Un Vide de Vérité

Chapitre 3 : Découverte

2167 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/09/2020 23:50

Les papiers de devinette gisaient éparpillés sur le sol, du gâteau au chocolat il ne restait maintenant que quelques miettes dans les assiettes vides. Un feu encore vif continuait de brûler dans la cheminée, insensible aux éclats de rires et aux discussions qui allaient bon train. Kristoff s’affala davantage dans le canapé.


« Wouah ! Je n’en peux plus. Ce repas était vraiment délicieux mais je crois que j’ai trop mangé. »


Il modula sa voix pour prendre l’intonation de Sven.


« Peut-être que tu n’aurais pas dû te resservir 3 fois du gratin de légume avec toute cette sauce !

-Je sais Sven, c’est toi qui as raison mon vieux, comme toujours ! Je crois que je vais aller dormir, ça ne vous dérange pas les filles si je vous laisse finir la soirée sans moi ?

-Vous pouvez tous aller dormir, je vais ranger. » Elsa sourit à l’assemblée mais sa sœur secoua la tête

« Je vais t’aider à ranger, laissons les petites natures se remettre de leurs émotions.

-Hé ! Je ne suis pas une petite nature ! Il y avait vraiment beaucoup de sauce ! »


Anna l’embrassa tendrement tandis que Sven le poussait déjà vers la porte, Olaf sur le dos.


« Bonne nuit les filles et à demain ! »


Elsa sourit, elle récupéra quelques cartes éparses dans un silence confortable qu’elle partageait avec sa cadette. Chaque fois qu’elle venait, Kristoff, Olaf et Sven finissaient par s’éclipser pour les laisser toutes les deux. Si la jeune femme trouvait ça très touchant, elle ne pouvait s’empêcher de penser qu’une fois de plus, elle prenait une place trop importante dans la vie de sa sœur.


« Je devrais peut-être rentrer moi aussi.

-Quoi ? En pleine nuit ? Elsa tu n’y penses pas ?

-La nuit ne représente pas vraiment un danger tu sais, j’ai m…

-Tu as tes pouvoirs pour te protéger, je sais. Mais pourquoi veux-tu déjà partir ? Tu ne te sens pas bien ici ? C’est ça ? »


Il y avait un sujet qu’elles n’avaient pratiquement jamais abordé ensemble, c’était le fait qu’Elsa soit devenue le cinquième esprit. Anna s’était toujours demandé si cela avait changé quelque chose chez sa sœur. Ou plutôt, à quel point cela avait changé sa sœur.


« Quoi ? Mais non Anna, je me sens très bien ici… C’est juste que…

-Que quoi ? Est-ce que tu dors à la belle étoile maintenant ? Parce que si c’est le cas, il suffit de le dire et on aménagera un espace à l’extérieur !

-Comment ? Non ce n…

-Ou alors, tu as tellement besoin de nature et d’espace que l’idée de dormir enfermée entre 4 murs est devenue horrible ?

-Pas du t…

-Je ne veux pas que tu sois malheureuse, Elsa. Alors… Si tu dois repartir, alors… Bien sûr que tu peux repartir. Je veux dire, évidemment que tu n’es pas prisonnière, le royaume d’Arendelle c’est aussi ton royaume, le nôtre d’ailleurs. Alors tu vas où tu veux, quand tu veux, en pleine nuit, en pleine journée, à midi… Pffrrrt ! Personne n’aurait rien à redire là-dessus et surtout pas moi !

-Anna…

-C’est juste que tu me manques, Elsa. »


La dernière phrase finit de désarmer l’ancienne reine, elle prit sa sœur dans ses bras et la serra tout contre elle, avec toute la tendresse du monde.


« Oh Anna… Tu me manques aussi. 

-Alors, pourquoi est-ce que tu dois déjà repartir ? »


Sa cadette s’exprimait d’une toute petite voix un peu malheureuse qui lui brisa le cœur. Mais comment trouver les mots justes ? Elsa prit une légère inspiration.


« Anna… »


Elsa s’écarta et repoussa doucement une mèche de cheveux du visage de sa sœur, elle lui sourit tendrement.


« Tu sais… Je ne veux pas tout gâcher.

-Je ne comprends pas Elsa, comment ta présence ici pourrait gâcher quoique ce soit ?

-Tu construis une vie ici, avec Kristoff et… Je ne veux pas prendre trop de place. »


Anna haussa les sourcils d’incompréhension, elle se redressa, contrariée.


« Tu es ma sœur, Elsa, comment peux-tu penser un seul instant que tu prends trop de place ?

-Je ne sais pas trop comment l’expliquer. Chaque fois que je suis avec toi, j’ai toujours l’impression que le reste du monde s’efface pour nous laisser ensemble et je ne m’en plains pas ! Tu sais que j’adore être avec toi Anna. Mais comme je l’ai dit, tu as aussi une vie à construire.

-Et tu ne dois pas en faire partie ? »


L’incompréhension était totale, Elsa se releva à son tour pour prendre les mains de sa cadette dans les siennes.


« Bien sûr que si.

-Je ne comprends pas, Elsa. Tu ne vis plus ici, comment pourrais-tu prendre trop de place ? »


Anna venait de marquer un point. Même si ça n’éliminait pas le sentiment de l’ex reine, elle devait admettre que la remarque de sa cadette était juste. Elle sourit tendrement.


« Tu as raison, Anna. C’est juste moi qui cherche des complications là où il n’y en a pas. Je crois que je continue de m’adapter à ma nouvelle vie.

-Alors tu restes dormir ? »


L’ancienne reine rit doucement.


« Oui, je reste dormir. Et je ne sais pas où tu es allée chercher que j’avais besoin de dormir à la belle étoile mais crois moi, j’apprécie toujours le confort de ma chambre ! »


Anna rit à son tour, enfin rassurée.


« D’accord. Est-ce que tu es fatiguée ? Parce qu’il y a quelque chose que j’aimerai vraiment beaucoup te montrer. Mais ça peut attendre demain si tu veux.

-Non, allons-y maintenant, je ne suis pas fatiguée. »


D’autant qu’elle était surtout très intriguée. La reine prit la main de son ainée dans la sienne et la guida dans les longs couloirs du château jusqu’à la grande bibliothèque. Perplexe, Elsa regardait autour d’elle sans trop comprendre.


« Hé bien ? Qu’est-ce que je suis supposée voir ?

-Par ici. »


Anna glissa sa main derrière le rebord de la cheminée. Un son étouffé se fit entendre et un pan de la bibliothèque se mit à bouger.


« Anna ! Qu’est ce qu…

-Une pièce secrète !

-Quoi ? Mais depuis quand ? Et pourquoi faire ?

-Hé bien tu sais Elsa, les pièces secrètes, souvent, servent à cacher des choses. C’est incroyable non ?

-Anna…

-Je l’ai découverte il y a quelques jours et j’attendais que tu viennes pour te montrer, je pense que tu pourras m’aider.

-T’aider ?

-Oui, viens… »


La jeune femme repoussa l’étagère remplis de livres épais qui bougea avec une facilité déconcertante. Dans la pénombre, se dévoilait une pièce remplit de bric-à-brac en tout genre, il était difficile d’évaluer la taille de l’endroit tant il était encombré. Anna alluma les bougies une à une, révélant différents documents, des notes manuscrites, des cartes anciennes, des gants en nombre importants. Elle jeta un œil à sa sœur ainée.


« De ce que j’ai compris jusqu’à maintenant, je crois que c’est une pièce dans laquelle nos parents faisaient des recherches.

-Des recherches ? Mais sur quoi ?

-Sur… Toi ?

-Moi ! »


Anna hocha la tête, elle prit un carnet rempli de croquis et de notes.


« Regarde, c’est l’écriture de notre père, il faisait des plans sur les gants que tu pouvais porter, les différents matériaux.

-Il cherchait un moyen de contenir mes pouvoirs.

-Oui, pour que tu puisses sortir de ta chambre, c’est ce qu’il a écrit ici, regarde. »


Elsa parcourut des yeux les quelques phrases, son cœur battait la chamade, les souvenirs de cette période pénible affluaient et ils étaient difficile à contenir. Sa gorge se serra, le poids de la solitude et de la culpabilité pesait lourdement sur ses épaules, même encore maintenant.


« Nos parents voulaient que tu aies une vie la plus normale possible.

-Oui, mais à quel prix ?

-Elsa… »


L’ainée hocha la tête, oui, elles avaient déjà eu cette conversation. Elle ne devait pas se sentir coupable, ses pouvoirs étaient un don, un cadeau. Mais ses parents étaient mort d’avoir voulu comprendre et chercher une solution.


« Tu n’es coupable de rien dans cette histoire. »


Nouveau hochement de tête de la part de l’ancienne reine.


« Oui, tu as raison, je sais que tu as raison. »


Anna passa sa main dans le dos de sa sœur pour la réconforter. Elsa se blottit un instant contre sa cadette, son regard se posa sur un carnet ouvert, posé sur un pupitre. Si l’écriture lui était familière, le reste en revanche était indéchiffrable.


« Qu’est-ce que c’est ? On dirait l’écriture de maman.

-Oui mais… Je n’ai pas pu le lire. »


L’ancienne reine quitta l’étreinte réconfortante de sa sœur pour se saisir du carnet. Elle fronça les sourcils.


« On dirait… de l’Aldrien du Nord.

-Oui, c’est ce que je pensais aussi. C’était la langue des Nothuldras avant qu’elle ne soit interdite, on sait maintenant pourquoi. J’ai d’ailleurs fait lever cette interdiction.

-Tu as bien fait. Je dois pouvoir le faire déchiffrer. »


Anne sourit et hocha la tête.


« Je comptais là-dessus. »


Elsa referma le carnet avec soin.


« Cette pièce est fascinante… »


Son regard se perdit sur les étagères pleines à craquer, dans tous les ouvrages, il était question de magie. Il y avait une petite table avec un métier à tisser sur lequel on trouvait différents gants plus ou moins achevés. Des flacons dont le contenu restait complètement inconnu et qu’Elsa n’avait aucune envie de vérifier. L’air sec et poussiéreux était irritant. Elle approcha la bougie d’une autre étagère, pleine aussi, mais de carnets cette fois ci, tantôt avec l’écriture de son père, tantôt celle de sa mère.


« Pendant toutes ces années… »


Elle se sentait submergée par les émotions. Ahtohallan l’avait réconcilié avec ses parents, en partie. Depuis qu’elle avait compris comment fonctionnait son pouvoir, Elsa avait oscillé entre rage, tristesse et compréhension vis-à-vis de ses parents. La solitude complète dans laquelle ils l’avaient enfermé, la peur d’elle-même qu’ils avaient nourrie bien malgré eux durant toutes ces années. Tout lui était apparu plus clairement lorsqu’elle avait compris que son grand père, le roi Runeard, avait peur de la magie et qu’il avait certainement dû élever Agnarr dans la même méfiance. Sans parler de la bataille du barrage qui n’avait fait que renforcer cette défiance. Ses parents n’avaient pas eu d’autre choix que de garder ses pouvoirs secrets dans un royaume où tout le monde était persuadé que les Northuldra avaient attaqué les soldats d’Arendelle.


« Anna, comment étaient nos parents avec toi ?

-Qu’est-ce que tu veux dire ? »


Elsa haussa légèrement les épaules, elle se tourna vers sa sœur et lui sourit légèrement.


« Mes pouvoirs rendaient notre relation très compliquée. Je ne voulais pas qu’ils m’approchent parce que j’avais peur de leur faire mal. Je me suis toujours demandé comment ils étaient, avec toi.

-Je crois que c’est une question qui nécessite du gâteau au chocolat.

-Il en reste ?

-Oui, j’avais demandé à ce qu’on nous sauve quelques parts pour le petit déjeuner. »


Anna fit un clin d’œil complice à sa sœur ainée et lui prit le bras pour quitter la pièce. Elle actionna le mécanisme et la bibliothèque reprit sa place, comme si rien n’avait jamais existé. Etonnamment, le poids qui pesait sur les épaules d’Elsa sembla s’alléger également, ou alors c’était la perspective du gâteau au chocolat. 

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