- Où suis-je ?
Quelle est cette odeur ? Jamais je n'ai senti quelque chose d'aussi exécrable de toute ma vie. J'ouvre faiblement les yeux. Je suis dans le noir complet. Je ne perçois rien, je sens juste mes mains retenues en l'air. Elles sont attachées par des chaînes froides. Je suis à moitié debout. Que se passe-t-il ? J'ai la gorge sèche et le goût du sang dans la bouche. Si je ne ressentais pas cela, je pourrais bien dire que la Mort se trouve à quelques mètres de mon corps. Qu'ai-je fait pour mériter cela ?
Je ne comprends rien. Quelque chose vient alors monter sur mon dos. Quelque chose de visqueux, de gluant. Que cela peut-il être ? Je pense sûrement à une espèce de reptile si j'en crois les mouvements de son corps. Un serpent. Qu'est ce que cela peut bien faire ici ? Je sens mon ventre se resserrer, mon cœur bat de plus en plus fort. J'ai peur. J'essaie de bouger, mais je me retrouve dans l'incapacité de le faire. J'ai envie de hurler, de crier à l'aide jusqu'à m'en arracher les tripes. Aucun son ne sort. C'est comme si l'on m'avait coupé les cordes vocales. J'ai tellement soif, je me sens complètement déshydratée. Cet animal ne fait qu'accroître mon angoisse en glissant sur mon dos. Il bouge lentement, prenant le soin de s'enrouler autour de mon corps. Je me rends compte maintenant que je suis nue, vulnérable et complètement inoffensive.
Je ne suis qu'une proie pour cette bête répugnante. Une viande, rien de plus. Est-ce à cela que se résume mon existence ? A finir dévorée par un serpent ?
Je me sens si faible, je n'ai plus aucune force, et pourtant, je ne me souviens même pas avoir fait le moindre effort. Qu'est ce qui a bien pu me mettre dans un état pareil ? Je ne peux pas me défendre face à l'ennemi qui me paralyse par sa simple présence. D'ailleurs, qu'attend-il pour me dévorer ? Je suis faible, vulnérable et sans doute seule. Je n'attends que cela, une vie comme la mienne ne vaut pas la peine d'être vécue. Une minute. Qui m'a donné la vie, et m'a abandonné ici ? Et d'ailleurs, quel est mon nom ? Pourquoi est-ce que je ne m'en souviens pas ? Comment puis-je affronter l'adversaire sans même savoir qui je suis ?
Le reptile gluant remonte derrière ma nuque pour se placer près de mon oreille. Sa prise excelle, impossible de m'en défaire. Il a réussi à bloquer le bas de mon corps, et à m'immobiliser tout en ayant pensé aux chaînes qui retenaient mes bras. Comment se fait il qu'un animal soit si intelligent et si puissant à la fois ? Je n'en ai plus pour longtemps. Je le sens. Je ferme les yeux, pensant qu'il commencerait alors son repas. Je ne tiens pas à assister à un tel spectacle. Je ne peux rien faire, il a tous les pouvoirs. Il est en position de force alors que je lui sers de déjeuner. Quelle misérable existence. Je n'aurais plus à souffrir longtemps, tout ceci sera bientôt terminé. Mais pour une raison encore inconnue, il ne m'attaque pas. Il me siffle à l'oreille. Le bruit résonne en moi comme un murmure. Je suis de plus en plus terrifiée par sa présence. Mon angoisse reste inqualifiable, je me retrouve dans l'inconnu complet. Que me veut-il à la fin ?
J'ai à présent une autre raison de paniquer : je viens de m'apercevoir que j'avais compris ce que chaque sifflement de la bête sauvage signifiait. Est-ce normal ? « Le maître arrive, il est très impatient de commencer. » m'avait-il dit. Le son du sifflement résonne encore dans ma tête. Il me la fait tourner, j'en suis désorientée. Je commence à craindre le pire. Le maître ? Qui est-ce ? Un gros serpent ? Commencer ? Son repas ? Lequel d'entre eux dois-je être le plus effrayée ? Je ne serais sûrement qu'un amuse-gueule pour eux. Je suis perdue. Pourquoi m'avoir dit cela ?
J'entends un bruit. Des pas. Qui cela peut-il bien être ? Un homme ? Va-t-on me secourir ? Je lève légèrement la tête, mon regard tourné vers l'endroit d'où provient le son qui résonne. Mon cœur va exploser, j'ai si peur de ce lieu effrayant. Je ne perçois rien dans l'obscurité, l'ignorance me fait face, et ce depuis le début. Quelqu'un va bientôt arriver, il se rapproche aussi lentement que l'animal qui s'était approprié mon corps. Mon angoisse se fait de plus en plus grande, je sens l'air glacial qui se dégage de la salle, paralysant mes moindres faits et gestes. Je n'arrive même pas à trembler, je suis complètement désespérée dans cette atmosphère. Ma gorge me pique, me brûle, comme si plus d'une centaine d'épées la broyaient. Ce goût du sang qui coule sur mon palais depuis que je me suis réveillée proviendrait-il de cela ?
Les pas s'arrêtent net. Je vois quelque chose bouger, malgré le peu de vision qui m'est offert. Quelque chose tourne. Serait-ce une poignée de porte ? Effectivement, celle-ci s'ouvre doucement, dans un grincement inaudible, dévoilant un homme illuminé par l'extérieur. Est-ce lui le « maître » ? Ou serait-ce mon sauveur ? Je ne le vois que de loin, mais je remarque de longs cheveux noirs virevoltants.
- Tu t'es finalement réveillée, Anko ? Lance-t-il d'une voix caverneuse.
Anko ? S'adresse-t-il à moi ? Quelle voix sombre, effrayante, glaciale. Comment cela peut-il exister ? Mon cœur bat de plus en plus vite, ce ton calme qu'il avait dégagé a confirmé mes pires craintes. Je suis dans un cauchemar, ce n'est pas possible ! Je détourne le regard, la lumière envahit un peu la pièce depuis qu'il a ouvert la porte. Des corps sont empilés par vingtaines aux deux extrémités de la pièce. La peur hante mon corps, la terreur s'en empare. Qu'allait-il me faire ? S'il avait voulu me tuer, il l'aurait fait dès le début, je n'aurais pas eu à subir ce désastre et il n'aurait pas besoin de me torturer ainsi. Qu'attend-il de moi alors ?
Je dévisage les corps inertes au sol. Leur peau est mauve, comme s'ils étaient le résultat d'atroces expériences. Je les envie presque. Ils n'ont pas eu à subir cet effroi qui déchire mes tripes depuis que le serpent eu rampé sur mon dos. Celui-ci se retire pour aller au pied de ce personnage inconnu qui me fait face, ses yeux perçants inspirant la crainte et le mépris. Il ne me regarde pas mais impossible de soutenir ce regard. J'entends un son provenant de sa bouche. Il rigole. Un rire sarcastique, cruel. Qu'y a-t-il donc de drôle ? Je suis enchaînée, nue, faible, à moitié consciente. Il ne m'inspire aucune sympathie, que de l'empathie et du dégoût, mais aussi beaucoup d'horreur. Que va-t-il me faire ?
Son regard croise le mien. Tout s'est passé en un éclair. Une immense douleur vient me frapper sur mon épaule gauche au moment même où ses yeux jaunâtres se sont plongés dans les miens. Je m'agite, de peur qu'il ne me fasse du mal, que cette douleur persiste, s'intensifie. Je frappe mes poings attachés contre le mur qui se trouve derrière moi, malgré mon immobilité. Je veux m'échapper, que tout ce cauchemar s'arrête ici et maintenant. Je n'arrive à rien au vu du peu de forces qu'il me reste. L'homme aux longs cheveux noirs s'avance lentement vers moi. J'entends le bruit de ses pas comme un requiem précédent la fin. Je sens mon cœur me lâcher, ratant un battement. Plus il se rapproche de moi, plus ma douleur s'intensifie et plus l'horreur me hante.
Arrivé à deux pas de mon corps, je remarque son sourire sarcastique. Le serpent le suit au pas. Je détourne le regard. En aucun cas je ne veux voir ses horribles petits yeux jaunes. Ce monstre me donne la nausée. Lentement, le maître du reptile s'approche près de mon visage, si près que je sens sa respiration réchauffant ma joue. Les battements de mon cœur s'accélèrent. Qu'ai-je fait pour mériter un tel sort ? Je vois sa main passer derrière ma nuque. Une main glacée qui me fait retourner la tête. En plus d'être un jouet, un bout de viande, je ne peux échapper à son regard. Des yeux perçants, semblables à ceux des serpents. Je remarque plus en détail sa peau blanchâtre, froide à en glacer le sang et son air maléfique, démoniaque. Serait-ce le diable ?
- Je suis venu te libérer de cet effroi. Souffle-t-il en caressant ma joue.
Mes yeux s'écarquillent. Me libérer ? Qu'est-ce que cela signifie ? Sans avoir rien remarqué, l'homme s'est placé derrière moi en un instant après avoir retiré sa main de ma joue. Il passe celle-ci autour de mon ventre, me collant à son corps. Je sens la bête sauvage remonter, allant de mon entre-jambe à mon épaule. Le serpent est aussi visqueux que son maître est effrayant, terrifiant. Les larmes commencent à monter, je ne peux rien faire, rien empêcher. Je suis prise au piège, comme un cochon à l'abattoir. Quel genre de personne peut être si cruel ? Je sens le souffle du démon sur ma joue, sa tête s'est rapprochée de la mienne. Ses cheveux tombent sur ma poitrine, mes larmes les noyant, les inondant.
Je l'entends bouger, le silence qui a envahi la pièce est à présent rompu. Le son qui vient à mes tympans ne m'est pas inconnu. Un froissement de tissus se fait entendre. Il enlève ses vêtements. Que va-t-il me faire ? J'essaie tant bien que mal de crier, de beugler que quelqu'un vienne m'aider, mais aucun son ne sort de ma bouche. Il m'a lâché ce court instant où il se déshabille, mais l'animal lui, continue de m'immobiliser. Pourquoi me maintenir comme ça ? Je ne peux pas m'échapper, je n'ai aucune force, ni aucune volonté. Qu'a-t-il à craindre de moi ? Le reptile répugnant me tient debout, les jambes écartées, de façon à ce que je ne puisse rien faire. Mais qu'attendent-ils ? Je sens la vie m'abandonner et ne ressens que du mépris et du dégoût à son égard.
Quelque chose fait le tour de mon cou. Quelque chose de gluant. Cette chose tient un couteau. Je baisse légèrement mon regard, par peur mais aussi par curiosité. Je ne suis vraiment pas prudente, mais je me rends compte que cette chose n'est autre qu'une gigantesque langue. Attendez. Une langue ? Les yeux grands ouverts, d'une peur sans précédent, je pousse enfin mon premier hurlement à m'en arracher les entrailles. Entendant le bruit assourdissant que je venais de provoquer, l'homme sournois agit avec rapidité, plaquant sa main sur ma bouche, sa tête collée à la mienne, la lame du couteau légèrement enfoncée dans mon cou.
Les larmes coulent avec abondance. Je pleure. J'ai mal. Je n'en peux plus. Je souhaite que ma vie s'achève. Qu'il me transperce la gorge. Qu'il me tue. Mais pourquoi me faire subir cela ? Le serpent me ressert encore plus, m'étouffant. Recherche-t-il un arrêt de ma circulation sanguine ? Un rire démoniaque, machiavélique résonne dans mes oreilles. Il se joue de moi. Je ne suis qu'un jouet qu'il peut ranger pour pouvoir me réutiliser à sa guise. Je me sens piégée, et ce pour le restant de mes jours. Il enlève lentement l'arme de dessous ma gorge pour venir le planter contre le mur, emportant ma main gauche avec. La douleur est insupportable, il continue de me torturer, physiquement et mentalement. Je veux crier la mort, qu'elle vienne à moi et me fasse quitter cet enfer. Je ferme les yeux, les larmes noient la main glaciale de mon tortionnaire.
- Reste calme, tu n'as aucune raison de paniquer. Murmura-t-il en rentrant sa langue.
Je jette un coup d'œil vers lui, il me mord violemment le cou du côté droit. Ma souffrance s'intensifie, mes cris jaillissent avec abondance. Le diable s'amuse à me faire subir sa torture. Il ricane avant de me prendre par les hanches et de se coller à moi. Le contact de son corps froid au mien accentue fortement la douleur à mon épaule. Je me contracte par instinct, je le sens jouir de mes souffrances, de mon malheur. Un rire provocateur résonne dans mes oreilles. Est-ce là sa réaction au malheur que j'endure ? Une envie de meurtre. Voilà mon ressenti. Je souhaite sa mort. La panique qui m'aveuglait depuis le début n'est plus présente. A cet instant, je veux qu'il crève, lui et son serpent.
Le démon passe les mains autour de mon corps. Mes seins se retrouvent à présent dans leurs paumes. Il commence à les malaxer en émettant un rire de plus en plus malsain, hautain. Je commence à ressentir la chaleur qui émane de son corps. Je frissonne à l'idée qu'un être pareil puisse me faire éprouver cela. Il me dégoûte en tout point. Je vois sa longue langue descendre, contournant mes seins, arrivant lentement à l'entrée de mon sanctuaire. La peur me traque, le désespoir me hante. Que cela s'arrête, maintenant.
- Non... Pas ça ! Beugle-je d'une voix aiguë, perçante.
Je le sens jouir à mes côtés. Il s'extasie de ma peur, de ma frayeur, de mon angoisse. Quel être abominable. Ce démon me répugne, il me dégoûte. Pourquoi un tel être a-t-il le droit de vivre ? Où est la justice ? Le diable commence à tournoyer son arme de torture, déflorant peu à peu mon jardin secret. Je crie, je hurle, je beugle, je m'époumone. Il continue de piétiner ce lieu paradisiaque, opposé à l'être qui vient d'y pénétrer. Je tremble de peur, j'essaie de me dégager en vain. Ce n'est que le commencement or j'en souhaite déjà la fin. Je n'en peux plus. Que la mort s'amène ici. Je l'implore. Qu'elle prenne ma vie. Il fait violemment entrer son arme visqueuse à l'intérieur du lieu sacré qu'il continue de saccager avec joie et démence. Je me mets à hurler. Sauf que ce cri n'est pas similaire aux précédents. J'ai aimé cette violation de sérénité, celle-ci particulièrement. Comment en suis-je arrivée là ? Pourquoi a-t-il réussi à me faire ressentir cela ? Mon effroi s'accroît au fur et à mesure de l'action. Je ferme les yeux, dégoûtée par ce que je vis.
Il s'arrête, je ne sens plus ses mains autour de mes seins, ni même sa langue. Serait-ce la fin ? La libération ? Je rouvre les yeux. Il me fait face. Sa posture imposante ferait fuir les plus téméraires. Je lis un sourire sur son visage. Il s'avance lentement, faisant abstraction des cris, des hurlements qui sortent de mes entrailles. Je le supplie d'arrêter, de laisser mon jardin tranquille. Il passe ses mains derrière mon dos, se collant à mon corps. Je me débats inutilement en m'agitant dans tous les sens. Depuis le début, tout était joué. Rien n'aurait pu me sauver, c'était vain dès le départ. Personne n'aurait pu venir me chercher. Mais je ne crie plus pour de l'aide, plutôt pour lui briser les tympans.
Sa tête s'approche de mes seins qu'il commence à embrasser doucement. Il se relève et plante son regard dans le mien. Ce regard perçant qui continue de faire battre mon cœur, et à cet instant, exprime le désir gourmand de dévorer le fruit de la passion. Ce visage me dégoûte, il me répugne, il m'horrifie. Lui cracher dessus reste maintenant un fantasme. Je n'ai plus de salive, ma gorge est sèche. Il me lance un sourire, doublé d'un rire sadique. Ce monstre se considère comme un roi dans un lieu qu'il tente de pénétrer contre le gré de sa propriétaire. J'éclate en sanglots au moment même où il y rentre, enfonçant brusquement la bête affamée. Le bourreau souille toujours plus mon corps à chacun de ses mouvements, agitant et balançant l'extrémité de son bassin au rythme de ses petits grognements de plaisir. Il se nourrit de mes peurs, de mon angoisse. Cela forge le plaisir exotique de son enivrement.
L'enfer est passé, le paradis est relâché. Je pensais qu'il ne le ferait jamais. Il m'a laissé plus faible que je ne l'étais. Se retirant lentement, il avait pris un malin plaisir à me torturer dans le pire des cauchemars. Je l'entends se rhabiller. Je suis relâchée au sol, comme un être misérable. Je suis délaissée et complètement morte de l'intérieur. Il commence à partir, je le vois. Je n'en attends pas moins, je ne souhaite plus le revoir, jamais. Le dégoût s'empare de moi en repensant à la scène qui s'était produit. Comment ai-je pu en arriver là ? Ne suis-je donc qu'un objet ? Le serpent le suit au pas, ils m'abandonnent tous deux. Je ressens une libération malgré mon statut de déchet. C'est au moment même où il franchit le seuil de la porte que mon estomac émet bruyamment un son pour se manifester.
Il s'arrête et se retourne net. Jamais je ne pourrais oublier cette expression sur le visage. Ce regard effarant, effroyable, sadique et horrifique. L'angoisse revient me hanter, en plus de s'amplifier. Son sourire s'élargit, émettant un rire sarcastique presque inaudible. Je le vois se baisser afin de prendre le serpent dans les mains. Qu'a-t-il l'intention de faire ?
- Aurais-je oublié de te nourrir ? C'est si impoli de ma part. Annonce-t-il de sa voix caverneuse.
Il se rapproche le plus lentement possible. Ma panique l'anime. Je sens la flamme qui s'intensifie dans ses yeux en s'approchant de mon corps. Son rire résonnant amplifie son air malsain, démoniaque, comme s'il prenait un plaisir à envenimer ce paradis en le changeant en un enfer hostile à son image. Je n'ai plus la force de crier, juste celle de frémir, de trembler, de m'angoisser au plus profond de mon être. J'agonise, les larmes coulent avec abondance. Je pensais qu'il aurait arrêté, je m'étais trompée. A un pas de mon corps, il m'attrape par les cheveux, remontant ma tête. Mes yeux s'écarquillent. Il ne porte plus ses vêtements. Quand les aurait-il enlevés ? Suis-je tant atteinte que le moindre de ses gestes m'apparaît flou ? Ma tête se retrouve à quelques centimètres de cette bête. Ce monstre qui ne souhaite que se faire dévorer. Est-ce là mon repas ? Je refuse d'ouvrir la bouche. Jamais cette chose immonde n'y pénétrera.
Il a remarqué que ce ne serait pas chose aisée. Il l'avait prévu même. Prenant le serpent dans sa main droite, il le dépose sur mon épaule. L'animal me le mordille du côté gauche, plantant profondément ses crochets venimeux. Cette douleur que j'ai oubliée reprend le dessus. La souffrance qu'il me procure me fait émettre un beuglement. Le bourreau profite de cet état pour planter sa graine dans la terre que je viens de creuser. Mon visage est inondé par les larmes qui en découlent. Le goût que m'offre cette bête m'est insupportable. Il me donne la gerbe. Je tente une attaque en le mordant, espérant endommager l'arme dont il se sert afin qu'elle devienne limitée.
C'est dur. Plus dur que mes crocs. Un éclat démentiel résonne dans toute la pièce comme un écho. Cela ne lui a rien fait, qu'est-ce qu'il se passe ? Je sens quelque chose d'autre. Il vient de se retirer, me laissant cette chose, comme une coquille dans ma bouche. Je recrache cet objet inconnu et il m'apparaît une mue de serpent. Je regarde cette protection ayant la forme de cette bête. Je suis complètement affaiblie, je ne possède plus aucune force. Le démon peut faire ce qu'il souhaite de mon corps. Je ne peux même pas vomir, n'ayant rien dans l'estomac.
Mon regard est vide, ma pensée de même. Je ne suis plus qu'une spectatrice sans volonté et sans once de dignité. Je ne suis qu'un objet dont cet infâme se sert. Ce monstre me fixe sévèrement comme si le fait que je ne me débatte plus ne le laissait pas indifférent. Le bourreau me prend une fois de plus par les cheveux, laissant pénétrer sa bête visqueuse dans le fond de la gorge. Une envie de vomir mes organes m'apparaît. Je ne peux que subir encore et encore sans rien pouvoir faire si ce n'est qu'émettre des bruits inaudibles.
Je dévisage sa peau blanchâtre. Je n'ai plus l'impression de ressentir quoi que ce soit d'autre que de la lassitude et du dégoût. Je remarque sa main, déposant le serpent en toute délicatesse sur mon épaule. Le reptile se faufile le long de mon dos, arrivant jusqu'au bassin. Je le sens rentrer dans l'antre, comme s'il se cachait dans sa tanière. L'horreur me reprend, je ressens à nouveau la peur et l'angoisse. Ces animaux me répugnent. Le serpent gigote, sortant sa langue qui tourne dans tous les sens. Je m'agite, d'une part à cause du plaisir minime qu'il me procure et d'autre part par l'effroi de me retrouver faible, inoffensive et vulnérable.
La peur s'accentue lorsque je sens une matière gluante couler dans ma gorge. Je me débats encore plus, tout en écoutant le ricanement du diable qui prenait une folle envie de me torturer. Le goût est ignoble, j'aimerai rejeter cette substance dans la face de celui qui me l'offre avec sadisme. L'odeur qui se dégage est autant insupportable. L'action semble se passer au ralenti, comme s'il souhaitait me torturer le plus longtemps afin d'arriver à l'orgasme ultime. Son rire se mêle à ses grognements de plaisir alors que le serpent se faufile doucement dans sa tanière.
Il finit par retirer les bêtes qui consumaient mon corps. Une tâche aussi blanchâtre que la peau de mon tortionnaire sort de ce dernier. Complètement dépitée, je regarde cette chose qu'il m'a fait ingurgiter contre mon gré. Cette chose au goût ignoble qui m'a nourri. Le démon tourne les talons, son serpent suivant au pas. Je continue de dévisager ce liquide gluant au sol qui commence à s'agiter. La crainte reprend le dessus, elle s'empare de mon âme. Qu'a-t-il pu bien mettre dans mon estomac ? Suite à une exclamation, l'infâme s'arrête dans sa démarche. Il reste au seuil de la porte comme s'il attendait qu'une quelconque affaire se produise. Je continue mon observation sur la tâche rejeté par la bête de l'ennemi. Le liquide se matérialise puis au bout d'un court instant, il prit l'apparence d'un serpent blanc.
- Je t'ai offert ma progéniture en dessert. S'esclaffe-t-il d'une moquerie sarcastique, sadique et cruelle avant de refermer la porte, me laissant dans l'obscurité la plus totale.
Je suis un déchet. C'est comme cela qu'il me considère. Je n'éprouve que du dégoût et beaucoup de rancœur vis-à-vis de ce monstre. Cette matière gluante qu'il m'a fait ingurgiter, quand allait-elle se transformer elle aussi ? Une douleur à l'estomac commence à se manifester. Ce n'est pas le même que le précédent. Je sens comme un trouble. Quelque chose s'agitent à l'intérieur. Ne vais-je jamais avoir la paix ? Comment suis-je arrivée dans un endroit pareil, à me faire répugner par le maître des serpents ? Je suis tellement blasée, abattue, découragée, terrifiée.
Je ne suis qu'un objet. Un jouet, rien de plus. Le bilan de ma vie est si pitoyable. J'aurais vraiment préféré être à la place de ces cadavres. Je donnerais tout pour pouvoir mourir. Avoir cette chance-là. Je me retrouve une fois de plus seule dans l'obscurité, jusqu'à ce qu'il dédaigne se montrer à nouveau. Ma vie se résume à cela. Comment évoluera-t-elle ? Je n'ai aucun rêve. Mon monde ne s'arrête qu'à cette pièce. J'entends des pas. Reviendrait-il ? Je crains ne pas pouvoir survivre une fois de plus. La porte s'ouvre dans un grincement, révélant une tout autre personne. Celui ci porte des lunettes ainsi que des cheveux grisâtres attachés en queue. Je vois le reflet de la lumière sur ses lunettes. Il m'apparaît presque comme un sauveur. La lumière que j'ai tant recherchée, serait-elle enfin venue me libérer ? Il s'avance vers moi d'un pas plutôt rapide puis jette un coup d'œil aux alentours avant de pointer une seringue et de m'attraper le bras.
- Je viens de la part de Maître Orochimaru. Je dois une fois de plus t'effacer la mémoire. M'annonce-t-il alors que j'étouffe une exclamation.
Voilà mon histoire, l'histoire d'Anko Mitarashi, 13 ans. Enfin, c'est ce que je crois.