Le tour de la question

Chapitre 3 : Révélation

1504 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 16/02/2017 12:08

- Coney Island, à l'extrême sud de Brooklyn -


Le bruit des manèges, les cris, les rires, les clameurs de joie. Toute l'île résonne des parcs d'attractions sous une journée estivale dont les embruns de l'Atlantique viennent apporter un air piquant. Coney Island est un endroit où l'on abandonne toute la morosité qui pourrait s'emparer de vous au profit d'un peu de légèreté et de détente. Le jeune homme déambule entre les stands, s'enivre de l'odeur des barbes à papas, son estomac ou plutôt le gouffre qui y siège, se rappelle à son bon souvenir. Un bref constat sur ses richesses et une grimace de dépit, il n'a pas vraiment les moyens de dépenser ne serait-ce que dix cents pour ça. Trouver un travail et de quoi subsister devient urgent et malgré l'ambiance festive qui règne en ces lieux, les soucis étreignent de nouveau son cœur et son esprit.


New York, ça n'a définitivement rien à voir avec l'Iowa et sa campagne perdue au milieu de nul part. Il en a vu du pays avec le Cirque Carson avant de suivre son propre chemin, de s'éloigner d'une spirale qui devenait bien trop dangereuse, bien trop éloignée de ses convictions. Cela faisait bien un mois qu'il n'avait plus de nouvelles de son mentor, de celui qui a su voir le talent qui se cachait si profondément chez ce gamin au caractère bien trempé.

Trickshot était son nom de scène, en réalité il s'appelait Buck Chisholm, un maître archer bien vite dépassé par l'élève. Seulement Buck n'était pas du genre petit escroc comme l'était Jacques, une véritable figure paternelle pour l'orphelin délaissé par son propre frère. Celui qui se faisait appeler Swordsman l'avait prit sous son aile, entraîné aux lancers de couteaux mais c'est avec l'arc que son protégé avait de l'avenir. Une partie de poker, truquée sans aucun doute, et Clint se retrouve entre les mains d'un malfrat qui rêve d'argent et de gloire. Un talent certain, un don même pour Buck. A cela s'ajoute les grandes capacités acrobatiques de son élève, son esprit travailleur et cette envie de toujours satisfaire ceux qui l'entourent. Clint était tout désigné pour l'accompagner dans ses méfaits.


Le grand dadet aimerait bien reléguer ces souvenirs dans un coin. Il est venu ici pour penser à autre chose. Laver sa conscience réclamerait bien plus qu'un simple détour par Coney Island. Du coin de l'œil, il avise un stand de tir, l'attraction classique qui consiste à envoyer des balles de base-ball sur une cible.


- Un dollar la mise, descendez toutes les cibles te remportez cinq dollars !


Criait le forain pour attirer les foules.

Certains tentaient leur chance, ça commençait bien à chaque fois puis les cibles tombaient avec bien moins de facilité. Clint restait en retrait, il observait ce qui pouvait bien se passer dans les coulisses de ce stand pourtant d'apparence classique. Il a été élevé dans ce monde, il en connaît les ficelles. Le jeune homme sait très bien que l'on voit ce que l'on veut montrer ici, tout n'est pas dévoilé et encore moins, la manière d'escroquer les gens. Enfin plutôt « faire son beurre » comme aiment à le nuancer les animateurs. Le point de pression devenait plus restreint alors que les cibles restaient en apparence les mêmes, finement joué mais pas assez pour le tireur d'élite en devenir. Un petit sourire narquois vient se dessiner sur les lèvres du blond qui s'approche alors pour tenter sa chance avec l'air benêt qu'il sait si bien afficher. Le forain pourrait presque se frotter les mains, à coup de un dollar par pigeon, la journée serait vite pliée. L'appât du gain fonctionne dans les deux sens. La balle de base-ball file vers la première simple, un peu gauche, de quoi tromper sur les capacités de notre jeune homme, une autre, puis une autre encore. Au fur et à mesure des cibles qui se renversent dans un tintement de cloches, le tenancier arbore une mine déconfite car Clint ne comptait pas s'arrêter en si bon chemin. Sur de ses manigances, le forain tombe des nues tandis que la dernière cible disparaît à son tour. Le blondinet lui lance un regard oblique en faisant sauter dans le creux de sa paume, la dernière balle qui lui restait pour tenter le jackpot de cinquante dollars qui doit rendre la poussière depuis un certain temps. Un rire jaune, on tente de garder contenance tout en continuant le numéro sous des applaudissement appréciateurs de la foule qui s'est amassée derrière Barton.

 

- Cinquante sacs, c'est pas mal ! j'ai fais un bon investissement.


Le sourire aux lèvres, les billets défilent entre ses doigts histoire de vérifier que son dû est entier avant de fourrer le tout dans la poche de son jean. La promenade tirait sur sa fin, il serait temps de reprendre le métro vers Bedford et l'appartement miteux qu'il venait de dégoter dans l'un des quartiers les plus craignos de la ville. Un petit détour par chez Gino, la pizzeria du coin et la boucle serait bouclée.

Clint a apprit bien vite que les plans sont toujours différents de la théorie à la pratique et ce qui lui passe devant les yeux, n'est qu'une nouvelle preuve. Un grondement sourd se fait entendre, un tremblement qui fait chavirer les étales les plus fragiles puis la panique commence à s'emparer du parc. Une cohue, des gens qui accourent en provenance de la Grande Roue comme une volée de perdreaux devant la tempête toute proche. Prenant un peu de hauteur avec une agilité naturelle, Barton aperçoit deux formes floues, l'une plus massive que l'autre qui virevolte dans les airs avec une extrême facilité. Semblable à une flèche carmin et or, des rayons bleutés semblent s'échapper de ses mains pour frapper le colosse à la peau grise, hurlant sa rage.


- Eh ! qu'est ce qui se passe ??

- Le Rhino...c'est le Rhino, Iron Man se bat avec lui !


Pas le temps d'en savoir plus que l'homme que Clint a attrapé, prend la fuite bien vite. Voilà de quoi attiser la curiosité, c'est bien la première fois qu'il serait témoins de celui dont on entend parler des exploits dans le tour du cul du monde.


- Faut que je vois ça...


Il se fraye un chemin non sans peine, comme si il marchait à contre-courant, le mouvement de foule se faisant de plus en plus diffus qu'il s'approche de la Grande Roue et du centre névralgique du combat. L'endroit a été évacué si vite, c'est comme si tout le monde était presque habitué à ce genre de spectacle qui vaut tout les shows de cirque du pays. Au loin, on pouvait déjà entendre les sirènes de police qui viendrait établir un périmètre le temps que l'Homme de Fer calme la bête. Caché derrière un stand, Barton en prend plein les mirettes, obnubilé par le combat de titan qui se joue devant ses yeux. Le Rhino est une force de la nature, incontrôlable, un criminel notoire qui semble s'être déjà fait un nom parmi la population New-Yorkaise. Un nouveau tremblement de terre, Barton plisse les yeux et grimace en voyant Iron Man envoyé au tapis d'un geste chaotique mais plein de fureur et de hargne, il aurait presque mal pour lui. C'est alors que son regard oblique vers la droit et s'écarquille.



- Qu'est ce que...


Un gamin se tenait là, totalement à découvert, absorbé comme le blondinet aurait pu l'être mais plutôt paralysé par la peur, tenant encore entre ses doigts la ficelle d'un ballon de foire. Le combat fait rage, les deux protagonistes n'ont aucune conscience de ce qui se passe autour deux quand des nacelles de manège ou des stands volent d'un bout à l'autre du ring improvisé. Impulsif, Barton sort de son abri dans la plus grande précipitation, courant alors vers le gamin qu'il a juste le temps de subtiliser du champ de bataille alors qu'une auto-tamponneuse vient s'y écraser. La réception est brutale, tenant le gamin contre lui, les bras serrés autour de la silhouette frêle, le dos de l'acrobate vient s'écraser contre l'armature métallique d'un carrousel amputé déjà de quelques chevaux. Un grognement de douleur mais pas le temps de traîner dans le coin, il se relève prestement et attrape la main du gosse pour le tirer loin de tout ce grabuge non sans un dernier regard en arrière. Une idée venait de germer dans un coin de son crâne. 


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