Le Rempart des Hommes

Chapitre 5 : Chapitre Cinquième

1116 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 12/12/2020 18:20

Le Rempart des Hommes

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Chapitre Cinquième

- Le Rempart des Hommes -

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L’hiver demeure.


La neige recouvre encore l'horizon tandis que le ciel garde sa couleur morne.


Cependant les vents sont redevenus plus chauds, suffisamment pour que les nuits elles, redeviennent vivables tant que l'on se couvre.


Une fois le bûcher funéraire enflammée, le capitaine tient conseil auprès des derniers membres de la compagnie.


Ils ne sont plus que neuf.


Les autres ont succombé aux blessures, à l'épuisement ou la pitié.


Durant les trois jours qui suivaient la bataille, les survivants ne pouvaient pas faires grands choses pour leurs camarades mourants, si ce n'est les libérer de leurs souffrances.


Avec le cœur lourd, certains avaient sorti leurs épées une dernière fois avant de les jeter, pour que leurs mains ne manient plus jamais pareils objets.


Ceux qui restent n'ont désormais plus de garde que le nom.


Leurs capes déchirées, leurs vêtements troués et leurs armes abîmées pigmentent leurs apparences couvertes de bandages de fortune.


Ännaberen lui-même ne s'en est pas sorti indemne.


Achevé par les nuits gelées subites plus tôt, il ne put sauver les plaies de sa main droite et perdue trois doigts.


Celle-ci ne pourrait plus jamais manier Arbreged, qui est elle-même fissuré de part en part.


Toutefois, l'envie d'accomplir son serment est plus forte que la douleur.


Ainsi il tient son épée dans sa main gauche avec plus de vigueur qu'il ne l'aurait fait avec sa, demie, main droite.


«Nous ne pourrons tenir une nuit de plus, dit Tirthenid qui avait perdu son œil gauche.»


«C'est à peine si nous pouvons chasser, nous battre ne serait que folie, poursuivit Garthgolwen aux jambes brisées.»


«Mais notre serment tient toujours, termine Lamringa qui est le seul à se tenir indemne.»


Il ni a aucune délibération. Ces trois vérités frappent aussi fort que l'acier et leur fierté en est à jamais blessée.


«Nous avons tenu notre serment, dit le capitaine en soutenant le regard de ses compagnons. Mais nous ne pouvons plus le tenir ici. Ainsi vêtus et armés, affamés et épuisés, nous ne tiendrons pas une semaine si les loups reviennent. Si ce sont les ombres qui revenaient, nous ne tiendrions pas plus d'une nuit.»


«Alors que faisons-nous? Devons-nous renier notre serment et fuir comme les parjures?»


La voix de Lamringa est dure et cache à peine son dégoût. Est elle dirigée contre les fuyards ou contre lui-même, nul ne peut le dire.


«Nous ne renierons rien, rassura Ännaberen en serrant de sa demi-main l'épaule de son camarade. Nous avons juré de faire rempart pour protéger nos êtres chers et nous le ferons. Cet hiver n'était qu'un début et je parie mon autre main que les prochains seront encore plus rigoureux


Ce qu'il prend pour une petite touche d'humour ne fait sourire aucun d'entre eux.


Aucun ne veut sourire.


Et lui non plus.


«Alors nous ferons rempart là où nous nous dresseront efficacement, auprès d'eux. Pour ma part, je retourne en Fornost, où résident mon Roi et mes gens. Je sais que vous, frères du Cardolan, n'avez aucun mur assez haut. J’ai été et suis toujours témoins de votre courage. Alors sachez ceci: moi Ännaberen, fils d'Ädanachas, vous promet que ma maison aura toujours des murs assez hauts pour vous et vos êtres aimés


Les silencieux hommes du sud restent méfiant à l’égard des promesses d'un Athedaïn.


Ces derniers étaient encore les frères ennemis de leur pays il y a encore quatre générations.


Cependant, il s'agit là d'une promesse d'un frère fidèle.


Un frère qui avait chassé, mangé, combattu et souffert avec eux.


leurs visage s'éclaircir de sourires, un chaleureux sourire que leur jeune capitaine leur rend.


C'est alors que le craquement d'une branche leurs fient sortir leurs armes et ils retournent pour confronter la menace.


Un homme se montre, en encore plus piteux état, présentant un arc fendu qu'ils reconnaissent comme Perintir.


«Tu oses te montrer devant nous parjure, crache Lamringa en le pointant de sa lance. Ce qui te reste de dignités ta finalement ordonné de revenir pour te donner la mort?»


L'homme, ou plutôt le débris vivant de ce qui fut un homme, ne répond point.


Il semble muet, regarde de ses yeux bruns vides ceux qu'il avait abandonnés lâchement.


Alors ils reconnurent ces yeux qui les fixaient, sans pour autant reconnaître l'arrogance qui les habitaient il y a encore quelques mois.


«Répond! Qu'est tu donc venu chercher traître?»


La bouche de l'homme s'ouvre légèrement mais ne laisse échapper aucun son.


Exaspéré et prêt à attaquer, Lamringa sent alors à nouveau la main de son chef sur son épaule.


«Devons-nous le tuer? Ainsi son serment sera tenu, pour le peu qu'il fit, dit-il sans lâcher sa proie du regard »


Ännaberen ne répond pas et s'avance vers le débris vivant.


Prenant peur pour sa vie et se maudissant d'être revenus, celui-ci s'agenouille lamentablement sur sol.


Ses membres tremblent et sa bouche émet des mots incompréhensibles, déformés par sa peur.


Le capitaine serre son épée.


L'envie de la brandir est puissante.


Des hommes courageux avaient souffert et gisent maintenant sur le bûcher, des hommes auxquels plus aucuns de leurs êtres chers ne reverraient jamais.


Jamais ils ne reverraient leurs visages ou n'entraient leurs voix. Jamais ils ne sauront ou résident leurs corps sans vies.


Pourquoi ce méprisable lâche échapperait à ce destin?


Alors il dégaine Arbreged.


Il la lève haute et menaçante.


Puis il l'abat.


Ses compagnons, muets, ne réagis pas.


L'homme agenouillé est encore vivant. L'acier avait touché de la pierre et l'épéiste dit:


«Je considère ton serment comme accomplis, Baurbel fils de Bronainnas. Désormais, que tu restes ou tu partes, cela ne me concerne plus.»


Et tous partent.


Certains prennent la route du sud, d'autre c'elle de l'ouest.


Ännaberen, sur le dos couleur fauve de Beledlothia, est le seul à prendre la route du nord.


Ses tristes yeux vert contemplent une dernière fois la tour en ruine, d'où s'échappe encore la fumée du buché.


«Oh mes frères qui restent.

Puissiez-vous trouver un repos éternel.

Mon serment me preste.

Et je vous adresse ce dernier salut fraternel.»


Alors ses yeux se détournent de la colline brumeuse.


Le cavalier se remet en route.


Car celle-ci est encore longue.

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