My frozen heart

Chapitre 12 : The right to live

3139 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:53

Au début, tout était sombre. On ne parvenait pas à distinguer les formes précises des objets qui environnaient la pièce. Il était uniquement possible de capter certains sons, comme des rires. Les paroles n’étaient pas encore très claires à l’oreille humaine. Il y régnait encore un bourdonnement présent, comme si le cerveau mettait un certain temps à faire le point. On eut dit que l’esprit était en train de revenir après une longue absence, un long sommeil. C’est cela, un long sommeil. Tout semblait flou. Il était impossible de connaitre l’espace-temps dans lequel nous étions. Comme si l’esprit était encore en train d’émerger.

Puis, soudain tout s’éclaircit. Les rires étaient plus nets aux oreilles et il était désormais possible de savoir où nous nous trouvions. Dans un salon, ou le plafond ne semblait n’avoir jamais de fin. L’immense cheminée dominait la pièce et tous les meubles se dirigeaient vers le feu crépitant durant les hivers rudes. La pièce était principalement dans les tons chauds. Les longs rideaux, pourpres recouvraient les fenêtres, empêchant d’apercevoir les flocons qui tombaient doucement dehors. La pièce semblait hors du temps, détaché du froid ambiant à l’extérieur et de tous soucis. Et on se rapprochant d’un peu plus près, il était possible de distinguer deux grands fauteuils en velours vert tournés en direction du feu. Installés dessus, un homme et une femme regardant avec un grand sourire le spectacle qui s’offrait à eux. Il aurait été plus convenable de présenter ces personnes comme un roi et une reine, mais les têtes n’étant plus couronnées, il était préférable de ne point évoquer leurs responsabilités. Face à nous, ils étaient seulement un homme et une femme.

Toutefois en observant plus précisément la pièce, les deux amants devenaient alors parents. En effet, la raison pour laquelle ils souriaient était deux jeunes filles âgées d’environ 5 ans qui jouaient et riaient aux éclats. Les deux sœurs s’amusaient à se poursuivre, l’une tentant d’échapper à l’autre et vice-versa. Les jeunes enfants malgré leur lien du sang, étaient très différents. En effet l’une était dotée d’une chevelure flamboyante, rappelant la chaleur se dégageant des arbres approchant de l’automne, l’autre bien au contraire était d’un blond si clair, qu’il se rapprochait du blanc. Il s’agissait bien évidemment des deux jeunes princesses étant enfants, Anna et Elsa. Et il était agréable de voir les sœurs si insouciantes, et si joyeuses.

 A ce moment précis, personne ne se préoccupait des pouvoirs de la future reine, ni des devoirs royaux. Aucune mèche blanche n’était présente dans les cheveux de la princesse rousse et ainsi, personne ne craignait Elsa. Ni même sa sœur, ni même les domestiques, ni même ses parents. Cela était même devenu une habitude de voir Elsa jouer avec son don. D’ailleurs, cette dernière étant poursuivie par sa sœur, tenta de la ralentir en créant une plaque de glace dans le but de la faire glisser. Cela marcha et la jeune princesse, bouda un instant, assise sur la glace. Le roi ria face à cette scène et il prit dans ses bras Anna. Il alla à nouveau s’assoir sur le fauteuil et la posa tendrement sur ses genoux. Elsa, quoiqu’un peu jalouse de l’attention portée à Anna plutôt qu’à elle, leva les bras vers sa mère, en demande d’une étreinte. Cette dernière eut un sourire narquois face à la jalousie de sa fille mais obtempéra et la prit, elle aussi dans ses bras. Et alors que les deux parents tenaient avec eux leurs précieux cadeaux, le père ne put s’empêcher de murmurer ces quelques mots.

« Je crois qu’en cet instant, je n’ai jamais été aussi heureux. »

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Le retour à la réalité fut douloureux pour la jeune reine. Son souffle était saccadé et son cœur battait à la chamade. Elle posa une main sur sa poitrine pour calmer les battements de son cœur qui cognait fortement contre sa poitrine. Sa respiration était achée. Elle regarda autour d’elle rapidement chaque détail de sa chambre pour s’accommoder au lieu. Le changement d’espace-temps était si brutal, qu’il était difficile au début de distinguer le vrai du faux. Elsa toucha le sol sur lequel elle était toujours assise et sentir cette présence commença à lui faire prendre conscience du lieu où elle se trouvait et de quel jour on était réellement. Puis elle tourna son visage vers celui de Jack. Elle avait besoin de sentir sa présence, afin de lui confirmer que ce qu’elle venait de vivre ne provenait pas de son imagination. Mais il n’était pas là. Et alors qu’elle commença à paniquer, une main s’approcha doucement d’elle, lui proposant son aide pour se lever.

Quand elle leva les yeux, elle trouve l’esprit de l’hiver adossé sur son bâton et lui adressant un sourire encourageant. Encore trop sous le choc pour pouvoir se lever seule, elle accepta alors son aide et se saisit de sa main. Une fois relevée, la jeune femme ne parvenait pas à tenir sur ses jambes. Jack passa alors le bras de la reine sur ses épaules et la dirigea vers le lit. Elsa était reconnaissante envers le jeune homme de ce soutien apporté et à ce moment les bonnes manières et la proximité naissante entre les deux, lui importait peu. Elle avait encore l’esprit trop occupé par les événements précédents. Quand la reine fut installée sur le lit, Jack s’assit silencieusement à côté d’elle. Il tentait, depuis qu’il avait fait resurgir les souvenirs de la jeune femme, de contrôler sa nervosité. Il ne voulait pas qu’elle le laisse. C’était encore trop tôt.

« Tenez, un peu d’eau. » Dit-il après s’être éclairci la gorge, pour cacher la peine qui pouvait se faire entendre dans sa voix.

Elsa tourna la tête vers le jeune homme, et utilisa le peu de force qui lui restait pour se saisir du verre d’eau. Pourtant elle ne porta pas le récipient à ses lèvres. Elle se contentait de fixer le contenu vaguement, tout en réfléchissant encore à cette vision. Elle était si déconnectée du monde alentour, qu’elle oublia le contrôle constant qu’elle devait porter à ses pouvoirs et l’eau se gela. Quand le verre devint lourd, il tomba, provoquant un déluge fait de verre et de glace. Cela eut pour effet de réveiller la jeune reine de son état de transe. Elle sursauta et se leva brusquement, tout en ne quittant pas Jack des yeux.

« As-tu vu ?» Lui demanda-t-elle dans un souffle.

La reine s’éclaircit elle aussi la voix. Elle avait si mal à la gorge, comme après ayant été malade. Elle posa une main sur sa gorge en la glaçant un peu, pour calmer le feu ardent qui s’était déclenché après avoir parlé.

« Non je n’ai rien vu Elsa, vos souvenirs sont personnels, je ne peux y avoir accès. » Déclara-t-il.

« Mais alors comment savoir si cela ne provient pas de mon imagination ? »

Jack se leva et fit face à la reine, pour que cette dernière puisse lire dans ses yeux la sincérité de ses propos.

« J’ai moi-même vécu l’expérience. Personne n’était là pour me confirmer que ce j’ai vu était réel. Mais j’ai senti que cela sonnait vrai. Au fond de moi, je savais que tout cela avait eu lieu. Comme vous n’est-ce pas ? Vous avez ressenti cela aussi non ? »

Elsa ne répondit pas, car elle savait que le jeune homme avait raison. Au fond d’elle, même si ses souvenirs étaient trop lointains pour qu’elle puisse s’en rappeler, elle avait cette sensation. Comme si son corps répondait à ce souvenir, comme s’il connaissait tout cela. Habituellement face à l’inconnu, le corps de la reine réagissait rapidement, menaçant de geler à tout instant. Et pourtant, durant son souvenir, elle était étrangement calme.

Elle était alors sure d’avoir vécu ce qu’elle a vu. Et cela l’emplit de joie car ce sentiment qu’elle avait éprouvé devant ce souvenir était si libérateur. Cela lui avait fait ressentir quelque chose de nouveau, un sentiment qu’elle ignorait jusque-là. Et alors qu’elle était dans sa chambre en compagnie de Jack Frost, quelque chose en elle explosa, comme si ces chaines la retenant depuis ces années n’existaient plus. Cette sensation fut si puissante que la reine tomba à genoux et resserra ses bras autour d’elle.

Jack Frost inquiet, tenta de la rattraper dans sa chute, en vain. Il se mit alors lui aussi à genoux devant elle, et épiait le moindre de ses gestes, de peur de la voir se briser. Mais cette dernière ne le regardait pas, elle avait son attention dirigée vers le sol. Puis, il vit une larme s’échapper du visage de la jeune femme pour atterrir sur le tapis persan. Inquiet par cette réaction, il se saisit alors du visage de la reine pour le ramener vers lui. Sa main était en feu, comme toujours, mais pour l’instant l’esprit restait focalisé sur Elsa. Mais lorsqu’il vit son expression, l’inquiétude de Jack se dissipa.

En effet la jeune reine avait un sourire qui éblouissait la pièce et pour une fois, ses yeux reflétaient véritablement son bonheur. Elle était tout simplement soulagée, heureuse. Et ne se souciant plus des bonnes manières et des coutumes royales, Elsa plongea dans les bras de l’esprit de l’amusement.

Ce dernier fut surpris du geste de la jeune femme. Il mit du temps avant de se rendre compte de ce qui était en train de se passer. Son cœur battait étrangement fort face à ce contact. Mais il répondit à l’étreinte en enroulant ses bras autour de la taille de la reine. Ils restèrent ainsi un long moment, savourant l’instant présent. L’une oubliant les règles de bienséance, l’autre ne se préoccupant plus l’espace d’un instant de sa peur de perdre Elsa. Il était désormais ravi du choix qu’il avait fait. Alors que la jeune femme était en transe, l’esprit perdu dans ce souvenir, Jack n’avait cessé de scruter son visage avec inquiétude. Il avait eu peur que cette dernière ne le rejette par la suite, n’ayant plus besoin de son aide. Mais tous les doutes venaient de s’évaporer. Il savait alors qu’il n’allait pas quitter le pays de sitôt. Il pouvait au moins rester jusqu’à la fin de l’hiver.

Face à cette pensée, le gardien resserra sa prise autour de la taille d’Elsa. Cette dernière, prenant compte de la situation dans laquelle elle se trouvait, se retira de l’étreinte et se releva précipitamment. Elle toussota légèrement pour dissimuler sa gêne.

« Je suis désolé Jack. Hum… Je ne sais pas ce qui m’a pris. »

Le concerné émit un rire gêné avant de se redresser. Il se rendit compte alors que son corps semblait imiter celui d’Elsa, comme un miroir. Lorsque cette dernière se déplaçait, Jack répondait identiquement à ses gestes.

« Vous avez juste agi comme un enfant. Voilà tout votre Majesté. » Expliqua-t-il tendrement.

Les joues de la reine rosirent discrètement.

« Je n’ai pas l’habitude excuse-moi ».

Jack sourit pour la rassurer. Elsa quant à elle se frottait les mains et se mordait les lèvres, nerveusement.

« En tout cas, je te remercie énormément Jack, pour ce que tu as fait pour moi. Pour m’avoir permis de vivre ça. C’est une sensation merveilleuse. »

« Oui en effet » Confirma le jeune homme.

Le gardien commença alors à créer un flocon dans sa main et le fit danser entre ses doigts. Puis il le lança et la création de l’esprit de l’hiver fit le tour la tête d’Elsa. Cette dernière rit face à ce spectacle.

« Et j’ai grande hâte de vous voir ressentir cela à nouveau dans la vraie vie. »

A l’entente de ces mots, le sourire de la jeune femme disparut de son visage. Maintenant qu’elle connaissait cette sensation, elle voulait la revivre, certes, mais ses obligations de reine étaient un obstacle à cela. Et avant qu’Elsa ne donne une réponse négative, le jeune homme la stoppa.

« Votre majesté, si je puis me permettre, j’insiste et vous invite vivement à tenter cette expérience. Je pense qu’il est bénéfique pour vous de faire cela. Cela vous permettra même de faire face au bal et au mariage. Je vous promets une échappatoire, qui vous permettra de survivre. Prenez mon offre au sérieux. »

Le jeune homme lui lança un regard suppliant, comme avant de faire retrouver la mémoire à la jeune femme. Il savait qu’il faisait plus cela pour lui que pour elle, mais cela était une raison pour continuer à voir la reine. Et il sentait au fond de lui également que sa mission ne serait pas finie sans passer par cela.

La reine quant à elle, ne savait que répondre. Elle se dirigea vers la fenêtre, l’ouvrit et sortit sur le balcon. L’air frais du soir lui fit du bien. Elle pouvait enfin faire le tri dans ses idées et dans ses sentiments. Elle ferma les yeux et se concentra un instant. Elle fit le vide dans sa tête.

Dans deux semaines, elle allait devoir se vendre au meilleur parti pour le pays. Dans quelques mois, elle serait mariée contre son gré avec une personne qu’elle n’aimera pas. Et même si cet époux se trouve être une personne avec de bonnes intentions, elle savait qu’elle ne pouvait s’empêcher de le voir comme celui qui l’a acheté, telle une marchandise.  A partir de ce moment, la reine devra s’enfermer dans cette forteresse de glace qu’elle avait construite durant son plus jeune âge. Elle pouvait effectivement profiter et exalter toutes ses émotions qui mourront bientôt. Elle lança un regard au village qu’elle surplombait. Les habitants dormaient, tout était si calme. Il y régnait une sérénité mensongère, une sérénité illusoire. Après tout si les villageois avaient le droit à un moment de paix, La reine Elsa en avait aussi le droit. Elle se retourna alors et s’approcha de Jack Frost, sans aucune hésitation. Elle était désormais sure, elle n’hésitait plus.

« C’est d’accord. Je veux bien qu’avant le bal, tu m’aides à vivre comme un enfant. »

Le gardien hocha la tête solennellement.

Le compte à rebours venait de commencer. Il ne restait désormais plus que deux semaines.  

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