tout est solide non ? Il n'y a pas de vrais risques que j'abîme le matériel avec mon poids n'est-ce pas ?

- On réessaie.


Elle n'eut pas le temps de protester que Levi s'élança à nouveau dans les airs. Au bout de quelques essais, le Caporal trouva leur entente satisfaisante et revint sur la terre ferme. Son équipe les regardait d'un air hilare.


- Everglow, ouvre les yeux et descend, c'est fini.

- Mais... maintenant que j'ai trouvé une bonne position je crois que je vais juste rester comme ça…


La jeune femme s'était agrippée à lui d'une telle force qu'elle ne parvenait même plus à détendre ses muscles. Vu de l'extérieur, elle semblait être devenue un koala.


- Tu as trois secondes pour dégager de mon dos. Un, deux…


Lilith lâcha sa prise et atterrit violemment sur le sol. Levi réalisa alors combien elle tremblait. Il se demanda où elle avait trouvé la force de s'agripper à lui avec tant d'efficacité alors même qu'elle semblait avoir complètement perdu ses moyens.


- Et moi qui trouvais que tu ne te débrouillais pas si mal que ça finalement… Râla-t-il.

- Tu…as dit qu'on n'aurait pas à l'utiliser hein ?

- Non, on restera à l'écart tranquille pendant que les autres feront de l'éclairage, et on a choisi un itinéraire peu dangereux. Ne t'inquiète pas.

- « Peu » dangereux…Super… Lâcha-t-elle sans cacher son profond désespoir.


« Tout va bien ? »


Lilith soupira. Erwin les avait rejoint. Les éclats de rire de ses collègues avaient dû attiser sa curiosité.


- On dirait qu'elle a fait ça toute sa vie, tout ira bien… Se moqua Levi en la laissant en plan à même le sol.


Pétra lui proposa son aide pour se relever et elle put à son tour se rendre compte de son degré de tremblement. Elle passa gentiment son bras autour d'elle et l'amena s'asseoir plus loin. Le reste de la journée se passa paisiblement. Ils mangèrent ensemble à midi, les soldats vérifièrent les équipements avant le départ et se tinrent prêt à partir. Il faisait encore beau, mais la journée allait bientôt prendre fin.


Pétra décida de prendre des nouvelles de Lilith, qu'elle avait trouvé très pâle après l'entraînement de Levi. La scène avait été tellement loufoque qu'elle ne s'était même pas offusquée de sa proximité avec son supérieur. Elle s'arrêta à l'embrasure de la porte principale quelques secondes. La Duchesse s'était installée dans le fauteuil de la salle commune pour se remettre de ses émotions. Telle une gravure, elle se tenait droite, assise, les jambes croisées, et contemplait le coucher du soleil d'un air songeur au travers de la fenêtre. La jolie rousse n'avait jamais côtoyé de personnes de la noblesse. Aux dires de son Caporal, elle s'était faite une toute autre image de la jeune femme. Elle ne lui paraissait finalement ni hautaine, ni impertinente, encore moins désagréable : elle la trouvait belle et attachante. Bien avant de penser à rejoindre le Bataillon, Pétra rêvait de châteaux et de robes de princesses. Elle avait toujours été fascinée par les filles du Compte de Yalkell, sa ville natale. Les trois gamines avaient sensiblement son âge, et elle les avait souvent vu se pavaner en publique, toujours vêtues de robes plus magnifiques les unes que les autres. Son père lui disait souvent qu'elle n'avait rien à leur envier, car les nobles n'avaient ni cœur, ni générosité. « Ce ne sont pas des gens sincères, ils sont sombres » lui disait-il. Pourtant, elle ne pouvait nier que toutes ses femmes brillaient de mille feus à ses yeux.


- Vos avez de magnifiques cheveux. Lui dit-elle timidement.

- C'est drôle que tu me dises ça, j'ai toujours été fascinée par les cheveux roux. Ils brillent au soleil je trouve que c'est vraiment hypnotisant. Tu ne me tutoie pas alors ?

- C'est que… vous êtes Duchesse tout de même….

- Est-ce que c'est désobligeant que je te tutoie ? Je tutoie quasiment tout le monde ici, mais vous êtes plusieurs à continuer à me vouvoyer. C'est humiliant ?


La jolie rousse balança négativement la tête de droite à gauche, surprise de cette question. S'inquiétait-elle de paraitre méprisante ?


- Je me posais la question. Tant mieux alors.


La voix rauque et autoritaire du Major les sortirent immédiatement de leur bulle. Il venait de sonner le départ. Chacun regagna les écuries et s'empara de son cheval. Lilith apprécia ne pas devoir chevaucher avec Levi. Il était très inconfortable de monter à deux sur le même cheval, et elle s'était inquiétée à ce sujet, sans pour autant qu'elle n'ose poser la question en avance.


Hanji et son escouade les saluèrent et ils partirent en direction de la porte de Trost. La Duchesse soupira de soulagement. De là où elle était, elle ne voyait même pas Erwin.

Elle fut parcouru d'un frisson vivifiant, entourée du Bataillon d'Exploration. Elle eut une pensée pour son père. Que ressentait-il lorsqu'il partait à l'aventure ainsi ? Avait-il des camarades aussi sympathiques qu'eux ? Avait-il peur, lui arrivait-il de penser à elle ?


Cette dernière pensée lui assombrit le visage et elle chassa ce genre d'interrogations de sa tête.


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