Darius : La victoire à tout prix !

C'en était assez ! Il décrivit un arc avec son immense hache, faisant tomber une tête de plus, celle de son capitaine. Noxus devait gagner cette bataille ! "Regroupez-vous !" hurla-t-il à son escouade qui commençait à faire marche arrière. "On ne bat pas en retraite, nous retournons combattre !

-Vous avez perdu l'esprit sergent ! Ils sont trop nombreux, nous ne pouvons rien faire !

-C'est du suicide !"

Lentement, le regard écumant de rage et la main cramponnée à sa hache, Darius s'approcha des deux indisciplinés et éructa : "J'ai dit, EN AVANT !". L'escouade se reforma et repartit au combat une fraction de seconde plus tard, menée par son nouveau chef.

Le champ de bataille était un plateau traversé par un ruisseau le délimitant en deux parties. Chaque belligérant avait pris place au sommet de l'une des deux collines : Demacia à l'Ouest et Noxus à l'Est. Dans un face-à-face opposant symboliquement les deux états, le général demacien toisait d'un air hautain le colonel ennemi, qui le fixait d'une haine sans égale. Alors que sonna l'Appel du Combat au sein des rangs, les noxiens saluèrent la clameur d'un nouveau combat, tandis que leurs adversaires s'en allaient à leur rencontre d'un air résigné mais sûr.

Les premiers coups s'échangèrent dans la boue qui bordait le ruisseau. Après plus d'une heure de combat acharné, il s'était teint d'un rouge nuancé et sombre. Des croutes se formaient sur l'herbe, au milieu de laquelle étaient jonchés membres humains, cadavres et pièces d'armures.

L'ardeur, le courage ou l'héroïsme étaient des valeurs absentes lors d'un combat aussi âpre et intense. Il ne pouvait être constaté que l'absence de pitié, la folie et l'obsession qu'engendrait la guerre en examinant les corps. Certains n'étaient ouverts que d'un coup transversal fendant leur plastron. Mais d'autres avaient les côtes arrachées, les poumons avidement poignardés et le visage écorché.

Loup devait se réjouir lorsqu'il y avait tant de guerriers obstinés à repousser son étreinte dans le but de pouvoir tuer un ennemi de plus avant de succomber.

Tant de soldats sacrifiés dans un combat dont l'issue était pourtant si évidente. Les deux armés s'étaient rencontrées au milieu du plateau, mais l'infériorité numérique de Noxus s'était vite faite ressentir. Demacia tenait maintenant au moins trois quarts du terrain. Ses adversaires avaient été surclassé, et maintenant la victoire était à portée de main.

Dans le camp ennemi, la retraite venait d'être sonnée. "Ils finissent tout de même par lâcher le morceau !" plaisanta Poemer. Son camarade sourit sous son heaume doré encore tout scintillant. "Et ils sont propre en plus de ça !" renchérit-il. C'est avec un sourire entendu qu'ils traversaient le champ de bataille, persuadés que l'ennemi serait bientôt vaincu. "Tiens ? Voilà que quatre d'entre eux nous chargent ?" s'interrogea Poemer. "Qu'est-ce qu'ils ont dans leurs rations ?" demandât Falgorn.

Ils arrivèrent en hurlant, une tradition aussi vieille que l'Empire, apprise au recrues le plus tôt possible. Avoir un cri unique fait émerger un sentiment d'unification au sein de chaque escouade, un cocon ou chaque guerrier digne de ce nom a sa place attitrée. On gagne en assurance lorsqu'on sent la présence d'un camarade couvrant votre flanc gauche de toute attaque en traître.

Celui de Darius était aussi guttural qu'implacable. Une nette inflexion de sa voix suivit la trajectoire que prit sa hache pendant un saut aussi magistral que salvateur.

Poemer s'affala des deux côtés de la sinistre hache. Son bouclier immaculé il y a seulement deux secondes s'était brisé puis chaque fragment s'était enfoncé dans l'une ou l'autre moitié de son corps. Soudainement, la peur se fraya un chemin dans le cœur de tous les soldats témoins de l'exécution.

Après avoir tranché un premier ennemi en deux, Darius égorgea un autre soldat abasourdi d'un revers. Son cou s'ouvrit pour laisser se déverser un flot de sang et son visage s'assombrit dans une expression de peur mêlée d'incompréhension. En face de lui, celui du sergent était crispé par la haine.

Les hommes sous le commandement de Darius redoublèrent d'effort pour le soutenir dans la mêlée. Ils firent tomber à eux seuls une trentaine de demaciens. Mais les épées avaient beau taillader, les lances empaler et sa hache trancher, l'armée ennemie se refermait petit-à-petit autour d'eux. Dans un dernier effort, Il s'écria "Face contre terre !" et décrivit un cercle aussi précis que mortel, fauchant les gardes qui les encerclaient. Mais cela n'allait guère suffire à endiguer le flot d'ennemis qui ne cessaient de se masser autour d'eux.

Alors que tout semblait perdu, un puissant cor retentit soudain, accompagné d'un immense cri de guerre. Ce qui restait de leur armée chargea celle de la Rivale. Leurs chances de victoires étaient affreusement faibles, mais la charge héroïque de Darius avait réveillé la soif de combat dans le cœur de chacun de ses frères d'armes, attisée par le désir de revanche. Se joignant à eux en dévalant la pente, les guerriers réengagèrent le combat, augmentant drastiquement le nombre des pertes de Demacia. Le clou du spectacle se déroulait autour de Darius, invincible combattant, exécuteur sans pitié et leader charismatique. Chaque ennemi qui lui faisait face tombait, le corps plus ou moins mutilé.

Il ne sentait rien, n'entendait rien et ne voyait dans son champ de vision rien d'autre que les armures dorées des demaciens. Il n'était pas plongé dans une soif de sang, mais de meurtre. Ils tomberaient tous... Après les amères défaites, Noxus enchaînera les victoires ! Ils le payeront de leur vie, TOUS !

Petit-à-petit, Noxus reprenait ce qu'elle avait perdu et déplaçait inexorablement la ligne de front vers le haut de la colline adverse. Confronté à un choix difficile, le général Demacien ordonna à ses hommes de continuer à se battre. Un choix qui ne permis la fuite que de quelques déserteurs.

Darius réussis à en rattraper un qui avait trébuché, le prit par la gorge et le tint à six centimètres de son visage. Il implorait : "Je me rend, je me rend ! Je serai un fervent défenseur de l'Empire, j'ai de nombreux talents ! Pitié, laissez-moi la vie sauve, je vous en prie !".

Darius s'était enfin extrait de sa soif de carnage et avait fini par lâcher la gorge du demacien, qui était maintenant en train de reprendre son souffle, agenouillé. "Des talents ? De quels "talents" parles-tu ?

-J'étais un des meilleurs de ma promotion à manier l'épée, la lance et j'ai servi en tant qu'assistant d'artillerie lors de la bataille de Cumas, Monsieur."

Darius souriait, il était expérimenté et trouverait forcément une place dans le bataillon. Néanmoins, une question lui tarauda l'esprit : "Possèdes-tu une famille, un foyer ?

-J'ai une femme et deux enfants, un garçon et une fille, Monsieur.

-Des enfants ? Parfait."

Une demi seconde plus tard, la tête de Jesmer, roulait par terre. Tout en admirant le sang sur sa hache, Darius lança : "J'espère qu'ils pleureront ta mort, vermine !"

Quelques instants plus tard, la tête du général tombait elle aussi. Cet évènement fut le signe de la victoire pour Noxus. Leurs forces étaient affaiblies et exténuées, mais ils avaient réussis l'impensable. Au milieu des insultes, des épées et des mains levées s'avança un porte-étendard. Un silence s'installa soudainement dans la foule et tous se mirent au garde-à-vous. Quand le drapeau fut planté dans le sol, tous levèrent le bras droit en l'air à l'unisson et, le poing serré, ils crièrent un vibrant et puissant "Pour Noxus !".

Après quoi, ils fêtèrent leur victoire avec camaraderie. Certains se tapaient amicalement l'épaule pendant que d'autre pillaient les cadavres ennemis. Bien vite, toute l'attention fut portée sur Darius. Ses frères d'armes le saluèrent sympathiquement pour son exploit, mais il leur renvoya le compliment d'une façon assez distante. Connaissant l'humeur assez changeante de leur nouveau capitaine, les membres de son escouade préférèrent s'éclipser pour aller rejoindre le reste des vainqueurs. Certains des vaincus étaient blessés et avaient été ramené en tant que prisonniers. Un triomphe jouissif et retentissant comme on en avait plus vu depuis longtemps.

Dans la soirée, Darius avait été honoré par le commandant du bataillon et le serait certainement plus encore de retour à la capitale. Mais il n'avait pas vraiment l'air fier ou satisfait, plutôt distrait et absent. Pendant leur retour, il était resté plongé dans ses pensées embrouillées, se moquant du bilan matériel et encore moins des honneurs à venir.

Cette victoire n'était que le commencement... Noxus se devait d'être une nation puissante et solide. De nombreux remaniement restaient à faire, notamment la chute de Darkwill et par effet de succession, l'accès de Swain au trône. Depuis trop longtemps la cité était prise dans l'emprise inerte du Grand Général et il était temps de faire entrer l'Empire dans un nouvel âge d'or. Pour cela, il fallait cesser toutes sortes de manigances ou de complots pour se focaliser sur les deux seuls buts valables : la domination incontestable de l'Empire sur tout Valoran, et l'annihilation totale de Demacia et Ionia.