Le poids des Apparences

Chapitre 17 : Ne parle pas de mon père

2532 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 25/04/2020 03:07

"Un des nobles fit soudainement face à Lilith. [...] il l'aborda avec audace.


- Vous êtes tombée bien bas... Je suis consterné de m'apercevoir que ce n'étaient pas que des rumeurs, comment une noble de votre envergure peut se rabaisser à ...


- Qui est cet idiot, Maxence ?"


___________


Lilith l'avait à peine regardé, et le noble, bien plus âgé qu'elle, commençait à perdre son assurance. Maxence répondit à sa question.


- Il s'agit du Baron de ...

- Un Baron. Merveilleux. Souffla-t-elle sans le laisser finir. Elle poursuivit, toujours sans adresser la moindre attention à l'homme.

- Je vois que le dressage n'est toujours pas ton fort. Une Cour ça s'éduque tu sais...

- Je préfère punir qu'éduquer, tu le sais bien...

- Oh ? Maintenant tu fais la différence entre les deux, j'ai raté quelque chose ? Se moqua-t-elle.

- Votre défunt père aurait honte de vous ! S'écria le Baron, dans un ultime effort pour attirer son attention.


Elle lui fit alors face et planta ses yeux dorés dans les siens. Elle était légèrement plus petite que lui, mais il sentit le besoin de reculer.


- Si vous insistez, je peux vous organiser une rencontre. Lui fit-elle d'un ton glacial qu'elle accompagna d'un léger sourire sarcastique.

- C'est...c'est une menace ?

- Non. Les menaces c'est pour les faibles. Je ne menace pas, j'agis. Maintenant si vous voulez tout savoir, je ne tolère pas ce manque de respect, surtout de la part d'un inférieur. Allez-vous continuer à me contrarier ou allez-vous retrouver la raison et rester à votre place ?


Le Compte de Karanese se délecta de la scène, tandis que le Baron se décomposait. Le pauvre homme finit par se confondre en excuses et quitter les lieux.


- Quelqu'un d'autre estime qu'il peut avoir une opinion à mon sujet ? Demanda Lilith d'une voix qui résonna dans la pièce entière.

- C'est bien ce qu'il me semblait. Ricana Maxence après un long silence.


Il jubilait de se tenir à ses côtés en cet instant. Le Compte l'invita à s'asseoir pour discuter et mit à l'aise Erwin et ses troupes afin qu'ils se sentent libre de se servir à boire et à manger et s'installer selon leur bon vouloir. Il fut surprit qu'Erwin et ses trois chefs d'escouade ne leur laissent que peu d'intimité en s'asseyant à proximité de lui et Lilith.


La jeune Duchesse l'obligea quelque peu à orienter la conversation sur le Bataillon, et Maxence fit l'effort de formuler des questions concernant leurs activités. Il fit de son mieux pour ne pas irriter Lilith mais il ne dupa personne quant à l'intérêt inexistant qu'il témoignait à Erwin. C'était si flagrant qu'elle finit par s'en amuser en le poussant dans ses derniers retranchements. Quand elle estima que la farce avait assez duré, elle le laissa recentrer la conversation sur d'autres sujets, plus familiers pour lui. C'est à ce moment là qu'un valet entra précipitamment dans la pièce. Il informa son Maitre qu'un intrus armé avait été arrêté alors qu'il essayait de les rejoindre. Probablement pour s'attaquer à la Duchesse.


- Tu es très aimée en ce moment Lilith.


Elle haussa les épaules et détourna le regard, comme si elle redoutait quelque chose. À son grand damne, cela ne se fit pas attendre.


- C'est l'heure de la correction ! S'exclama-t-il. Tu viens ? Il est venu pour toi, tu te dois d'être présente.


Lilith inspira profondément et le suivit sans un mot. Liam voulut la suivre mais le Compte lui signifia de ne pas bouger. Il attendit que la Duchesse lui confirme son accord et les laissa quitter la pièce.


- Ce mec est dingue non ? Murmura Oluo.

- Tu n'as aucune idée. Souffla Liam qui se sentait désolée pour Lilith.


L'absence de l'hôte permit aux membres du Bataillon de se détendre, et ils savourèrent la nourriture à disposition. Puis au bout d'un certain temps, les aristocrates disparurent les uns après les autres. S'ennuyaient-ils, ou était-ce prévu qu'ils ne restent pas longtemps pour que le Compte profite seul de la compagnie de Lilith ? Erwin trouva le temps long et se demanda ce qu'ils pouvaient bien faire à ce pauvre intrus. Plusieurs valets les invitèrent à rejoindre la salle à manger, et ils comprirent en voyant la table toute préparée que le Compte de Karanese avait prévu un véritable repas. Ils prirent place tandis que le valet en chef leur assura qu'ils n'allaient pas tarder à revenir.


Quelques minutes plus tard, Lilith réapparut dans la pièce, seule. Elle s'avança et prit place en face d'Erwin tout au bout, tandis que la place de Maxence présidait la table. Elle lui parut plus pâle que d'habitude, et sa respiration saccadée, malgré les efforts qu'elle déployait à ne rien laisser paraitre, mais Erwin ne dit rien. Livaï, assis à la droite du Major, fixa un instant le bras de la Duchesse. Elle jeta un coup d'œil rapide, trouvant cela suspect et s'aperçut que du sang perlait son avant-bras. Elle attrapa frénétiquement sa serviette et essuya les quelques gouttes. Liam lui proposa spontanément de changer le tissu et s'en s'empara. Lorsqu'il revint avec une autre serviette, Maxence était revenu, et la Duchesse lui demanda d'enlever son verre de vin et de lui apporter de l'eau à la place. On ne tarda pas à leur servir leurs plats.


- Quelle belle soirée ! Je vous en prie, régalez-vous ! Tout va bien Lilith, tu es un peu pâle... Tu ne manges pas ? Je t'ai fais préparer un merveilleux gaspacho de tomates, toi qui ne mange pas de viande...

- Tout va bien. Répondit-elle d'une voix agacée. Je n'ai pas faim c'est tout. Murmura-t-elle tout en évitant de regarder le liquide rouge et pâteux dans son assiette.


Maxence savait très bien pourquoi elle faisait cette tête. Un serveur lui retira l'assiette et elle parut retrouver une certaine sérénité une fois qu'elle but son verre d'eau.


- J'ai entendu dire que le Compte Johanes était mort... Un tragique accident de cheval parait-il... Sa famille est dévastée...C'est tellement triste...


Elle le regarda d'un air désabusé. La soirée allait vraiment être longue... Allait-il aborder tous les sujets embarrassants devant Erwin ?


- Tu sais très bien pourquoi j'ai dû m'en séparer. Et « sa famille est dévastée » ? Arrête si tu veux bien, à l'heure qu'il est sa femme doit danser autour d'un feu en louant mon nom.


Il arbora un sourire satisfait. Il avait enfin réussi à l'éreinter, et elle commençait à perdre patience en montrant ses vraies couleurs. Il la préférait avec du relief, même si elle en devenait plus dangereuse.


- Quand je pense que c'est moi que l'on qualifie de monstre... Continua-t-il sans la lâcher des yeux.

- Tu sais, je vais être claire, ce soir je rentre SEULE. Alors puisque tu nous as rendu service, et que visiblement l'idée que je sois aussi tordue que toi te plait beaucoup... j'accepte de jouer ton jeu.

- Dois-je énumérer toutes tes folies pour que tu te rappelles qui tu es ? S'énerva-t-il, n'appréciant guère son ton.


Chacun des militaires se demanda ce qu'il faisait là. L'ambiance était extrêmement étrange, depuis le début, et cela commençait à devenir vraiment gênant. Quand pourraient-il s'enfuir ? Ils regardèrent Erwin comme pour lui demander s'il avait un plan, mais celui-ci semblait absorbé par la scène. Lilith et le Compte continuait de s'envoyer des pics tout en dégustant leur dessert, que les valets venaient d'apporter. Visiblement, Lilith avait retrouvé un semblant d'appétit pour déguster la tarte au citron.


Dans la conversation, ils apprirent que le Compte était un cousin éloigné de la Duchesse. Tout s'expliquait donc pour ses yeux dorés. Une réplique plus haute que les autres retirent leur attention.


- Oh...! S'exclama-t-elle. Venant de la part de quelqu'un qui garde les yeux de ses victimes dans des bocaux je trouve ça gonflé, Maxence.

- JE suis la victime, je n'ai pas forcé ces gens à vouloir me faire du mal. Et c'est un Art.

- C'est surtout dégoûtant.


Il sursauta, comme piqué à vif. Ce moment marqua le tournant de la soirée. Lilith ne le sentit guère, mais elle venait de le blesser profondément, et l'alcool n'aidant pas à le raisonner, le Compte décida de contrattaquer avec la seule arme efficace contre Lilith : son père.


- Je n'ai pas de leçon à recevoir de toi. Je te rappelle que tu n'as même pas lâché une larme, ni quand on l'a exécuté sous tes yeux, ni quand ta pauvre mère, paix à son âme, s'est tranché la gorge en hurlant. Quelle genre de mère abandonne ainsi son enfant d'ailleurs, tu devais être sacrément compliquée...


Elle laissa tomber sa fourchette dans son assiette, abasourdie. Il devait sacrément avoir confiance en leur relation pour oser parler de l'exécution de son père en public. S'imaginait-il qu'elle le portait dans son cœur ? Qu'elle n'oserait pas le tuer après un tel acte ? Elle rassembla toutes ses forces pour rester calme et ne pas lui planter sa fourchette dans la jugulaire.


- J'avais six ans Maxence, crois-moi, je suis confuse si mon manque de réaction t'as choqué à l'époque. Ceci étant dit, peut-être que si tu n'avais pas été aussi émerveillé par l'effusion du sang provoquée ma mère, tu aurais remarqué que j'étais terrifiée.

- Tu es restée calme et quand je suis parti tu étais assise sous un banc, tu allais parfaitement bien.

- Ça s'appelle être en état de choc, Maxence. Mais pour comprendre le concept j'imagine qu'il faut avoir un minimum d'empathie. Répondit-elle de manière saccadée, trahissant qu'elle était à deux doigt d'exploser.

- Mouais. C'est quand même une sacrée histoire que tu te montres de nouveau ici, accompagnée de membres du Bataillon d'Exploration... Vous avez prévu une petite cérémonie d'hommage à Thomas Grahm demain ? Pour info par contre on a changé la potence depuis le temps... Je préfère te le dire que tu ne sois pas déçue...


Elle en resta sans voix. Son état d'ébriété avancé ne constituait plus une excuse suffisante. Il avait dépassé les limites. Non, il était même allé faire un tour du monde et les avait piétinées plusieurs fois. Elle n'aurait jamais imaginé qu'il ose tenir de tels propos. C'était juste un petit Compte de province, loin de Mitras, et à des années lumière de son rayonnement. Ils se chamaillaient gentiment d'habitude, et elle avait toujours eu le dessus. À quel moment s'était-il senti de franchir ce cap ? Erwin avait écarquillé les yeux en la regardant. Bien entendu, elle n'avait jamais mentionné que son père avait fait parti du Bataillon. Quelle charmante façon de lui livrer l'information... Quant à Hanji, elle s'était émerveillée à l'annonce du dit nom de famille : « Grahm ». Lilith Everglow Grahm. LEG. L'acronyme de toutes les donations anonymes versées au Bataillon d'Exploration depuis presque dix ans. Elle avait immédiatement fait le rapprochement. Cela devenait de plus en plus intéressant.


- Maxence.

- Oui ?

- Si tu prononces encore un seul mot au sujet de mon père, je te détruis. Crois-moi, ces paroles seront les dernières que tu auras prononcé avec un titre de noblesse. Je brûlerai ta réputation, et je te prendrai tout ce pour quoi tu t'es battu toutes ces années, avant de te laisserai crever sur le trottoir avec tes « bocaux ».

- Le message est très clair. Je ne dis plus rien, calme-toi. Mes mots ont dépassé ma pensée.


Il avait baissé les yeux, comme s'il venait de reprendre ses esprits. Lilith tremblait de fureur.


- Bien. Écoute, je suis fatiguée d'écouter tes conneries, je vais rentrer.

- Tu ne peux pas partir comme ça ! Je te tiens ! Tu dois me considérer, sinon je bloquerai mon vote pour ta loi ! S'emporta-t-il. Je suis au courant de ce que tu comptes faire ! Reste ! Tu es obligée.


Elle le toisa froidement alors qu'elle s'était levée pour quitter la table. Liam se tenait prêt à intervenir à tout moment.


- Je suis obligée ? Je suis obligée de quoi exactement ? Tu n'es personne pour moi. « Bloquer ton vote » mais fais ce que tu veux, si tu me gênes, je te remplacerai par quelqu'un de plus coopératif.

- Je suis ton cousin ! S'étouffa-t-il. Je suis ta famille !

- Ma famille ??? Où était ma famille quand il m'a enfermée dans cette putain de tour ? Hein, tu étais où ??????


Elle avait presque hurlé sa dernière réplique, et le Compte s'était figé.


- Des nobles qui rêvent de prendre ta place, il y en a beaucoup. Reprit-elle d'une voix beaucoup plus calme. Et au cas où tu l'aurais oublié, je suis la Duchesse Lilith Everglow. Tu es qui toi ?

- Je... je peux t'avoir la boîte, je peux t'avoir le carnet ! Laisse-moi mon titre ! La supplia-t-il.


Elle leva les yeux au ciel. Mais qu'avaient-ils tous avec ce carnet... Pour en avoir elle-même lu le contenu, il n'y avait pas de quoi en faire tout un scandale... L'informateur avait rajouté quelques faux secrets la concernant en échange d'une généreuse somme. Elle l'avait fait au cas où, mais était à mille lieux d'imaginer que tout ceci prendrait une telle ampleur. Elle y avait caché un vrai secret dans la masse. C'était une technique redoutable, car elle était connue pour contrôler diaboliquement bien sa réputation. Il lui suffirait de laisser fuiter son accord avec l'informateur, et tout son contenu la concernant serait décrédibilisé. Elle devait bien être la seule à ne rien craindre de ces morceaux de papiers.

Maxence s'était mis à genoux, désemparé.


- Relève-toi crétin. Ne me parle plus jamais de mon père, demain j'oublierai ce que tu as fait. Je suis fatiguée, j'ai failli mourir pendant l'expédition je n'ai pas la force de te supporter plus longtemps ce soir.


Elle fit signe à Liam de la suivre et quitta la pièce. Les militaires profitèrent de l'opportunité pour décamper à leur tour et saluèrent le Compte, toujours à genoux. Une fois dehors, les langues se délièrent.


- C'était... intense hein ? Fit remarquer Hanji.

- C'est le moins qu'on puisse dire... Et moi c'était la première fois que je la voyais... Précisa Moblit.

- C'était violent. Ajouta Pétra.

- Terriblement gênant. Compléta Oluo.

- Je dirais juste monstrueux. Finit Nanaba. Mais la tarte au citron était délicieuse non ?


Mike lui adressa un sourire entendu. Quant à Levi, il fusillait son supérieur.


« Erwin, je ne t'accompagnerai plus JAMAIS à aucune soirée ».




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