Nouvelles d'Overwatch

Chapitre 30 : Coup d'Envoi (2 sur 5)

2484 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 30/06/2019 16:37

- C’est le dernier ? demanda Gabriel.


- Oui capitaine, lui confirma Everly.


Cette dernière était une des deux lieutenants de Gabriel. Petite femme aussi maigre que musclée, Everly pouvait marcher deux fois plus longtemps que n’importe quel membre du commando. De plus, Gabriel ne l’avait jamais vu perdre son calme. Or, il la connaissait depuis son entré dans les forces spéciales.


Après la destruction du générateur, Gabriel et ses troupes étaient resté dans la ferme, traquant les derniers omnics qui s’y trouvaient. Mais la plupart de ces derniers s’étaient enfuit, sachant la partie perdue.


Malgré cette victoire, le moral était bas. Gabriel savait très bien pourquoi. Jaime. Pourtant, onze autres corps se trouvaient alignés devant le capitaine. Onze autres commandos tués par les omnics.

Mais c’était une chose de voir un frère d’arme se faire tuer par l’ennemi. S’en était une autre de voir un officier supérieur lui ordonner d’aller se suicider. Ne risquaient-ils pas d’être les prochains ?


Sans doute pensa Gabriel. Cette guerre se passait mal. Il ne faisait que lentement reculer.


Et pourtant, Gabriel se souvenait bien des débuts de la Crise. Passé la surprise de l’attaque, la réaction de l’US Army avait été rapide et mortelle. Les omnics avaient enchainés les défaites, écrasés par la toute-puissance de l’aviation américaine. C’est à cet époque que l’ennemi avait reçu son surnom de « craztoast ». Car c’était rien de plus que des toaster fous, disait-on alors.


Mais déjà à l’époque, il y avait des signes. Les gigantesques îles-plateformes, que la Navy découvrait avec stupeur dans les océans, bardées d’usines d’armes et d’omnics. Les fortifications ennemies, qui se faisait de plus en plus développées. Et puis les rapports venant d’autres pays, où la guerre ne se passait pas aussi bien.


Pourtant, tout le monde aux USA pensait la victoire acquise. Le gouvernement n’avait même pas décrété la mobilisation générale, juste augmenté le budget de l’armée. Un assaut massif sur plusieurs omniums fut préparé. Les ricains allaient écraser l’insurrection chez eux, puis sauver le reste du monde, comme en 39-45.


L’assaut fut lancé. Il tourna en désastre. La plus grande défaite militaire américaine à ce jour.


L’état-major ne sut pas comment réagir. Encore plus quand les omnics lancèrent une contre-attaque, faisant venir des renforts du reste du monde. Un terrain conquis en plusieurs mois fut perdu en quelques jours à peine.

Le gouvernement se décida enfin à lancer la mobilisation générale. L’économie fut pleinement mise à contribution et la conscription rétablit. L’afflux de soldats et de matériel permit de ralentir l’avancer omnics. Ils ne les avaient toujours pas stoppés.


Gabriel fut tiré dans ces réflexions par le bruit d’une personne en train de vomir. Surprit, il se retourna.


C’était Cody. La jeune recrue contemplait une fosse. La bâche qui la cachait venait d’être retiré, révélant son contenu : un charnier. Une vingtaine de cadavres pourrissant, hommes, femmes et enfants. Tous des civils. Tous tués par les balles des Nettoyeurs.


Les omnics ne faisaient pas de prisonniers.


Certains se demandaient pourquoi les craztoast voulaient les exterminer. Était-ce un dysfonctionnement ? Ou peut-être parce que les omniums avaient été désactivé ? Quelqu’un les avaient-ils piratés ? A moins que les omniums pensent que la planète était trop petite pour contenir les humains et eux ?


Gabriel s’en moquait. Il lui suffisait de savoir qui était l’ennemi.


- Eh, qui a laissé entrer ce civil ici ? demanda une voix moqueuse.


Il s’agissait de Mateo, le deuxième lieutenant de Gabriel. Ce grand blond au visage rieur était le meilleur tireur du commando. Son tableau de chasse comportait plus de soixante-dix omnic tués, une chose dont Mateo se vantait souvent. Et il savait se rendre populaire. Mais c’était un vrai connard. Tout simplement. La hiérarchie l’avait affecté à Gabriel lorsque ce dernier fut promu capitaine. Il n’aimait pas Mateo. Mais ce dernier restait un bon soldat. Gabriel ne demandait rien de plus.


La remarque de Mateo s’adressait à Cody. Ce dernier s’essuyait la bouche hâtivement, sous le regard moqueur des autres membres du commando.


- Alors soldat, continua le lieutenant, on a l’estomac trop fragile pour voir quelques cadavres ? On s’attendait à ce que la guerre ne soit que senteurs de roses et petits oiseaux ?


Il y eu quelques ricanements. Ah pour sûr, Mateo savait se rendre populaire. En persécutant les plus faibles.


- Non, lieutenant, répondit Cody en se redressant.


- Tu ne rendras pas ton repas devant les craztoast, hein ? Ça ferait mauvais genre.


- Non, lieutenant.


Même si Cody faisait des efforts pour rester digne, le rouge lui était montée aux joues. Gabriel, de son côté, c’était déjà désintéresser de la scène. Il avait d’autre chat à fouetter. Informer l’état-major de l’état de son commando, entre autres.


Tandis qu’il se détournait, Gabriel perçut le regard désapprobateur d’Everly. Elle détestait voir Mateo agir ainsi. Un jour, elle avait demandé à Gabriel d’interdire ce genre de moquerie. Il n’en avait rien fait. Si un soldat n’était pas capable de supporter Mateo, comment pouvait-il espérer supporter les omnics ? La guerre ne laissait pas de place aux petites natures. Encore moins dans une unité d’élite.


Il s’approcha d’un poste de communication, établit par ses spécialistes techniques quelques minutes plus tôt. Basiquement, il s’agissait juste d’une grosse antenne reliée à un clavier, un écran et un système de cryptage. Gabriel l’utilisa pour transmettre le rapport des pertes, des blessés, des munitions utilisés, de l’équipement perdu ainsi que le nombre d’omnics tués et de matériel capturé. Pas le devoir le plus exaltant d’un capitaine. Mais ça devait être fait.


Une fois le rapport envoyé. Gabriel retourna auprès du gros de ses troupes. Ces lieutenants avaient placé quelques sentinelles, au cas où. Mais la plupart des soldats profitaient de la fin des combats pour prendre une pause bien méritée. Certains bavardaient en petit groupes. D’autres restaient juste assis, à contempler le paysage. Une poignée fumaient. Les regards vers Gabriel étaient fuyant, tandis que les discussions mourraient à son approche. Ils lui en voulaient encore pour Jaime.


- Capitaine ! dit Mateo en s’approchant de lui, un sourire aux lèvres. On a trouvé du whisky ! poursuit-il en montrant fièrement une bouteille. Autorisation de le distribuer ?


- Non.


Ils étaient encore sur la ligne de front, à deux pas des positions ennemies. Ce n’était pas le moment de boire de l’alcool.


- Oh…réagit Mateo, déçu. Eh…on peut les emporter alors ? Ça manquera pas à leurs anciens propriétaires...finit-il, un sourire au coin.


Gabriel hocha la tête. Il ne pouvait donner tort à Mateo sur ce point.


Tout souriant, Mateo repartit, sans doute pour récupérer le plus de bouteille possible. Voilà qui allait alimenter le marché noir. Qu’importe. Tant qu’il ne se faisait pas prendre…


Maintenant c’était Everly qui s’approchait de lui.


- Il faudra que tu évoques le cas de Jaime aux troupes, lui dit-elle.


- Je sais.


- Le plus tôt sera le mieux.


- Je sais.


Elle hocha la tête, et repartie de son côté, surement inspecter les sentinelles. Gabriel lui, allât broyer du noir de son côté.

Il songea avec nostalgie, que, quelques mois plus tôt, il aurait été au milieu de ses soldats, à rire et plaisanter. Mais c’était avant que Gabriel ne soit obligé d’ordonner à un homme de mourir pour accomplir une mission.

Foutue guerre.


Quelques minutes passèrent. Puis, une sentinelle contacta Gabriel par oreillette.


- Capitaine, convoi repéré au sud-est, lui annonça-t-elle. Douze camions, US Army.


Le capitaine se rendit lui-même au poste d’observation, avant de sortir sa longue vue. Il reconnut de suite les camions. Ils appartenaient à la compagnie d’infanterie chargée de leurrer les omnics pendant que son commando attaquait la ferme. Ceux qui devaient tenir six heures et avaient fui au bout de deux.


Ces lâches n’avaient pas envoyé un mot d’excuses, ni même un seul message. Et maintenant, ils osaient se pointer ici ? Le chef d’escadron lui, au moins, avait recontacté Gabriel pour le féliciter, d’un ton un peu terne, mais poli. Eux, rien. Gabriel allait leur en faire voir.


Fulminant, le capitaine se posta près de la route par laquelle les camions approchaient. Quelques-uns de ces soldats, curieux, se rapprochèrent.


Le premier camion s’arrêta, laissant descendre une poignée de conscrits. Les uniformes de ces derniers étaient un peu plus encombrants que ceux des commandos, comportant notamment un casque. Leur armement consistait en un fusil semi-automatique, complétés de quelques armes lourdes en cours de déchargement. A la tête de la troupe se trouvait une capitaine, avec un classique uniforme d’officier. Il s’agissait d’une grande femme, à l’air réservé.


Comme Gabriel, elle était très jeune. Rien de surprenant. Au déclenchement de la guerre, l’Army avait doublé de taille. Puis, ces effectifs décuplèrent lorsque la conscription fut réinstaurée. Un besoin urgent d'officier apparu, pour encadrer tout ce beau monde. Beaucoup de jeunot furent alors promu, Gabriel y comprit.


L’autre capitaine s’avança vers lui et fit un salut militaire en annonçant :


- Capitaine, ma compagnie a été chargée de fortifier cette ferme.


- Combien en avez-vous perdu ? lui répondit Gabriel, sans la regarder.


A la place, il observait les autres camions et les soldats qui en sortaient.


- Pardon ? s’étonna l’officière.


- J’ai dit : combien en avez-vous perdu ? répéta Gabriel en tournant son regard vers elle. Parce que ça devait être une sacrée boucherie pour que vous abandonniez le combat au bout de deux heures, alors que vous deviez nous en donner six !


La capitaine blêmit.


- C’était…vous…murmura-t-elle.


- Mais pourtant, poursuivit-Gabriel, l’ignorant totalement. A regarder, votre compagnie semble totalement indemne. Vous admettrez que c’est troublant !


Tout autours, les conscrits s’étaient arrêtés dans leur travail, observant avec étonnement cet homme en train de hurler sur leur capitaine.


- Les omnics sortaient de partout, tenta de se justifier cette dernière. Leur artillerie nous pilonnait et plusieurs bastions avaient déployé leurs mitrailleuses. Nous n’arrivions pas à les stopper…


 - Vous n’aviez pas à les stopper mais à les distraire ! hurla Gabriel. Juste à les occuper durant six heures, pendant qu’on faisait le vrai boulot ! Même pas besoin de tirer, juste à rester planquer à attendre que le temps passe ! Alors je vous le redemande, combien en avez-vous perdu pour que vous ayez abandonnés moi et mes gars ?!


- Cinq…murmura la capitaine, blême comme un linge. Nous…nous avons perdu cinq soldats.


Gabriel se rapprocha et, instinctivement, la capitaine recula d’un pas.


- Les craztoast m’en ont pris douze, dit-il. Douze soldats d’élites entrainé pendant un an au frais du pays, chacun ayant minimum dix éliminations à son actif. Et ce sont ces types-là qui sont mort, pour que vos minables conscrits…


Il y eu des grognements de protestations du côté des « minables conscrits ».


- …entrainés pendant deux mois et qui n’ont probablement jamais tiré un coup de feu, poursuivit Gabriel, les ignorant royalement, puissent survivre. Si vous aviez fait votre job, la moitié de mes morts ne le seraient pas, lâche !


La capitaine ne répondit rien, continuant de fixer Gabriel, livide. Mais les protestations redoublèrent parmi ces troupes, même si certains conscrits, honteux, s’étaient détournés.

Mais tous se turent lorsque Gabriel pointa son regard sur eux.


Ce n’était pas du respect. C’était de l’instinct de survie. Celui qui ordonne de se cacher et de se coucher devant un prédateur.


Ce face à face dura une petite minute. Puis, Gabriel se détourna.


- Il va falloir qu’on bouge, l’informa Everly, qu’il retrouva quelques minutes plus tard. L’état-major a transmis des ordres.


- Tant mieux, répondit le capitaine. Je ne veux pas rester une seconde de plus à cet endroit.


Tandis que ses lieutenants préparaient le commando au départ, il s’informa des dits ordres, au poste de communication.


On les envoyait détruire un pont, récemment capturé par une compagnie omnic. Désormais, une division complète de craztoast s’apprêtait à le franchir. Et ce n’était que la première vague. S’ils franchissaient ce pont, les omnics pourraient prendre à revers tout un corps d’armée. Alors que s’il était détruit… Bon, les bastions s’en fichaient de faire une petite trempette. Ces saletés étaient totalement insubmersibles, un fait que beaucoup de soldats découvraient à leurs dépens. Mais l’artillerie, les convois de munitions, de générateurs…tout cela devait passer par une route goudronnée.

Raser le pont ferait donc gagner un peu de temps. Pour que l’Army puisse se replier et former une nouvelle ligne. Reculer. Ils ne faisaient que putain de reculer.


Cela déjà faisait grogner Gabriel. Mais il y avait autre chose. Déjà, qu’on les renvoie aussi vite au combat était mauvais signe. Normalement, ils auraient dû retourner à une zone sure, le temps de se ravitailler, se reposer et de vérifier la santé de tout le monde. Mais les nécessités de la guerre empêchaient parfois cela. Souvent même.


Ensuite, Gabriel avait appris à comprendre le langage de l’état-major. A décrypter ce qu’ils disaient réellement, derrière le jargon, les termes techniques et les formules de politesses.

L’attaque sur le pont les avaient pris par surprise. L’idée de voir les craztoast détruire un corps d’armée entier les faisaient paniquer. Envoyer le commando de Gabriel était un geste désespéré. L’état-major ne s’attendait qu’à moitié à les voir réussir. Et en aucun cas à les voir survivre.


En bref, c’était une mission suicide.

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