Un Vide de Vérité

L’effervescence qui régnait au château hier s’était maintenant étendue à tout le royaume. Les invités arrivaient de tous les horizons, des reines, rois, princesses, duchesses et duc des pays voisins, des fournisseurs du bout du monde, les bateaux accostaient à un rythme effréné et malgré l’agrandissement du port, ils étaient trop nombreux. La ville entière s’était mise sur son 31, un décor de glace et de fleurs pour faire honneur aux mariés, même si Elsa lui avait volé la vedette, à l’origine, la glace était l’univers de Kristoff. Les stands de nourritures s’installaient un peu partout, la musique allait bon train pour divertir la foule, parfois quelques danseurs s’enhardissaient sur une piste improvisée. Un mélange étonnant de poissons grillés et de cookie au caramel venait chatouiller le nez des badauds. Ce n’était que les prémices de la fête de ce soir, une simple mise en bouche pour un royaume qui célébrait l’union du couple royal. La famille trolls de Kristoff avait roulé jusqu’à l’entrée de la ville, ils se tenaient tous à l’écart, un peu circonspect face à l’enthousiasme général. Les trolls étaient loin d’être le dernier à s’amuser, mais ils n’étaient pas habitués à fréquenter autant d’humains d’un coup.

« On va se faire marcher dessus.

-T’auras qu’à leur rouler sur les pieds. »

Le peuple Northuldra avait également fait le trajet jusqu’à Arendelle, et on pouvait même apercevoir quelques représentant des Skamjorder. Tous se montraient aussi prudents que les trolls, à la fois fascinés et effrayés. Finalement, les seuls réellement à l’aise étaient Honeymaren et Metiger, ils avaient eu plus de temps pour apprivoiser la vie citadine. Les enfants couraient dans tous les sens malgré les multiples tentatives de leurs parents de les garder présentables au moins jusqu’à la cérémonie. Un brouhaha joyeux qui se calma aussitôt que les cloches d’Arendelle retentirent. Le chemin jusqu’à l’église était délimité par des cordons fleuris et la population se massa aux abords. Des portes ouvertes du château sortirent les soldats d’Arendelle dans leurs uniformes d’apparat impeccables au couleur du royaume. Ils étaient fiers, leurs médailles rutilantes étincelaient au soleil, les plumes de leurs coiffes militaires s’ébouriffaient dans le vent. Ils prirent position dans une chorégraphie parfaite et formèrent une haie d’honneur sur le pont qui menait au château.

Le capitaine de la garde royal : Mattias, fut le premier à ouvrir le cortège. Droit dans ses bottes, il marchait 5 pas en avant du futur époux. Kristoff suivait, terriblement intimidé et mal à l’aise d’attirer autant les regards. C’était d’autant plus vrai qu’il avançait en compagnie de Bulda, la troll qui l’avait adoptée, et Sven bien sûr, son fidèle compagnon. Juste derrière lui, on pouvait voir Ryder et Oaken. Evidemment, pour un homme plus à l’aise avec les cervidés qu’avec ses congénères, la situation était plutôt difficile à vivre. Ses lèvres remuaient doucement tandis qu’il se murmurait à lui-même, comme un mantra :

« Pense à Anna, tu fais tout ça pour Anna, pense à Anna. »

Bulda lui donna une légère tape sur le mollet.

« Arrête de t’inquiéter grand dadais, ils sont tous là pour t’admirer et souhaiter ton bonheur. »

Les paroles étaient curieusement réconfortantes, jamais Kristoff n’avait vu les choses sous cet angle. Sa vie avait tellement changé depuis qu’il avait rencontré Anna qu’il lui arrivait encore de se pincer pour y croire. Sven lui donna un très léger coup de corne pour l’encourager. Le futur roi souffla doucement pour se donner du courage, il leva la main et salua quelques personnes dans la foule. Bulda avait raison, les phrases qu’il percevait au milieu des acclamations n’étaient faites que de bienveillance. On pouvait être roi et avoir un renne pour meilleur ami. Mais même s’il était apprécié, ce n’était rien à côté de ce qui allait suivre.

Lorsqu’Anna se présenta au bras d’Elsa, vêtue de blanc, la foule retint son souffle. Une jupe en mousseline de tulle avec un bustier en dentelle, une simplicité élégante simplement réhaussé de motifs floraux discrets et de quelques éclats de glace. Sa coiffure était faite d’entrelacs de fleurs, une longue traine courait derrière elle au bout de laquelle on pouvait trouver Olaf et Honeymaren. Même si elle était nerveuse, Anna irradiait de bonheur. Elsa lui tapota gentiment la main qui reposait sur son bras.

« Tu es prête.

-Oui. »

Lorsqu’elle fit le premier pas sur le pont, la foule explosa littéralement dans une liesse cacophonique. Les acclamations et les houra fusèrent de toute part.

« Oh mes aïeux ! »

Elsa rit doucement. Elle laissa le soin à sa sœur de ravir le peuple en prenant le temps de les saluer, offrant autant de sourire qu’elle en recevait. Les soldats encadraient le cortège et Olaf se chargeait de recueillir les fleurs et autres présents que la foule tendait vers Anna. Il fut très vite débordé par la situation et déposa le tout dans les bras d’un militaire qui n’avait rien demandé. La reine fut presque surprise de se retrouver face à l’église. Son cœur battait la chamade, elle resserra sa prise sur le bras d’Elsa.

« Ne t’inquiète pas, je suis là, je serai toujours là pour toi.

-On y est. »

Anna observa la façade, elle déglutit difficilement.

« Elsa… je crois que j’ai oublié ce que je devais dire… Et si je me prends les pieds dans ma robe ? Ou pire ! Si je perds soudainement ma voix ? Et si mes pouvoirs se déclenchent à un moment inopportun ? Kristoff serait capable d’oublier les alliances. J’ai soif, il fait chaud non ? »

Elsa lui caressa la joue avant d’y déposer un baiser.

« Tout va très bien se passer. Tu es une mariée magnifique, Kristoff est l’homme le plus amoureux que je connaisse et votre mariage sera parfait. »

La reine hocha la tête.

« D’accord. »

Le futur roi était certes très amoureux, mais il était surtout très nerveux. Par respect pour la tradition, Anna et lui ne s’était pas vu depuis la veille et bien entendu, il n’avait pas encore vu sa tenue de mariée. L’orchestre jouait discrètement mais bientôt, la musique changea pour quelque chose de beaucoup plus officiel. Kristoff croisa les mains devant lui, dans son champ de vision, il n’y avait plus de place pour les invités, ni pour l’église, pas même pour Elsa, et bientôt jusqu’au brouhaha qui s’estompa pour laisser place à un silence parfait. La silhouette d’Anna se découpa sur la lumière extérieure. Son sourire qui n’était que pour lui, son regard clair qui se riva au sien, elle était parfaite, depuis toujours, elle était son âme sœur. Son cœur manqua un battement, ou deux, tandis qu’elle remontait l’allée dans sa direction. Leurs yeux ne s’étaient pas quittés, elle prit place en face de lui tandis qu’Elsa, Honeymaren et Olaf s’installaient à ses côtés. L’émotion des deux futurs époux était palpable, celle de leurs proches aussi.

Anna sourit, quelques larmes de joie bordaient ses paupières. Elle avait parcouru tant de chemins, affronté tant de choses avant d’en arriver là aujourd’hui. Plus sûre d’elle, moins naïve, elle savait maintenant qui elle était et d’où elle venait. Elle pouvait mener de grands combats comme de petites batailles, l’important étant qu’elle n’était jamais seule. Sa famille s’était agrandie d’un bonhomme de neige, d’un débiteur de glace et d’un renne et maintenant plus que jamais, elle était impatiente de savoir ce que lui réservait l’avenir avec l’homme de sa vie.

« Hé.

-Tu es magnifique. 

-Tu es superbe aussi. »

L’évêque se racla doucement la gorge pour attirer leur attention et si effectivement ils firent silence, leurs regards en revanche, restèrent rivés l’un à l’autre. Ils se prirent les mains et entrelacèrent leurs doigts sans même y réfléchir. L’homme d’église débuta la cérémonie en rappelant les valeurs fondatrices de l’engagement du mariage. Tandis qu’il parlait, les invités observaient un silence respectueux, on y trouvait notamment des trolls, quelques compagnons débiteurs de glace de Kristoff, Lenjo et Laceli étaient là aussi, aux côtés de Yelena et de Metiger ainsi que différents nobles et non nobles. Anna avait insisté pour que la cérémonie ne soit pas qu’un acte politique dans le but de ravir l’aristocratie, mais bien un acte d’amour auxquels les personnes les plus proches pouvaient assister. Ce qui impliquait également la présence de Kai, Gerda et Ingma sur le banc des invités. Oaken et Ryder, tous les deux témoins de Kristoff, étaient très concentrés, peut être même un peu tendu, ce qui n’était pas du tout le cas de Sven qui avait l’air d’être sur le point de pleurer. Du côté de la reine, Elsa avait bien du mal à cacher son émoi, Olaf à ses côtés ne l’aidait pas beaucoup puisqu’il se mouchait bruyamment, au grand dam d’Honeymaren. 

« Kristoff Bjorgman, acceptez vous de prendre pour épouse sa majesté Anna d’Arendelle ici présente ?

-Oui, je le veux. »

Les mots étaient clair, vibrants d’émotion, il couvait sa future femme d’un regard très amoureux.

« Anna d’Arendelle, reine d’Arendelle, acceptez-vous de prendre pour époux Kristoff Bjorgman ici présent ?

-Oh oui ! »

Un rire léger s’étendit dans la salle face à la spontanéité bien connue de la cadette. L’évêque esquissa un sourire.

« Vous pouvez maintenant procéder à l’échange des alliances. »

Kristoff sursauta.

« Oh bon sang, les alliances ! »

Il se tourna vers Sven et ses deux témoins en proie à une panique total. Le renne se mit à ricaner tandis que Ryder déposait l’anneau dans les mains de son ami.

« Tout va bien mon vieux. Tu me l’avais confié. »

L’intéressé poussa un long soupir de soulagement. Il se retourna vers Anna, un peu fébrile tandis qu’il lui passait la bague au doigt. Elle essuya une larme de sa main libre avant de faire de même.

« Je t’aime, Kristoff.

-Moi aussi je t’aime. »

Ils semblaient tellement dans leur bulle, que l’évêque crut bon de rajouter :

« Vous pouvez embrasser la mariée. »

Mais c’est Anna qui embrassa Kristoff la première, trop heureuse de pouvoir enfin passer ses bras autour de son cou. La salle explosa d’un cri de joie et se mit à applaudir à tout rompre. Lorsque les mariés quittèrent l’église, ils furent accueillis par les vivas de la foule, sous des jets de fleurs et de confettis. Le bonheur était presque palpable tant ils rayonnaient tous les deux. La reine s’arrêta au bas des marches, elle attendit un peu de calme pour mettre ses mains en portevoix, dans une attitude tout sauf royal.

« Et maintenant ! Que la fête commence ! »

Kristoff l’attrapa par la taille pour la faire tourbillonner dans les airs avant de l’embrasser de nouveau. La foule s’esclaffa de bonheur et la musique retentit de tous les côtés. Les portes du château grande ouvertes, on y avait dressé des tables dans les jardins tandis que la cour principale accueillait le début des festivités avec petit fours et alcool. La salle de bal à l’intérieur devait permettre de danser jusque tard dans la nuit, mais en vérité, c’est toute la ville qui s’apprêtait à fêter l’événement. Faisant fi de tout protocole, Anna se glissa au milieu du peuple, Kristoff à son bras, pour discuter avec différentes personnes. Laceli les observait de loin jusqu’à ce que Lenjo lui donne un léger coup de coude. Le langage des signes fonctionnait bien avec son amie, c’était beaucoup plus efficace que d’utiliser un livre ou de devoir écrire.

« Ca ne te donne pas des envies ?

-De mariage ? »

Il acquiesça d’un signe de tête.

« Tu es fou ! Moi ? Mariée ? Ne dis pas n’importe quoi. En plus, je ne suis même pas certaine de finir ma vie avec un homme… »

Tout en le disant, son regard s’était porté naturellement vers Elsa et Lenjo n’avait rien loupé.

« Vous en êtes où ?

-Nulle part mon ami, nulle part.

-Depuis quand une femme te résiste ? »

Laceli lui sourit.

« Depuis qu’être attirée par une autre femme est une responsabilité difficile à assumer. »

L’esprit du vent fit la grimace avant de signer quelques excuses.

« Désolé.

-Il y en aura d’autre, ailleurs, dans d’autres pays. »

Mais pour le moment, la brune devait reconnaitre qu’elle n’en avait pas très envie. Lenjo comprit qu’il était préférable de changer de sujet.

« Laceli, je voulais te remercier. Tu as veillé sur moi durant toute ces années. Je sais que tu as fait tout ce que tu pouvais pour me protéger de Derlock. Kecen m’a raconté votre conversation et Elsa m’a expliqué le plan que vous aviez échafaudé.

-Jamais je ne t’aurais laissé derrière moi.

-Tu es quelqu’un de bien, Laceli, et une bonne amie.

-Hé bien on dirait que les mariages te rendent tout émotif ! »

Lenjo prit son amie dans ses bras et la serra fort contre lui. Il s’écarta pour signer de nouveau.

« Ce n’est peut-être pas le meilleur moment pour avoir cette conversation. Mais j’aimerai qu’on prenne le temps de parler avant que je parte.

-Toi et moi nous aurons plein de temps, je pars avec toi.

-Vraiment ? Mais pourquoi ?

-Il n’y a rien qui me retienne à Arendelle. Et puis… Je crois que j’aimerai bien retourner dans mon pays natal, retrouver quelques traces de ma famille peut être, tu sais… En apprendre un peu plus sur moi-même. »

L’esprit du vent acquiesça d’un signe de tête, il comprenait très bien.

Olaf naviguait avec bonne humeur au milieu de la foule, évitant les coups de hanche maladroit, distribuant les câlins avec plaisir et savourant toutes les gourmandises dont il parvenait à se saisir. Il s’installa sur un banc, à côté d’Elsa, les mains pleines de victuaille. La blonde lui sourit.

« Tu comptes manger tout ça Olaf ?

-Oh oui ! Ingma a dit que pour une fois, il n’y avait pas d’ordre à respecter ! »

Il prit une bouchée de chocolat qu’il savoura avec un plaisir évident.

« Alors Anna est mariée ? Ca veut dire que Kristoff et elle vont avoir des bébés maintenant ?

-Heu… Oui, j’imagine.

-Donc tu vas être tata, c’est ça ?

-Effectivement.

-Et c’est pas grave d’être tata avant d’être mariée quand on est la grande sœur ? »

Le tact habituel du bonhomme de neige faisait toujours mouche. Elsa lui piqua un chocolat pour se donner le temps de répondre. Son regard trouva Laceli dans la foule tandis qu’elle tirait Lenjo par le bras. La blonde avait beau réfléchir, elle ne savait pas comment répondre à cette question, mais elle pouvait toujours compter sur Olaf pour combler les silences.

« Moi je pense que c’est pas grave. Le plus important, c’est l’amour. »

Elsa haussa un sourcil tandis qu’il poursuivait.

« Kristoff dit que normalement, les rois et les reines se marient par arrangement, mais pas par amour. Mais qu’ici, c’est différent. Qu’ici, à Arendelle, l’amour c’est le plus important. C’est vrai ?

-Maman n’était pas de sang royal, effectivement, et ça n’a pas empêché papa de l’épouser, par amour, c’est vrai.

-Alors c’est une tradition ? Comme pour noël ? »

La blonde sourit.

« Je pense qu’on peut dire ça.

-Et comment est ce qu’on reconnait un roi ou une reine ? C’est marqué dessus ? Comment font ceux qui ne se marient pas par amour ? Ils se promènent et quand ils rencontrent un roi ou une reine, PAF ! Ils se marient ?

-Pas exactement Olaf.

-Et, est ce que ça veut dire que Sven va devoir épouser un Roi ?

-Pardon ?

-C’est un renne, non ? »

Elsa cligna des yeux avant d’éclater de rire.

« Absolument, tu as entièrement raison ! Tu devrais lui en parler, et à Kristoff aussi ! Oh Olaf. »

Elle prit le bonhomme de neige et le serra dans ses bras. Mais visiblement cette histoire de mariage, d’arrangement et d’amour était quelque chose qui l’inquiétait.

« Maintenant que tu n’es plus reine, ça veut dire que tu peux te marier par amour, n’est-ce pas ?

-Je suppose que oui.

-Pfiouuuuu ! Tant mieux ! J’avais peur que ce ne soit pas possible.

-Et c’est quelque chose qui t’ennuyait ?

-Bien sûr ! Je t’aime alors que je veux que tu sois heureuse. Et si j’ai bien compris, on n’est pas vraiment heureux quand on se marie par arrangement. Du coup je sais pas trop à quoi ça sert, ça arrange qui exactement ? Parce que si t’es malheureux, ça arrange personne, on est d’accord ?

-Tu as parfaitement raison Olaf, c’est d’ailleurs pour ça que je ne me suis jamais mariée.

-Parce que tu n’avais pas trouvé le bon roi ?

-Parce que je n’avais pas trouvé la bonne personne, celle dont je serai tombée amoureuse.

-Oh d’accord, et quand est ce que tu la trouves ?

-Je… »

Mais par quel magie un bonhomme de neige pouvait être si juste dans une conversation où il était question de marier un renne avec un roi ? Olaf, l’innocence incarné, enfonça un peu plus le clou en avalant un choux à la crème.

« Moi je pense que lorsqu’on trouve la bonne personne, il faut se marier tout de suite. Pourquoi Kristoff et Anna ont attendu si longtemps ? C’est pour te laisser du temps à toi de trouver pour te marier avant eux ? »

Elsa ressentit le besoin impérieux de changer de sujet de conversation.

« Oh ! Honeymaren ! Je suis heureuse de te voir !

-Vraiment ? Mais on s’est quitté il y a quelques minutes à peine. »

Son amie lui jeta un regard interloqué mais la blonde ne lui laissa pas le temps de poursuivre et l’entraina un peu plus loin, surtout loin d’Olaf en fait. La foule s’était maintenant dispersée aux quatre coins de la ville, rendant l’endroit plus clairsemé qu’au tout début. L’ambiance musicale changeait en fonction des rues et finalement, à l’image de la famille royale, tout se déroulait dans une relative simplicité. Laceli s’était faite la réflexion à plusieurs reprises lorsqu’elle avait découvert Arendelle. Derlock lui avait au moins permis de voyager et de découvrir beaucoup de choses. Elle avait déjà vu des châteaux, elle avait déjà vu des rois, des reines, des aristocrates de tout bord. Elle en avait même fréquenté certains. Et s’il y avait une chose qu’elle avait toujours constaté, c’était l’opulence. Les meubles dorés à l’or fin, les trônes gigantesques sertis de pierre précieuses, les tenues somptueuses, alors bien sûr, Elsa et Anna disposaient d’une vie très confortable, mais la richesse du royaume n’était pas dilapidée en caprices inutiles. La brune se souvenait même avoir été très surprise la première fois qu’elle était rentrée dans la salle du trône. Une simple chaise en bois réhaussée de tissus élimés. La belle affaire. Même le siège du bureau de Derlock lui avait paru plus confortable et plus impressionnant. Et ce mariage était fait de choses simples. Finalement, les aspects les plus extravaguant de la décoration était assurés par le pouvoir des esprits. Et comme pour confirmer ses pensées, Laceli sourit en voyant Anna et Kristoff qui dansaient au milieu de la rue au loin. La reine s’était débarrassée de sa traine pour plus de confort et la foule autour s’amusait tout autant, de manière indifférente : Anna était l’une des leurs. Elle était très heureuse d’avoir rencontré les deux sœurs sur sa route, elle y avait gagné sa liberté, bien sûr mais elle y avait surtout réappris le sens du mot bienveillance. Elle avait découvert une famille ouverte, heureuse et chaleureuse, et pour l’esprit du feu, ça n’était pas rien. Elle fut la première surprise lorsque la reine s’avança vers elle et s’appuya sur son épaule pour reprendre son souffle.

« Déjà fatiguée ? Mais la soirée ne fait que commencer, votre majesté.

-Toi… Pfouuu… Tu as… Ah… de la chance que… Ouf… Je sois essoufflée. »

Laceli sourit malicieusement.

« Vous formez un couple magnifique. »

Anna rayonna sous l’effet du compliment qu’elle avait pourtant beaucoup entendu ces dernières heures.

« Merci ! »

Elle soupira de contentement.

« Je suis tellement heureuse !

-Ca se voit.

-Laceli, je peux te dire quelque chose ?

-Quelque chose t’a déjà arrêté auparavant, Coquelicot ? »

Anna sourit davantage.

« J’aurais aimé que tu restes plus longtemps, Lenjo aussi.

-Il est pressé de retrouver sa famille et l’endroit où il a grandi.

-Je comprends. Toi aussi ? »

Laceli haussa les épaules.

« Elsa et toi vous m’avez sauvé la vie et pour ça, je vous serai éternellement reconnaissante. Arendelle est très joli mais, qu’il n’y a rien pour moi ici.

-Tu n’as pas encore tout vue. Je suis sûre que ma sœur adorerait te faire découvrir la forêt enchantée.

-Tu ne renonces jamais ? »

Anna se mordit légèrement la lèvre.

« Je crains que non.

-J’ignore ce qu’Elsa t’a dit, mais elle a été très clair et je respecte sa décision.

-Qu’elle n’était pas prête à assumer, pas encore. »

Laceli offrit à la reine un long regard appuyé qui la fit soupirer.

« Bon très bien, j’ai compris, c’était juste tellement bien de voir ma sœur comme ça.

-Comme ça ?

-Plus heureuse, plus souriante, plus épanouie, plus… chaleureuse ? »

La remarque fit rire l’esprit du feu.

« Et tu ne penses pas que le fait d’avoir vaincu Derlock, de t’avoir libérée et de te voir te marier à l’homme que tu aimes y est pour quelque chose ?

-Pas comme ça, pas à ce point. J’ai même proposé de faire garder votre bateau à quais. »

La brune s’étouffa avec un petit four, Anna s’empressa d’ajouter.

« Mais elle a refusé ! Et de toute façon, je n’aurai jamais fait ça ! Bien sûr que non ! Jamais je n’abuserai de mon pouvoir, ce serait terrible ! Terrible et injuste ! Et absolument pas royal ! Non non. Votre bateau partira en temps et en heure. Mais vous allez me manquer. Les 4 pouvoirs réunis, alors qu’il y a encore quelque moi j’étais convaincue qu’Elsa était unique.

-Elle l’est. »

La reine sourit, elle s’appuya au comptoir d’un stand de nourriture et lorgna sur le chocolat. Laceli l’observa un instant avant de rajouter :

« Vous allez me manquer aussi. »

Les convives furent invités à se déplacer vers les tables pour assister au repas tandis que l’après midi déclinait doucement. Anna se redressa pour observer la foule qui bougeait joyeusement.

« J’espère qu’il y a du chocolat. »

Laceli éclata de rire.

« Vous avez quelque chose avec le chocolat ? Elsa, Olaf et toi, c’est vraiment dans la famille.

-Ah peut être !

-Est-ce que c’est le plus beau jour de ta vie ?

-Oui. »

Anna avait répondu sans l’ombre d’une hésitation, la réponse avait franchi ses lèvres alors même que l’esprit du feu n’avait pas encore terminé sa phrase. Kristoff se présenta devant-elles, souriant et légèrement décoiffé. Il s’inclina dans une très belle révérence.

« Mon épouse accepterait-elle de me suivre jusqu’à la table d’honneur ?

-Volontiers mon cher mari. »

Elle se saisit du bras qu’il lui tendait et fit signe à Laceli de les accompagner.

« Dans un instant, je retrouve Lenjo et nous vous rejoignons. »

Arendelle était définitivement un royaume à part, un endroit où vous pouviez avoir un renne pour meilleur ami, des trolls et un bonhomme de neige pour famille sans que personne n’y trouve rien à redire. Elle s’était attachée en peu de temps à la ville et aux personnes, tout ici avait l’air si simple. Anna n’avait pas tout à fait tort, elle n’avait aucun besoin de précipiter son départ. Contrairement à Lenjo, il n’y avait aucune famille pour attendre son retour, elle ne manquait à personne. Ici, ils seraient quelques-uns à regretter son départ.

« Peut être qu’après tout il y a quelque chose pour moi, à Arendelle. »

La réflexion était avant tout pour elle-même puisqu’il n’y avait personne à ses côtés.

Le repas se déroula dans la même bonne humeur général, Anna et Kristoff semblaient nager dans un bonheur intarissable. Elsa s’était assurée que tout se passait au mieux et que rien ne venait troubler la fête, Laceli faisait connaissance avec des gens très intéressants sans jamais laisser Lenjo de côté, tandis que Sven avait mangé un maximum de carotte et qu’Olaf avait trouvé le chemin vers la crème glacé. Et si le dîné se terminait tranquillement, la salle de bal était maintenant grande ouverte sur l’extérieur afin de permettre à tout le monde de continuer de s’amuser jusque tard dans la nuit. L’orchestre avait déjà commencé à jouer et quelques danseurs prenaient possession de l’espace. La journée avait été riche en émotion mais il restait une dernière surprise. Ce n’était pas grand-chose, juste un geste que les esprits avaient préparés en secret du couple royal. Elsa vint chercher ses deux complices du moment et pris place au centre du jardin. Elle attira l’attention et le calme des convives sans aucune difficulté. Laceli avait déjà remarqué qu’elle faisait ça le plus naturellement du monde.

« Anna, Kristoff, nous avons une dernière surprise pour vous. »

D’un signe de tête en direction de l’orchestre, la musique changea et la mélodie de « Point d’avenir sans nous » s’éleva dans la nuit. D’un claquement de doigts, Elsa fit naitre un feu d’artifice bleuté dans le ciel. Avec l’aide de Lenjo, les éclats de glace formèrent la silhouette d’un Kristoff alourdit par la neige. Un nouveau geste de la main des deux esprits et Anna apparut tout à coup, pataugeant dans la neige en tenu d’été. La foule rit doucement avant de s’exclamer lorsque Laceli fit apparaitre des explosions rougeoyantes dans le ciel que le vent transforma en cœurs tout autour des futurs amoureux. La musique se poursuivit au fur et à mesure que l’histoire de leur rencontre était racontée sous forme de feu d’artifice, en omettant bien sûr les événements les plus tragiques. Les scènes s’enchainèrent avec fluidité, pour le plus grand plaisir du public jusqu’au premier baisé ponctué par une explosion flamboyante de centaines de cœur de toute taille. La foule applaudit à tout rompre tandis que le bouquet final s’annonçait par la reproduction du mariage et que Laceli réhaussait le tout de tendresse et d’amour. La musique se tût en même temps que les derniers éclats s’éteignaient dans le ciel. Anna et Kristoff se précipitèrent vers le trio pour un câlin général et quelques sanglots émus. La reine souriait tout en reniflant.

« Merci beaucoup. Cette journée est parfaite. »

Elsa lui caressa la joue tandis que Kristoff avait l’air trop touché pour parler.

« Je vous aime, vous êtes ma famille. »

Olaf qui avait observé toute la scène en retrait ne tint plus en place et se précipita pour rejoindre les embrassades.

« Moi j’aime les gros câlins ! »

Tous se mirent à rire et Anna en profita pour relancer les festivités sur le parquet de danse.