Un Vide de Vérité

Chapitre 38 : Le plaisir de la vie

2445 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 05/02/2021 16:30

Le lendemain de la bataille, les habitants furent invités à regagner leurs demeures. Trop heureux de délaisser le confort spartiate des grossières huttes de terre en pleine forêt, ils eurent quand même un temps d’arrêt en arrivant sur les ruines de la place principale. Durant le combat, certaines façades d’habitation avaient été fortement endommagées, Le sol semblait avoir servis de trampoline à la famille de trolls de Kristoff : des nids de poules, des bosses étaient soudainement apparus, mais surtout des trous béants et gigantesques, la lave avait également provoqué de nombreux dégâts et il était devenu absolument impossible de s’y déplacer à cheval. En bref, la place ressemblait maintenant à un champ de bataille, ce qui est précisément ce qu’elle avait été.


Anna et Lenjo furent libérés de la marque Maitre/esclave aussi vite possible et tout juste après, le couple royal fit l’annonce de leur mariage qui se tiendrait sur la place reconstruite d’ici 1 mois jour pour jour. De nombreux habitants s’étonnèrent à la fois d’une date aussi rapide après des fiançailles de presque 1 an, mais surtout, beaucoup étaient ceux qui doutaient que les travaux soient achevés. Mais c’était sans compter sur l’aide des 4 esprits qui participèrent activement. Et finalement, le chantier se révéla beaucoup moins fastidieux qu’il n’y paraissait.


L’existence de Derlock avait été relégué au second plan, plus personne ne se souciait de lui, si ce n’est les gardes qui lui apportaient les repas dans sa geôle. En fait, tout le monde était particulièrement pressé d’oublier jusqu’à son nom pour tourner la page sur ce mauvais souvenir de la vie du royaume. Le plus difficile pour la population fut d’accepter la présence de Laceli et Lenjo, prendre le temps d’expliquer, de s’excuser, de pardonner n’était pas forcément chose aisée. Mais Anna et Elsa avaient mis beaucoup d’énergie pour redorer l’image des deux autres esprits, et finalement, le peuple d’Arendelle étant de nature ouverte et tolérante, il les avait maintenant complètement accepté dans leurs rangs.


Lorsque la place fut achevée, l’automne était suffisamment avancé pour n’avoir laissé aucune feuille sur les arbres. Les sapins étaient maintenant les plus majestueux de la région et le vent du nord se faisait de plus en plus vivifiant malgré un soleil éclatant. Le nouveau centre d’Arendelle était plus verdoyant que le précédent, même à cette époque de l’année. Les pouvoirs de la reine n’étaient évidemment pas étranger à cette transformation. Des parterres de fleurs délimitaient l’emplacement des stands, les escaliers en pierre qui menaient au port étaient adoucis par quelques bosquets et les quais avaient été agrandis afin de s’étendre plus loin dans la mer pour d’accueillir plus de bateaux. Les navires aux anciens pavillons de Derlock étaient d’ailleurs garés paresseusement à attendre leurs prochaines destinations.


Un peu plus haut sur la place, avant d’atteindre les ruelles qui serpentaient sur les hauteurs d’Arendelle, se trouvait la statue d’Agnarr et d’Iduna, miraculeusement épargnée par les récents combats. Anna se souvenait parfaitement du jour de l’inauguration, c’était aussi le jour de son couronnement. A l’époque, elle n’avait aucune idée qu’ils n’étaient pas ses véritables parents, pas de sang tout du moins. Elle n’avait pas de pouvoir non plus à cette période et finalement pas la plus petite suspicion sur sa véritable identité. Elle avait à peine eu le temps de se familiariser avec cette situation que Derlock avait attaqué. Et maintenant, elle était là, face à ce monument qu’elle avait dressé en hommage à des parents qui n’étaient pas réellement les siens. Ou, l’étaient-ils après tout ? Iduna et Agnarr l’avaient accueilli sans même se poser de questions. Metiger avait déposé une enfant sans défense sur le pas de leur fenêtre, alors qu’eux même avaient déjà une petite fille magnifique dotée de pouvoir extraordinaire. Ils auraient pu s’en tenir à ça, à leur famille déjà idéale, et confier Anna au soin de l’orphelinat, ou comme l’avait pensé Metiger, lui permettre de grandir en sécurité avant de la faire intégrer le personnel du palais. Mais ils en avaient décidé autrement et contre toute attente, lui avaient permis de grandir dans les fastes et les facilités de la royauté, faisant d’elle une héritière au même titre que sa sœur et l’autoriser aujourd’hui à porter une couronne alors qu’elle n’avait pas la moindre goutte de sang royal dans les veines. Elle aurait voulu savoir pourquoi mais il n'y avait plus personne à qui poser la question maintenant. Peut être si elle retournait à Eohialan ? Anna soupira doucement, et si le peuple savait ? Serait-elle forcée d’abdiquer ?


Son regard se porta sur la place reconstruite où tout le monde s’affairait dans une bonne ambiance générale. Elle aimait cette ville et ces habitants, elle les connaissait tous par leurs prénoms, et adorait passer du temps à flâner dans les rues, à s’attarder devant les étals de nourritures, à discuter avec les pêcheurs. Elle se releva du banc sur lequel elle était assise et elle siffla quelques notes en rejoignant l’agitation. Anna se mit à chanter pour elle-même* [*Sur l’air de « Home » chanson supprimée de Frozen 2 que vous pouvez trouver ici : https://www.youtube.com/watch?v=Zu87Gux0p98&ab_channel=SCRFilms . Paroles traduites et reprise dans une cover fr ici : https://www.youtube.com/watch?v=ULiTxFxmCAA&t=71s&ab_channel=MichiyoFandub%26Cover .] :


« Dès que j’approche du Fjord, je sens l’odeur de l’iode

Au grincement des navires, j’entends les marins rirent

A chaque respiration, je suis à la maison ce que je peux donner de plus à cette maison.

Chez moi.

Je marche long des allées, les gens sont affairés

Ces personnes qui font ma joie peuvent-elles compter sur moi ?

Mais que puis-je leur apporter ? A ces femmes et ces hommes ?

Ma Maison.

Ma Maison.

Je siffle en marchant, une belle odeur de kransekake du boulanger

Et au marché l’activité est là pour me le rappeler !

Je ne suis plus seule désormais. »


Son regard se dirigea vers le château dans la silhouette haute et impressionnante se détachait du paysage.


« Chaque jour je suis consciente que la vie m’a comblée

J’ai une famille bienveillante, l’épreuve est terminée

Si jamais je les perdais

Mon monde s’effondrerait

Ils sont mon abri, mon rempart

Et pour moi quelque part

Ils sont mon chez moi

Mon chez moi

Et que ce bonheur perdure

Sur cette terre notre future

Notre maison, je suis à la maison. »


Anna s’arrêta, souriante, le cœur gonflé de bonheur devant la vitrine d’un magasin. Dans le reflet, elle pouvait voir Olaf en grande conversation philosophique avec un groupe d’enfants qui semblaient davantage en extase devant son nouveau nez poireau, puis pomme de terre, puis tomate, puis fleurs et ainsi de suite… Elle s’apprêtait à le rejoindre mais autre chose attira son attention. Un peu plus loin, devant les étals de fleurs, Elsa et Laceli discutaient et riaient ensemble. La cadette haussa un sourcil inquisiteur. Elle n’avait pas cessé de les observer tout au long des travaux et des préparatifs du mariage. L’esprit du feu flirtait ouvertement avec sa sœur qui, malgré tous ses efforts pour rester complètement de marbre, n’était pas du tout indifférente. Anna la connaissait assez pour le savoir : elle voyait ses joues qui se coloraient d’un rouge léger, le sourire charmé qu’elle tentait de dissimuler et son regard qui s’attardait plus que de raison sur la silhouette de la brune. Chaque fois qu’elle avait tenté d’en parler, son ainée avait toujours haussé les épaules avec une indifférence feinte et dévié la conversation sur un tout autre sujet. En somme, c’était simplement une autre manière de fermer les portes. Mais à les voir ainsi, le langage corporel était évident : Laceli ne perdait jamais une occasion de prendre la main d’Elsa, de lui caresser le bras ou de lui écarter une mèche de cheveux du visage et sa sœur, bien loin de la repousser, rentrait complètement dans le jeu. Anna pencha légèrement la tête, il fallait qu’elle en ait le cœur net, mais pas question de les déranger pour l’instant.


« Un sou pour tes pensées ? »


Elle sursauta en reconnaissant la voix de son futur époux et l’embrassa furtivement.


« Je songeais à quel point j’étais heureuse d’être ici, entourée des personnes que j’aime. »


Elle posa une main sur son torse et sourit tendrement.


« Et toi ? Que fais tu ici ? »


Kristoff eut un soupir dramatique.


« Nous sommes en panne de carottes… »


Il pointa du doigt Sven qui affichait une moue boudeuse. Anna se mordit doucement la lèvre.


« Oh oui je comprends, c’est une situation extrêmement urgente.

-Absolument, la plus extrême des urgences ! »


Le renne roula des yeux avec excès. Kristoff fit semblant de murmurer à sa fiancée.


« Je crois même que sa vie est en danger.

-Vite ! Ne perds pas de temps, je crois que j’ai vu une pleine cargaison au stand au coin de la rue ! »


L’animal bondit instantanément sur ces 4 pattes et poussa l’homme de sa truffe.


« Oui oui c’est bon Sven, on y va ! On y va ! »


Les deux futurs époux partagèrent un regard complice. Ils s’échangèrent un dernier baiser avant que Kristoff ne soit emmené de force en direction des carottes. Anna rit doucement.


« A tout à l’heure ! Soyez prudents sur la route ! »


Elle les observa disparaitre au coin de la rue avec un sourire amusé, lorsqu’elle se tourna pour rejoindre sa sœur et Laceli, elle se trouva nez à nez avec un bonhomme de neige, la tête hérissée de légumes, de fruits et même de poisson. Elle sursauta sous l’effet de surprise avant de se mettre à rire.


« Oh Olaf ! Qu’est ce qui s’est passé ?

-Nous avions une grande conversation sur la liberté et le destin, le véritable libre-arbitre existe-t-il ou notre vie est-elle déjà tracée et régit par des lois complexes ? »


Anna haussa un sourcil, perplexe. Le bonhomme de neige haussa les épaules.


« Et puis c’était l’heure d’aller manger alors ils sont tous partis.

-Ta tête, Olaf, je demandais ce qui était arrivée à ta tête… »


Il tâta prudemment les différents aliments qui ornaient son visage et son crâne.


« Ah ça !

-Oui, ça !

-C’est une salade de hareng. »


La reine éclata de rire, elle s’était attendue à tout, sauf à cette réponse.


« Ici du Hasselback, ils voulaient faire un Kalops mais impossible de trouver du bœuf. 

-Ah oui oui, bien sûr.

-Tu sais cuisiner toi, Anna ?

-J’ai bien essayé mais je me faisais toujours sortir par Ingma, je crois que je suis plus douée pour les catastrophes que pour faire du Kalops. »


Elle sourit au bonhomme de neige tout en le débarrassant des aliments qui l’encombraient.


« Ah merci ! Je me sens beaucoup plus léger ! Sven m’avait prévenu que les Knäckelbröd pouvaient être difficile à digérer. »


Anna secoua la tête en riant. Elle paya le vendeur et transféra les victuailles dans un sac.


« Tu voudrais cuisiner avec moi, Olaf ?

-Oh oui ! J’aimerai beaucoup ! Mais si on ne te laisse pas approcher des cuisines, ça risque d’être difficile, non ?

-Ne t’inquiète pas ! On trouvera une solution. »


Elle lui prit la main et prit la direction du château en compagnie du bonhomme de neige.


« Dis moi Olaf, tu ne trouves pas qu’Elsa est un peu différente ces derniers temps ?

-Différente comment ? Je ne crois pas qu’elle ait grandi et la dernière fois que je l’ai vue, elle avait deux bras, deux jambes, 10 doigts…

-Non non, je ne parle pas physiquement.

-Mais je n’arrive pas à savoir si je préfère avec une natte ou les cheveux détachés. »


La reine rit de nouveau, les conversations avec le bonhomme de neige prenait toujours une tournure inattendue.


« Tu n’as pas l’impression qu’elle sourit davantage ? Elle a l’air plus ouverte, ou plus épanouie ces derniers temps, tu n’as pas remarqué ? Depuis qu’elle passe du temps avec Laceli. »


Olaf prit le temps de réfléchir à cette question.


« En fait… C’est vrai qu’elles sont très bruyantes quand elles sont toutes les deux. »


Anna cligna des yeux.


« Très bruyantes ? Comment ça ?

-Hé bien tu sais, comme Kristoff et toi. »


La reine sentit ses joues devenir rouge d’un coup, elle était persuadée que de la vapeur lui sortait des oreilles à cet instant.


« Qu’est ce que tu veux dire, Olaf ?

-Tu sais ! Elles rient beaucoup, elles se chamaillent, elles parlent tout le temps… Toutes ces choses là, comme Kristoff et toi quand vous êtes ensembles !

-Aaaaaaah… Bruyants comme ça.

-Hé bien oui, quoi d’autre ?

-Oh heu… Non non, rien ! Rien du tout ! »


Elle relâcha un soupir de soulagement tandis que sa température corporelle redevenait normale. Le bonhomme de neige était perplexe.


« Il y a d’autres façon d’être bruyant ?

-Absolument aucune autre !

-Kristoff me dit que je parle beaucoup parfois.

-Ah oui ? 

-Mais est ce qu’il sait à quel point il ronfle quand il dort ? »


Et la conversation se poursuivit ainsi jusqu’aux abords des cuisines.


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